Mme Michèle Tabarot attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la réforme de la justice et son impact sur l'activité future des tribunaux de grande instance (TGI) dans les départements qui comptent plusieurs de ces juridictions. En effet, s'il a été affirmé par le Gouvernement qu'aucun TGI ne serait fermé en France, des questions subsistent sur la mise en œuvre concrète des dispositions annoncées lors de la présentation des grands axes de la réforme de la justice en mars 2018 puis du projet de loi de programmation en avril 2018. Il est ainsi prévu la possibilité d'opérer des regroupements de compétences autour de pôles spécialisés. Un TGI pourrait alors recevoir l'ensemble de certains contentieux civils ou pénaux pour l'ensemble d'un département. Il est précisé que cette mesure serait décidée par les premiers présidents et les procureurs généraux de cour d'appel après avis des présidents et procureurs des TGI. Aussi, elle souhaiterait qu'elle puisse lui préciser les modalités envisagées de mise en œuvre de cette disposition pour confirmer notamment que l'ensemble des juridictions concernées au niveau d'un département seront consultées et dire si leur avis sera bien un avis conforme, seul à même de garantir que rien ne sera imposé contre la volonté des acteurs locaux de la justice.
Le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a été déposé au Sénat le 20 avril 2018. Le chantier de l'adaptation de notre réseau de nos juridictions est celui qui a soulevé le plus d'interrogations. Le rapport qui a été remis sur ce sujet préconisait en effet un certain nombre de mesures qui ont pu inquiéter. Il s'agissait cependant de propositions, qui n'ont pas été suivies pour la plupart. Néanmoins, le statu quo ne paraissait pas acceptable. Plusieurs décisions ont donc été prises, dont deux principales : fusionner administrativement les Tribunaux de Grande Instance (« TGI ») et les Tribunaux d'Instance (« TI »), et donner la possibilité de spécialiser des juridictions sur des contentieux précis lorsque ce sera pertinent. Mais aucun lieu de justice ne sera fermé. Ainsi, dans les villes où il n'existe actuellement qu'un tribunal d'instance, celui-ci sera maintenu et ses compétences actuelles seront conservées. Il continuera à juger les mêmes contentieux du quotidien, et il gardera exactement le même nom, même s'il sera organiquement rattaché à un tribunal de grande instance. Il n'y aura donc aucun recul de la justice de proximité. Ce sera le cas des tribunaux d'instances de Cannes, d'Antibes, de Cagnes-sur-mer et de Menton. Les magistrats et fonctionnaires continueront par ailleurs à y être affectés. De même, les deux tribunaux de grande instance de Grasse et Nice seront pleinement maintenus, ainsi que leurs compétences. Par ailleurs, l'article 53. I. 8° de ce projet de loi crée un article L. 211-9-3 au sein du code de l'organisation judiciaire, dont le premier alinéa prévoit que lorsqu'il existe plusieurs tribunaux de grande instance dans un même département, l'un d'entre eux peut être spécialement désigné par décret pour connaître, dans l'ensemble de ce département, de certaines matières civiles et de certains délits et contraventions, dont la liste est déterminée par décret en Conseil d'Etat. Cette liste sera limitative, et portera sur des contentieux très spécialisés et de faible volume : il n'est pas question ici de transférer l'intégralité du contentieux civil ou pénal sur une juridiction, au détriment d'une autre. Cela ne pourra se faire que dans un esprit d'équilibre entre les juridictions qui seront volontaires. Il s'agit en effet d'une possibilité ouverte par la loi, et non d'une obligation. Dans ce cas, la décision de spécialisation pourra être prise par les chefs de Cour, après avis des chefs de juridiction concernés. L'objectif de cette réforme est que les acteurs de terrain puissent proposer l'organisation la plus performante et la mieux adaptée aux besoins des justiciables dans les départements de leur ressort comportant plusieurs tribunaux de grande instance. Il est enfin précisé que les choix de spécialisation décidés par les chefs de Cour sont officialisés juridiquement par un décret simple pris par la garde des Sceaux, ministre de la justice.
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