Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Loïc Prud'homme
Question N° 8241 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 15 mai 2018

M. Loïc Prud'homme appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'accaparement du foncier agricole par des sociétés françaises ou étrangères. Celles-ci réalisent leurs opérations dans l'opacité. Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), en principe chargées de réguler le marché des terres agricoles, sont tenues à l'écart. En effet, les SAFER ne sont pas en mesure de préempter des parts de société. Il suffit donc à l'exploitant individuel de se constituer en société agricole et au fonds de gestion de racheter des parts en prenant soin d'en laisser quelques-unes au vendeur qui reste exploitant minoritaire. Les outils juridiques des SAFER pour s'opposer à ces opérations sont insuffisants. Pourtant, les enjeux sont primordiaux. La mainmise de ces grandes sociétés sur le patrimoine agricole français entraîne une hausse du prix du foncier. Les paysans se trouvent évincés, dans l'incapacité financière de créer une activité agricole viable. Se développe dès lors une agriculture sans paysan. Les productions agricoles sont gérées par un chef de production salarié et ont recours à de la main-d'œuvre temporaire. Cela pose un problème en termes d'emploi et d'aménagement du territoire. De plus, ces sociétés constituent leurs propres filières pour s'approvisionner en engrais, machineries agricoles, etc., au détriment des filières locales. Le maintien d'une population locale pérenne, dans les territoires ruraux s'en trouve remis en cause. Enfin, c'est la garantie de l'autonomie alimentaire de la France qui est en jeu. Nombre de ces sociétés qui s'accaparent les terres arables sont des fonds de gestion étrangers. À titre d'exemple, dans l'Indre, 1 700 hectares de terres agricoles ont été achetés par un investisseur chinois afin de produire du pain. Cette production a vocation à être intégralement exportée vers la Chine. Il l'interroge donc sur ce qu'il compte faire pour éviter cette dérive ainsi que préserver et développer un modèle d'agriculture produisant une alimentation saine et locale, support efficace au développement pour les territoires et les paysans.

Réponse émise le 3 juillet 2018

L'achat récent de terres agricoles françaises par des sociétés étrangères notamment dans l'Indre a montré que les outils de régulation du foncier agricole dans leur état actuel étaient inadaptés face au développement des phénomènes de concentration des exploitations par le biais sociétaire. Depuis la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) peuvent exercer leur droit de préemption pour l'acquisition de la totalité des parts sociales d'une société dont l'objet principal est la propriété agricole. Force est de constater que des cessions partielles sont aisément organisées pour contourner ce dispositif. Des initiatives ont été récemment engagées pour protéger les terres agricoles contre ces phénomènes de financiarisation et de concentration d'exploitations agricoles mais elles se sont avérées infructueuses. En effet, une proposition de loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles avait été déposée le 21 décembre 2016 visant à instaurer une plus grande transparence dans l'achat de terres par des sociétés et à étendre le droit de préemption des SAFER aux parts sociales ou aux actions en cas de cession partielle. Cette dernière disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel dans une décision no 2017-748 DC du 16 mars 2017.  Le Gouvernement lancera en 2018 une réflexion pour appréhender de manière globale ce phénomène de fond. En parallèle, la mission d'information de l'assemblée nationale sur le foncier agricole viendra alimenter cette réflexion.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.