M. Bruno Bilde interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la procédure de régularisation dont fait l'objet M. Mamoudou Gassama. En effet, ce jeune homme d'origine malienne entré illégalement sur le territoire national en septembre 2017 a obtenu un récépissé valant titre de séjour après un rendez-vous en préfecture de la Seine-Saint-Denis. En récompense de son héroïsme et de son altruisme qui l'ont conduit à sauver un enfant en escaladant un immeuble à mains nues samedi 26 mai 2018, le Président de la République a exprimé sa volonté de lui permettre de rester en France et de s'engager sur la voie de la naturalisation. Il est évident que Mamoudou Gassama a justifié cette reconnaissance de la Nation et qu'il est en droit de demander la nationalité française au regard du principe qui veut que celle-ci s'hérite ou se mérite. Néanmoins, sa régularisation express, effectuée dans un tourbillon médiatique excessif, contraste avec la relative lenteur voire la passivité des services de l'État quand il s'agit d'expulser d'autres migrants qui se sont singularisés par des actes de délinquance ou des crimes. Chaque semaine, la presse régionale se fait l'écho de faits divers mettant en cause des immigrés clandestins. Le 23 mai 2018, une jeune femme de 33 ans a été insultée et molestée en gare de Dijon par deux demandeurs d'asile afghans qui lui reprochaient de porter un décolleté en période de ramadan. Placés en garde à vue, les deux individus ont ensuite été remis en liberté et ont regagné Dole, leur ville d'accueil. Ils ne seront convoqués devant le tribunal correctionnel qu'en octobre pour « violences en réunion ». Le 26 mai 2018 à Calais, une policière a été violemment frappée par un migrant d'origine érythréenne. Ce dernier a été relâché faute d'interprète. Pourquoi ces individus qui demandent l'asile et la générosité des Français ne sont pas immédiatement expulsés et pourquoi sont-ils laissés en liberté alors qu'ils constituent une menace réelle pour la sécurité publique ? Il est légitime que le mérite et les comportements exemplaires soient salués et récompensés mais il est fondamental que les infractions aux lois et les atteintes aux valeurs soient punies avec la plus grande sévérité. Il n'est pas possible de garder sur le sol français des personnes qui ne respectent pas les principes les plus élémentaires de l'hospitalité. Il lui demande quelle est la position du Gouvernement sur ces questions.
Lorsqu'un étranger se rend coupable d'un crime ou d'un délit sur le territoire français, deux procédures distinctes et indépendantes peuvent être engagées à son encontre : une procédure judiciaire et une procédure administrative d'expulsion. Si l'enquête permet d'établir l'existence de faits pénalement répréhensibles et que des poursuites sont engagées, la mise en œuvre de la procédure judiciaire prime sur celle de la procédure administrative d'expulsion. L'étranger ne pourra ainsi être éloigné vers son pays d'origine tant qu'il sera placé sous main de justice ou incarcéré. Par ailleurs, dans l'attente de l'éventuel jugement, il appartient à l'autorité judiciaire d'évaluer, au regard des éléments du dossier et de la législation en vigueur, s'il y a lieu de prendre des mesures de contrainte à l'encontre de l'étranger concerné. Le cas échéant, une fois que l'étranger aura purgé sa peine d'emprisonnement, il pourra être éloigné du territoire dès sa libération, soit sur le fondement d'une interdiction judiciaire du territoire français – si une telle peine a été prononcée par le juge pénal – soit sur le fondement d'une mesure d'expulsion si sa situation le permet. Enfin, conformément aux engagements internationaux de la France, un demandeur d'asile ne peut être éloigné vers son pays d'origine tant que sa demande d'asile n'a pas été rejetée. L'expulsion est une mesure de police administrative exclusivement destinée à protéger l'ordre et la sécurité publics. De nature préventive et non répressive, elle répond à des objectifs différents de ceux de la justice pénale. Il s'agit d'évaluer la menace pour l'ordre public que représente pour l'avenir l'intéressé au regard de l'ensemble de son comportement. Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) prévoit que l'expulsion peut en principe être prononcée par l'autorité administrative contre tout étranger dont la présence sur le territoire français constitue une menace grave à l'ordre public. Toutefois, comme toute mesure de police administrative, la mesure d'expulsion doit être nécessaire et proportionnée. Afin d'assurer une conciliation équilibrée entre le droit au respect de la vie privée et familiale de l'étranger et la prévention des atteintes à l'ordre public, le législateur a prévu que certaines catégories d'étrangers peuvent bénéficier soit de protections relatives, soit de protections quasi-absolues contre l'expulsion, en fonction de l'intensité de leurs liens avec la France. Par ailleurs, lorsque l'autorité administrative estime que le comportement de l'étranger ressortissant d'un pays tiers est constitutif d'une menace « simple » pour l'ordre public, celle-ci peut à elle seule fonder un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour (le CESEDA fait en effet de l'absence de menace pour l'ordre public une condition générale de l'admission au séjour des étrangers). La menace simple permet également de prononcer une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, assortie le cas échéant d'une interdiction de retour, à l'encontre des étrangers éligibles à une telle mesure (tel est le cas par exemple d'un immigré clandestin). Les services du ministère de l'intérieur travaillent en relation étroite avec ceux du ministère de la justice afin d'assurer un suivi vigilant de la situation des étrangers incarcérés.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.