M. Daniel Labaronne appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'impact de la nouvelle carte des zones agricoles défavorisées simples sur l'agriculture en Indre-et-Loire. Le Gouvernement s'est engagé à faire aboutir la réforme de la carte des zones défavorisées simples qui datait de 1976 et qui détermine les agriculteurs éligibles à une indemnité compensatoire pour handicap naturel (ICHN) de l'Union Européenne. Le 30 mars 2018, la nouvelle carte portée par les autorités françaises auprès de la Commission européenne a été présentée. Le nouveau zonage repose sur des critères de nature biophysique et sur des contraintes spécifiques comme l'élevage extensif, l'environnement et les paysages. Le département d'Indre-et-Loire est l'un des plus touchés en France avec 300 exploitations agricoles sortant de la carte et une perte de revenu d'environ 1,5 millions d'euros. Ce chiffre représente à lui-seul la moitié de l'impact sur toute la région Centre-Val de Loire qui regroupe pourtant six départements. La nouvelle carte a été ensuite complétée d'un critère de continuité territoriale qui devait permettre de traiter marginalement des enclaves non classées. Sur les 18 communes proposées par le département d'Indre-et-Loire, aucune n'a été retenue. Les réunions organisées par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation avec les organisations professionnelles du département ainsi que la réception de 700 jeunes agriculteurs à l'Elysée en février 2018 reflètent une volonté forte d'accompagner les exploitants sortant de la carte des ZDS. Les 5 milliards d'euros prévus dans le grand plan d'investissement du Gouvernement pour la modernisation de l'agriculture devraient permettre de les financer en partie. Des pistes de mesures d'accompagnement ont été avancées et les filières agricoles de l'Indre-et Loire qui se trouvent durement fragilisées attendent les arbitrages qui seront rendus en fin d'année suite au diagnostic en cours d'élaboration par la préfecture et au comité de pilotage national qui se réunira à l'automne 2018. L'un des enjeux du projet de loi faisant suite aux états généraux de l'alimentation (EGA) est « d'accompagner la transformation des modèles agricoles vers une multi-performance sociale, sanitaire, environnementale et économique ». Le Gouvernement a exprimé sa volonté d'accompagner les agriculteurs vers une production en adéquation avec la demande en favorisant la diversification et en se basant sur des appels à projets valorisant l'entreprenariat agricole. Dans son discours aux jeunes agriculteurs, le Président de la République a indiqué que « nous avons [en France] les atouts pour mener une vraie révolution culturelle ». L'Indre-et-Loire s'inscrit parfaitement dans cette démarche et se prépare à être un territoire d'expérimentation. En lien avec la préfecture, les élus de la métropole, le conseil départemental, la chambre d'agriculture et des syndicats agricoles dessinent actuellement un « projet de territoire » autour des thématiques de la transition du modèle agricole et notamment la valorisation des produits locaux et l'utilisation de circuits courts. Il lui demande d'examiner avec attention l'expérimentation en cours d'élaboration en Indre-et-Loire lors du comité de pilotage national qui aura lieu à l'automne et qui devrait poser les prémices des mesures d'accompagnements pour les 300 exploitants sortis de la carte des ZDS.
Les zones défavorisées simples avaient été définies à la fin des années 1970 en se fondant sur des critères socio-économiques mais aussi, parfois, d'opportunité. Un rapport de la Cour des comptes européenne de 2003 pointait l'utilisation de critères non harmonisés conduisant à des situations très disparates au sein de l'Union européenne et à un classement contestable dans un certain nombre de cas. Une révision était donc nécessaire pour pérenniser les soutiens prévus aux agriculteurs de ces zones, en particulier l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) en assurant une homogénéité de traitement pour les agriculteurs européens. Le règlement européen relatif au développement rural a rendu cette révision obligatoire pour l'ensemble des États membres d'ici 2019. Des discussions ont été engagées dès 2016 avec les professionnels agricoles afin d'établir ce nouveau zonage, qui se composera de deux parties : - une première partie, les « zones soumises à contraintes naturelles », qui découle de l'application stricte de critères européens biophysiques et climatiques, sur laquelle il n'y a pas de marge de discussion. La carte établie sur la base de ces critères est soumise à l'approbation du Joint Research Center de la Commission européenne ; - une deuxième partie, les « zones soumises à contraintes spécifiques » (ZSCS), sur laquelle les travaux sont en voie d'achèvement et où la prise en compte de certaines spécificités est permise. Ainsi, dans le respect du plafond de 10 % du territoire pouvant être classé sous cette catégorie, le caractère extensif de l'élevage dans certains territoires, ou encore certaines particularités d'intérêt pour l'environnement ou le paysage (présence de haies ou parcellaire morcelé, présence de surfaces peu productives ou de zones humides, zones soumises à déprise agricole, ou encore insularité) ont été prises en compte. La détermination des différents critères étudiés et retenus a fait l'objet d'une concertation étroite avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles. Le 15 mars 2018, une délégation française a présenté aux services de la Commission européenne la méthodologie nationale retenue pour le nouveau zonage. En complément de la carte stabilisée, la France a également partagé avec la Commission européenne le principe d'un critère d'homogénéité territoriale. En effet, après application des critères, certains biais statistiques rares entraînaient le non classement de petites enclaves au sein de plus vastes territoires classés. La France a ainsi mobilisé ses marges de manœuvre (dans le respect de l'obligation européenne de ne pas dépasser 10 % du territoire classé en ZSCS), à hauteur de 55 000 hectares supplémentaires, notamment afin d'inclure dans le zonage ces petites enclaves. La Commission européenne a demandé de justifier, commune par commune, qu'il s'agissait de zones enclavées au sein de zones classées et que ces zones n'avaient pas été retenues alors qu'elles étaient très proches des seuils fixés pour les critères utilisés. Une carte consolidée pour l'hexagone, après application du principe d'homogénéité territoriale, a été récemment diffusée par les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Ce projet de carte peut être considéré comme une version de travail avancée dans les discussions avec la Commission européenne. Les échanges avec la Commission se poursuivent afin de permettre la validation formelle de la méthodologie française et, dès lors, de la carte finale. Sur la base des travaux actuels, il y aurait donc 14 210 communes classées contre 10 429 dans le zonage actuel. 5 074 communes seraient nouvellement classées pour près de 8 000 bénéficiaires potentiels supplémentaires. Cependant 1 293 communes sortiraient du zonage. S'agissant des critères utilisés, les paramètres de réglage économique qui accompagnent les différents critères en ZSCS visent tant à garantir l'équité entre les différents territoires classés qu'à obtenir un zonage global qui respecte le plafond des 10 % du territoire classé en ZSCS imposé par la réglementation européenne, afin là-aussi de veiller à l'équité des zonages entre agriculteurs des différents États membres. Les exploitants situés dans des zones sortantes bénéficieront, avant de sortir totalement du dispositif d'aide, et comme cela est permis par la réglementation européenne, de paiements au titre de l'ICHN dégressifs sur les années 2019 et 2020. Un accompagnement spécifique a été demandé aux préfets s'agissant des exploitations qui bénéficiaient des aides liées au zonage et qui sortiront de la nouvelle carte en 2019. Il importe également d'aider les exploitants situés dans ces territoires à se projeter dans une nouvelle dynamique, la réflexion pouvant être associée, dans certaines zones, à celle, plus large, sur l'accompagnement des agriculteurs situés en zones dites « intermédiaires ». Ainsi, le travail a débuté aux niveaux départemental et régional pour établir un diagnostic des systèmes de production et identifier les difficultés rencontrées par les entreprises agricoles dans ces zones. Des groupes de travail, sous l'autorité des préfets de région et associant les représentants des entreprises agricoles et des filières agroalimentaires et les conseils régionaux, auront pour objectif, sur la base de ces diagnostics, d'identifier les opportunités ainsi que les outils mobilisables et adaptés aux différents territoires et les conditions de leur bonne articulation, avec une attention particulière accordée aux nouveaux installés. Ces travaux permettront d'alimenter le comité national qui se réunit régulièrement. Le travail sur le zonage est en voie de finalisation pour mise en œuvre en 2019. À l'issue de cette réforme, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation restera mobilisé, d'une part, au niveau européen pour défendre les intérêts des éleveurs, et notamment ceux des zones les plus difficiles, et d'autre part, au plan national, avec un accompagnement des agriculteurs sortant du dispositif, en lien étroit avec les conseils régionaux.
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