M. Daniel Labaronne interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la prise en charge des mineurs non accompagnés par les départements. La question des mineurs non accompagnés s'inscrit dans un contexte d'intensification des flux migratoires. Dans sa circonscription d'Indre-et-Loire, 209 mineurs non accompagnés se sont présentés aux services sociaux du département sur toute l'année 2015 et déjà 448 entre le 1er janvier et le 31 mai 2018. Les budgets sont pourtant en augmentation; dans le PLF2018, le budget dédié à l'accueil et à l'orientation des mineurs étrangers a augmenté de 132 millions d'euros au total. Ces fonds ont pour objet d'être transférés aux départements. Malgré cette augmentation, beaucoup de conseils départementaux assurent être dépassés par la situation et alertent l'Etat en demandant de l'aide. Suite à la décision rendue par le conseil d'Etat le 25 août 2017, l'État doit suppléer à la carence du département si celui-ci n'a pas les moyens pour l'hébergement ou l'évaluation. Par ailleurs, avant que le parquet ou le juge des enfants ne soient saisis, l'appréciation de la minorité est à la discrétion du président du conseil départemental. Malgré l'existence d'un référentiel national - arrêté ministériel du 17 novembre 2016 - , les pratiques d'évaluation ne sont pas harmonisées d'un département à l'autre, ni en méthodes ni en résultats. Par exemple, quand le taux de reconnaissance de mineurs accueillis est évalué à 52 % en 2016 au niveau national, les associations locales d'Indre-et-Loire alertent sur un chiffre de 1 sur 6. Concernant les conditions d'accueil et hébergements, il existe une réelle inégalité de traitement sur le territoire. Il n'est pas rare de voir les départements recourir à des hôtels à très bas coût et les frais annexes pris en charge par les associations. Les départements plus réticents à reconnaître les mineurs isolés les dirigent parfois vers d'autres départements plus favorables. Le discours d'Edouard Philippe lors du 87e congrès des départements de France en octobre dernier explicitait la responsabilité de l'Etat « d'accueillir dignement une personne étrangère sur notre territoire », et de s'assurer de son droit à la protection. Dès lors, il l'interroge sur les dispositifs que l'Etat pourrait développer afin d'accroître son engagement dans la gestion des personnes se disant MNA et sur les évaluations qui pourraient être envisagées en vue d'une harmonisation de la procédure par les départements.
La situation tant matérielle que financière des départements liée à la prise en charge des mineurs non accompagnés (MNA) fait partie des préoccupations du Gouvernement qu'il s'est engagé à traiter en partenariat avec l'Assemblée des départements de France (ADF). Concernant le volet financier, conformément à l'engagement du Premier ministre auprès de l'assemblée des départements de France du 21 décembre 2017, un financement exceptionnel de l'Etat au titre de 2017 a été annoncé le 16 juin 2018, ainsi qu'un renforcement très important des moyens au profit des départements dans le projet de loi de finances 2018. Ils passent de 20 M€ en 2017 à 132 M€ en 2018, intégrant le financement exceptionnel de l'Etat au profit des conseils départementaux au titre de la prise en charge partielle des dépenses d'aide sociale à l'enfance (ASE) liées au nombre de mineurs supplémentaires présents dans chaque département au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. La mission d'expertise, confiée par le Premier ministre et le Président de l'ADF, à des membres des corps d'inspection de l'Etat, de l'ADF et des cadres des conseils départementaux, par lettre en date du 30 octobre 2017, vise à identifier des solutions opérationnelles permettant d'améliorer l'efficacité, la cohérence et la soutenabilité budgétaire de la phase d'évaluation et de mise à l'abri. De même, des propositions doivent être formulées « visant à renforcer le pilotage des procédures d'évaluation et garantir leur fiabilité ». Ses conclusions ont été rendues aux commanditaires et les discussions sont en cours entre le Gouvernement et l'ADF pour parvenir à une solution équilibrée prenant en compte l'augmentation du nombre de jeunes étrangers arrivant en France. En effet, le nombre de jeunes se déclarant mineurs et devant être évalués par les conseils départementaux a connu une très forte augmentation en 2017, dépassant probablement les 30 000 (les chiffres ne seront connus que lorsque les conseils départementaux auront transmis les données financières du dernier trimestre à l'Agence des services de paiement), dont 14 908 mineurs recensés par la cellule MNA de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse. Le nombre de mineurs pris en charge par l'ASE, après évaluation, est quant à lui passé de 13 020 au 31 décembre 2016 à 20 950 au 31 décembre 2017 selon les données (chiffres provisoires) remontées par les conseils départementaux à la cellule MNA. Par ailleurs, des publications récentes détaillent des pratiques innovantes qui peuvent permettre de mieux prendre en charge les jeunes, qu'il s'agisse de la période pré-évaluation ou de leur séjour à l'ASE : "recommandations de bonnes pratiques professionnelles"de l'agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) (décembre 2017),"accompagner et accueillir les MNA au regard de leurs besoins"par la convention nationale des associations de protection de l'enfant (CNAPE) (février 2018),"face à l'urgence, des départements innovent" dans la lettre de l'observatoire national action sociale décentralisée (ODAS) (février 2018).
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