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Valérie Boyer
Question N° 9712 au Secrétariat d'état Secrétariat d'État


Question soumise le 26 juin 2018

Mme Valérie Boyer attire l'attention de Mme la ministre des armées sur les attentes des familles de civils européens enlevés par le FLN au cours de la guerre d'Algérie entre le 1er novembre 1954, avec une accélération des disparitions après le 19 mars 1962 et jusqu'en 1963. À l'époque des faits et toujours pour la même période le secrétaire d'État aux affaires algériennes, M. Jean de Broglie faisait état, se basant sur des données de l'ambassade de France à Alger, de 3 019 personnes enlevées dont 1 700 environ disparues avec de fortes présomptions de décès. Au même moment, le Comité international de la croix Rouge (CICR) a enquêté entre mars et septembre 1963 sur 1 200 disparitions et conclut à 70 % de décès, 20 % de présomption de décès, 10 % de retrouvés. Son rapport transmis le 24 octobre 1963 au secrétaire d'État aux affaires algériennes, énonce qu'il n'a pu accéder à 20 camps de détention de l'ALN. La diffusion du rapport du CICR n'a été autorisée qu'en juin 2003 sur décision du Premier ministre de l'époque. Elle a ouvert un dossier trop longtemps occulté. La loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés reconnaît dans son article 1er les souffrances endurées par les disparus et leurs familles. Sous cette impulsion, la direction des archives du ministère des affaires étrangères publia une liste des dossiers des disparitions, issue des archives diplomatiques, afin d'aider les familles des intéressés. Cette initiative contribua aux travaux de la commission « disparus » mise en place en mai 2009 par la mission interministérielle aux rapatriés (MIR), service du Premier ministre, chargée de la mise en œuvre des politiques matérielles et mémorielles en direction des rapatriés. La commission établit une liste de 1 709 personnes enlevées portées disparues entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1962, c'est-à-dire déclarées décédées par jugement ou présumées décédées. Le nombre de 1 598 de ces personnes figure depuis février 2012 sur les colonnes du mémorial du quai Branly dédié aux victimes de la guerre d'Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie. Cette énumération n'est pas exhaustive et il est souhaitable que la commission achève sa mission afin de finaliser la liste par confrontation des sources. C'est ainsi que le sort de 171 disparus demeure encore incertain. Ensuite, les familles des personnes enlevées ne veulent pas que l'écoulement du temps rende impossible l'exercice du droit de connaître le sort de leurs époux ou descendants, frères ou sœurs, les conditions de leur fin dans l'effrayante solitude qui devait être la leur et le lieu de leurs dépouilles. Une telle démarche requiert l'appui des services consulaires français en Algérie. Elle est éclairée, au-delà de son applicabilité juridique, par l'esprit de la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées adoptée par l'ONU le 20 décembre 2006. Dans ce contexte, elle l'interroge sur le point de savoir si elle a l'intention de demander à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre à qui ont été transférées les compétences de la MIR par décret n° 2014-1696 du 29 décembre 2014, de prolonger la mission de la commission « disparus » avec la participation indispensable du ministère des affaires étrangères.

Réponse émise le 7 août 2018

Sollicité à plusieurs reprises, dès le début des années 2000, par des associations d'anciens combattants, le service historique de l'armée de terre a établi des fichiers recensant les militaires français disparus pendant la guerre d'Algérie. Au cours des années 2009 et 2010, un groupe d'historiens, mandaté par la mission interministérielle aux rapatriés - MIR -, organisme dont la dissolution est intervenue le 29 décembre 2014, a mené un travail de recherche approfondi concernant les civils et les militaires disparus durant cette guerre, consultant et recoupant les informations dispersées au sein des fonds d'archives de plusieurs ministères et services (affaires étrangères, intérieur, culture, justice, service historique de la défense - SHD -, service central des rapatriés). Le rapport qui avait été remis à la MIR au terme de cette enquête a récemment été communiqué au SHD, qui s'efforce aujourd'hui de réunir l'ensemble des résultats des différentes recherches effectuées en vue de recenser les disparus, prolongeant ainsi l'action qui avait été menée par la commission « Disparus », et contribuera à apporter un éclairage complémentaire sur le sujet. Par ailleurs, l'association « Soldis Algérie », créée en novembre 2014 avec le soutien du secrétariat d'État aux anciens combattants, poursuit ses recherches tendant à dresser l'inventaire nominatif des soldats disparus en vue de sauvegarder leur mémoire. En parallèle, le SHD et le comité international de la croix-rouge ont engagé des travaux conjoints afin de confronter les différentes listes existantes et de vérifier l'état des sources. Le groupe de travail piloté par les services compétents du ministère des Moudjahidine et ceux du ministère des armées, constitué en vue de faciliter la recherche et l'échange d'informations pouvant permettre la localisation des sépultures de disparus algériens et français de la guerre d'indépendance, a pour sa part commencé ses investigations lors du premier trimestre 2015 et s'est réuni pour la première fois à Alger, le 11 février 2016. Consécutivement à cette rencontre, la partie française a transmis à son homologue algérienne une série de propositions visant à définir une méthode de travail commune pour examiner, dans le cadre d'une démarche progressive, l'ensemble des situations identifiées. Dans sa réponse, le ministère des Moudjahidine a souhaité voir apporter quelques inflexions à ces propositions initiales. Le déplacement officiel du Président de la République en Algérie, au mois de décembre 2017, a permis de réaffirmer la volonté des deux pays de poursuivre les démarches en cours afin de réconcilier les mémoires et d'apaiser les souffrances de familles qui souhaitent connaître les conditions dans lesquelles sont intervenues les disparitions de leurs proches, ainsi que le lieu de leur inhumation. Le poste diplomatique français à Alger s'est en conséquence à nouveau rapproché de ses interlocuteurs institutionnels pour que puisse être organisée une deuxième réunion du groupe de travail, l'objectif étant de fixer définitivement la méthode selon laquelle les travaux de recherche des disparus pourront être concrètement engagés sur le terrain.

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