M. Bastien Lachaud interroge Mme la ministre des armées au sujet des méthodes de dénombrement des blessés au sein des forces armées. Dans un rapport de 2014, les députés M. Olivier Audibert-Troin et Mme Emilienne Poumirol avaient jugé « anormal et tout à fait incompréhensible que le SSA ne soit pas en mesure de [...] fournir des données chiffrées concernant la totalité des blessés, offrant une cartographie complète de toutes les armées indiquant nombre, type de blessure, unité, circonstance de la blessure, cohorte... ». Alors que les forces françaises sont engagées depuis plusieurs années sur des théâtres extérieurs, il est plus que jamais urgent de disposer de données consolidées permettant un pilotage de l'action publique en cohérence avec les besoins. Pour cette raison, il souhaite savoir quelle suite son ministère a donné à la recommandation des rapporteurs et quand il sera possible de disposer enfin de tous les renseignements utiles concernant les blessés.
Le suivi des blessés au sein des forces armées nécessite de disposer de données chiffrées, dont l'analyse permet d'améliorer la prise en charge médicale et la réinsertion de ces militaires. À cette fin, le service de santé des armées (SSA) disposait déjà depuis de nombreuses années de données consolidées tel que le nombre de militaires blessés et évacués des théâtres d'opérations, selon le degré d'urgence et selon la maladie ou le traumatisme initial. La surveillance épidémiologique des armées permettait également d'obtenir des informations précises sur les militaires blessés par armes ou engins explosifs, présentant un trouble psychique en relation avec un événement traumatisant ou victimes d'un traumatisme sonore. Toutes ces données demeuraient néanmoins parcellaires et ne permettaient pas d'avoir une vision aboutie de la situation. Le SSA disposait en particulier de peu de données lorsque les militaires n'étaient plus pris en charge par les établissements de santé militaires, ce qui pouvait entraîner une rupture de suivi. Pleinement conscient de ses devoirs envers les militaires qui servent la Nation parfois au prix de leur intégrité physique et psychique, et à la suite du rapport d'information n° 2470 du 16 décembre 2014 déposé par la commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale en conclusion des travaux d'une mission d'information sur la prise en charge des blessés, le SSA s'est résolument engagé depuis 2015 dans la mise en place d'un observatoire de la santé des militaires. Dans cette perspective, il a été nécessaire d'identifier les différentes sources de données disponibles aussi bien au sein du ministère des armées qu'en dehors (notamment le système national des données de santé - SNDS). Il a fallu également définir les modalités d'accès aux données dans le respect de la réglementation en vigueur et des bonnes pratiques en matière de santé publique. En effet, la très grande mobilité des militaires d'active, tant sur le territoire national que sur les théâtres d'opérations, la multiplicité des intervenants du parcours de santé (secteur médical avec des professionnels de santé généralistes et hospitaliers, militaires et civils, secteur médico-social et secteur social) ont eu pour conséquences à la fois d'augmenter et de disperser les données nécessaires pour caractériser l'état de santé des militaires en général et des blessés en particulier. Le projet d'observatoire de la santé des militaires ayant acquis une maturité suffisante, tous les services concourant du ministère ont été sollicités, dès avril 2018, pour appuyer et soutenir le SSA dans la mise en place de ce nouveau dispositif. Mis en œuvre par le centre d'épidémiologie et de santé publique des armées (CESPA), l'observatoire de la santé des militaires sera composé de plusieurs sources de données qui seront donc opérationnelles très prochainement. Ainsi, le Registre des Actes Techniques en Opérations (ReAcTO), déployé d'ici à la fin 2018, offrira la possibilité de détailler l'ensemble de la prise en charge médicale des militaires depuis les théâtres d'opérations jusqu'à leur évacuation médicale éventuelle dans un hôpital d'instruction des armées sur le territoire national. Au cours de l'année 2019, la nouvelle grande enquête, réalisée conjointement par le SSA et la caisse nationale militaire de sécurité sociale à laquelle tous les militaires sont affiliés, permettra, à partir d'un échantillon représentatif de 5 000 militaires tirés au sort dans une cinquantaine d'unités militaires, de décrire l'état de santé perçu des militaires, les événements de santé survenus au cours de la dernière opération extérieure et les besoins de prévention. Cette enquête, qui s'inscrit pleinement dans le plan famille du ministère, comprendra un volet « familles » et explorera notamment le retentissement de l'état de santé des militaires sur leur entourage familial. Enfin, le dispositif CSESaM (Consommation de Soins et État de Santé des Militaires), qui sera pleinement opérationnel avant la fin 2021, permettra, grâce aux données du SNDS, de caractériser l'état de santé des militaires à partir de leur consommation de soins (consommations de médicaments, consultations, hospitalisations en France métropolitaine) et d'identifier des facteurs et des circonstances à risques, afin de mettre en place des actions de prévention spécifiques. L'ensemble du dispositif reposera sur le dossier médical informatisé supporté par le projet CMA numérique (AXONE), futur outil de gestion des données médicales individuelles. Sa mise en œuvre complète et connectée aux autres systèmes d'information médicale conditionne la possibilité de donner une description précise de l'état de santé des militaires. L'observatoire de la santé des militaires, projet ministériel majeur, répond ainsi aux ambitions du ministère des armées visant à disposer de données consolidées, concernant la totalité des blessés, et en particulier les caractéristiques des blessures subies ou des maladies contractées au service de la Nation. La connaissance de l'état de santé des militaires permettra la mise en œuvre d'actions de prévention plus efficaces, ciblées et particulièrement adaptées aux conditions d'emploi des militaires.
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