Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Texte n° 1297

Amendement N° 757 (Non soutenu)

Publié le 22 octobre 2018 par : M. Gosselin.

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I. – Il est créé un plancher minimum de charges sociales dont l'ensemble des entreprises doit s'acquitter.

II. – Cette contribution est acquittée sur le prix de vente des produits avant application de la taxe sur la valeur ajoutée. Si le taux de charges sociales dans le chiffre d'affaires minoré des achats est inférieur au seuil appelé plancher minimum de charges sociales, une contribution est ajoutée afin d'atteindre celui-ci.

III. – Les recettes du plancher sont collectées par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et affectées au financement de la protection sociale.

IV. – Les modalités d'établissement, de calcul du plancher et de fixation de cette nouvelle cotisation sont déterminées par décret en Conseil d'État.

Exposé sommaire :

Le 30 janvier dernier, le mécontentement des personnels des EHPAD se cristallisait sous la forme d'une journée d'action. Au-delà du cas des EHPAD, cette actualité remet sur le devant de la scène un sujet brûlant depuis de nombreuses années, le financement du grand âge et de la dépendance et plus largement de la transition démographique.

Or, cette question a été sans cesse repoussée. Certes la Loi n° 2015‑1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement a été votée mais sans qu'elle règle, sur le fond, le financement de la dépendance et celui de la protection sociale. Si un grand débat public est prévu, il n'aurait lieu qu'en 2019. C'est loin ! Il faut agir dès maintenant.

Après le papy boum, il faut éviter le « papy crack ».

Historiquement appuyé sur le travail, le financement de la protection sociale est assis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale sur les salaires à hauteur d'environ 70 %, dans le cadre d'une économie où la plupart des secteurs étaient de gros pourvoyeurs de main d'œuvre. D'une certaine façon, chaque produit vendu participait au financement de la protection sociale.

Compte tenu des mutations de l'économie française, asseoir les charges sociales sur la seule assiette des salaires apparaît en déphasage avec notre société moderne. En effet, avec l'automatisation des processus de production, de plus en plus de biens sont fabriqués sans intervention de l'homme. Leur production, souvent délocalisée, est de ce fait exempte de charges sociales. Seuls les produits à forte main d'œuvre, et de plus fabriqués en France, supporteraient donc le poids desdites charges ! ! Ce n'est pas et plus tenable !

Bien sûr, une maîtrise des dépenses de santé est indispensable. Les gaspillages doivent être pourchassés, les fraudes découragées et la gestion de la protection sociale largement améliorée. Pour autant, au-delà même de ces économies indispensables sur l'existant, il faudra trouver de nouvelles recettes et pas seulement pour combler les déficits. En effet, dans les années à venir, nous devrons faire face à de nouvelles dépenses sociales, avec par exemple le financement de la dépendance.

Selon une étude publiée par le Ministère de la Santé en octobre 2017, les dépenses de prise en charge du grand âge devraient doubler d'ici à 2060. La part publique passerait de 1.11 à 2.07 points de PIB, et la dépense totale de 1.4 à 2.78 points de PIB[1]. Quant au nombre de personnes âgées de plus de 85 ans, pas toutes dépendantes, il passerait de 1.5 millions à 5 millions en 2050.

Au-delà des efforts individuels qui pourraient, le cas échéant, être demandés par le biais d'un système faisant une part plus grande à l'assurance privée, la solidarité nationale doit pouvoir s'organiser, pour les plus faibles notamment. Si les recettes de la sécurité sociale doivent augmenter, la crise actuelle pousse à trouver d'autres solutions qu'une simple augmentation de la CSG et des impôts qui risque de freiner la consommation, d'étrangler les entreprises et de compromettre à la fois l'emploi et la compétitivité de notre économie. De surcroît, une fois de plus, les classes moyennes seront affectées en tout premier lieu.

C'est pourquoi, il est proposé d'instaurer un Plancher Minimum de Charges Sociales (PMCS) qui serait de nature à répondre à ces enjeux.

Le dynamisme de l'économie libérale a permis jusqu'à présent de financer les progrès de la couverture sociale française. Sans création de richesse, il n'y a pas de partage. C'est dans cette continuité que souhaite s'inscrire cette proposition.

Le PMCS vise à augmenter les recettes de la sécurité sociale grâce à une contribution sur les produits faisant peu appel à l'humain, sous l'effet d'une automatisation accrue. Le progrès offre aujourd'hui une baisse des prix et pourrait demain, avec le PMCS, financer la protection sociale.

Certains pans de l'économie, dits à « hautes charges sociales », contribuent déjà largement à son financement, notamment dans les secteurs du bâtiment, de l'hôtellerie, de la restauration ou même de l'éducation. En revanche, d'autres secteurs d'activité, plus automatisés, peuvent être dits à « basses charges sociales ». Ces derniers pourraient supporter une nouvelle contribution, bien sûr concertée et très progressive, d'autant plus neutre que, dans ces secteurs, sous l'effet des avancées techniques et technologiques, les coûts de production tendent à diminuer.

Concrètement, le principe du PMCS est le suivant :

· Il s'applique sur le prix de vente de tout produit ou service, avant TVA. Si le poids des charges sociales dans ce prix est inférieur au plancher minimum de charges sociales, une contribution est prélevée afin d'atteindre le seuil fixé.

· Néanmoins, étant donné que plusieurs entreprises interviennent dans le processus de production, il ne faut pas qu'il soit cumulatif. Ainsi, pour effectuer le calcul, on applique le PMCS sur le prix de vente auquel on a préalablement soustrait le prix des achats nécessaires à la production.

Dans la pratique, cela revient à retirer du chiffre d'affaires hors taxe le prix des achats de l'entreprise, à calculer le pourcentage que représente dans ce chiffre le poids des charges sociales. Si celui-ci est inférieur au plancher minimum de charges sociales, un prélèvement est alors ajouté afin que la contribution de l'entreprise à la protection sociale atteigne ce seuil.

Le PMCS s'applique à tous les produits consommés en France, ce qui élargit l'assiette taxable et présente l'avantage de faire contribuer les produits importés au financement de la protection sociale.

La mise en place du PMCS se fera de manière progressive, sur une génération, soit 20 ans, grâce une augmentation annuelle du plancher. Des ajustements pourront être faits, au fur et à mesure des bilans et évaluations qui seront réalisés régulièrement.

Notre protection sociale est un des piliers de notre modèle et de l'excellence française. Elle est aussi un des fondements du Pacte Républicain.

Si, bien sûr, notre modèle doit s'adapter, prendre en compte la situation économique actuelle, les évolutions de la société, il est cependant impératif de le défendre et de lui assurer un financement durable. C'est précisément l'objet du PMCS qui vise à augmenter les recettes de notre système de protection sociale, afin de le pérenniser. Il s'agit surtout de faire face aux besoins sociaux qui sont si grands et permettre ainsi d'ouvrir de nouveaux chantiers, notamment celui de la dépendance.

[1] Romain Roussel (DREES), 2017, « Personnes âgées dépendantes : les dépenses de prise en charge pourraient doubler en part de PIB d'ici à 2060 », Études et Résultats, n°1032, Drees, octobre 2017.

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