Publié le 8 novembre 2018 par : Mme Obono, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
I. – L'article L. 225‑102‑4 du code du commerce est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa, après les mots : « relation commerciale établie », sont insérés les mots : « au sens de l'article L. 442‑6 du code de commerce » ;
2° Au même troisième alinéa, après les mots : « la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement », sont insérés les mots : « ces atteintes graves étant définies par les infractions prévues aux articles 211‑1 à 215‑3, 221‑12 à 221‑17, 222‑1 à 222‑6‑3, 224‑1 A à 224‑1 C, 324‑1 à 324‑6‑1, 410‑1 à 413‑14, 421‑1 à 421‑8, 431‑1 à 431‑2, 433‑1 à 433‑2‑1, 461‑1 à 462‑11, 511‑1 à 511‑28, 521‑1 à 521‑2 du code pénal, des articles L173‑1 à L173‑12 du code de l'environnement et de l'article 1741 du code général des impôts, » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le juge peut condamner la société au paiement d'une amende civile d'un montant qui ne peut être supérieur à 10 millions d'euros. Le juge fixe le montant de cette amende en proportion de la gravité du manquement, et de son éventuel caractère de récidive, et en considération des circonstances de celui-ci et de la personnalité de son auteur. L'amende ne constitue pas une charge déductible du résultat fiscal. »
II. – Avant le premier alinéa de l'article L. 225‑102‑5 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les conditions prévues aux articles 1240 et 1241 du code civil, tout manquement aux obligations définies à l'article L. 225‑102‑4 du présent code engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice que l'exécution de ces obligations aurait permis d'éviter. »
III. – Après l'article L. 225‑102‑5 du code de commerce, il est inséré un article L. 225‑102‑5‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225‑102‑5‑1. – Pour l'application des articles L. 225‑102‑4 et L. 225‑102‑5, l'amende civile encourue est prononcée en monnaie locale, compte tenu de la contre-valeur dans cette monnaie de l'euro. »
Par cet amendement d'appel, afin de lutter contre l'impunité des grandes firmes transnationales, nous proposons l'extension à à de nouvelles infractions de la possibilité d'engager la responsabilité pénale des sociétés mères pour les fautes commises par leurs filiales (santé et sécurité au travail, corruption, droits humains).
Nous proposons ici de reprendre et d'adapter des dispositions de la loi n° 2017-399 (du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre) qui avaient été censurées pour imprécision par le Conseil constitutionnel, et que nous proposons donc de préciser, en conformité avec la Constitution, et d'étayer.
Le manque de précision sur les infractions en cause ayant été censuré par le Conseil constitutionnel, nous proposons ainsi que le devoir de vigilance s'applique aux manquements constitutifs des infractions suivantes :
- Des dommages causés à l'environnement (articles L173-1 à L173-12 du code de l'environnement) ;
- de la fraude fiscale (article 1741 du code général des impôts)
- des crimes contre l'humanité et contre l'espèce humaine (211-1 à 215-3 du code pénal) ;
- des atteintes à la personne constituées par les disparitions forcées (articles 221-12 à 221-17 du code pénal) ;
- des tortures et actes de barbarie (articles 222-1 à 222-6-3 du code pénal) ;
de la réduction en esclavage et de l'exploitation de personnes réduites en esclavage (articles 224-1 A à 224-1 C du code pénal) ;
- du blanchiment (articles 324-1 à 324-6-1 du code pénal) ;
- des atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation (articles 410-1 à 413-14 du code pénal) ;
- du terrorisme (articles 421-1 à 421-8 du code pénal) ;
- des entraves à l'exercice des libertés d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation (articles 431-1 à 431-2 du code pénal) ;
- de la corruption active et du trafic d'influence commis par les particuliers (articles 433-1 à 433-2-1 du code pénal) ;
- de crimes et délits de guerre ( articles 461-1 à 462-11 du code pénal) ;
- des infractions en matière de santé publique (articles 511-1 à 511-28 du code pénal) ;
- des sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux (articles 521-1 à 521-2 du code pénal).
En détail
Les raisons de la censure du Conseil constitutionnel en 2017 étaient les suivantes (https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=904EA5768A6ECD6CF2BCCFD4F2E01F0D.tplgfr41s_1?cidTexte=JORFTEXT000034290632&categorieLien=id)
1) (9. En premier lieu, les dispositions contestées imposent aux sociétés en cause d'établir et de mettre en œuvre, de manière effective, des « mesures de vigilance raisonnable » qui doivent en particulier prendre la forme d'« actions adaptées d'atténuation des risques ou de prévention des atteintes graves»)
2) caractère large et indéterminé de la mention des « droits humains » et des « libertés fondamentales » -> nous proposons une liste d'infractions pénales spécifiques (. 10. En deuxième lieu, ces dernières mesures, sans autre précision du législateur et qu'un décret en Conseil d'Etat peut, au surplus, « compléter », sont destinées à identifier tous les risques et à prévenir toutes les atteintes graves envers l'ensemble des « droits humains » et des « libertés fondamentales » résultant des activités non seulement de la société à laquelle incombe l'obligation d'établir un plan mais également de celles de certains de ses partenaires économiques)
3) caractère large et indéterminé du périmètre des sociétés, entreprises et activités entrant dans le champ du plan de vigilance -> nous proposons une référence spécifique au code de commerce au seul point problématique, la “relation commerciale établie” (11. En troisième lieu, le périmètre des partenaires économiques de la société soumise à l'obligation d'établir un plan de vigilance délimité par les dispositions contestées inclut l'ensemble des sociétés contrôlées directement ou indirectement par cette société ainsi que tous les sous-traitants et les fournisseurs avec lesquels elles entretiennent une relation commerciale établie, quels que soient la nature des activités de ces entreprises, leurs effectifs, leur poids économique ou le lieu d'établissement de leurs activités.)
4) Nous proposons que la sanction soit encourue pour chaque manquement et en situation de récidive (En dernier lieu, le législateur n'a pas précisé si la sanction est encourue pour chaque manquement à l'obligation qu'il a définie ou une seule fois quel que soit le nombre de manquements.).
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