Publié le 20 novembre 2018 par : M. Perrut.
Supprimer les alinéas 5 à 10.
Les dispositions prévues par les alinéas 5 à 10 de cet article constituent un recul pour le citoyen en posant trois nouvelles barrières à la plainte avec constitution de partie civile et à l'ouverture d'une information judiciaire :
- En portant le délai de 3 à 6 mois imposé au procureur pour répondre à une plainte simple avant que la victime ne puisse saisir le juge
- En ouvrant la possibilité pour le juge d'instruction de refuser l'ouverture d'une information lorsque celle-ci est inutile et qu'une citation directe de la victime est possible.
Malgré les modifications apportées par les sénateurs (notamment la suppression de la nécessité pour les plaignants de porter un recours devant le procureur général en cas de décision de classement sans suite du procureur de la République), les conditions supplémentaires imposées par l'article 34 à la victime et l'introduction d'une appréciation d'opportunité sur l'ouverture d'une information judiciaire alors même que l'enquête préliminaire aurait établi des charges suffisantes remettent en cause la garantie ouverte à celle-ci d'un accès au juge pénal.
Aujourd'hui, le juge d'instruction ne traite presque plus que des constitutions de partie civile à cause du gain de pouvoir toujours plus important du parquet. Avec ces nouvelles barrières, et en particulier l'allongement du délai de 3 à 6 mois et le renvoi à la procédure de citation directe à la charge de la victime, cette réforme va conduire à un peu plus d'affaiblissement du juge d'instruction et, conséquemment, un nouvel amoindrissement des droits de la défense (que l'instruction octroie) de même qu'à un recul des droits des victimes.
Si l'objectif d'une justice efficace et rapide est partagé par tous, ce mouvement ne peut se faire qu'à la condition d'une « égalité des armes », garantie à laquelle ont le droit tous les citoyens. Or, cette mesure va conduire à la fin de la garantie de chaque victime d'avoir accès au juge pénal. De surcroit, il serait incohérent de vouloir faciliter le dépôt de plainte via internet d'une part et de poser de tels obstacles d'autre part. On ne peut verrouiller d'une part ce qu'on prétend faciliter d'autre part.
Par ailleurs, et même dans l'hypothèse où le plaignant surmonterait les obstacles procéduraux, le juge d'instruction garderait la possibilité, sur réquisition du parquet, de refuser d'instruire au motif que les faits auraient pu faire – selon son appréciation et hors tout critère défini par la loi - l'objet d'une citation directe devant la juridiction de jugement. La plainte avec constitution de partie civile est pourtant le seul moyen de surmonter l'inertie du parquet dans des dossiers sensibles. De nombreux exemples existent de dossiers qui auraient pu être non traités ou moins bien jugés sous le regard d'un parquet non indépendant soumis au lien hiérarchique avec l'exécutif. Sans la pugnacité des parties civiles et l'indépendance des juges d'instruction, le fonctionnement de notre justice aurait été défaillant. De plus, la pratique démontre régulièrement que le parquet est amené à classer sans suites des plaintes ou dénonciations en application du principe de l'opportunité des poursuites pour finir par requérir des condamnations en audience après que la procédure ait été réenclenchée après le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile.
C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à supprimer ces dispositions, en ce qu'elle limite les droits de la victime, son droit d'accès au juge de l'enquête, ainsi que les possibilités pour la victime de déclencher une enquête. En outre, cette mesure est contradictoire avec l'esprit et les mesures de la loi « violences sexuelles et sexistes », qui visait à permettre plus facilement aux victimes de porter plainte.
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