Publié le 19 novembre 2018 par : M. Bernalicis, Mme Autain, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
Cet amendement a été déclaré irrecevable après diffusion en application de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale.
Par cet amendement d'appel principal, afin de moderniser le fonctionnement de la justice à la hauteur des exigences de notre société démocratique, nous proposons que les délibérés du Conseil constitutionnel, garant du respect par la loi de la Constitution et juge électoral, soient publics ainsi que les votes de chacun des membres de sa formation de jugement.
Ceci existe d'ores et déjà à l'échelle internationale (voir ci-dessous), et nous estimons que cela ne peut que renforcer notre démocratie et notre État de droit. Ces juges suprême jugeant “au nom du peuple français”, ce même peuple français a aussi droit à pouvoir connaître le processus d'élaboration et de décision de jugements qui ont des effets concrets sur les normes qui le régissent et bien souvent sur sa vie quotidienne.
Cet amendement va ainsi de pair avecun autres amendements principaux demandant un même caractère public du délibéré et des votes pour les magistrats des autres Cours suprêmes françaises (Cour de cassation et Conseil d'État). Ceci nous apparaît d'autant plus fondamental que la jurisprudence de ces Cours a toujours historiquement constitué une possible véritable adjonction à la loi ou à la Constitution. Par leur caractère particulier les Cours suprêmes ont un devoir de transparence particulier.
Dans le cas du Conseil constitutionnel cela permettrait de mieux comprendre et justifier ses prises de position et l'interprétation du droit, ainsi que ses revirements de jurisprudence (notamment celui qui a mis fin à “l'effet cliquet” ou principe de non régression en matière de droits et libertés fondamentales - voir notammenthttps ://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2005‑2-page-257.htm -, ou comment il a pu dernièrement considérer que la possibilité de mise en rétention d'un enfant pendant plus de 90 jours pouvait être effectivement considérée comme constitutionnelle (voirhttps ://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2018/2018770DC.htm).
En détail :
Si le secret du délibéré (initialement entendu comme les échanges entre magistrats qui se mettent d'accord pour prendre une décision) est un principe général de droit (reconnu depuis 1843 par la Cour de cassation et 1922 par le Conseil d'État) – c'est-à-dire inférieur au niveau législatif -, il empêche toutefois le peuple de comprendre pourquoi une telle décision a été effectivement prise. Ceci prend d'autant plus d'importance quand il s'agit du jugement d'un Cour suprême qui s'impose à toutes les juridictions de première instance, d'appel et même de cassation.
Rappelons enfin que cette transparence des décisions publiques et la fin du secret du délibéré a par ailleurs constitué une conquête révolutionnaire : la loi des 16 et 28 septembre 1791 relative à la « police de sureté, la justice criminelle et l'établissement du jury » a suspendu l'application de ce principe en imposant aux juges d' « opiner à haute voix à l'audience, en public ». Ce n'est que par la Constitution du 5 fructidor an III (1795) que le secret du délibéré est rétabli. Notons par ailleurs que d'autres États exercent cette pratique démocratique avec délibération et vote des juges en séance publique (tel le Tribunal fédéral suprême en Suisse – article 58 de la loi sur le Tribunal fédéral de 2005https ://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20010204/index.html#id-2‑9 – ou au Brésil (trois fois plus peuplé que la France) – Tribunal fédéral suprême du Brésil, ses audiences et délibérés étant même retransmis à la télévision sur une chaîne dédiée, TV Justiça -http ://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/nouveaux-cahiers-du-conseil/cahier-n-26/regard-d-un-francais-sur-le-tribunal-federal-supreme-stf.51497.html).
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