Publié le 4 juillet 2019 par : M. Gérard, Mme Rilhac, Mme Vanceunebrock-Mialon, Mme Atger, Mme De Temmerman, M. Blanchet, Mme Racon-Bouzon, M. Claireaux.
L’article L. 401‑2 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice des dispositions prévues aux articles 222‑33‑2-2 et 226‑2-1 du code pénal, aux septième et huitième alinéas de l’article 24, ainsi qu’aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il fixe les conditions selon lesquelles tout élève ayant commis une des infractions susmentionnées par voie électronique à l’encontre d’un autre élève ou du personnel de la communauté éducative peut faire l’objet d’une procédure disciplinaire, y compris pour des faits commis hors temps scolaire ou à l’extérieur de l’enceinte de l’école ou de l’établissement d’enseignement scolaire. »
Le large développement de l’usage des téléphones portables chez les jeunes ainsi que l’avènement des réseaux sociaux a bousculé les modes classiques de socialisation et donné une toute nouvelle envergure au phénomène de harcèlement scolaire qui était autrefois limité au monde physique, mais qui aujourd’hui se prolonge sans répit pour les élèves.
Comme le rappelle l’enquête de l’association Génération Numérique, près de 61 % des 11‑18 ans ont un appareil numérique en permanence avec eux. Ces nouveaux usages du numérique a eu pour conséquence de banaliser le nombre d’agressions en ligne : selon les statistiques publiées par l’association e-Enfance en février 2017, 40 % des élèves déclarent avoir déjà subi une agression en ligne.
Le cyber-harcèlement a des conséquences très néfastes sur la santé des élèves, avec le développement de pensées suicidaires et la baisse des résultats scolaires.
Pour endiguer ce phénomène, les dispositions de droit commun prévues au sein du code pénal ne semblent pas suffisantes. D’une part, s’il est possible pour les victimes d’aller porter plaintes, peu de victimes passent à l’acte ou osent en parler à leurs parents. D’autre part, la portée d’une sanction pénale n’est pas toujours dissuasive pour un jeune public de mineurs, d’autant que le temps de la justice est très différent du temps scolaire.
C’est pourquoi, cet amendement propose, sur le modèle de l’article L. 511‑3 du code de l’éducation qui reproduit les dispositions pénales relatives au bizutage scolaire, de qualifier juridiquement la notion de « cyber-harcèlement scolaire » au sein du code de l’éducation pour rappeler que la cyber-violence est, bien souvent, le prolongement du harcèlement scolaire, comme le montre les travaux de Catherine Blaya. Contrairement à ce qui est souvent pensé, la haine en ligne est une violence de proximité et a lieu dans des cercles sociaux préexistants à la vie en ligne. S’il s’agit d’une violence anonyme, la victime connaît très souvent son/ses agresseurs avec qui elle partage certains espaces tels que le milieu scolaire. Par ailleurs, les recherches menées par Jean-Pierre Bellon, président de l’APHEE (association de prévention du harcèlement scolaire) a montré qu’une sanction à l’encontre des intimidateurs peut être contre-productive. Aussi, il apparaît préférable de mettre l’individu en situation de réparation et de mobiliser les leviers de lutte et de prévention scolaire qui existe en matière de harcèlement. C’est pourquoi cet amendement rappelle l’importance du rôle des chefs d’établissement en la matière. Cette légitimité à agir pour les faits commis dans l’enceinte scolaire pendant le temps scolaire est élargie, par une jurisprudence constante, aux faits commis en dehors du temps et des lieux scolaires quand les faits ne sont pas « dépourvus de tout lien avec la qualité d’élève ». Le tribunal administratif de Versailles vient de faire une application de ce principe à une situation de harcèlement scolaire (décision 1608289 du 21 décembre 2017).
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