Publié le 2 octobre 2019 par : Mme Maud Petit, Mme Louis.
I. – Après le septième alinéa de l’article L. 1111‑4 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Hors nécessité vitale immédiate, aucun acte médical de conformation sexuée irréversible visant à modifier les caractéristiques sexuelles ne peut être effectué sur une personne mineure tant que l’intéressée n’est pas en mesure d’exprimer par elle-même son consentement après avoir reçu une information adaptée à son âge. »
II. – Le dernier alinéa de l’article 371‑1 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas de désaccord sur une décision de nature médicale relevant de l’alinéa 7 de l’article L. 1111‑4, le juge des tutelles apprécie la volonté du mineur. »
Cet amendement est issu des échanges de vue et d’un travail en commun transpartisan entre les membres du groupe d’études sur les discriminations et LGBTQIphobies dans le monde ainsi que du groupe d’études droits de l’enfant et protection de la jeunesse.
Il existe aujourd’hui une injonction de la société afin qu’un enfant sorte de la maternité avec un sexe défini. Cependant, des voix émergentes redéfinissent la notion de genre et de sa détermination. Il est du devoir du législateur de se saisir de la question.
L’amendement vise à différer tout acte médical de conformation sexuée, hors cas d’urgence vitale immédiate, afin que la personne mineure concernée puisse exprimer son consentement éclairé, en ayant reçu une information adaptée quant aux conséquences de ces opérations.
L’enjeu ici réside ici dans le droit d’avoir le choix. Certains actes médicaux, pratiqués en France sur des nourrissons, sont irréversibles. Si nous ne doutons pas de l’intention d’agir pour l’intérêt de l’enfant, pourquoi agir immédiatement quand il est possible de laisser à l’enfant, un être en pleine construction, le droit de comprendre qui il est, et qui il veut devenir ?
En 2017 déjà, le Défenseur des droits faisait état de la nécessité d’une évolution de la prise en charge des personnes intersexes, dans le respect des droits humains que sont l’intégrité du corps, et la libre disposition de soi. Comme nous le rappelle l’article 16.1 du Code civil « Chacun a le droit au respect de son corps ».
C’est aussi ce que rappelle Le Conseil d’État dans son rapport sur la révision de la loi de bioéthique, remis au Premier ministre en 2018 : des professionnels de santé réalisent des actes médicaux tendant à conformer les caractéristiques sexuelles primaires ou secondaires des personnes présentant des variations du développement sexuel, en dehors du cadre légal de l’article 16‑3 du code civil. Le Conseil d’État précise par ailleurs que seules sont envisageables les interventions « qui s’imposent afin d’éviter de mettre en jeu le pronostic vital de la personne ou les souffrances physiques associées à ces variations. ».
Le droit de décider pour son propre corps est un droit fondamental, qui n’est malheureusement pas respecté lors d’interventions précoces, non urgentes, où le consentement de l’enfant n’est pas recherché. Pourtant, l’article L. 1111‑5 du code de la santé publique démontre que le consentement libre et éclairé du mineur peut être recueilli sans l’aval de ses représentants légaux. Ainsi, un droit d’exercice à consentir au mineur est prévu lorsque celui-ci refuse que ses représentants légaux soient consultés sur les décisions médicales intéressant la sauvegarde de sa santé. Dans le cas d’acte médical de conformation sexuée, hors urgence immédiate, ce droit devrait pouvoir être respecté. En l’absence de nécessité vitale absolue, il faut attendre que l’enfant soit en capacité d’exprimer son consentement si une opération le concerne directement.
Comme le rappelle l’Article 12 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (qui engage la France depuis 30 ans cette année) « Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement, le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. »
Compte tenu du contexte difficile qui peut entourer les parents au moment de la naissance (injonction de la société afin qu’un enfant sorte de la maternité avec un sexe défini), nous proposons donc par cet amendement que ce type d’intervention irréversible soit soumis au préalable au consentement personnel du mineur. Décider de pratiquer une telle opération engage la vie future de l’enfant. Il est légitime que ce dernier décide pour lui-même, tout en étant évidemment accompagné et éclairé dans sa décision.
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