Publié le 2 octobre 2019 par : Mme Obono, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
I. – Après le septième alinéa de l’article L. 1111‑4 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Hors nécessité vitale immédiate, aucun acte médical de conformation sexuée irréversible visant à modifier les caractéristiques sexuelles ne peut être effectué sur une personne mineure tant que l’intéressée n’est pas en mesure d’exprimer par elle-même son consentement après avoir reçu une information adaptée à son âge. »
II. – Le dernier alinéa de l’article 371‑1 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas de désaccord sur une décision de nature médicale relevant de l’alinéa 7 de l’article L. 1111‑4, le juge des tutelles apprécie la volonté du mineur. »
Cet amendement est issu des échanges de vue et d’un travail en commun transpartisan entre les membres du groupe d’études sur les discriminations et LGBTQIphobies dans le monde ainsi que du groupe d’études droits de l’enfant et protection de la jeunesse.
Cet amendement vise à ce que tout acte médical de conformation sexuée, hors cas d’urgence vitale, soient différés pour être préalablement soumis au consentement de la personne elle-même, personnellement exprimé, après avoir reçu une information adaptée et pu prendre pleine conscience des conséquences d’une telle opération.
Le Conseil d’État le rappelle d’ailleurs dans son rapport sur la révision de la loi de bioéthique remis au Premier ministre en 2018 : des professionnels de santé réalisent des actes médicaux tendant à conformer les caractéristiques sexuelles primaires ou secondaires des personnes présentant des variations du développement sexuel, en dehors du cadre légal de l’article 16‑3 du code civil. Celui-ci précise que ces opérations doivent avoir lieu seulement en cas de nécessité médicale pour la personne, ou recueil préalable d’un consentement libre et éclairé, exprimé par les personnes concernées elles-mêmes. Le Conseil d’État ajoute que seules sont envisageables les interventions « qui s’imposent afin d’éviter de mettre en jeu le pronostic vital de la personne ou les souffrances physiques associées à ces variations. »
En principe, le dispositif existant devrait permettre de contrôler l’appréciation de nécessité médicale opérée par le médecin. En effet, l’application du principe de proportionnalité (article L. 1110‑5 du code de la santé publique), combinée à l’obligation du médecin de ne pratiquer « aucune intervention mutilante [...] sans motif médical très sérieux et, sauf urgence ou impossibilité, sans information de l’intéressé et sans son consentement. » (article R. 4127‑41 du même code), devraient suffire à interdire de telles opérations. Force est de constater qu’il n’en est rien.
En 2017, le Défenseur des droits et la délégation aux droits des femmes du Sénat ont déjà montré la nécessité de changer la prise en charge des personnes intersexes. De nombreuses institutions se sont prononcées pour appeler à cesser ces pratiques. Toutes s’accordent sur le principe de précaution et la nécessité de ne pas intervenir sur le corps de la personne concernée sans urgence vitale et sans son consentement libre et éclairé, personnellement exprimé. L’État français a été rappelé à l’ordre par trois comités de l’ONU : en janvier 2016, par le Comité des Droits de l’Enfant puis en mai 2016, par le Comité contre la torture, et enfin, en juillet 2016, par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes).
La loi du 4 mars 2002 a permis de renforcer les droits du mineur en introduisant à l’article L. 1111‑4 (actuel alinéa 7) du code de la santé publique l’obligation pour le médecin de « rechercher » son consentement, l’exercice de ses droits n’en reste pas moins dévolu à ses représentants légaux. Ainsi, la recherche de discernement, qui conférerait une capacité d’exercice à consentir au mineur est écartée, de sorte qu’il n’est question que de consentement consultatif. En l’espèce, ces opérations ont souvent lieu sur des nourrissons, qui ne sont évidemment pas en état de consentir à quoi que ce soit. Pourtant, ce sont elles et eux qui devront vivre toute leur vie, dans un corps avec des caractéristiques sexuelles qui ont été modifiées, sans même avoir pu donner leur avis, alors qu’il n’y avait aucune urgence à intervenir. Parfois, ces personnes sont tenues dans l’ignorance d’opérations qu’ils ont subies très jeunes, et n’apprennent la vérité que tardivement.
A contrario, l’article L. 1111‑5 du code de la santé publique démontre que le consentement libre et éclairé du mineur peut être recueilli sans l’aval de ses représentants légaux. Celui-ci prévoit un droit d’exercice à consentir au mineur lorsque ce dernier refuse que ses représentants légaux soient consultés sur les décisions médicales intéressant la sauvegarde de sa santé.
Compte tenu du contexte de pression psychologique dans lequel peuvent évoluer les parents au moment de la naissance, il est proposé par voie d’amendement de modifier l’article 1111‑4 du code de la santé publique pour que ce type d’intervention irréversible soit soumis au préalable au consentement personnel de l’enfant.
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