Publié le 7 novembre 2019 par : le Gouvernement.
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Les articles L. 1142‑24‑11 à L. 1142‑24‑15 sont remplacés par des articles L. 1142‑24‑11 à 1142‑24‑13 ainsi rédigés :
« Art. L. 1142‑24‑11. – Un collège d’experts placé auprès de l’office procède à toute investigation utile à l’instruction de la demande, dans le respect du principe du contradictoire. Il diligente, le cas échéant, une expertise, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel ou industriel.
« Le collège est présidé par un membre du Conseil d’État, un magistrat de l’ordre administratif ou un magistrat de l’ordre judiciaire, en activité ou honoraire, et comprend notamment une personne compétente dans le domaine de la réparation du dommage corporel, une personne compétente en droit de la responsabilité médicale, ainsi que des médecins proposés par le Conseil national de l’ordre des médecins, par des associations de personnes malades et d’usagers du système de santé ayant fait l’objet d’un agrément au niveau national dans les conditions prévues à l’article L. 1114‑1, par les producteurs, exploitants et fournisseurs concernés ou leurs assureurs, par les assureurs des professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code et des établissements, services et organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, et par l’État.
« La composition du collège d’experts et ses règles de fonctionnement, propres à garantir son indépendance, son impartialité et le respect du principe du contradictoire, ainsi que la procédure suivie devant lui et les modalités d’information des organismes de sécurité sociale auxquels la victime est affiliée sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Les membres du collège et les personnes qui ont à connaître des documents et informations détenus par celui-ci sont tenus au secret professionnel, dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226‑13 et 226‑14 du code pénal. »
« Art. L. 1142‑24‑12. – S’il constate un ou plusieurs dommages mentionnés à l’article L. 1142‑24‑10 qu’il impute à la prescription, avant le 31 décembre 2015, de valproate de sodium ou de l’un de ses dérivés pendant une grossesse, le collège d’experts émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue de ces dommages, ainsi que sur la responsabilité de l’une ou de plusieurs des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article L. 1142‑5 ou de l’État, au titre de ses pouvoirs de sécurité sanitaire.
« Les malformations congénitales sont présumées imputables à un manque d’information de la mère sur les effets indésirables du valproate de sodium ou de l’un de ses dérivés, lorsqu’il a été prescrit à compter du 1er janvier 1982.
« Les troubles du développement comportemental et cognitif sont présumés imputables à un manque d’information de la mère sur les effets indésirables du valproate de sodium ou de l’un de ses dérivés, lorsqu’il a été prescrit à compter du 1er janvier 1984.
« L’avis du collège d’experts est émis dans un délai de six mois à compter de la saisine de l’office. Il est transmis à la personne qui l’a saisi et à toutes les personnes intéressées par le litige, notamment les organismes de sécurité sociale auxquels est affiliée la victime. Il s’impose à l’office.
« Cet avis ne peut être contesté qu’à l’occasion de l’action en indemnisation introduite devant la juridiction compétente par la victime ou des actions subrogatoires prévues aux articles L. 1142‑14 et L. 1142‑24‑15.
« Sous réserve que le premier avis de rejet n’ait pas donné lieu à une décision juridictionnelle irrévocable dans le cadre de la procédure mentionnée au cinquième alinéa du présent article, un nouvel avis peut être rendu par le collège d’experts dans les cas suivants :
« 1° Si des éléments nouveaux sont susceptibles de justifier une modification du précédent avis ;
« 2° Si les dommages constatés sont susceptibles, au regard de l’évolution des connaissances scientifiques, d’être imputés au valproate de sodium ou à l’un de ses dérivés. »
« Art. L. 1142‑24‑13. – L’article L. 1142‑24‑3 est applicable à l’indemnisation des préjudices régis par la présente section. » ;
2° L’article L. 1142‑24‑16, qui devient l'article L. 1142-24-14, est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa du I, les mots :« comité d’indemnisation » sont remplacés, deux fois, par les mots : « collège d’experts » ;
b) À la première phrase du II, la première occurrence des mots :« comité d’indemnisation » est remplacée par les mots : « collège d’experts », les mots : « au regard des obligations légales et réglementaires s’imposant au produit » sont supprimés et la seconde occurrence des mots : « comité d’indemnisation » est remplacée par les mots : « collège d’experts » ;
3° L’article L. 1142‑24‑17, qui devient l’article L. 1142‑24‑15, est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « L. 1142‑24‑16 » est remplacée par la référence : « L. 1142‑24‑14 » ;
b) Au deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « un » ;
4° L’article L. 1142‑24‑18 devient l’article L. 1142‑24‑16.
II. – Les dossiers en cours de rapport ou d’avis à la date de l’installation du nouveau collège d’experts sont repris par ce dernier, qui peut également être saisi d’une demande de réexamen d’un dossier ayant fait l’objet d’un avis du comité d’indemnisation, sous réserve que cet avis n’ait pas donné lieu au paiement transactionnel d’une indemnité.
III. – Les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 1142‑24‑12 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant du I, sont applicables aux demandes introduites devant l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux avant comme après l’entrée en vigueur de la présente loi.
Le présent article a, en premier lieu, pour objet de fusionner le collège d’experts et le comité d’indemnisation créée par la loi n° loi n° 2016-1917 de finances pour 2017 du 29 décembre 2016 et d’instaurer un régime de présomption d’imputabilité des dommages causés par le valproate de sodium à un manque d’information de la mère sur ses effets indésirables.
Cette fusion :
- accélérera le traitement des dossiers, en évitant que les dossiers soient examinés deux fois par deux instances ;
- facilitera le travail des experts, pour éviter des problèmes de frontière de compétences entre les deux instances) ;
- réduira les coûts de fonctionnement du dispositif.
Cette évolution, notable, apparaît justifiée, car les deux raisons principales qui avaient présidé à une architecture du dispositif à deux instances sont devenues sans objet :
- le collège d’experts chargé des questions d’imputabilité avait été conçu pour être une première approche permettant une orientation des victimes vers une prise en charge médicale adaptée, afin de répondre à une forte demande des associations de mettre fin à l’errance diagnostique. Or, sur les 43 premiers dossiers examinés par le collège d’experts, 100 % d'entre eux bénéficient d’une prise en charge adaptée. L’utilité d’une orientation vers des structures semble désormais marginale ;
- par ailleurs, la distinction de deux temps d’examen des dossiers, avec un premier temps consacré à l’imputabilité devait permettre au principal laboratoire pharmaceutique d’entrer de manière plus objective dans une démarche d’indemnisation. Or, au regard de l’attitude du laboratoire Sanofi Aventis France, qui manifeste un refus constant de participer au processus d’indemnisation et qui conteste même catégoriquement toute responsabilité, la nécessité de deux instances n’apparaît plus aussi nécessaire.
En deuxième lieu, le présent article prévoit l’ajout, au sein du collège d’experts, d’un médecin représentant des assureurs des médecins prescripteurs, ceux-ci pouvant être mis en cause dans le cadre du dispositif d’indemnisation. On compte en effet 6 avis mettant en cause au moins partiellement la responsabilité d’un prescripteur au 30 juin 2019 et il apparaît donc légitime de les intégrer au dispositif pour que ceux-ci puissent faire valoir leur position.
En troisième lieu, cet article vise à améliorer la lisibilité du dispositif et à clarifier le périmètre d’indemnisation pour les victimes en instaurant des dates à partir desquelles l’imputabilité du dommage à un défaut d’information est présumée : en s’appuyant sur la littérature et les expertises disponibles depuis les conclusions du rapport remis en février 2016 par l’Inspection générale des affaires sociales au terme de son enquête relative aux spécialités pharmaceutiques contenant du valproate de sodium, il s’agit de 1982 pour les malformations congénitales et de 1984, pour les troubles du développement. L’instauration d’un régime de présomption d’imputabilité des dommages causés par ce médicament à un manque d’information de la mère sur ses effets indésirables doit ainsi permettre d’éviter de très longues investigations rétrospectives afin d’établir l’état des connaissances des effets indésirables d’un produit mis sur le marché dans le milieu des années 1960 et qui a causé les dommages en litige dès les premières prescriptions.
Pour tirer les conséquences complètes de cette mesure, il est proposé de supprimer au premier alinéa du II de l’article L. 1142-24-16 du code la santé publique les mots « au regard des obligations légales et réglementaires s'imposant au produit », qui sont en contradiction avec le régime de présomption. En effet, le maintien de la rédaction actuelle du II de cet article pourrait conduire à exclure du dispositif les victimes ayant subi des dommages à une date à laquelle aucune obligation d’information ne pesait avec certitude sur le laboratoire ou le médecin.
Du fait de la modification proposée, les malformations congénitales, qui seront présumées imputables à un manque d’information de la mère sur les effets indésirables du produit lorsqu’il aura été prescrit à compter du 1er janvier 1982, de même que les troubles du développement comportemental et cognitif lorsque ce produit aura été prescrit à partir du 1er janvier 1984, pourront être indemnisées plus aisément. Si un responsable a pu être identifié (au regard des obligations qui lui incombaient à l’époque des faits), celui-ci sera tenu de faire une offre à la victime concernée. Dans le cas contraire, l’indemnisation sera versée par l’ONIAM pour le compte de l’Etat en application des dispositions du II de l’article L. 1142-24-16 du code de la santé publique.
En quatrième lieu, pour tenir compte de l'ancienneté et de la complexité des dossiers, le présent projet dispose que l'avis du collège s'impose à l'ONIAM, sans réexamen des dossiers.
En cinquième lieu, afin d’accélérer la procédure, il est prévu de ramener de trois mois à un mois le délai dont dispose l’ONIAM pour faire une offre, lorsque l’office se substitue au responsable n’ayant pas fait d’offre ou ayant fait une offre manifestement insuffisante.
En sixième et dernier lieu, pour tenir compte de la création du nouveau collège d’experts unique, le présent projet précise les conditions d’ouverture du réexamen par le collège des avis précédemment rendus en ne le réduisant pas aux seuls avis de rejet et permet au nouveau collège de réexaminer à la demande des victimes les avis rendus par le comité d'indemnisation.
L’instauration d’un régime de présomption d’imputabilité des dommages causés par le valproate de sodium et ses dérivés à un manque d’information de la mère sur ses effets indésirables constitue une dépense supplémentaire de 1 M€ prise sur le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » de la mission « Santé ».
Toutefois, l’amendement intègre également l’économie liée à la fusion du collège d’experts et du comité d’indemnisation créée par la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016. Le bénéfice financier attendu pour l’Etat et l’ONIAM consiste en une diminution significative du coût de fonctionnement conduisant à une économie de 500 000 € par an.
Au total, les crédits du programme 204 seront majorés à hauteur de 0,5 M€ pour tirer les conséquences de cet amendement.
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