Lutte contre le gaspillage et économie circulaire — Texte n° 2274

Amendement N° CD819 (Non soutenu)

(2 amendements identiques : CE216 CD400 )

Publié le 23 novembre 2019 par : M. Vatin.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

L’article 8bis de ce projet de loi propose d’instaurer un dispositif de consigne sur certains emballages. Le présent amendement vise à supprimer cet article.

Alors que le tri des déchets est devenu une priorité dans la lutte contre la pollution de nos mers et de nos océans, de nombreux dispositifs ont déjà été mis en place et ont prouvé leur efficacité. Porté par les collectivités locales depuis 30 ans, le service public de collecte sélective a su valoriser les produits plastiques recyclables pour réduire le coût de ce service aux citoyens. En effet, ce service public accompagne les citoyens dans le tri de leurs déchets et plus spécialement dans le recyclage de l’ensemble des bouteilles en plastique qui suivent un processus bien rôdé. Or la volonté de mise en place de consignes pour recyclage de bouteilles en plastique par des entreprises privées (aussi appelées éco-organismes) viendrait interférer avec le dispositif actuel et ne laisserait à ce service public que les déchets sans valeurs et avec un taux de recyclage très faible. De plus, cette méthode s’avère être moins efficace que le dispositif actuel et engendrerait un surcoût de 600 millions d’euros.

Que ce soit sur le plan environnemental (maintenir sur le long terme l’usage des déchets plastiques), économique (réduction des recettes de la valorisation pour le service public), social (complexification du tri des déchets pour les citoyens, réduction des effectifs de collecte des déchets et des centres de tri, au détriment des acteurs publics,) ou budgétaire (les collectivités locales investissent des centaines de millions d’euros en modernisation), ce projet de consigne à l’endroit des distributeurs que porte cet article, ne paraît pas être une réponse juste à la question de la lutte contre le « tout jetable » et se fait malheureusement au détriment du service public local de collecte sélective. A l’heure où l’économie circulaire est au cœur de notre politique environnementale, il est important de soutenir un service public de gestion des déchets, déjà présent depuis plus de 30 ans au plus près des Français, et d’y investir les techniques nécessaires pour pérenniser leur action.

Un tel dispositif de consigne viendrait fortement compromettre le rapide développement en cours du tri par les habitants, qui recherchent simplification du geste et efficacité du dispositif ; la monétisation du geste de tri risque de venir diminuer fortement les efforts des habitants pour les autres emballages (majoritaires en tonnages collectés) restant en dehors du champ de la consigne. En effet la collecte sélective peut-elle rester crédible et mobilisatrice, avec les bouteilles, canettes et briques en consigne et le reste dans le bac jaune ? Le risque de désengagement du public doit être considéré.

Quid des investissements réalisés par les collectivités en matière de tri (centres de tri, bacs de collecte) pour accompagner l’extension du tri à tous les emballages et papiers, en cours de déploiement ? Le modèle des centres de tri et des standards de tri des collectes sélectives serait à modifier alors que celui des standards matériaux vient tout juste d’être publié, et que la majorité des collectivités de France se lance dans l’extension des consignes de tri (objectif 2022 de la loi : couverture à 100 % du territoire français). Ce passage à l’extension des consignes de tri a demandé aux collectivités d’investir massivement dans de nouveaux centres de tri, de nouveaux contenants, de nouveaux marchés de collecte, ….

Ce projet de consigne du Gouvernement, au minimum se trompe de cible, et au pire il pourrait s’assimiler pour notre collectivité à un sabotage des efforts faits depuis plus de vingt ans pour mettre en place un dispositif efficace de recyclage de tous les emballages et papiers.

Pour progresser encore et atteindre l’objectif européen de collecter 90 % de bouteilles plastiques en vue de recyclage, le SMDO considère que la meilleure option serait d’élargir le gisement de bouteilles plastiques collectées, en autorisant les collectivités à collecter la part dite « hors foyer ». Sachant que le SMDO atteint déjà 73 % de recyclage des bouteilles visées par ce projet, sur la partie de son territoire en extension de tri, la captation du hors foyer ajoutée à la progression continue de l’effort de tri des habitants, permettrait d’atteindre rapidement ce taux de 90 %.

De plus le projet de loi ne traite qu’insuffisamment du sujet majeur pour l’économie circulaire qu’est la réduction de la production et de la consommation des emballages en plastique. Une véritable politique de diminution des déchets plastiques doit s’orienter vers la promotion et le réemploi de contenants durables et recyclables à l’infini, comme le verre. Elle doit aussi viser une forte réduction du recours au plastique à usage unique.

Or le dispositif de consigne proposé ne réduira en aucun cas la production de bouteilles en plastique : ce mode de conditionnement reste en effet le préféré des vendeurs de boissons. On peut craindre au contraire que la mise en place de ce dispositif de consigne, compte tenu des lourds investissements dans le processus de déconsignation d’une part, et d’autre part de l’habitude qu’auront prise les consommateurs de voir rétribuer leur geste de déconsignation, ne contribue plutôt à pérenniser l’usage du plastique comme conditionnement des boissons.

Enfin les implications économiques sont considérables : En cas de mise en place du projet de consigne des bouteilles plastique et canettes métalliques, la perte directe des recettes matières pour les collectivités locales organisatrices du tri, est estimée à 60 millions d’euros au niveau national.

Les conséquences directes de la consigne pour le SMDO seraient :

- Des recettes industrielles en moins : 908 370 € par an.

- Des soutiens CITEO en moins : 2 840 388 € par an.

- Une augmentation relative des coûts de la collecte et du tri : moins de tonnages (4 500 tonnes par an, représentant 10 % de la collecte sélective SMDO) collectés, avec des couts fixes restant identiques, et peu ou pas de marge de réduction des coûts variables sans des investissements d’adaptation du process de tri.

La conséquence financière directe pour le SMDO est estimée à 3 750 000 € par an soit 5,16 € par habitant et par an.

Il ne faut pas non plus négliger un risque de pillage des bacs jaunes pour capter les éventuelles bouteilles présentes, afin de récupérer la somme de la consigne, ce qui viendrait indéniablement perturber la propreté de nos espaces publics.

Il est à rappeler que la montée en charge de l’extension des consignes à tous les emballages et tous les papiers n’est permise que depuis 2016, et qu’en conséquence, il n’y a pas suffisamment de recul pour établir un bilan en matière de taux de recyclage, notamment pour les bouteilles plastiques.

Le passage à l’extension des consignes engendre de lourds investissements, notamment sur le parc de centres de tri français : modernisation qui est en plein développement. Le SMDO vient d’investir 38 millions d’euros dans un centre de tri ultra performant, compatible pour trier un flux en extension des consignes de tri. Les recettes industrielles liées à la vente et au recyclage des bouteilles plastiques et emballages métalliques entrent dans le plan de financement d’un tel équipement de tri des collectes sélectives.

Cette privatisation de la collecte des plastiques au profit des producteurs et distributeurs n’est en rien une consigne. Ce projet, dont le coût est supporté par le consommateur, fragilise inutilement la collecte publique et ne répond pas au véritable enjeu : la baisse des emballages jetables et l’augmentation du réemploi.

Cette déstabilisation du service public génèrera des pertes financières qui ne pourront être compensées que par l’augmentation de la fiscalité locale des déchets payée par les contribuables.

Il est indispensable de mettre au point de nouvelles techniques de recyclage, de développer les industries nécessaires en Europe et en France, de produire des objets contenant plus de matières recyclées.

Il est important de faire confiance aux collectivités locales investies depuis plus de 20 ans dans la collecte sélective et le recyclage des emballages. Les efforts entrepris ces dernières années doivent leur permettre d’atteindre rapidement 90 % de collecte des bouteilles en plastiques en vue de recyclage, et collecter davantage d’emballages pour atteindre l’objectif de 75 % de recyclage de l’ensemble des emballages ménagers.

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