Publié le 15 octobre 2019 par : M. Véran.
I. – À titre expérimental, pour une durée de deux ans, l’État peut autoriser l’usage médical du cannabis sous la forme de produits répondant aux standards pharmaceutiques, dans certaines indications ou situations cliniques réfractaires aux traitements indiqués et accessibles.
II. – Les conditions de mise en œuvre de l’expérimentation sont définies par voie réglementaire. Elles précisent notamment les conditions de prise en charge, le nombre de patients concernés, les modalités d’importation, de production, d’approvisionnement, de prescription et de délivrance par les pharmacies hospitalières et d’officine, ainsi que les conditions d’information, de suivi des patients et de formation des professionnels de santé.
III. – Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport portant notamment sur l’usage médical du cannabis pour les malades, leur suivi, l’organisation du circuit de prescription et de dispensation, ainsi que sur les dépenses engagées. Ce rapport étudie, en particulier, la pertinence d’un élargissement du recours à l’usage médical du cannabis au terme de l’expérimentation et, le cas échéant, les modalités de sa prise en charge par l’assurance maladie.
Cet amendement propose la mise en place, pour une durée de deux ans, d’une expérimentation visant à autoriser l’usage médical du cannabis.
L’utilisation médicale de cannabis et dérivés était strictement interdite en France, jusqu’au décret du 5 juin 2013 qui a octroyé la possibilité d’utiliser des spécialités pharmaceutiques, avec une autorisation de mise sur le marché (AMM) française ou européenne, à base de cannabis. Il a également autorisé les opérations de fabrication, de transport, d’importation, d’exportation, de détention, d’offre, de cession, d’acquisition ou d’emploi relatives à ces spécialités. Deux médicaments ont obtenu une AMM. L’un, indiqué dans la sclérose en plaque (Sativex), n’a jamais été commercialisé, faute d’accord sur le prix et le second, indiqué dans des épilepsies pharmacorésistantes, et actuellement disponible en autorisation temporaire d’utilisation (ATU) depuis décembre 2018, doit encore obtenir les avis de la commission de transparence de la Haute Autorité de santé (HAS) et du Comité économique des produits de santé (CEPS).
De nombreuses revues scientifiques internationales attestent des effets bénéfiques de certaines molécules issues de cette plante (CBD et THC), dans de nombreuses pathologies telles que la sclérose en plaques, l’épilepsie, pour certaines douleurs chroniques notamment neuropathiques ou effets indésirables des chimiothérapies ou trithérapies.
Dès lors, l’interdiction du recours au cannabis d’usage médical est régulièrement contournée en France par des patients qui parviennent à s’en procurer soit par le biais du trafic, par autoproduction, ou dans des officines étrangères (notamment aux Pays-Bas) souvent sur prescription médicale que les médecins français sont habilités à faire, paradoxe qu’il convient de lever. En l’absence d’accompagnement, ces pratiques individuelles font courir des risques importants aux malades, tant sur le plan pénal que sanitaire.
En septembre 2018, à la demande de la ministre des solidarités et de la santé, un Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST) a été créé par l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM). Il était chargé d’évaluer la pertinence de développer en France l’usage médical du cannabis pour certaines indications et de proposer le cas échéant, les modalités de sa mise à disposition.
L’ANSM a souscrit à l’avis positif et aux propositions du groupe d’experts (CSST) publiées le 28 juin sur le cadre pratique de l’usage médical du cannabis en vue d’une expérimentation en France. L’agence et le ministère des solidarités et de la santé se sont engagés à mener les travaux nécessaires à sa mise en place.
Cet amendement encadre par voie législative cette expérimentation qui permettra de répondre au besoin immédiat des malades non soulagés par les thérapeutiques actuellement disponibles, tout en leur donnant accès à des traitements sûrs et de qualité. Elle évaluera en situation réelle la pertinence du circuit de prescription et de délivrance, l’adhésion des professionnels de santé et des patients à ces conditions et permettra d’obtenir les premières données françaises de bénéfice-risque dans les principales indications retenues.
L’expérimentation pourrait concerner environ 3 000 patients. Le cadre expérimental retenu permettra en outre de financer les coûts associés au déploiement du cannabis d’usage médical, notamment le coût d’achat des produits, de la création d’un registre de suivi des patients et son exploitation scientifique – dont les modalités seront définies par l’ANSM – , ainsi que celui de la formation des médecins et des pharmaciens susceptibles respectivement de prescrire ou de délivrer le cannabis.
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