Publié le 16 octobre 2017 par : Mme Firmin Le Bodo.
I. – Une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue à l'article 265 du code des douanes revenant à l'État est attribuée aux collectivités territoriales ayant adopté un plan climat-air-énergie territorial conformément au I de l'article L. 229‑26 du code de l'environnement.
Cette fraction est calculée de manière à ce que le montant versé à chaque collectivité concernée s'élève à 10 € par habitant.
II. – Les modalités d'attribution de la fraction prévue au I ci-dessus sont fixées dans un contrat conclu entre l'État et la collectivité locale ou le groupement concerné, avec la possibilité pour la région d'être cocontractante.
III. – La perte de recettes résultant pour l'État du I et du II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La loi de transition énergétique a fixé des objectifs précis et ambitieux (réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre, réduction de 50 % de la consommation d'énergie finale, augmentation à 32 % de la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie, rénovation énergétique de 500 000 logements par an à partir de 2017).
Ces objectifs nationaux votés par une grande majorité des parlementaires risquent pourtant de ne pas être atteints, à la fois en raison des prix extrêmement bas de l'énergie et en raison du manque de moyens financiers des acteurs potentiels de la transition énergétique.
L'atteinte de ces objectifs passe inéluctablement par une mise en mouvement généralisée, rapide et efficace des territoires et des acteurs locaux. Elle passe, en particulier, par l'élaboration puis par la mise en oeuvre des Plans Climat-Air-Énergie territoriaux (PCAET) à l'échelle des intercommunalités.
Mais cette planification est assez peu prescriptive et les collectivités compétentes se sont vues transférer de nouvelles compétences sans aucun transfert de moyens. Sans moyens, ces plans et schémas ne pourront être mis en œuvre et risquent de rester en grande partie à l'état d'intention.
Si l'élaboration d'un plan ou schéma coûte environ 1 euro/habitant, sa mise en oeuvre à l'échelle du territoire coûte environ 100 à 200 euros/habitant. L'atteinte des objectifs de ces documents de planification suppose en effet des actions importantes et coûteuses pour les collectivités : rénovation énergétique de leur propre patrimoine, accompagnement de la rénovation des particuliers (notamment via la mise en place des Plateformes Territoriales de la Rénovation Énergétique, qui doivent couvrir l'ensemble du territoire d'après la loi de transition énergétique, et dont le financement est assuré en partie par les collectivités), développement de projets d'énergies renouvelables électriques et thermiques…
Le gouvernement a par ailleurs annoncé, dans son grand plan d'investissement, plusieurs dispositifs de financement à destination des collectivités. Toutefois, les financements annoncés dans ce plan d'investissement correspondent à la fois à des engagements déjà existants, à des enveloppes de prêts à taux bonifiés et à quelques financements nouveaux. Pour la rénovation des bâtiments des collectivités par exemple, les 3 milliards d'euros annoncés sont en réalité constitués de 500 millions d'euros de véritables nouveaux financements (issus de la Dotation de Soutien à l'Investissement Local), d'une enveloppe de 500 millions d'euros pour un nouveau dispositif de financement via la Caisse des Dépôts et Consignation qui doit encore démontrer son attractivité pour déclencher des opération de rénovations et de 2 milliards d'euros de prêts de la Caisse des Dépôts et Consignation. Rien ne garantit donc que ce plan d'investissement sera suffisant pour mobiliser les territoires.
Dans le même temps, le projet de loi de finances pour 2018 fixe une trajectoire d'augmentation de la Contribution Climat Énergie (CCE), qui passera de 30/t de CO2 à 44,6 €/t CO2 dès l'année prochaine, et augmentera progressivement pour atteindre 86 €/t CO2 en 2022. L'augmentation prévue pour 2018 génèrera environ 2,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires, portant le total des recettes de la fiscalité sur le carbone à environ 8 milliards.
Le présent amendement vise donc à doter les EPCI en charge de l'élaboration et de la mise en œuvre des PCAET d'un montant de 10 €/ habitant pour les EPCI. Si un tiers des collectivités ayant l'obligation de mettre en œuvre un PCAET bénéficie de cette fraction de TICPE en 2018, cela représentera une enveloppe globale de 200 millions d'euros.
Le versement de cette dotation serait conditionné par la signature de contrats d'objectifs entre les collectivités bénéficiaires et l'État, sur le modèle des contrats de transition énergétique annoncés par le secrétaire d'État à la Transition écologique Sébastien LECORNU. Au regard du rôle des régions en matière de mise en cohérence au niveau régional de l'action publique sur la transition énergétique, notamment à travers les SRADDET que devront prendre en compte les PCAET, il est proposé que les régions puissent être cocontractantes avec l'État des contrats conclu avec les collectivités locales (EPCI). Les financements concernés seraient majoritairement utilisés pour des investissements dans la rénovation des bâtiments publics et dans des aides financières versés aux ménages afin de déclencher le passage à l'acte de la rénovation des logements. Ils pourront être utilisés à la marge pour compléter les dispositifs de soutien existants dans les énergies renouvelables et pour financer une ingénierie territoriale nécessaire à ces actions.
Cette mesure contribuerait à l'atteinte des objectifs du plan climat présenté par le ministre de la Transition écologique, notamment les 32 % d'énergies renouvelables en 2030 ou la rénovation de l'ensemble des passoires thermiques en 10 ans. Elle permettrait de donner un sens à la fiscalité sur le carbone en la redistribuant de manière incitative aux acteurs locaux via les territoires sous la forme d'un accompagnement à cette transition énergétique, génératrice d'emplois et de développement économique.
Cette proposition a été soutenue lors de l'élaboration de la loi de finances rectificative pour 2016 par des députés et sénateurs de toutes tendances politiques et adoptée par le Sénat, mais un amendement gouvernementale lors de la lecture définitive à l'Assemblée nationale, adopté à quelques voix d'écart, l'a supprimé.
Affecter, via la TICPE, une partie de la Contribution Climat Énergie aux EPCI en charge d'élaborer des PCAET, c'est faire un vrai choix politique : le choix de taxer des énergies non renouvelables et importées (et qui grèvent la balance commerciale de la France) pour financer l'emploi et l'activité économique locale et favoriser la baisse de la facture énergétique du pays et des français tout en protégeant l'environnement.
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