Publié le 18 décembre 2019 par : M. Bothorel, M. Mis, Mme Rilhac, M. Fiévet, M. Rouillard, Mme Gaillot, Mme Provendier.
Substituer aux alinéas 78 et 79 les sept alinéas suivants :
« Art. L. 541‑10‑7. – I. – Lorsqu’une personne physique ou morale facilite, par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne, les ventes à distance ou la livraison de produits relevant du principe de responsabilité élargie du producteur pour le compte d’un tiers, cette personne est tenue de prendre les mesures nécessaires pour permettre à ce tiers, quel que soit son lieu d’établissement, de se conformer aux dispositions des articles L. 541‑10 et L. 541‑10‑6.
« II. – À cette fin, l’autorité administrative ou l’éco-organisme compétents peuvent adresser à la personne désignée au I du présent article un signalement portant présomptions sérieuses de non-conformité de ce tiers. Le signalement inclut la meilleure estimation possible du niveau d’activités et du montant de l’éco-contribution annuelle due par le redevable potentiel ainsi qu’une liste de justificatifs permettant au tiers de démontrer qu’il se conforme aux dispositions L. 541‑10 et L. 541‑10‑6.
« La personne désignée au I du présent article rend compte des mesures prises pour inciter ce tiers à répondre à ses obligations.
« III. – En l’absence de réponse après un délai d’un mois à compter de la réception du signalement, ou en présence d’une réponse négative ou non satisfaisante du tiers ou de la personne désignée au I du présent article, l’autorité administrative ou l’éco-organisme peut mettre en demeure la personne désignée au I de prendre des mesures supplémentaires ou, à défaut, d’exclure le tiers de l’utilisation de son service.
« La personne désignée au I notifie à l’autorité administrative et à l’éco-organisme les mesures prises au titre du présent III.
« IV. – En l’absence de mise en œuvre des mesures ou de l’exclusion mentionnées au III après un délai d’un mois à compter de la mise en demeure, la reprise ou l’éco-contribution dont est redevable le tiers visé sont solidairement dues par la personne désignée au I.
« V. – Les modalités d’application du présent article sont définies par décret. »
Dans leur rédaction actuelle, les alinéas 78 et 79 de l’article 8 du projet de loi prévoient que les places de marché en ligne seront soumises par défaut au principe de responsabilité élargie du producteur (REP), incluant des obligations telles que le financement via l’éco-participation ou la reprise des produits. Toutefois, ces dispositions ne tiennent pas compte des particularités de certains modèles d’affaires, notamment en ce qu’elles ne distinguent pas les plateformes qui possèdent un stock, des produits et des services logistiques, de celles qui se limitent à un rôle d’intermédiation pure entre acheteurs et vendeurs.
Or, ces plateformes d’intermédiation pure ne sont aujourd’hui pas en mesure de respecter l’ensemble des obligations afférentes à une filière REP, ce qui menace leur modèle d’affaires et, par conséquent, l’activité des marchands ayant recours à leurs services.
En particulier, dès lors que ces plateformes ne détiennent jamais physiquement le produit, il leur est impossible de déterminer avec certitude la redevabilité au titre de l’éco-participation, qui est due par le producteur et dont le montant dépend de barèmes liés au type, au poids et à la composition de l’objet. Ces plateformes ne disposent que des informations déclarées par les vendeurs tiers, qui peuvent s’avérer incomplètes ou inexactes, sans qu’il soit possible pour les plateformes de les vérifier.
De surcroît, la rédaction actuelle de ces dispositions laisse subsister une incertitude quant à leur compatibilité avec le droit européen relatif au statut des intermédiaires en ligne, régi par la directive dite « e-Commerce » et transposé en droit interne par la loi pour la confiance dans l’économie numérique.
Par ailleurs, instaurer un régime de responsabilité sur les seules places de marché en ligne soumises au droit français aurait pour conséquence :
- d’accélérer le développement de leurs concurrents opérant depuis l’étranger, qui sont hors de portée de nos juridictions ;
- de fragiliser le principe de « pollueur-payeur », en décourageant tout comportement vertueux de la part des utilisateurs de plateformes quant à la gestion et la prévention des déchets issus de leur activité, lesquelles étant intégralement reportées sur un tiers.
Afin de remédier à ces difficultés, le présent amendement propose d’adopter en matière environnementale un mécanisme similaire à celui mis en œuvre en matière de TVA dans le cadre de la loi relative à la lutte contre la fraude, à savoir un système de coopération renforcée entre, d’une part, les places de marché en ligne, et d’autre part, les pouvoirs publics et les éco-organismes. L’administration et l’éco-organisme compétent pourront signaler, auprès de la place de marché, qu’un vendeur ne remplit pas ses obligations environnementales. La place de marché sera alors tenue de prendre contact avec le vendeur signalé afin que ce dernier se mette en conformité. À défaut de prendre les mesures nécessaires dans un certain délai, la place de marché pourra se trouver tenue solidairement responsable du manquement du vendeur tiers. Ce mécanisme de signalement couplé à une responsabilité conjointe paraît en effet plus flexible et adapté à des plateformes en situation d’asymétrie d’information par rapport aux vendeurs tiers.
Les principaux éco-organismes réalisent déjà, au titre du cahier des charges, lié à leur agrément au sein de leur filière, une activité de « recherche et identification des redevables » ainsi que de « Constitution des dossiers concernant les non-contributeurs potentiels ». Ces dossiers sont aujourd’hui traités par l’administration du ministère de la Transition Ecologique et Solidaire. En pratique, le mécanisme porté par cet amendement propose donc un « prétraitement » des dossiers lorsqu’ils portent sur des redevables utilisateurs de plateformes en ligne, via la responsabilisation de ces dernières. Le recouvrement de l’éco-contribution due en serait rendu plus efficace et moins coûteux pour les pouvoirs publics.
Cet amendement permet ainsi d’assurer une cohérence entre les mesures prises en matière de contrôle de la TVA et celles relatives aux obligations environnementales des metteurs sur le marché.
Enfin, cet amendement reprend la définition légale d’une plateforme en ligne qui figure à l’article L. 111‑7 du Code de la consommation à des fins d’harmonisation juridique, de clarté et d’intelligibilité de la loi, et afin de retenir un champ d’application adéquat au regard de l’hétérogénéité des pratiques et modèles d’affaires.
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