Publié le 4 mars 2020 par : Mme Le Grip, Mme Meunier, Mme Anthoine, M. Boucard, Mme Bazin-Malgras, M. Minot.
I. – Substituer à l’alinéa 30 les trois alinéas suivants :
« XI. – Le premier alinéa de l’article L. 331‑21‑1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique chargé d’exercer la mission de protection des œuvres et des objets protégés, ainsi que les agents habilités et assermentés devant l’autorité judiciaire mentionnés à l’article L. 331‑14 du code de la propriété intellectuelle, peuvent constater les faits susceptibles de constituer des infractions prévues au présent titre lorsqu’elles sont punies de la peine complémentaire de suspension de l’accès à un service de communication au public en ligne mentionnée à l’ article L. 335‑7.
« Le membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique chargé d’exercer la mission de protection des œuvres et des objets protégés, ainsi que les agents habilités et assermentés devant l’autorité judiciaire mentionnés à l’article L. 331‑14, sont également habilités à rechercher et à constater les faits susceptibles de constituer l’infraction mentionnée à l’article L. 335‑7‑1.
II. – En conséquence, après l’alinéa 49 insérer les quatre alinéas suivants :
« XVbis(nouveau). – Après l’article L. 331‑19, il est inséré un article L. 331‑19‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 331‑19‑1. – I. – Le membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique chargé d’exercer la mission de protection des œuvres et des objets protégés, lorsqu’il constate des faits constitutifs d’une négligence caractérisée prévue par l’article L. 335‑7‑1, peut, si ces faits n’ont pas déjà donné lieu à la mise en mouvement de l’action publique, proposer à l’auteur des faits une transaction consistant dans le versement d’une amende transactionnelle dont le montant ne peut excéder 500 € s’il s’agit d’une personne physique et 2 500 € s’il s’agit d’une personne morale. Le montant de l’amende est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de l’auteur des faits. La transaction, proposée par le membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique chargé d’exercer la mission de protection des œuvres et des objets protégés et acceptée par l’auteur des faits, doit être homologuée par le procureur de la République. La personne à qui est proposée une transaction est informée qu’elle peut se faire assister par un avocat avant de donner son accord à la proposition.
« II. – Les actes tendant à la mise en œuvre ou à l’exécution de la transaction mentionnée au I sont interruptifs de la prescription de l’action publique. L’exécution de la transaction constitue une cause d’extinction de l’action publique. Elle ne fait cependant pas échec au droit de la partie civile de délivrer citation directe devant le tribunal de police. Le tribunal ne statue alors que sur les seuls intérêts civils.
« III. – En cas de refus de la proposition de transaction ou d’inexécution d’une transaction acceptée et homologuée par le procureur de la République, le membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique chargé d’exercer la mission de protection des œuvres et des objets protégés, conformément à l’article 1er du code de procédure pénale, peut mettre en mouvement l’action publique par voie de citation directe. »
La procédure de réponse graduée mise en œuvre par l’Hadopi est un dispositif à vocation pédagogique et dissuasive consistant à avertir l’internaute, dont l’accès Internet a été le support à des échanges en pair à pair de contenus culturels en méconnaissance du droit d’auteur, que la pratique de tels échanges est constitutive d’une infraction, pénalement sanctionnée, et qu’il lui revient la responsabilité de sécuriser son accès Internet afin qu’il soit mis fin à ces échanges.
Si, malgré plusieurs avertissements, il est constaté que la pratique incriminée perdure, l’Hadopi ne peut que signaler la situation au procureur de la République. S’ouvre alors une phase relevant de la seule institution judiciaire, le Procureur de la République appréciant l’opportunité d’exercer des poursuites à l’égard du contrevenant et de le soumettre à une sanction pénale.
La phase pédagogique déployée par l’Hadopi a montré son efficacité : elle a contribué à faire diminuer de moitié les pratiques de piratage en pair à pair depuis sa mise en place.
Une étude récemment conduite par l’Ifop pour l’Hadopi montre que 63% des abonnés qui ont reçu une recommandation ont diminué leurs pratiques illicites.
En revanche, la phase judiciaire qui intervient quand la pédagogie n’a aucun effet sur ces pratiques illicites, a montré ses limites : dans plus 85% des cas, le contrevenant n’est condamné à aucune sanction.
Ainsi, malgré les efforts déployés, environ 3 millions d’internautes continuent d’utiliser les services pair à pair tous les mois pour pirater des œuvres protégées.
En outre, on observe que lorsque des sites illégaux importants de streaming ou de téléchargement direct sont bloqués à l’issue de procédures judiciaires, une part importante de leurs utilisateurs se reportent vers le pair à pair. Dans la perspective, recherchée par le projet de loi et portée largement par différents groupes parlementaires, de renforcer significativement les actions de lutte contre le streaming et le téléchargement direct, il est donc indispensable de mettre en place une solution renforçant l’efficacité de la procédure de réponse graduée.
Une étude juridique, menée par deux membres du Conseil d’État, a montré que des solutions alternatives à la mise en œuvre de la procédure judiciaire actuelle pourraient être utilement mises en place.
En particulier, le recours à la transaction pénale, dont dispose le Défenseur des Droits, présente toutes les garanties juridiques nécessaires pour être mise en place par une autorité publique indépendante. Dans ce dispositif, l’ARCOM aurait la possibilité, en cas d’échec de la phase pédagogique de la procédure de réponse graduée, de proposer au contrevenant le paiement d’une amende transactionnelle, plafonnée au tiers du montant de la peine maximale aujourd’hui encourue, pour éteindre l’action publique (soit 500 € maximum contre 1.500 € maximum actuellement). Dans l’hypothèse où l’abonné refuserait la proposition de transaction de l’Autorité, cette dernière aurait la possibilité de le citer directement devant le tribunal de police.
Ce dispositif permettrait donc:
- sur la base d’une forme d’adhésion à la sanction de la part du contrevenant acceptant de rentrer dans la logique transactionnelle, de comporter une réponse sanctionnatrice plus systématique ;
- de crédibiliser ainsi la phase pédagogique initiale d’avertissements et de renforcer son effet dissuasif ;
- de décharger l’autorité judiciaire d’une part de ce contentieux pénal que les parquets peinent en l’état à traiter, la saisine du tribunal de police par l’ARCOM par voie de citation directe en cas de refus de la transaction par le contrevenant ne devant intervenir que marginalement, compte tenu de l’intérêt de ce dernier à privilégier le paiement d’une amende d’un faible montant plutôt que d’encourir devant le juge pénal une sanction pécuniaire plus sévère.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.