Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Texte n° 3074

Amendement N° 2128 (Retiré)

Publié le 2 juillet 2020 par : Mme Mörch, Mme Pitollat, Mme Lenne, M. Daniel, Mme Meynier-Millefert, M. Raphan, Mme Kerbarh, Mme Clapot, Mme Michel, Mme Sarles, M. Claireaux.

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Le I de l’article 179 de la loi n° 2019‑1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est complété par un 30° ainsi rédigé :

« 30° un rapport sur la prévention sociale est présenté. Le rapport fait état de la nécessité d’une mise en exergue du rapport entre le coût pour l’État de l’investissement dans la prévention et les gains apportés par cette même prévention. Ce rapport comprend :
« a. un volet organisation des soins ;
« b. un volet alimentation ;
« c. un volet qualité de l’air ;
« d. un volet psychiatrie en périnatalité. »

Exposé sommaire :

Donnons-nous la possibilité par l’outil budgétaire de respecter l’engagement : « réduire les inégalités à la racine ». La première des évolutions que la crise met en exergue est qu’une politique de santé publique ne peut plus se résumer à un système axé sur le soin. Il doit élargir son champ d’action, notamment à tout ce qui conditionne l’efficacité et la qualité du soin. Ainsi, une politique efficace de santé publique se doit avant tout d’être une politique de prévention à plusieurs volets.

Un premier volet organisation des soins. La crise actuelle confirme ce que les professionnels de la santé martèlent depuis des années : les moyens engagés pour assurer les soins et notamment la sécurité sanitaire de la population sont bien inférieurs aux besoins réels. Une des leçons à retenir dans les prochains mois – l’opinion l’a saisie – sera de redonner aux travailleurs de la santé et de l’accompagnement social, les moyens nécessaires d’exprimer pleinement le sens de solidarité et de la responsabilité qui anime leur engagement quotidien.

Le deuxième volet est un volet alimentation, Plus de 50% des maladies dans le monde résultant de problèmes alimentaires de tous genres. Si la sous-alimentation, encore trop présente dans les pays pauvres, aggrave l’état de santé général dès l’enfance, la sur-alimentation a elle aussi un impact négatif de long-terme sur la santé. Il a été montré (Harvard) que la sur-alimentation causé autant de maladies dans le monde que la sous-alimentation. Maladies cardiaques, cancers, maladies chroniques se multiplient et chez des publics de plus en plus jeunes.

En vingt ans, les cancers ont augmenté de 63% en France et sont devenus la cause première de mortalité en Europe. Le Fond mondial de recherche contre le cancer a souligné que un rééquilibrage des habitudes alimentaires permettrait de prévenir plus d’un tiers des cancers. Le raisonnement est le même pour le diabète et les maladies cardiovasculaires.

L’alimentation est donc un point névralgique dans la prévention des maladies. Un point d’autant plus important que ces maladies réclament des soins très couteux : investir dans la prévention alimentaire ne peut qu’avoir des effets positifs de long terme, sur la santé comme sur les finances publiques.

Le troisième volet est relatif à la qualité de l'air. Il nous faut bien mieux considérer l’impact positif de la protection de l’environnement sur la santé, notamment en matière de pollution de l’air intérieur et extérieur ou des perturbateurs endocriniens. Le confinement a fait de notre monde un laboratoire à ciel ouvert. On estime de plus en France que 48 000 personnes décèdent chaque année à cause de la pollution de l'air. C’est la première cause de mortalité environnementale et la seconde cause de mortalité après le tabac et l’alcool. Nous avons pu observer l’impact de la baisse voire de l’arrêt des activités sur la qualité de l’air extérieur. Il serait utile de mettre en lumière de façon rigoureuse l’impact sanitaire et donc le bénéfice de cette baisse brutale des activités sur la santé des français et donc sur les soins au long court. Toujours dans les observations permises par la crise, un impact peut être deviné sur l’air intérieur : en effet, le confinement nous a à l’inverse sur-exposé à l’air intérieur (multi-pollué) de nos habitats. Ce sujet majeur a notamment été développé lors du PNSE4. Ici encore, des études peuvent être réalisées pour chiffrer ces impacts de façon rigoureuse et les intégrer à la politique de prévention sanitaire que nous devons impérativement mener – rappelons que pour de nombreux spécialistes, « la moitié des maladies sont évitables » si l’on adapte les habitudes de vies et l’environnement des individus. Aération régulière des espaces avec la nécessité de lutter contre l’idée que l’air du dedans est plus sain que l’air du dehors, adaptation des produits d’entretien pour des usages moins nocifs, prévention contre l’utilisation de parfums d’ambiance intérieurs qui souvent rajoutent encore des polluants nocifs pour la santé... le propre n’a pas d’odeur.

Enfin un volet psychiatrie en périnatalité. Dans la période critique des 1000 jours, les nouveaux nés et nourrissons, en particulier les plus fragiles, ont besoin de soignants attentifs à leurs parents comme à eux-mêmes ainsi que d’une médecine préventive efficace. Les troubles aussi bien des parents que du nourrisson engendrent de très nombreux coûts réels en termes de soin, lorsque ceux-ci n’ont pu être prévenus. De la grossesse à la deuxième année de vie, la santé physique et psychologique doit devenir une authentique priorité de santé publique. Un outil original a été développé sur la base du Rapport Bauer (London School of Economics) permettant de comprendre les coûts que représente l’absence d’effort en la matière, et surtout de visualiser pour la France, à l’échelle d’un territoire comme une ville ou une région, les économies qui pourraient être réalisées si la prévention était renforcée. Dans la 2e circonscription de l’Allier (1000 naissances domiciliées par an), on peut estimer une économie de 10 millions d’euros de soins dès lors que la prévention aura été mise en place en matière de psychiatrie périnatale.

Une politique de prévention englobante qui prenne en compte la complexité de l’Homme, que ce soit dans ses dimensions intrinsèques allant du corps à l’esprit, ou extrinsèques tel que l’environnement socio-économique, culturel et naturel. Cette complexité nous appelle à une redéfinition de la notion de « prévention » et une meilleure prise en compte de celle-ci. Il devient évident que l'on doit désormais tenir pleinement compte des aspects psychologiques, sociaux et environnementaux des maux sociétaux auxquels notre population est exposée. Ces multiples facettes sont le fondement de la prévention.

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