Publié le 24 juin 2020 par : M. Carrez, M. Savatier, Mme Le Grip, Mme Kuster.
I. - A titre expérimental, pour une durée de trois ans, par dérogation à l’article 12 de la loi n° 2010‑1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, et aux III et IV de l’article L. 221‑7 du code monétaire et financier, l’État peut autoriser les établissements publics muséaux et patrimoniaux à financer leurs investissements par emprunt auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, lorsque la part de leurs ressources propres constatée en moyenne depuis cinq ans est supérieure à des taux définis par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la culture.
II. - Une convention-cadre conclue entre les ministres chargés du budget, de l’économie et de la culture d’une part, la Caisse des dépôts et consignations, après accord de sa commission de surveillance, d’autre part, définit notamment les durées maximales d’échéance et les montants maximaux d’annuités des différentes catégories de prêts souscrits dans le cadre de l’expérimentation mentionnée au I.
III. - Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 30 septembre 2021, un rapport d’étape et, au plus tard le 30 septembre 2023, un rapport d’évaluation qui présentent les investissements financés dans le cadre de l’expérimentation prévue au présent article, les emprunts souscrits à ce titre et les échéanciers de leurs remboursements, ainsi que les modalités d’évaluation de ces investissements au regard d’objectifs d’augmentation de la fréquentation et d’accessibilité au public des établissements concernés, d’amélioration de la conservation préventive et de la restauration de leurs monuments historiques ainsi que de respect de la programmation des opérations financées.
Cet amendement vise à permettre aux grands établissements patrimoniaux et muséaux, opérateurs du programme 175 Patrimoines, de recourir, de façon encadrée, à des emprunts à maturité longue issus des fonds du Livret A, dès lors qu’ils disposent de niveaux élevés de ressources propres. Il s’agit de leur permettre de poursuivre leurs programmes d’investissement en surmontant le choc budgétaire temporaire de la crise sanitaire.
En effet les grands musées et monuments nationaux autofinancent largement leurs investissements mais la crise sanitaire occasionne des pertes de ressources propres considérables, en raison des mois de fermeture au public, des contraintes de distanciation physique limitant la fréquentation après réouverture et en raison de la crise du tourisme international.
L’effondrement des recettes de billetterie, largement dépendantes des visiteurs internationaux, et les baisses de recettes de concessions et de valorisation des espaces occasionnent, en 2020, des pertes qui dépasseront 300 millions d’euros.
Ces pertes s’élèveront par exemple à 80 millions d’euros pour le Louvre, 60 millions d’euros pour le centre des monuments nationaux, 40 millions d’euros pour le château de Versailles, 20 millions d’euros pour les Musée d’Orsay et de l’Orangerie et 20 millions d’euros pour le Centre Pompidou.
Or ces grands établissements n’ont pas pu réduire leurs charges à due concurrence, faute d’accès au régime d’activité partielle.
Le programme 175 Patrimoines, qui verse à ces établissements des subventions pour charges de service public et quelques dotations d’investissements, ne dispose pas de crédits suffisants pour compenser ces pertes de recettes, et tout redéploiement se ferait aux détriments des crédits de restauration et d’entretien des monuments historiques de l’État, des collectivités ou des propriétaires privés, essentiels à l’attractivité de nos territoires.
Afin de ne pas fragiliser l’entretien des monuments historiques sur les crédits du programme 175 et afin de préserver les programmes d’investissement des grands opérateurs du patrimoine, cet amendement vise à expérimenter un financement par l’emprunt auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations.
L’autorisation d’emprunt serait subordonnée au fait que les établissements disposent, en longue période, de niveaux significatifs de ressources propres qui en garantiront le remboursement.
Ces investissements d’intérêt général devront permettre de répondre à des objectifs d’augmentation de la fréquentation et d’accessibilité au public de ces établissements tout en améliorant la conservation préventive et de la restauration de leurs monuments historiques.
Dans ce but, cet amendement permet, dans le cadre d’une expérimentation d’une durée de 3 ans :
- de déroger à l’interdiction faite aux organismes divers d’administration centrale de contracter un emprunt supérieur à douze mois (article 12 de la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques), interdiction au demeurant déjà assortie de nombreuses exceptions puisque la liste des établissements auxquels elle s’applique est fixée par un arrêté des ministres de l’économie et du budget, modifié à plusieurs reprises ;
- de déroger aux règles d’emploi du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, qui finance aujourd’hui prioritairement le logement social. Or le fonds d’épargne dispose de dépôts considérables, qui dépassent désormais 420 milliards d’euros, accrus par l’épargne contrainte accumulée par les Français pendant le confinement.
En finançant, par des prêts à maturité longue, les investissements des grands opérateurs de notre patrimoine, l’épargne populaire du livret A continuera de remplir sa mission d’intérêt général.
L’épargne des Français disposera ainsi de toutes les garanties de sécurité et de rentabilité, en raison des ressources que procure, sur la durée, l’attractivité internationale de nos plus grands musées et monuments, héritages prestigieux de notre histoire.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.