Publié le 7 septembre 2020 par : Mme Rubin, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, M. Ruffin, Mme Taurine.
Cet amendement a été déclaré irrecevable après diffusion en application de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale.
Par cet amendement, nous souhaitons supprimer l'Agence Nationale de la recherche, l'ANR, et redistribuer les fonds dont elle dispose entre les établissements publics qui pouvaient répondre à ses appels à projets, sous la forme d'une dotation de fonctionnement par an et par personnel titulaire. Le fonctionnement sous forme d'appels à projets organise la concurrence entre établissements et entre équipes de la recherche publique. Il n'a eu de cesse, depuis sa création, d'accroître les disparités entre d’un côté les établissements et unités de recherche d’excellence qui remportent des projets et bénéficient donc de financements, et de l'autre côté des établissements de seconde catégorie qui n'en obtiennent pas et doivent tenter de poursuivre leurs travaux avec des dotations de base insuffisantes pour fonctionner. Ainsi, 80% des appels à projets sont remportés par une vingtaine d'universités. Ce sont les universités les plus prestigieuses, qui accueillent les étudiants issus des classes sociales les plus favorisées, les mêmes établissements qui reçoivent des financements en faisant partie des IDEX (initiatives d'excellence).C'est la consécration d’un système de recherche à deux vitesses basé sur la compétition entre établissements. De plus, ce système de financement de la recherche est particulièrement inéfficace : le coût du temps perdu à chercher des moyens plutôt qu'à faire avancer les connaissances est considérable. Aujourd'hui, si l'on tient compte du temps passé pour monter les projets, les évaluer et assurer leur suivi organisationnel, le coût du total du projet (montage et mise en œuvre) équivaut à près de 50% de son montant total. En 2018, le taux de succès pour les appels à projets était de 16%, cela signifie que 84% des projets ont été déposés en vain avec tout le gâchis de temps et d'énergie que cela suppose. Si l'objectif affiché par le projet de loi est d'augmenter le taux de succès à 30%, cela signifie que 70% des projets présentés par les équipes de recherche française seront toujours refusés ! Les chercheurs doivent consacrer leur temps à leurs travaux scientifiques plutôt qu'à courrir après des financements. Enfin, ce fonctionnement a déjà eu des conséquences désastreuses pour la recherche française, en particulier pendant la crise sanitaire. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) le souligne dans son avis sur le projet de loi : « les connaissances fournies par la recherche scientifique et l'expertise sont en outre indispensables pour éclairer les choix politiques, et donnent les moyens de ne pas reproduire les erreurs du passé. À cet égard, le défaut de financements de projets engagés sur la famille des coronavirus signalés par Bruno Canard, virologue entendu le 27 mai dernier par la section, doit nous interroger sur des pratiques qui compromettent notre capacité à prévenir les risques et à les résoudre. » Loin de tirer les leçons de la crise, le projet de loi poursuit dans la même voie. Le collectif des Sociétés savantes académiques de France craint également que « l'introduction des biais thématiques conduisent les établissements à privilégier les disciplines les plus « rentables ». De plus, il risque d'introduire au sein des laboratoires une course aux contrats préjudiciables à la recherche sur le temps long ». La recherche exploratoire ne peut pas être sacrifiée. Nous demandons donc la suppression de l'ANR et la redistribution de ses fonds sous la forme de crédits récurrents pour les équipes de recherche. Les grands équipements seront quant à eux financés par d'autres programmes.
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