Publié le 13 octobre 2020 par : Mme Fiat, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
À l’article L. 5121‑29 du code de la santé publique, les mots : « et qui ne peut excéder quatre mois de couverture des besoins en médicament » sont remplacés par les mots : « d’au moins quatre mois de couverture des besoins en médicament, exception faite des médicaments dont un tel délai mettrait à mal les garanties de pleine efficacité ».
En 2019, nous comptions plus de 1 200 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur en pénurie ou en rupture d’approvisionnement, contre 800 en 2018 et seulement 44 dix ans plus tôt. Le 14 septembre 2020, la ligue contre le cancer publiait une étude avec un constat particulièrement alarmant en oncologie : 3 / 4 des professionnels de santé sont confrontés à cette problématique et 68% des oncologues médicaux confrontés aux pénuries de médicaments contre le cancer considèrent qu’elles ont un impact sur la vie à 5 ans de leurs patients. L’épidémie de Covid-19 a mis en lumière l’urgence de la situation et les dysfonctionnements structurels majeurs liés notamment à la dérégulation du marché mondial pharmaceutique et la délocalisation en Chine et en Inde des sites de production de médicaments.
La gravité des pénuries est telle que des médicaments d’usage courant sont maintenant concernés. Les conséquences sont dramatiques puisqu’en plus de générer une perte de chance pour les malades, une détérioration de leur état de santé et de la souffrance, elles engagent le pronostic vital d’une partie d’entre eux. « L’article 34 permettra de lutter efficacement contre la rupture de stocks d’un grand nombre de médicaments – difficulté régulièrement évoquée en commission et lors des auditions, à l’égard de laquelle les Français sont de plus en plus vigilants et inquiets. Il s’agit notamment d’obliger les laboratoires à stocker certains médicaments pendant quatre mois. » Voici ce que l’actuel Ministre de la Santé affirmait à l’occasion du dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale dont il était à l’époque rapporteur.
En totale contradiction avec ses paroles, il a pourtant, en tant que Ministre, envisagé que le décret d’application de cette mesure ramènerait ce délai à seulement 2 mois et même 1 mois selon nos dernières informations. L’obligation aux industriels d’un stock de 4 mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur résultait d’une demande de longue date faite par les associations de malades, notamment France Asso Santé. Elle permettait de prévenir les pénuries en se donnant le temps de trouver des alternatives. Ce rétropédalage est gravissime et directement contraire à l’intérêt général. France Asso Santé, le collectif d’association TRT-5 CHV, l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament et de nombreux autres acteurs s’accordent à dire que ce décret ne répond pas à la demande initiale. Les dispositions retenues sont inapplicables et inefficaces.
Les ruptures de médicaments durent en moyenne plus de 14 semaines selon un rapport sénatorial de 2018. Les deux mois du décret ne permettront pas d’assurer un approvisionnement continu par les industriels alors qu’ils y sont tenus conformément au code de la santé publique.
Loin de tirer leçon de la crise de la Covid-19, le gouvernement arbitre en faveur des industries pharmaceutiques et au détriment des patients. Par cet amendement, nous entendons revenir à l’esprit initial de la mesure que nous avons voté ensemble à l’automne dernier.
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