Publié le 10 mai 2021 par : M. Houbron.
« CHAPITRE …
« Dispositions améliorant le régime des nullités de procédure
« Article …
« La section 10 du chapitre Ier du Titre III du Livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifiée :
« I. ‒ Les articles 170 à 173 sont ainsi rédigés :
« Art. 170. ‒ En toute matière, la nullité d’un acte accompli au cours de l’instruction, lors de la procédure qui a précédé l’ouverture de cette dernière, ou, lors de cette ouverture elle-même, ainsi que de toute pièce figurant au dossier de l’information, peut être soulevée dans les conditions suivantes :
« 1° Soit, d’office, par le juge d’instruction ;
« 2° Soit, par des réquisitions du procureur de la République au juge d’instruction ;
« 3° Soit, par une requête au juge d’instruction formulée par les parties ou par le témoin assisté, sous réserve qu’une telle requête ne soit pas irrecevable en vertu des dispositions de l’article 173-1, du premier alinéa de l’article 174 et du IV de l’article 175.
« Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux actes pouvant faire l’objet d’un appel ou d’un recours spécial prévu par la loi, à l'exception des actes pris en application du chapitre IX du titre II du livre II du code de la sécurité intérieure. Les actes d’administration judiciaire, ou, les pièces produites au dossier dont le juge judiciaire n’aurait pas compétence pour apprécier la validité, ne peuvent également être contestés par ce moyen.
« Art. 171. ‒ Le juge d’instruction, dans tous les cas, informe sans délai le procureur de la République, les parties et le témoin assisté de son initiative ou de la réception par lui des réquisitions ou requête évoquées à l’article précédent, et, leur impartit un délai pour formuler leurs observations à cet égard, lequel ne peut être inférieur à dix jours.
« Après expiration de ce délai, il statue par une ordonnance motivée notifiée au procureur de la République, aux parties et au témoin assisté, dans laquelle après avoir apprécié, s’il y a lieu, la recevabilité de la requête formulée, il se prononce sur l’existence ou non d’une cause de nullité de l’acte ou de la pièce en débat. S’il constate une cause de nullité, il statue sur les conséquences à en tirer.
« Art. 172. ‒ L’ordonnance visée à l’article précédent peut être déférée par la voie de l’appel à la chambre de l’instruction par le procureur de la République, les parties ou le témoin assisté dans le délai de cinq jours à compter de sa notification. En l’absence d’appel, elle devient définitive et emporte tous ses effets. La nullité, si elle n’a pas été constatée par l’ordonnance, ne peut plus être soulevée pour la même cause.
« L’appel doit, à peine d'irrecevabilité, faire l'objet d'une déclaration au greffe de la chambre de l'instruction. Cette déclaration est constatée et datée par le greffier qui la signe ainsi que le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier. Lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffe peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Lorsque la personne mise en examen est détenue, la requête peut également être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement. Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffe de la chambre de l'instruction.
« Dans les huit jours de la réception du dossier par le greffe de la chambre de l'instruction, le président peut, par ordonnance non susceptible de recours, constater que l’appel est irrecevable en application des dispositions de l’article 170, du précédent alinéa du présent article, de l'article 173-1, du premier alinéa de l'article 174 ou du IV de l'article 175 ; il peut également constater l'irrecevabilité de l’appel si celui-ci n'est pas motivé. S'il constate l'irrecevabilité de l’appel, le président de la chambre de l'instruction ordonne que le dossier de l'information soit renvoyé au juge d'instruction ; dans les autres cas, il le transmet au procureur général qui procède ainsi qu'il est dit aux articles 194 et suivants.
« Lorsque la solution lui paraît s'imposer de façon manifeste, le président de la chambre de l'instruction statue sur ce recours, conformément aux dispositions de l'article 199, sans la présence des deux conseillers de la chambre.
« Si la décision qui s'impose consiste dans l'annulation des actes ou pièces de la procédure, elle peut, en cas d'accord du ministère public, être prise par ordonnance sans qu'il soit procédé à l'audience prévue au même article 199.
« L'auteur du recours peut cependant demander que ce dernier soit examiné par la chambre de l'instruction.
« Art. 173. ‒ Pour l’application des articles 170 à 172, l’appréciation d’une cause de nullité, des conséquences à en tirer, et, de la possibilité de la couvrir, obéit aux règles fixées à l’article 802.
« II. ‒ L’article 174 est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, la référence: « 173 » est remplacée par la référence : « 172 ».
« 2° Les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par alinéa ainsi rédigé :
« La chambre de l’instruction se prononce conformément aux dispositions de l’article 802 et procède comme il est dit au troisième alinéa de l’article 206. ».
« III. ‒ L’article 174-1 est ainsi modifié :
« Les mots : « la chambre de l’instruction annule » sont remplacés par les mots : « est annulée ».
« Article …
« Le deuxième alinéa de l’article 206 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Quel que soit le motif de sa saisine, si elle découvre une cause de nullité, elle se prononce conformément aux dispositions de l’article 802.»
« Article …
« À la fin de l’article 595 du code de procédure pénale, les mots : « , et sans préjudice du droit qui appartient à la Cour de cassation de relever tous moyens d'office. » sont supprimés.
« Article …
« L’article 802 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 802. ‒ I. ‒ Sans préjudice des sanctions disciplinaires ou pénales qui peuvent frapper les magistrats ou fonctionnaires qui n’auraient pas respecté scrupuleusement toutes les formes imposées par le présent code, la nullité d’un acte accompli en application des dispositions de ce dernier ne peut être prononcée que si les deux conditions suivantes sont réunies :
« 1° La méconnaissance des conditions essentielles à la validité de cet acte au regard des exigences imposées par la loi en ce qui concerne :
« a) Soit, l’organisation et la compétence des juridictions ainsi que les principales modalités de leur saisine, du déroulement de leurs débats et de la prise de leurs décisions ;
« b) Soit, les principales garanties dont bénéficient les personnes pour la protection de leur liberté, de leur sûreté ou de leur présomption d’innocence lors de leur comparution devant un agent ou un officier de police judiciaire, ou encore, une autre autorité chargé de fonctions de police judiciaire ou disposant de pouvoirs de police judiciaire ainsi que devant un magistrat, pour le recueil de leurs déclarations, ou, le recours à une mesure de contrainte, de privation ou restriction de leurs droits et libertés, d’atteinte à leur vie privée, leur domicile ou résidence, comme à leur propriété ;
« c) Soit, les principales garanties visant à assurer la sincérité et la qualité du recueil des éléments de preuve ainsi que celles encadrant le recours à la compétence d’un tiers ;
« d) Soit, les principales garanties d’un plein et libre exercice des droits de la défense, et, celles du respect du contradictoire ;
« e) Soit, les principales garanties de la protection du secret professionnel, de celui des communications, ou, de la confidentialité d’informations prévue par la loi ;
« f) Soit, les principales garanties particulières dont bénéficient en vertu de la loi certaines personnes en raison de leurs fonctions.
« 2° Des conséquences effectives suffisamment graves, dès lors que cette méconnaissance aura eu pour effet direct et certain :
« a) Soit, d’altérer sensiblement le cours de la procédure, en faisant obstacle à la manifestation de la vérité ou en la retardant à l’excès, ou encore, en compromettant de manière définitive et irréparable le recueil ou la discussion d’éléments de preuve ;
« b) Soit, de léser substantiellement la personne qui invoque la nullité, en ayant été, pour elle, la cause directe, nécessaire et exclusive d’une perte de chance définitive et irréparable de pouvoir faire valoir utilement ses moyens, ou, en ayant fait subir à ses droits, libertés ou propriété une atteinte anormale, injustifiée ou excessive.
« La nullité de toute pièce figurant au dossier d’une procédure conduite en application du présent code peut être prononcée pour les motifs mentionnés au 1° qui précède ainsi que pour tout motif tiré d’une disposition d’ordre public résultant de la loi et du règlement prescrite en dehors du présent code, si, dans tous les cas, la condition prévue au 2° qui précède est également satisfaite.
« Dans tous les cas, la juridiction qui prononce la nullité doit expressément énoncer les motifs de droit et de fait, en considération des éléments de l’espèce, qui fondent sa décision. »
« II. ‒ Avant prononcé d’une annulation, l’irrégularité potentielle d’un acte peut être couverte dans les conditions suivantes :
« 1° Au cours de l’instruction, un acte du juge d’instruction ou d’une autorité commise par lui ou le substituant dans l’exercice de ses compétences dont la nullité est de nature à être soulevée peut être recommencé dans des conditions régulières et similaires à l’acte initial, quand cela est encore possible, en se donnant expressément pour objet de couvrir la cause de nullité potentielle ; dans ce cas, l’action en nullité est éteinte, sans préjudice de la possibilité, pour ce nouvel acte, de faire lui-même l’objet d’une telle action pour des motifs qui lui soient propres.
« 2° En toute matière, si un acte ou une pièce, par suite d’une erreur matérielle ou pour toute autre raison exclusive de toute volonté délibérée d’altération de la vérité de la part de son auteur, comporte des énonciations inexactes, équivoques ou incertaines, ou encore, des lacunes, ou, est manquant au dossier de la procédure, exposant ainsi cette dernière au risque d’une annulation, il est possible à toute personne bien fondée à apporter son témoignage sur la réalité des faits, y compris l’auteur de l’acte ou de la pièce, de déposer au dossier de la procédure une attestation sous serment, accompagnée, le cas échéant, de toutes justifications utiles, pour rétablir la vérité des faits, en engageant expressément sa responsabilité pénale ou disciplinaire en cas de fausse déclaration. L’autorité chargée, le cas échéant, de se prononcer sur la cause de nullité peut aussi, dans le même cas, entendre sous serment toute personne pouvant apporter un témoignage utile à cet égard. Ces déclarations, si elles établissent sans équivoque que la cause de nullité n’est pas fondée, régularisent l’acte ou la pièce en question, auxquels elles sont, dès lors, rattachées dans le dossier de la procédure, avec, s’il y a lieu, la décision de l’autorité qui aura statué en la matière.
« 3° A tout moment d’une procédure, une partie ou un témoin assisté peut expressément renoncer à se prévaloir d’une cause de nullité, en présence de son conseil ou celui-ci dûment appelé. Ils ne sont, dès lors, plus recevables à invoquer la même cause, et, si cette cause n’a été soulevée que par eux, il n’y a plus lieu de statuer en la matière et la procédure reprend son cours.
« Ne peuvent être couvertes les causes de nullité suivantes :
« a) L’incompétence matérielle de l’auteur de l’acte contesté, en dépit de toute régularisation formelle de l’instrument qui la constaterait ou la mentionnerait ;
« b) La méconnaissance des règles de fond relatives à toute cause d’extinction de l’action publique ;
« c) Toute cause résultant d’une fraude, d’un abus ou détournement de pouvoir commis à dessein par l’auteur de l’acte.
« III. ‒ L’autorité qui se prononce sur la nullité d’un acte ou d’une pièce règle les effets de sa décision ; elle peut ainsi :
« 1° Limiter l’annulation à l’acte ou la pièce en question, ou, l’étendre à d’autres actes ou pièces au dossier de la procédure si l’acte ou la pièce ayant fait l’objet de cette annulation apparaît comme le support direct, nécessaire et exclusif de ces autres actes ou pièces.
« 2° Dire que l’acte ou la pièce en question seront retirés du dossier de la procédure et classés au greffe de la juridiction, sauf dans les cas suivants :
« a)Si l’annulation n’affecte qu’une partie de l’acte ou de la pièce, cette partie sera cancellée, après établissement d’une copie certifiée conforme à l’original, laquelle sera classée au greffe de la juridiction.
« b) Si, à titre exceptionnel, il apparaît utile, pour l’intelligence des faits et la manifestation de la vérité, de conserver tout ou partie de l’acte ou de la pièce. Dans ce cas, après, le cas échéant, cancellation partielle opérée dans les conditions qui précèdent, l’acte ou la pièce seront maintenus au dossier de la procédure, en étant rattachés à une copie conforme de la décision d’annulation.
« Les informations tirées d’actes ou pièces ou parties d’actes ou de pièces ayant été ainsi écartés du dossier de la procédure, ne peuvent être évoquées contre une partie, sous peine de poursuites disciplinaires contre celui qui violerait cette interdiction. Les actes ou pièces faisant état de ces informations peuvent être frappés d’annulation.
« Article …
« Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa de l’article 80-1-1, la référence : « 173 » est remplacée par la référence : « 170 » ;
« 2° Au premier alinéa de l’article 89-1, les mots : « et 173, troisième alinéa, » sont remplacés par les mots : « et 170, » ;
« 3° Au dernier alinéa de l’article 113-3, la référence : « 173 » est remplacée par la référence : « 170 » ;
« 4° Au huitième alinéa de l’article 116, la référence : « 173 » est remplacée par la référence : « 170 » ;
« 5° Au sixième alinéa de l’article 175, la référence : « troisième alinéa de l’article 173 » est remplacé par la référence : « quatrième alinéa de l’article 170 » ;
« 6° Au second alinéa de l’article 187, la référence : « 173 » est remplacée par la référence :« 172 » ;
« 7° Au second alinéa de l’article 194, la référence : « 173 » est remplacée par la référence : « 172 » ;
« 8° Au premier alinéa de l’article 218, la référence : « 171, » est supprimée ;
« 9° Le premier alinéa de l’article 221-2 est ainsi rédigé :
« Lorsqu'un délai de quatre mois s'est écoulé depuis la date du dernier acte d'instruction, les parties peuvent saisir la chambre de l'instruction par requête motivée, dont elles adressent copie au juge d'instruction qui transmet le dossier de la procédure au président de la chambre de l'instruction. La requête doit, à peine d'irrecevabilité, faire l'objet d'une déclaration au greffe de la chambre de l'instruction. Elle est constatée et datée par le greffier qui la signe ainsi que le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier. Lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffe peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Lorsque la personne mise en examen est détenue, la requête peut également être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée et datée par le chef de l'établissement pénitentiaire qui la signe, ainsi que le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement. Ce document est adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffe de la chambre de l'instruction » ;
« 10° À la fin du dernier alinéa de l’article 308, les mots : « constitue une cause de cassation de l'arrêt de condamnation s'il est établi qu'il a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne condamnée » sont remplacés par les mots : « peut être sanctionné par la nullité si les conditions prévues à l’article 802 en sont réunies. » ;
« 11° À l’article 565 du code de procédure pénale, les mots : « lorsqu’elle a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne qu’il concerne, » sont remplacés par les mots : « si les conditions prévues à l’article 802 en sont réunies, » ;
« 12° Au dernier alinéa de l’article 571, la référence : « 173 » est remplacée par la référence : « 172 » ;
« 13° À l’article 625, le mot : « substantielles » est supprimé ;
« 14° À la dernière phrase du premier alinéa de l’article 695-9-22, les mots : « de l’article 173 » sont remplacés par les mots : « du troisième alinéa de l’article 172 et du premier alinéa de l’article 221-2 ».
L’annulation d’un acte de procédure pénale est toujours une décision grave, de nature à saper la confiance dans la Justice et dans ses différents acteurs, avec des conséquences pratiques, qui peuvent aller jusqu’à l’annihilation de pans entiers d’un dossier, voire de sa totalité –de manière, parfois, irréparable.
De ce fait, elle peut être une source sérieuse de démoralisation et démobilisation pour les enquêteurs et magistrats qui peuvent voir ainsi leurs efforts anéantis, et, le doute jeté sur leur compétence. C’est aussi, pour les victimes, une cause d’incompréhension, voire de scandale, quand de tels « accidents » du parcours judiciaire viennent retarder, perturber, voire empêcher la manifestation de la vérité et compromettre leurs intérêts de parties civiles.
Or, la cause de la nullité peut apparaître, parfois, passablement dérisoire par rapport à ses lourdes conséquences.
Le régime des nullités doit donc s’efforcer de concilier deux impératifs : d’abord, éviter, par un trop grand laxisme, que les acteurs de la procédure se sentent par trop libres de s’affranchir des règles qu’elle leur impose –ce qui serait ouvrir la porte à toutes sortes de dévoiements ; mais, d’un autre côté, ne pas les exposer trop facilement au risque de l’annulation –alors que l’évolution contemporaine du droit procédural a multiplié des exigences et formalités qui peuvent être autant d’embûches et chausse-trapes pour les enquêteurs et les magistrats.
De fait, aujourd’hui, au terme d’une évolution, législative et jurisprudentielle, qui n’a pas toujours été sans à-coups, ce régime donne le sentiment d’une casuistique complexe, qui ne satisfait pas pleinement à ce qui devrait, par définition, être ses deux exigences premières : la lisibilité, et, la prévisibilité.
Le pivot du régime, en effet, est la distinction posée par l’article 171 du code de procédure pénale entre les « formalités substantielles » et les autres, la méconnaissance des premières entraînant seule la nullité, mais encore, à la condition que cette méconnaissance ait « porté atteinte aux intérêts » de la partie concernée.
Or, la loi n’a en rien défini ces notions, qui se trouvent donc abandonnées aux flottements et incertitudes de la jurisprudence, ce qui est un facteur d’instabilité du droit et d’insécurité pour ceux qui ont à l’appliquer.
D’un autre côté, malgré les améliorations qui ont pu être apportées par les derniers textes intervenus en la matière, le traitement procédural des nullités reste lourd.
Enfin, les effets de la nullité, quand elle est encourue, sont parfois trop brutaux.
Il y a donc lieu, par un dispositif d’ensemble cohérent et pragmatique de réécrire les textes concernés, avec un triple objectif :
1- Limiter l’exposition au risque d’annulation
L’institution de moments-clés et de délais à peine de forclusion pour soulever les nullités et en permettre la purge, à différents étapes des procédures, ont été des réformes heureuses, qu’il convient de conserver : toutefois, pour une plus grande efficacité et célérité dans le traitement d’un problème de nullité, il convient de compléter ces dispositions, aux différents stades de procédure :
Au stade de l’instruction :
En l’état actuel du droit, si une cause de nullité est soulevée lors de l’instruction (par une partie, un témoin assisté, le parquet ou le juge lui-même), il y a lieu d’en saisir la chambre de l’instruction.
Or, dans nombre de cas, la cause de nullité ne soulève pas de difficulté sérieuse et la solution s’impose sans grande contestation ; si bien que ce détour par la juridiction d’appel, avec la lourdeur qu’il implique, et, pendant ce temps, le facteur d’incertitude qu’il représente pour le dossier, peut être évité. .
Il est donc prévu que le juge d’instruction, juridiction de premier degré en matière d’instruction, et, premier responsable, par définition, du contenu et de la qualité du dossier qu’il constitue, statue lui-même, après un délai donné à tous les acteurs de la procédure pour formuler leurs observations, par une ordonnance qui, comme bien d’autres qu’il est amené à rendre, pourra, en cas de contestation, être portée devant la chambre de l’instruction, sous le contrôle, le cas échéant, de la Cour de cassation pour ce qui est de la décision rendue par cette dernière.
Il ne s’agit là que d’une procédure tout à fait analogue à celle qui existe devant les juridictions de jugement, qui statuent elles-mêmes sur les exceptions de nullité qui leur sont soumises relativement à la procédure suivie auparavant -quand elles sont recevables-, à charge de recours. Et, s’agissant des propres actes du juge d’instruction, il est d’autant plus logique qu’il puisse, en somme, réparer ses erreurs, que l’on est encore dans une phase préparatoire, et, que, de toute façon, sa décision, si elle ne satisfait pas un autre acteur de la procédure, pourra être contestée en appel devant la chambre de l’instruction.
Au stade de la chambre de l’instruction
En l’état du droit, la chambre, quand elle est saisie en matière de détention provisoire, n’a pas le pouvoir de statuer sur une cause de nullité étrangère à la matière.
Cette restriction peut apparaître choquante, et, de nature à retarder la révélation et la sanction d’une cause de nullité : elle doit donc être levée, et, la chambre doit pouvoir statuer en la matière quel que soit le motif de sa saisine.
Au stade de la Cour de Cassation
La Cour a le pouvoir de soulever d’office une cause de nullité.
Mais, si cette dernière n’a pas été soulevée jusque-là, c’est qu’il y a eu consensus tacite pour le faire et qu’elle n’a lésé aucune partie ; ou bien qu’elle était fort peu évidente.
Il y a donc peu d’intérêt à maintenir cette cause d’incertitude dans les procédures –qui, au surplus, risque de se manifester tardivement : aussi doit-elle être supprimée. Dans le cas où il y aurait néanmoins un intérêt majeur à faire constater une nullité, il ne sera que de recourir au pourvoi dans l’intérêt de la loi –lequel n’entraîne pas remise en cause de la procédure elle-même.
2- Redéfinir les critères de l’acte annulable
Pour éviter les incertitudes liées au manque de précision des formules actuelles des textes, il convient de mieux caractériser les formalités dont la méconnaissance est de nature à entraîner la nullité, avec un double critère, cumulatif, en encadrant mieux l’appréciation du juge :
Un critère de gravité suffisante
Il faut beaucoup mieux caractériser la gravité de la méconnaissance des règles, au regard de sa portée effective ; ce qu’il appartient, nécessairement, au juge d’apprécier, en fonction des données concrètes et singulières d’une situation de fait, mais, désormais, à l’intérieur d’un cadre mieux défini que celui, actuel, des simples « intérêts » de la partie concernée, trop « subjectif », alors que doivent prévaloir des intérêts plus « objectifs », comme l’altération du cours de la procédure, ou, l’existence d’un préjudice :
- L’altération du cours de la procédure : l’objectif premier et la raison d’être de la procédure pénale est d’encadrer les conditions par lesquelles se forme une vérité judiciaire quant à la culpabilité ou l’innocence d’une personne relativement à la commission d’une infraction ; dès lors, il s’agira de se demander si la méconnaissance des règles a pu, sur le fond et par rapport à cet objectif, perturber la recherche des éléments à charge ou à décharge, au point de jeter le doute sur leur existence même, ou, à tout le moins, sur leur contenu et leur signification ; ce qui n’a pas, en soi, de lien nécessaire avec la gravité intrinsèque de l’irrégularité.
- La lésion préjudiciable des droits d’une partie : elle ne doit pas être présumée, comme il arrive aujourd’hui en jurisprudence, sans la démonstration, in concreto, que l’irrégularité a provoqué le perte d’une chance pour cette partie, de nature à ne pouvoir être autrement réparée que par une telle annulation de l’acte ; c’est là un critère à la fois logique et opérationnel, bien connu dans d’autres domaines du droit où l’appréciation y est ni plus ni moins délicate.
3- Eviter l’annihilation systématique de l’acte annulable
Le droit en vigueur, quand la nullité est encourue, est très restrictif, aussi bien pour ce qui est de la possibilité de régulariser la procédure, que pour ce qui est des conséquences de l’ annulation ; il convient, dans le même esprit de pragmatisme, et, dans l’optique de limiter cette sanction aux cas où elle est le plus justifiée, de prévoir ainsi, d’une part, un élargissement des moyens de régularisation, et, d’autre part, une modulation des effets de l’annulation :
Permettre plus largement de réparer l’acte annulable
En dehors de la possibilité matérielle de faire un nouvel acte pour tenter de substituer en tout ou partie celui qui a été sanctionné –avec, bien souvent, d’évidentes limites pratiques-, il n’existe guère qu’une possibilité de couvrir la nullité quand elle est encourue, réservée à la seule partie concernée, qui peut renoncer à se prévaloir de cette nullité, ce qui est par trop restrictif ; il faut donc ouvrir cette faculté à d’autres acteurs de la procédure, moyennant certaines conditions et exceptions :
- Ouvrir la régularisation aux magistrats, à leurs auxiliaires et aux enquêteurs : bien des irrégularités ne le sont que d’apparence, par suite d’une problème matériel ou d’une circonstance inopportune (comme une signature omise sur un acte, alors qu’il n’y a pas de doute sur la réalité et l’authenticité de ce dernier) ; dans ce cas, il est ainsi prévu que l’acteur concerné puisse verser au dossier, à tout moment avant jugement définitif d’annulation, une attestation, signée de lui, et, le cas échéant de tout témoin pouvant confirmer ses affirmations, ou, faire une déclaration reçue par un magistrat, relativement à l’authenticité de l’acte et de son contenu, sous sa responsabilité (en l’occurrence pénale et criminelle, s’agissant, en cas de mensonge avéré, de faux en écritures publiques), lesquelles feraient foi jusqu’à inscription de faux et interdiraient, sauf établissement définitif par la Justice d’un tel faux, toute action en nullité. De même, l’action en nullité doit pouvoir être paralysée, dans le cadre de l’instruction, dans le cas où l’acte annulable peut être refait à l’identique, en se donnant expressément ce but, dans des conditions régulières ; le nouvel acte venant alors en complément du précédent.
- Les conditions et exceptions à la couverture d’une irrégularité : il est prévu des cas où une telle couverture ne sera pas possible, pour motif prioritaire d’ordre public (incompétence matérielle radicale de l’auteur de l’acte, ou, cause d’extinction de l’action publique) ou, tenant au contexte : restriction au détriment de l’auteur de l’acte en cas de fraude de sa part (déloyauté dans la conduite de la procédure, abus de pouvoir caractérisé ou volonté avérée de faire échec aux droits des parties).
Moduler les effets de la nullité
Le principe actuel est celui de l’annihilation de l’acte, à la fois physique (retiré du dossier ou cancellé en partie), et, juridique (son contenu est censé avoir disparu et ne peut plus être évoqué –et, partant, tous les actes qui ont pu logiquement en découler suivent son sort). Tout en en conservant le principe, il faut, par pragmatisme, lui apporter des tempéraments, en intensité, et, en étendue :
- Permettre une annulation sans retrait du dossier : s’il est satisfaisant pour le principe, qu’un acte soit stigmatisé comme nul, il ne doit pas s’ensuivre automatiquement qu’il doive complètement disparaître, car il peut y avoir un intérêt à le maintenir, en tout ou en partie, au dossier (il peut comporter énonciation de faits avérés et non contestés, ou, tellement notoires que leur occultation serait artificielle) ; dès lors, la juridiction qui prononce la nullité pourra faire exception à l’annihilation de l’acte annulé, pour des motifs légitimes, et, en conséquence, décider qu’il sera, avec la mention de l’annulation, ou, la copie du jugement annexé, conservé au dossier.
- Limiter la cascade des annulations : en l’état du droit, la juridiction a déjà le choix de prononcer l’annulation du seul acte visé, ou, en sus, de ceux qui sont dans sa dépendance logique ; pour limiter cette situation au strict nécessaire, il est prévu la possibilité pour le juge de restreindre la « chaîne » des annulations, en l’incitant à avoir une approche restrictive et exigeante du lien de dépendance.
Le présent amendement, par un dispositif cohérent, ne vise, en définitive, qu’à trouver un équilibre entre, d’une part, un excès de rigorisme juridique, qui ne servirait pas la cause du droit en croyant la défendre, et, d’autre part, un excès de laxisme, qui desservirait celle de la justice en prétendant la soutenir : ce sera, dès lors, une contribution notable à la restauration de la confiance dans la justice.
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