Publié le 27 novembre 2017 par : Mme Obono, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 521‑1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« En cas de résidence alternée de l’enfant au domicile de chacun des parents, telle que prévue à l’article 373‑2‑9 du code civil, les parents désignent l’allocataire. Cependant, la charge de l’enfant pour le calcul des allocations familiales est partagée entre les deux parents selon un ratio qui peut être fixé soit par leur demande conjointe dans la convention mentionnée à l’article 373‑2‑7 du code civil ou, en cas de désaccord entre les parents, par le juge saisi sur le fondement de l’article 373‑2‑8 du code civil. La convention homologuée au titre de l’article 373‑2‑7 du code civil et la décision du juge au titre de l’article 373‑2‑9 du code civil sont transmises à la caisse d’allocation familiales compétente.”
II. – Après le c du I de l’article 194 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les enfants sont à la charge de chacun des parents selon un ratio qui a été fixé soit par la demande conjointe des parents dans la convention mentionnée à l’article 373‑2‑7 du code civil, soit en cas de désaccord entre eux, par le juge saisi sur le fondement de l’article 373‑2‑8 du code civil, les droits à majoration mentionnés aux a, b et c du présent I sont multipliés par ce même ratio. »
III. – Les dispositions du I et du II entrent en vigueur le lendemain de la promulgation de la présente loi.
Cette proposition de loi de la majorité LREM / MODEM pose de réelles difficultés en termes de respect de l’égalité femmes-hommes et d’attention portée aux situations de précarité de parents isolés avec enfant(s) - qui sont bien souvent des femmes.
En effet, selon les études disponibles, à savoir de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du Ministère des Solidarités et de la Santé) et de l’ONPES (Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale), les parents isolés en situation de précarité sont à 98 % des femmes (http ://www.onpes.gouv.fr/IMG/pdf/Tomasini.pdf et http ://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/er112.pdf pour des données plus anciennes).
Nous proposons ici, par cet amendement de repli face aux conséquences dévastatrices qu’auraient l’adoption de cette proposition de loi. Nous souhaitons ici préserver et protéger, en faisant que l’instauration du principe généralisé d’une résidence alternée n’ait dans les faits aucune influence, ne lèse en aucun cas le parent qui assure la charge matérielle principale effective du ou des enfants. Ainsi, nous proposons de modifier les dispositions relatives aux allocations familiales ainsi qu’à la demi-part fiscale de l’impôt sur le revenu pour que celles-ci reviennent précisément de manière proportionnée aux parents selon la réalité et le degré de la prise en charge matérielle de l’enfant ou des enfants.
Dans le détail :
- Pour les allocations familiales : dans sa rédaction actuelle, l’article L. 521‑2 du code de la sécurité sociale précise qu’en cas de résidence alternée mise en œuvre de manière effective, les parents désignent en principe l’allocataire. Toutefois, les allocations familiales peuvent cependant être partagées en deux parts égales soit “sur demande conjointe des parents”, soit “en cas de désaccord sur la désignation de l’allocataire”.
=> Nous proposons de modifier le droit existant tout d’abord en gardant le principe que les parents peuvent désigner un allocataire unique.
=> Toutefois, si un des parents ou les parents sont en désaccord sur la désignation d’un allocataire unique, deux possibilités : 1) ils peuvent sur accord conjoint décider une répartition selon un ratio qui reflète la prise en charge matérielle réelle par chacun des parents, ce qui induit une modification de leur convention au sens de l’article 373‑2‑7 du code civil, et nécessite donc une nouvelle homologation devant le juge 2) en cas de désaccord sur le ratio, l’un des parents pourra saisir le juge aux affaires familiales sur le fondement de l’article 373‑2‑8 du code civil, qui désignera un allocataire unique ou un ratio retenu pour la répartition de l’allocation.
=> Ce ratio retenu sera ensuite transmis à la caisse d’allocations familiales compétente.
- Pour les parts fiscales au titre de l’impôt sur le revenu :
=> D’un point de vue fiscal, le I de l’article 194 du code général des impôts prévoit qu’ “en cas de résidence alternée au domicile de chacun des parents et sauf disposition contraire dans la convention homologuée par le juge, la décision judiciaire ou, le cas échéant, l’accord entre les parents, les enfants mineurs sont réputés être à la charge égale de l’un et de l’autre parent. Cette présomption peut être écartée s’il est justifié que l’un d’entre eux assume la charge principale des enfants”. En conséquence, lorsque les enfants sont réputés être à la charge égale de chacun des parents, la majoration du quotient familial est égale à la moitié de celle qui serait attribuée en cas de résidence exclusive, assurant ainsi un partage égal entre les deux parents)
Le partage de la majoration de part implique aussi celui des réductions et crédits d’impôt prévus pour les frais de garde des enfants et de scolarité des enfants scolarisés dans l’enseignement supérieur et secondaire.
=> Afin de lutter contre ces effets distorsifs, il est proposé que, en cas de charge matérielle non égale ou non unique, un ratio soit déterminé soit par les parents dans une convention homologuée par le juge aux affaires familiales ou par une décision de ce même juge (373‑2‑7 du code civil et 373‑2‑8 du code civil).
Nos inquiétudes et points d’interrogation étaient déjà partagées par la délégation aux droits des femmes, qui avait notamment précisé dans son rapport sur la proposition de loi de 2014 qu’il était nécessaire que les prestations sociales et avantages fiscaux puis rester pour leur part intégralement attribués au parent ayant la charge matérielle principale de l’enfant.
La recommandation n°3 de ce rapport était : “ de veiller à ce que les prestations sociales et avantages fiscaux puissent rester attribués au parent ayant la charge matérielle principale de l’enfant, en clarifiant en ce sens l’article 7 de la proposition de loi.”
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