Publié le 4 juin 2021 par : M. Coquerel, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
I. – L’autorité administrative conditionne les soutiens financiers de l’État aux sociétés définies aux articles L. 225‑102‑4 et L. 225‑102‑5 du code du commerce à la publication d’un plan de vigilance conforme à l’article L. 225‑102‑4.
II. – Lorsqu’une entreprise bénéficiaire ne satisfait pas aux obligations prévues au I dans un délai de trois mois à compter de l’adoption de cette loi, l’autorité administrative impose le remboursement des aides perçues majorées d’une amende de 10 %.
III. – L’autorité administrative restreint de façon permanente l’utilisation du mécanisme de règlement des différends entre des investisseurs et l’État sous toutes ses formes au titre des plaintes qui, selon l’État incriminé, se rapportent aux mesures liées à la crise de la covid-19, notamment :
1° Imposer de façon permanente une amende équivalente à 100 % de la somme perçue pour toute société établie sur le sol français et ayant bénéficié du soutien financier de l’État qui aurait eu recours, directement ou par une de ses filiales dont le siège social est fixé sur le territoire français ou à l’étranger, qu’elle contrôle au sens du II de l’article L. 233‑16 du code de commerce, directement ou indirectement, à un mécanisme de règlement des différends entre des investisseurs et l’État qui, selon l’État incriminé, se rapporte à des mesures liées à la crise de la covid-19 ;
2° Intégrer une clause générale d’interprétation dans tous ses accords de commerce et d’investissement en vigueur spécifiant que les mesures sanitaires, sociales, fiscales et économiques prises en réponse à une crise due à une épidémie ou à une pandémie ne peuvent pas constituer des expropriations indirectes ou une violation de la clause de traitement juste et équitable ;
3° Suspendre tous les litiges en matière de règlement des différends entre des investisseurs et l’État concernant les action contre le Gouvernement en 2021 et 2022 pendant qu’il lutte contre la crise de la covid-19 et que ses capacités sont concentrées sur la réponse à la pandémie, et s’assurer par voie diplomatique de l’application aux entreprises domiciliées en France parties à des procédures en cours de règlement des différends entre des investisseurs et l’État et ayant bénéficié du soutien financier de l’État. En cas de non-respect de cette suspension des procédures par une entreprise française, une pénalité de 10 % du chiffre d’affaires annuel s’applique ;
4° Suspendre pour l’année 2021 et 2022 tout versement de fonds public par tout État en vertu des indemnisations liées à des procédures de règlement des différends entre des investisseurs et un État à des sociétés domiciliées en France et qui ont bénéficié du soutien financier de l’État. En cas de non-respect de cette suspension du versement des indemnisations au profit d’une entreprise française, une pénalité de 10 % du chiffre d’affaires annuel s’applique.
IV. – L’autorité administrative s’assure que les sociétés définies aux articles L. 225‑102‑4 et L. 225‑102‑5 du code de commerce et bénéficiaires des aides d’État respectent les contrats en vigueur auprès de leurs fournisseurs et sous-traitants avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie. Tout contrat en vigueur non effectué ou révoqué en raison des mesures sanitaires et économiques prises par les donneurs d’ordre dans le contexte de la crise du covid-19 doit être honoré à hauteur de toutes les sommes déjà engagées et de tout le travail déjà fourni par ces fournisseurs et sous-traitants. Lorsqu’une entreprise bénéficiaire ne satisfait pas aux obligations prévues au I dans un délai de trois mois à compter de l’adoption de cette loi, tout fournisseur ou sous-traitant lésé peut fournir à l’autorité administrative les factures et fiches de paie liées à ce contrat. L’autorité administrative procède au remboursement des frais engagés par les plaignants dans un délai d’un mois, avant d’engager une procédure de recouvrement auprès des entreprises incriminées, assorti d’une amende équivalent à 100 % des sommes remboursées.
V. – L’autorité administrative s’assure que les sociétés ont bien honoré leur responsabilité sociale vis-à-vis des personnes travaillant auprès de leurs fournisseurs et sous-traitants avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie.
1° Sont concernées les sociétés définies aux articles L. 225‑102‑4 et L. 225‑102‑5 du code de commerce émettrices de dividendes, bonus ou options sur titre en 2021 et 2022 ainsi que les société bénéficiaires des aides de l’État ;
2° Les fournisseurs ou sous-traitants concerné qui verraient leurs commandes diminuer peuvent faire appel à la société mère ou à l’entreprise donneuse d’ordre pour solliciter des avances de trésorerie destinées au versement d’un salaire vital pour les personnes qui perdent tout ou partie de leur salaire en raison de cette perte d’activité, et qui ne peuvent bénéficier d’une protection sociale publique à hauteur d’un salaire vital. Dès lors que celle-ci répond aux critères mentionnés à l’article I, toute société sollicitée a l’obligation d’y répondre favorablement, à hauteur des dividendes, bonus et stock-options versés en 2021 et 2022.
3° Lorsqu’une société ne satisfait pas aux obligations prévues au I et au II dans un délai d’un mois à compter de l’adoption de cette loi, le fournisseur ou le sous-traitant peut fournir à l’autorité administrative sa demande d’avance de trésorerie, assortie des fiches de paie et identité des personnes à qui sont destinés le versement des salaires. L’autorité administrative verse ces avances de trésorerie dans un délai d’un mois, avant d’engager une procédure de recouvrement auprès des entreprises incriminées, assortie d’une amende équivalent à 100 % des sommes remboursées.
VI. – Les soutiens financiers de l’État sont :
1° La prise en charge du dispositif exceptionnel de chômage partiel à la suite de la crise sanitaire tel que défini par le programme 360 « Plan d’urgence face à la crise sanitaire » ;
2° Le fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire tel que défini par le même programme ;
3° Les participations financières de l’État par l’intermédiaire de l’Agence des participations de l’État ;
4° Les subventions publiques versées au titre des crédits ouverts par la loi de finances pour 2021 ;
5° Les garanties publiques pour le commerce extérieur prévues au chapitre II du titre III du livre IV du code des assurances ;
6° Le crédit d’impôt mentionné à l’article 244 quater B du code général des impôts.
Par cet amendement, nous reprenons les propositions défendues par l’association CCFD- Terre Solidaire, visant à conditionner le soutien financier de l’État au respect par les entreprises bénéficiaires, de garanties en matière de respect des droits humains et de la démocratie.
Nous proposons tout d’abord que tout soutien financier soit conditionné au respect de la loi sur le devoir de vigilance, imposant la publication et la mise en œuvre d’un plan de vigilance contre les violations des droits humains et les atteintes à l’environnement. Sur les 237 entreprises concernées par cette loi, 59 sociétés n’avaient pas publié de plan de vigilance, comme le révèle le recensement réalisé par les associations CCFD-Terre Solidaire et Sherpa en juin 2019.
Nous formulons également une demande de moratoire sur les procédures d’arbitrage entre investisseurs et États (ISDS), pour les entreprises ayant bénéficié de concours financier de l’État. En effet, il convient de s’opposer fermement à ces attaques qui contreviennent aux fondements démocratiques de nos sociétés, alors que certains cabinets d’avocats d’affaires suggèrent déjà aux entreprises multinationales d’attaquer les États pour exiger des compensations financières aux pertes causées par les mesures de confinement.
Par ailleurs, il est inacceptable que des entreprises puissent bénéficier d’aides d’État, si elles ne garantissent pas le respect des droits fondamentaux des personnes travaillant dans leurs filiales ou auprès de sous-traitants, par l’exercice de leur devoir de vigilance vis-à- vis de leurs chaînes de valeurs. Au Bangladesh par exemple, les annulations de commande des grandes marques du textile étaient estimées à 2,58 milliards de dollars au 26 mars 2020, avec pour conséquence des arriérés de salaire de 400 millions de dollars, et deux millions de travailleuses et de travailleurs concernés. Malgré la reprise internationale, nombreux d’entre eux n’auront toujours pas rattrapé ce manque à gagner en 2022.
Enfin, les entreprises bénéficiant d’un soutien financier de l’État doivent garantir le versement des salaires vitaux auprès de leurs fournisseurs et sous-traitants, plutôt que le versement de dividendes à leurs actionnaires, dont on peut douter que leurs droits humains fondamentaux soient directement menacés, contrairement aux millions de travailleuses et de travailleurs précipités dans la pauvreté par la crise.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.