Publié le 10 juillet 2021 par : M. Gauvain, M. Kervran.
Rédiger ainsi cet article :
Le titre XV du livre IV du code de procédure pénale est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« De la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion
« Art. 706‑25‑16. – I. – Lorsqu’une personne a été condamnée à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, d’une durée supérieure ou égale à cinq ans pour une ou plusieurs des infractions mentionnées aux articles 421‑1 à 421‑6 du code pénal, à l’exclusion de celles définies aux articles 421‑2‑5 et 421‑2‑5‑1 du même code, ou d’une durée supérieure ou égale à trois ans lorsque l’infraction a été commise en état de récidive légale, et qu’il est établi, à l’issue d’un réexamen de sa situation intervenant à la fin de l’exécution de sa peine, que cette personne présente une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive et par une adhésion persistante à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme, faisant ainsi obstacle à sa réinsertion, le tribunal de l’application des peines de Paris peut, sur réquisitions du procureur de la République antiterroriste, ordonner, aux seules fins de prévenir la récidive et d’assurer la réinsertion, une mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion.
« La décision définit les conditions d’une prise en charge sanitaire, sociale, éducative, psychologique ou psychiatrique destinée à permettre la réinsertion de la personne concernée et l’acquisition des valeurs de la citoyenneté. Cette prise en charge peut, le cas échéant, intervenir au sein d’un établissement d’accueil adapté.
« Elle peut imposer à la personne concernée d’exercer une activité professionnelle ou de suivre un enseignement ou une formation professionnelle ; elle peut également lui interdire de se livrer à l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise.
« La décision précise les conditions dans lesquelles la personne concernée doit communiquer au service pénitentiaire d’insertion et de probation les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d’existence et de l’exécution de ses obligations et répondre aux convocations du juge de l’application des peines ou du service pénitentiaire d’insertion et de probation. Elle peut aussi l’astreindre à établir sa résidence en un lieu déterminé.
« Les obligations auxquelles la personne concernée est astreinte sont mises en œuvre par le juge de l’application des peines du tribunal judiciaire de Paris, assisté du service pénitentiaire d’insertion et de probation, le cas échéant avec le concours des organismes habilités à cet effet.
« II. – Le tribunal de l’application des peines de Paris ne peut prononcer la mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion qu’après s’être assuré que la personne condamnée a été mise en mesure de bénéficier, pendant l’exécution de sa peine, de mesures de nature à favoriser sa réinsertion.
« III. – La mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion prévue au I peut être ordonnée pour une durée maximale d’un an. À l’issue de cette durée, la mesure peut être renouvelée sur réquisitions du procureur de la République antiterroriste par le tribunal de l’application des peines de Paris, après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue à l’article 763‑10, pour au plus la même durée, périodes de suspension comprises, dans la limite de cinq ans ou, lorsque le condamné est mineur, dans la limite de trois ans. Chaque renouvellement est subordonné à l’existence d’éléments nouveaux ou complémentaires qui le justifient précisément.
« IV. – La mesure prévue au I ne peut être ordonnée que si elle apparaît strictement nécessaire pour prévenir la récidive et assurer la réinsertion de la personne concernée. Elle n’est pas applicable si la personne a été condamnée à un suivi socio‑judiciaire en application de l’article 421‑8 du code pénal ou si elle fait l’objet d’une mesure de surveillance judiciaire prévue à l’article 723‑29 du présent code, d’une mesure de surveillance de sûreté prévue à l’article 706‑53‑19 ou d’une rétention de sûreté prévue à l’article 706‑53‑13.
« Art. 706‑25‑17. – La situation des personnes détenues susceptibles de faire l’objet de la mesure prévue à l’article 706‑25‑16 est examinée, sur réquisitions du procureur de la République antiterroriste, au moins trois mois avant la date prévue pour leur libération par la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue à l’article 763‑10, afin d’évaluer leur dangerosité et leur capacité à se réinsérer.
« À cette fin, la commission pluridisciplinaire mentionnée au premier alinéa du présent article demande le placement de la personne concernée, pour une durée d’au moins six semaines, dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues, aux fins notamment d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité.
« À l’issue de cette période, la commission adresse au tribunal de l’application des peines de Paris et à la personne concernée un avis motivé sur la pertinence de prononcer la mesure mentionnée à l’article 706‑25‑16 au regard des critères définis au I du même article 706‑25‑16.
« Art. 706‑25‑18. – La décision prévue à l’article 706‑25‑16 est prise, avant la date prévue pour la libération du condamné, par un jugement rendu après un débat contradictoire et, si le condamné le demande, public, au cours duquel le condamné est assisté par un avocat choisi ou commis d’office. Elle doit être spécialement motivée au regard des conclusions de l’évaluation et de l’avis mentionnés à l’article 706‑25‑17 ainsi que des conditions prévues aux II et IV de l’article 706‑25‑16.
« Le jugement précise les obligations auxquelles le condamné est tenu ainsi que la durée de celles‑ci.
« La décision est exécutoire immédiatement à l’issue de la libération du condamné.
« Le tribunal de l’application des peines de Paris peut, sur réquisitions du procureur de la République antiterroriste ou à la demande de la personne concernée, selon les modalités prévues à l’article 706‑53‑17 et, le cas échéant, après avis du procureur de la République antiterroriste, modifier la mesure ou ordonner sa mainlevée. Cette compétence s’exerce sans préjudice de la possibilité, pour le juge de l’application des peines, d’adapter à tout moment les obligations auxquelles le condamné est tenu.
« Art. 706‑25‑19. – Les décisions du tribunal de l’application des peines de Paris prévues à la présente section peuvent faire l’objet du recours prévu au second alinéa de l’article 712‑1.
« Art. 706‑25‑20. – Les obligations prévues à l’article 706‑25‑16 sont suspendues par toute détention intervenue au cours de leur exécution.
« Si la détention excède une durée de six mois, la reprise d’une ou de plusieurs des obligations prévues au même article 706‑25‑16 doit être confirmée par le tribunal de l’application des peines de Paris dans un délai de trois mois à compter de la cessation de la détention, à défaut de quoi il est mis fin d’office à la mesure.
« Art. 706‑25‑21. – Le fait pour la personne soumise à une mesure prise en application de l’article 706‑25‑16 de ne pas respecter les obligations auxquelles elle est astreinte est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
« Art. 706‑25‑22. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions et les modalités d’application de la présente section. »
Cet amendement propose de rétablir la version de l'article 5 issue des travaux de l'Assemblée nationale en première lecture.
En effet, le Sénat a fait le choix de réécrire cet article afin d’étendre considérablement le champ des obligations prononcées dans le cadre de la mesure de sûreté, reprenant ainsi plusieurs mesures prévues par les MICAS telles que l’interdiction de paraître dans certains lieux. Cette réécriture se fonde également sur un système de double pallier de mesures plus ou moins contraignantes complexe à mettre en œuvre, et qui soulève donc de potentielles difficultés opérationnelles.
Tel qu'il a été voté par l'Assemblée nationale, l'article 5 créé une nouvelle mesure de sûreté dont l’objectif est de prévenir la récidive et de garantir la réinsertion des personnes condamnées pour certains actes de terrorisme. Cette mesure permet au tribunal de l’application des peines de Paris d’imposer à un détenu en fin de peine une ou plusieurs des six obligations figurant au nouvel article 706-25-16 du code de procédure pénale, dès lors qu’il présente une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive et par une adhésion persistante à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme, faisant ainsi obstacle à sa réinsertion.
Plusieurs autres conditions sont par ailleurs nécessaires afin de prononcer cette mesure de sûreté:
– le II de l’article 706-25-16 prévoit qu’elle ne peut être prononcée qu’aux personnes condamnées ayant pu bénéficier, pendant l’exécution de leur peine, de mesures de nature à favoriser leur réinsertion ;
– le IV du même article pose un principe de non-cumul de cette mesure de sûreté avec un suivi socio-judiciaire, une mesure de surveillance judiciaire ou une mesure de surveillance ou de rétention de sûreté.
Le III de l’article 706-25-16 prévoit que la mesure de sûreté ne peut être ordonnée pour une durée excédant un an. Toutefois, elle peut être renouvelée par le tribunal de l’application des peines, sur réquisition du procureur de la République antiterroriste et après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté pour un an maximum, dans la limite de cinq ans – ou de trois ans quand l’individu est mineur. Cette prolongation est néanmoins conditionnée, pour chacun des renouvellements, à l’existence d’éléments nouveaux ou complémentaires.
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