Publié le 16 septembre 2021 par : M. Vallaud, M. Aviragnet, Mme Biémouret, Mme Vainqueur-Christophe.
Substituer aux alinéas 21 à 23 l’alinéa suivant :
« 4° De compléter les droits sociaux des travailleurs des plateformes numériques en prévoyant, lorsque plusieurs travailleurs placés dans une situation similaire subissent des préjudices résultant du recours à un statut fictif de travailleur indépendant, qu’une action de groupe puisse être exercée, sans préjudice des actions individuelles que les travailleurs peuvent exercer à d’autres fins auprès des tribunaux compétents. »
Cet amendement vise à transposer au sein de ce projet de loi, par voie d’habilitation à légiférer par ordonnance, les dispositions de l’article 1er de la proposition de loi « visant à lutter contre l’indépendance fictive en permettant des requalifications en salarié par action de groupe et en contrôlant la place de l’algorithme dans les relations contractuelles » portée par les sénateurs socialistes Olivier Jacquin, Monique Lubin, Franck Montaugé et Didier Marie.
Il convient de noter que le 4° de l’article 2 du présent projet de loi dépasse le champ de l’organisation du dialogue social entre travailleurs et plateformes en habilitant également le Gouvernement à renforcer « l’autonomie » de ces travailleurs. Or, cette quête d’autonomie est illusoire dans la mesure où, par le biais de ce projet de loi, le Gouvernement fige les travailleurs des plateformes dans un « tiers-statut » cumulant les inconvénients du salariat, et notamment le lien de dépendance vis-à-vis de l’entreprise (qui fixe les tarifs des prestations et impose les règles de travail sous peine de sanction), avec ceux du « véritable » travail d’indépendant, notamment en ce qui concerne l’accès à la protection sociale (pas de congés payés, pas d’assurance contre les accidents du travail, etc.) et le manque de visibilité sur les revenus.
Dès lors, plutôt que de moduler à la marge le degré d’autonomie de ces travailleurs, il apparaît primordial de renforcer le salariat et de mieux définir les périmètres du statut d’indépendant. En ce sens, l’arrêt du 4 mars 2020 de la Cour de cassation contribue grandement à cette clarification en ce qu’il sacralise le terme d’« indépendance fictive ». C’est la raison pour laquelle, avec les auteurs de la proposition de loi sénatoriale, nous entendons contribuer à mettre fin aux pratiques abusives des plateformes qui, sous couvert des statuts dévoyés d’auto et de microentrepreneurs – qu’il conviendra de profondément réformer dans d’autres textes – condamnent des milliers de travailleurs à la précarité et les privent de droits sociaux.
L’article 1er de la proposition de loi sénatoriale et le présent amendement entendent donc répondre à ce sujet en créant une procédure de requalification par action de groupe. Une solution d’autant plus juste qu’elle permettrait à nombre de ces travailleurs précaires et pauvres de faire valoir leurs droits devant les tribunaux, eux qui n’en ont aujourd’hui pas les moyens tant les procédures sont longues et couteuses. Elle permettra par ailleurs d’assainir le monde des plateformes numériques entre celles qui sont en mesure de rémunérer le travail à sa juste valeur et celles qui n’ont pour seul modèle économique que de faire pression sur son coût, notamment au travers d’algorithmes qui permettent de faire varier sans véritable contrôle la valeur nominale des tâches de ces « cyberprécaires ».
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