Publié le 12 novembre 2021 par : M. Bru, M. Sempastous.
L’article L. 161‑10 du code rural et de la pêche maritime est abrogé.
Lorsque la commune met en vente un chemin rural, elle doit « mettre en demeure » les propriétaires riverains d’acquérir « les terrains attenant à leurs propriétés ». Analysé comme un droit de préemption innommé, ce dispositif souffre toutefois de maladresses rédactionnelles et d’écueils, ainsi qu’en atteste l’importance du contentieux existant.
Le mode opératoire n’est pas défini; le choix de mise en demeure est inadapté au format amiable de la vente projetée; le texte ne précise pas l’étendue des prérogatives des riverains (leur offre peut-elle porter sur l’entier chemin ou seulement sur la fraction contiguë à leur propriété ?). De plus, l’ensemble de ces contraintes n’emporte aucune obligation de vente pour la commune qui peut, au final, refuser l’offre émise en s’appuyant sur des motifs aussi diffus que confus.
Ce dispositif trouvait originairement sa justification dans le souci d’avertir les riverains de la vente du chemin qui les bordait. L’enquête publique préalable à la désaffectation assure toutefois la diffusion de cette information mais aussi l’absence d'utilisation du chemin.
En outre, la jurisprudence vide cette procédure d’une partie de sa substance puisque l’annulation de la vente passée en contravention de ce dispositif ne peut pas être demandée si l’annulation de la délibération ayant décidé de l’opération n’est pas préalablement obtenue. En effet, la Cour de Cassation a estimé qu’en l’absence d’un recours en excès de pouvoir dirigé contre la délibération, la vente n’est plus annulable (Cass. 3e civ., 11 mai 2017, n° 16‑12.236).
Complexe à mettre en œuvre, sujet à contentieux, alourdissant autant qu’il fragilise les ventes de chemins opérées par les communes, avec un résultat insatisfaisant, ce dispositif peine aujourd’hui à trouver sa légitimité. Celle qui lui restait était couplée à l’interdiction pour une commune d’échanger un chemin rural. En effet, seule la vente était soumise à la procédure ici contestée et puisque l’échange ne constitue par définition pas une vente, il y aurait échappé.
L’article 27 ter du présent projet de loi a toutefois levé cet obstacle en ouvrant la possibilité aux communes d’échanger des chemins ruraux. Ainsi, la vente de chemin resterait soumise à ce droit de préemption innommé au profit des riverains tandis que l’échange y échapperait. La suppression de l’article L 161‑10 du code rural et de la pêche maritime vise ainsi à simplifier et à harmoniser ces deux régimes.
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