Publié le 17 avril 2018 par : M. Cesarini, M. Cattin.
I. – L'État peut autoriser l'utilisation d'aéronefs télépilotés pour la pulvérisation aérienne de produits phyto-pharmaceutiques, à titre expérimental, sous le contrôle des services de L'État et de l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA). Cette autorisation serait exclusivement réservée aux très rares vignobles concernés par des vignes à très fortes pentes, supérieures ou égales à 30 %, en culture biologique, ou ayant enclenché une démarche environnementale. Cette possibilité expérimentale déroge aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 253‑8 du code rural et de la pêche maritime.
II. – L'expérimentation est menée pour une période maximale de cinq ans à compter de l'adoption de la loi. Elle fait l'objet d'une évaluation par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.
III. – La mesure prévue au I doit être prise dans un délai permettant les traitements de la saison 2018.
IV. – Les conditions et modalités de ces expérimentations seront définies par arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement, de l'agriculture et de la santé, de manière à garantir l'absence de risque inacceptable pour la santé et l'environnement.
La directive 2009/128/CE définit à son article 3 paragraphe 5 la pulvérisation aérienne comme « toute application de pesticide par aéronef (avion ou hélicoptère) ». Les aéronefs télépilotés (drones) ne sont donc pas considérés comme de la pulvérisation aérienne au titre de la réglementation européenne.
L'article L. 253‑8 du code rural et de la pêche maritime interdit la pulvérisation aérienne. Cette interdiction concerne tous les aéronefs définis par l'article L. 6100‑1 du code des transports, comme tout objet capable de s'élever ou de circuler dans les airs, interdisant donc la pulvérisation aérienne par drone. Au regard de la problématique de la pulvérisation aérienne dans certains vignobles et strictement réservé aux vignes à très forte-pente, du risque élevé pour les opérateurs en cas de traitement par voie terrestre et des avancées technologiques actuelles en matière d'aéronef télépiloté, il est nécessaire de s'interroger sur la modification du champ d'application de l'interdiction de la pulvérisation aérienne. Cela permettra que la réglementation autorise, dans certaines conditions bien précises de durée et de lieu, l'expérimentation de l'utilisation de ces aéronefs.
Le Ministre de la Transition écologique semble s'inquiéter des risques de l'épandage pour la santé publique. Qu'il soit ici rassuré puisque l'application de ce type de traitement par drone, qui survole à ras des rangs de vigne, représente une réduction des doses de près de 50 % et s'inscrit donc pleinement dans le « volet environnemental » prévu à cet effet.
Cette application va également dans le sens d'un meilleur environnement de travail préservant la santé et la sécurité du personnel intervenant dans la protection des cultures. A titre d'exemple, pour le principal domaine identifié en Alsace en très fortes pentes, le traitement concerne 8 personnes pendant 1 semaine pour un traitement classique. Un traitement par drone représenterait une seule matinée de travail avec, de surcroit, aucun contact des opérateurs avec les produits.
Rappelons les nombreux accidents (3 morts en 10 Ans dans le Haut-Rhin et de nombreux cas d'accident du travail) dans le cadre d'un traitement classique alors que le nouveau type de drones permettrait d'éviter ces drames. Ces interventions sont aujourd'hui totalement fiables au niveau de la sécurité civile (cartographie intégrée et limitée aux parcelles à traiter). Ces appareils, dont le survol s'opère au ras des vignes, sont déjà homologués et commercialisés en Suisse, par exemple, dans des vignobles similaires. Il est donc démontré que la dérive de produits est quasi inexistante par rapport à un traitement classique à partir du sol ou lors de traitement aérien par hélicoptère utilisé jusqu'à présent.
Rappelons également que de très rares vignes à très fortes pentes (Alsace, Vallée du Rhône,...) sont concernées. En Alsace, par exemple, seule une centaine d'hectares est concernée sur les quelques 16.500 hectares du vignoble alsacien, concentrée qui plus est sur quelques communes (entre autres Guebwiller, Thann, Gueberschwihr et Niedermorschwihr). La plupart de ces vignobles sont d'ailleurs en culture biologique, et, sans ce type de traitement innovant, il y a remise en cause de cette démarche, pourtant préconisée suite à l'interdiction de traitement par hélicoptère.
Le Ministre nous explique également qu' » aucune dérogation pour expérimentation d'épandage aérien n'est prévue par les textes ». Cela entre en contradiction avec la recherche d'innovation dont nous n'arrêtons pas d'entendre parler. L'une des missions de l'IRSTEA est d'ailleurs de contrôler et vérifier ce type de matériel et d'expérimentation innovante.
Des essais concluants et des études sérieuses ont été effectuées en Suisse, et l'encadrement par les services, notamment de l'État (formation des intervenants, encadrement des plans de vol, opérateurs très limités en nombre, voire unique par vignoble, ...) démontrent qu'il n'y a pas de risque de détournement d'utilisation.
Précisons, enfin, que le recours exceptionnel actuellement prévu par les textes ne peut pas être une réponse appropriée (surtout en culture Bio où il faut être réactif et ne pas dépendre d'autorisations administratives contraignantes qui retardent d'autant les interventions.
Interdire l'expérimentation, c'est revenir aux pratiques de protection du vignoble avec des produits phytopharmaceutiques classiques. Telle n'est pas l'orientation environnementale préconisée actuellement et pour l'avenir.
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