Immigration maîtrisée droit d'asile effectif et intégration réussie — Texte n° 714

Amendement N° CL323 (Rejeté)

Publié le 2 avril 2018 par : M. Prud'homme, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.

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À l'alinéa 3, substituer aux mots :

« quinze jours »,

les mots :

« deux mois, sauf circonstances exceptionnelles et humanitaires notamment relatives à sa vulnérabilité, ».

Exposé sommaire :

Par cet amendement, nous proposons de faire rentrer dans le droit commun le délai de recours d'un.e demandeur.se d'asile devant la Cour nationale du droit d'asile, c'est-à-dire que celui-ci ne soit ni de 15 jours, ni d'un mois, mais bien de deux mois, à savoir le délai de recours de droit commun devant toute juridiction administrative française, tel que prévu par l'article R. 421-1 du code de justice administrative («La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. »).

En effet, le délai de droit commun de deux mois, consacré initialement par la jurisprudence, est une garantie pour un administré. Son présupposé est en effet que l'administré, eu égard à sa connaissance de la langue française, des procédures administratives et des mécanismes de recours, de ses connaissances juridiques, ait le temps dans un délai de deux mois à compter de la date de notification ou de la publication de la décision qui l'impact, de contester celle-ci en bonne et due forme par un recours qui sera recevable.

Est-il sérieux, est-il même éthique de considérer qu'un demandeur d'asile, qui est dans une situation de vulnérabilité, dont la langue française et notre organisation administrative ne lui est pas familière, de son état psychologique (les demandeurs d'asile demandent quand même une protection contre des persécutions dont ils ont été et sont victimes) et de sa santé (qui a pu être impacté par son exil et son parcours migratoire), son indigence probable, puisse en un délai de moins de deux mois sérieusement exercer son droit au recours ?

Nous estimons qu'eu égard à ces conditions, la diminution du délai de recours à 15 jours est irrégulière au regard du droit européen. En effet, la directive 2013/32/UE prévoit un délai “raisonnable” pour exercer le droit au recours effectif et que “les délais prévus ne rendent pas cet exercice impossible ou excessivement difficile” (article 46 paragraphe 4 de la directive). En effet, quand bien même le Gouvernement argue que le délai pour les procédures normales de 9 Etats membres de l'Union européenne est entre 8 et 15 jours (page 43 de l'étude d'impact du présent projet de loi) ou pour la procédure accélérée entre 2 et 15 jours pour 16 Etats de l'Union européenne, il n'est pas juste de comparer des systèmes juridiques si différents. Si le délai de droit commun en France pour tous et toutes les administré.e.s est de deux mois pour faire un recours, comment peut on imaginer qu'un délai de 15 jours ne rendra pas “excessivement difficile” voire “impossible” un droit au recours pour des personnes ne maîtrisant en grande majorité ni notre langue, ni notre système administratif, juridique et judiciaire.

Le Gouvernement est par là d'une hypocrisie sans pareille, puisqu'en divisant par deux ce délai de recours, il met par là même une pression intolérable sur les associations et bénévoles qui tentent d'aider les demandeurs d'asile pour que ceux-ci puissent exercer dignement et dans les meilleurs conditions leur droit au recours.

Pour cela, nous proposons que le seuil minimal soit de deux mois, modulable eu égard à des circonstances exceptionnelles et humanitaires (notamment relatives à sa vulnérabilité) dont le demandeur pourra justifier.

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