Publié le 14 mai 2018 par : M. Laqhila.
Après la première phrase du I de l'article L. 121-17 du code de l'environnement, il est inséré l'alinéa suivant :
« Ne peuvent toutefois pas faire l'objet d'une telle concertation les projets soumis à concertation au titre de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, organisée dans le respect des droits mentionnés aux 1°, 3° et 4° du II de l'article L. 120-1 du présent code ».
Issu de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, l'article L 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime institue un principe de compensation collective agricole. Ce principe impose aux maîtres d'ouvrage, publics ou privés, d'étudier et/ou de compenser les impacts de leurs projets sur l'économie agricole locale.
Si le principe initial de compensation pour la filière agricole va dans le sens d'une utilisation plus rationnelle des terres agricoles, le décret du 31 août 2016, applicable depuis le 1er décembre 2016, est venu déséquilibrer ce dispositif en précisant le champ d'application et le régime de l'évaluation des impacts sur l'économie et la filière agricole.
Ce décret a pour effet :
- De mettre en danger des opérations d'aménagement structurantes pour certains territoires en renchérissant sensiblement le coût du foncier des opérations qu'elles soient publiques ou privées. Des logements, des services ou encore des équipements publics sont ainsi mis en danger alors même que le choix d'ouvrir des terres agricoles à d'autres occupations relève de la compétence et la liberté de choix des collectivités locales. Ce décret est d'autant plus étonnant qu'il existe déjà des dispositifs de compensations puisque les aménageurs qui acquièrent des terrains agricoles indemnisent déjà au moyen de l'indemnité d'éviction la perte de récolte qui en résulte.
- D'allonger considérablement les délais de réalisation des projets au moment même où le Gouvernement met tout en œuvre pour « construire plus vite, mieux et moins cher ». En effet, d'une part, les porteurs de projets auront tout intérêt à purger le délai de désaffectation de cinq ans prévu par le texte, et d'autre part, le Préfet pourra autant que nécessaire demander au porteur de projet de parfaire son étude jusqu'à complète satisfaction des instances agricoles, sans que tout cela soit encadré par des délais.
Par ailleurs, la visibilité sur le temps des projets étant essentielle pour l'ensemble des opérateurs, ce décret entraîne une véritable insécurité en donnant la possibilité aux préfets de département de déclencher une étude obligatoire sur le site. Il existe pourtant déjà un seuil minimum national qui permettrait d'avoir un référentiel unique et plus lisible pour accélérer la réalisation des projets.
De plus, les aménageurs ne disposent pas de la capacité, ni des informations nécessaires pour effectuer une analyse économique du secteur agricole. Ils sont à ce titre dépendants des éléments et appréciations de la CDPENAF et des chambres agricoles qui sont juges et parties dans la mesure. En effet, les aménageurs ne sont pas représentés au sein de ces instances. Il en résulte, l'émission par le préfet d'une « décision » s'imposant à l'ensemble des parties prenantes du projet sans qu'ils n'aient la possibilité d'intenter un recours.
En plus d'être inefficace et inégalitaire, ce dispositif contrevient également à la réglementation européenne des aides publiques directes ou indirectes de l'Etat. En effet, les maîtres d'ouvrage publics pourront également être visés par ce dispositif et dès lors devront s'acquitter de mesures de compensation à la filière agricole.
Ainsi, ce dispositif, tel qu'il a été institué, fait peser d'importants risques juridiques et économiques sur les opérations d'aménagement à un moment où celles-ci sont très fortement encouragées par le Gouvernement dans ce projet de loi ELAN.
De plus, en privilégiant le secteur agricole au regard d'autres secteurs économiques stratégiques comme le logement, ce dispositif encourage une extension de son application à d'autres formes de corporatisme économique.
Face à l'ensemble de ces arguments il est proposé l'abrogation pure et simple de ce dispositif et ainsi de l'article L 112-1-3 du code rural et de la pêche maritime.
Tel est l'objet du présent amendement
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