Publié le 14 mai 2018 par : M. Saddier, Mme Duby-Muller, M. Emmanuel Maquet, M. Menuel, M. Bony, Mme Bonnivard.
Après l'alinéa 22, insérer l'alinéa suivant :
« 2°bisLorsque la qualification relève d'une décision d'un établissement public de coopération intercommunale, la délibération de l'organe délibérant prévoit les conditions des transferts de compétences opérés entre les communes et leurs groupements et les conditions de la réalisation et de la mise à disposition par les communes d'équipements publics relevant de leur compétence à l'établissement public de coopération intercommunale ou à la collectivité à l'initiative de l'opération ainsi que les conditions, notamment patrimoniales et financières, de remise à la collectivité compétente de ces équipements au jour de leur livraison ou, au plus tard, à l'expiration de la grande opération d'urbanisme. Ces conditions sont décidées par délibérations concordantes de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la collectivité à l'initiative de l'opération et des communes concernées se prononçant dans les conditions de majorité qualifiée requise pour la création de l'établissement. »
L'article 1er complète la création d'un contrat partenarial d'aménagement par un nouvel outil d'aménagement similaire aux OIN initié, après accord préalable de l'Etat, par les intercommunalités, la collectivité à statut particulier qu'est la métropole de Lyon et de celle que sera la Ville de Paris, dénommé « grande opération d'urbanisme » (GOU).
Cette opération emporte de nombreux effets dérogatoires au droit commun de l'urbanisme et plusieurs transferts de compétences entre communes et EPCI afin de permettre l'accélération et la recherche de solutions innovantes en matière de construction de logements dans le cadre des grandes opérations d'urbanisme : dérogation à certaines normes de construction (permis de faire), bénéfice d'un exercice prolongé du droit de préemption dans les ZAD ; dérogation à la loi MOP ; intérêt « réputé » communautaire ou métropolitain de l'opération ; transfert au président de l'EPCI de la compétence en matière de délivrance des permis de construire, d'aménager, de démolir et du prononcé sur les déclarations préalables ; substitution d'office, après accord du préfet, de l'intercommunalité à la commune pour la construction et l'adaptation d'un équipement public communal requis par la grande opération d'urbanisme, en cas de refus de la commune d'y procéder, pouvoir de substitution d'office entre collectivités territoriales considéré par le Conseil d'Etat (avis du 29 mars 2018, requête n° 394435) comme semblant « jusqu'ici n'avoir pas de précédent »..
Selon l'avis du Conseil d'Etat du 29 mars 2018 (requête n° 394435) rendu sur ces dispositions, la « grande opération d'urbanisme » doit être interprétée non pas comme un outil d'aménagement servant les objectifs de l'Etat mais comme un outil au service des collectivités : « la similitude des régimes juridiques de l'OIN et de la GOU et le maintien d'un contrôle de l'Etat sur cette dernière ne paraissent cependant pas justifier de la ranger parmi les dispositifs servant les objectifs de l'Etat prévus par le chapitre II du titre préliminaire du livre Ier du code de l'urbanisme, puisqu'elle s'avère être au service de l'établissement ou la collectivité ».
Et, selon l'exposé des motifs, « les critères de création des GOU sont définis en référence à la nature supra-locale des enjeux sur le territoire, soit par la dimension, soit par les caractéristiques particulières des opérations d'aménagement concernées, ayant conduit à la conclusion d'un contrat de PPA ».
Or, à l'instar du contrat de projet partenarial d'aménagement, si l'avis des communes incluses dans le périmètre de l'opération est recueilli préalablement à la délibération emportant création de la grande opération d'urbanisme, il apparaît toutefois que cet outil relève in fine de la seule responsabilité de l'Etat qui, d'une part, donne son accord préalablement à la délibération de l'intercommunalité ou de la collectivité décidant de la création de cette opération et répute l'intérêt communautaire des opérations d'aménagement engagées dans le périmètre des GOU, et qui d'autre part, peut passer outre l'avis défavorable d'une des communes lors de cette décision de création ou encore enclencher, « un pouvoir de substitution d'office » permettant à l'intercommunalité de prendre la main sur les équipements publics relevant de compétence communales.
Or, un tel pouvoir de tutelle d'une part de l'Etat sur les collectivités territoriales (accord préalable du préfet sur la délibération de l'intercommunalité créant la GOU) et d'une collectivité sur une autre (substitution d'office après accord du préfet de l'intercommunalité sur les communes en matière de gestion des équipements publics) est inacceptable à plusieurs titres :
- Il porte atteinte au pouvoir de libre administration des collectivités locales garanti par l'article 72 de la Constitution alors même que le Conseil d'Etat considère que la GOU s'avère « être au service de l'établissement ou la collectivité » et non pas de l'Etat.
- Il entraîne des transferts automatiques de compétences entre communes et intercommunalités et la réalisation par ces dernières au nom et pour leur compte des communes d'équipements publics relevant de leurs compétences sans leur accord, mais également sans débat préalable des conseils municipaux et de l'organe délibérant de l'intercommunalité sur les conditions de ces transferts et de ces mises à dispositions.
En ce sens, cet article habilite l'intercommunalité non pas à organiser mais à disposer d'un pouvoir de décision pour déterminer les modalités de l'action commune de plusieurs collectivités, ce qui a déjà pu être sanctionné par le conseil constitutionnel au regard de l'alinéa 5 de l'article 72 de la Constitution (Décision n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008, loi relative aux contrats de partenariat point 33). L'article L. 312-8 du projet est donc supprimé en conséquence.
- L'intérêt réputé communautaire de la GOU entraîne une concurrence de cet outil dérogatoire et performant avec les projets déjà engagés par les communes dans le cadre de leurs compétences structurantes en matière d'aménagement (voirie, aménagement des espaces publics, circulation piétonne, équipements scolaires, culturels et sportifs, etc.) et fragilise l'équilibre contractuel et économique des opérations en cours au détriment et des porteurs de projets (publics, du type des EPFL ou de SEM, SPL ou privés) et de la cohérence des politiques locales déjà mises en œuvre.
Or, les communes ne peuvent être considérées comme des partenaires institutionnels et financiers de second rang dès lors qu'elles disposent de compétence structurantes en matière d'aménagement des équipements publics relatifs à ces compétences (voirie, aménagement des espaces publics, circulation piétonne, équipements scolaires, culturels et sportifs, etc.) qui participent à la conception de la ville et, très souvent, du foncier mobilisable.
Seuls des engagements partagés et co-construits entre les communes, leurs groupements et l'Etat permettront de mettre en œuvre durablement des opérations d'aménagements ambitieuses au service de projets de territoire et de leurs habitants.
Pour ces raisons, il serait contreproductif et ce, de manière inédite en droit de l'aménagement, d'écarter les communes de l'accès à un outil contractuel potentiellement dérogatoire au droit commun de l'urbanisme et potentiellement plus performant en matière de politique publique (via les grandes opérations d'urbanisme - GOU) relevant pourtant de l'exercice de leurs compétences et de leur maîtrise foncière.
Cet amendement est lié à l'amendement précédent sur le contrat de projet partenarial d'aménagement et vise à adapter le régime de la grande opération d'urbanisme (GOU) au regard du principe de libre-administration des collectivités territoriales.
Aussi, il vise d'une part à réintégrer les communes comme acteurs principaux ce grandes opérations d'urbanisme, la création des GOU étant soumise à leur accord préalable.
D'autre part il a pour objet de réintégrer, dans la procédure de création de la GOU, un débat sur les conditions des transferts de compétence entre les communes et leurs intercommunalités et sur celles relatives à la mise à disposition des équipements publics entre une commune et l'établissement public de coopération intercommunale ou la collectivité à l'initiative de la grande opération d'urbanisme.
Conformément au principe de libre-administration des collectivités, il est à noter qu'en l'état actuel du droit, il est déjà permis aux termes de l'article L.422-3 du code de l'urbanisme, lorsqu'une commune fait partie d'un établissement public de coopération intercommunale, en accord avec ce dernier, qu'elle puisse lui déléguer la compétence prévue au a) de l'article L. 422-1, à savoir la délivrance des autorisations d'urbanisme, qui est alors exercée par le président de l'établissement public au nom de l'établissement. Dans ce cas, le maire adresse au président de l'établissement public son avis sur chaque demande de permis et sur chaque déclaration préalable.
Un transfert automatique de la compétence en matière de délivrance des autorisations de construire et ce, pour une durée indéterminée dans le cadre des grandes opérations d'urbanisme, s'apparente à un transfert de compétence des communes aux EPCI en matière d'aménagement et d'urbanisme, sous contrôle de l'Etat. En cela il porte atteinte à la nécessaire souplesse d'adaptation de ces compétences aux circonstances locales qui devraient pourtant être privilégiée dans le cadre du dispositif contractuel PPA-GOU.
La disposition relative au transfert automatique du pouvoir de délivrance de l'autorisation de construire au président de l'EPCI est donc supprimée en conséquence.
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