Publié le 22 mai 2018 par : M. Delpon, M. Girardin.
Après leb du 4° de l'article L. 443‑1 du code de commerce, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :
« Les délais dérogatoires prévus en application du 4° ne doivent pas constituer un abus manifeste à l'égard du créancier. Dans le cadre du contrôle qu'elle exerce à l'occasion de la procédure d'extension visée à l'article L. 632‑3 du code rural et de la pêche maritime, l'autorité administrative vérifie donc que les délais dérogatoires prévus, le cas échéant, par l'accord ou la décision qui lui est soumis ne sont pas manifestement abusifs. À cette fin, elle prend en considération tous les éléments d'appréciation pertinents, notamment :
« a) L'existence éventuelle d'un écart manifeste par rapport aux bonnes pratiques et usages commerciaux, contraire à la bonne foi et à un usage loyal ;
« b) Les spécificités du secteur et du produit concernés ;
« c) Le cas échéant, la présence de circonstances locales particulières ;
« d) Toute autre raison objective justifiant la dérogation.
« Lorsqu'une organisation interprofessionnelle reconnue sollicite l'extension d'un accord interprofessionnel ou d'une décision interprofessionnelle prévoyant des délais dérogatoires de paiement, ces délais sont présumés ne pas constituer un abus manifeste à l'égard du créancier s'ils résultent d'une décision adoptée à l'unanimité des familles professionnelles qui la composent. »
Le présent amendement vise à préciser l'étendue et les modalités du contrôle qu'exerce l'administration lorsqu'elle vérifie, à l'occasion de la procédure d'extension visée à l'article L. 632‑3 du code rural et de la pêche maritime, que les délais dérogatoires prévus par l'accord ou la décision qui lui est soumis(e) ne sont pas manifestement abusifs.
Pour rappel, l'article L. 443‑1 du code de commerce prévoit des délais de paiement spéciaux pour certains secteurs économiques et certains produits. Pour les achats de raisins et de moûts destinés à l'élaboration de vins ainsi que pour les boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du code général des impôts, il prévoit ainsi un délai de paiement maximum de quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours à compter de la date d'émission de la facture. Il prévoit cependant que ce délai ne s'applique qu'à défaut de dispositions dérogatoires figurant :
- dans des décisions interprofessionnelles prises en application de la loi du 12 avril 1941 portant création d'un comité interprofessionnel du vin de Champagne ; ou
- dans des accords interprofessionnels pris en application du livre VI du code rural et de la pêche maritime et rendus obligatoires par voie réglementaire à tous les opérateurs sur l'ensemble du territoire métropolitain.
Autrement dit, l'article L. 443‑1 du code de commerce autorise les organisations interprofessionnelles du secteur vitivinicole à mettre en place des délais de paiement dérogatoires dans les accords interprofessionnels qu'elles adoptent.
En vertu de l'article 3 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011, un délai de paiement entre entreprises ne peut excéder 60 jours qu'à la condition de ne pas constituer un « abus manifeste à l'égard du créancier ». De même, l'article L. 442‑6, paragraphe I du code de commerce précise que tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers engage sa responsabilité s'il obtient ou tente d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des « conditions manifestement abusives » concernant, notamment, les délais de paiement.
Dans le cadre du contrôle de légalité qu'elle exerce à l'occasion de la procédure d'extension visée à l'article L. 632‑3 du code rural et de la pêche maritime, l'autorité administrative doit donc vérifier, le cas échéant, que les délais dérogatoires prévus par l'accord qui lui sont soumis ne sont pas manifestement abusifs.
Toutefois aucune disposition législative ne précise pour l'instant les critères que l'administration doit prendre en compte pour déterminer si un délai dérogatoire est, ou non, manifestement abusif.
Pour des raisons de sécurité juridique, le présent amendement vise à combler cette lacune, en s'inspirant directement des critères mentionnés à l'article 7 de la directive du 16 février 2011 précitée. Il prévoit en outre que les délais de paiement dérogatoires, figurant dans des accords interprofessionnels adoptés à l'unanimité des familles professionnelles membres de l'interprofession concernée, sont présumés non abusifs. Pour refuser d'étendre un tel accord, l'administration devait donc démontrer en quoi ces délais dérogatoires présentent un caractère manifestement abusif, au regard des critères mentionnés ci-dessus.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.