Publié le 25 juin 2018 par : M. Ruffin, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, Mme Taurine.
L'article 27 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute atteinte à l'indépendance de pensée, de travail, de proposition, et de vote d'un membre du parlement fait l'objet de sanctions. Une loi organique fixe les conditions d'application du présent alinéa. »
Par cet amendement, nous proposons de mettre en place des sanctions en cas de non-respect de la liberté d'action d'un parlementaire.
En effet, cette actualité est brûlante, le règlement intérieur du Groupe majoritaire de l'Assemblée nationale imposant notamment, par la menace de sanctions à son article 16, l'interdiction de cosigner un amendement ou une proposition de loi d'autres députés : “Les députés membres et apparentés du Groupe ne cosignent aucun amendement ou proposition de loi ou de résolution issus d'un autre groupe parlementaire. En cas de manquement, les sanctions mentionnées à l'article 19 peuvent s'appliquer.”. De même, sur certains projets de loi, tels celui sur l'asile et l'immigration, des députés ne souhaitant pas voter dans le sens qui leur été indiqué ont été menacés (https://www.bfmtv.com/politique/loi-asile-immigration-des-deputes-larem-menaces-pour-leur-refus-de-voter-le-texte-1434227.html). Il faut mettre fin à ces atteintes inconstitutionnelles qui font des député.e.s représentante.s du peuple des godillots.
En détail, depuis les révisions constitutionnelles Chirac sur le quinquennat et Sarkozy en 2008, il est un constat partagé qu'un déséquilibre majeur existe entre les pouvoirs législatif et exécutifs, ce dernier ayant une prédominance marquée et préjudiciable pour notre vitalité démocratique.
Cet amendement propose de mettre fin à cette pratique préjudiciable pour la démocratie et incompréhensible pour les citoyens français, dite du « fait majoritaire », observable depuis 2002 – que les majorités aient été issues de l'UMP ou du PS -, qui consiste à ce que les députés, représentants du peuple français et détenteurs du pouvoir législatif arraché par le peuple depuis la révolution française de 1789, soient réduits, selon les observateurs, en exécutants muets d'oukazes présidentiels.
A cet effet, nous proposons de préciser l'article 27 de la Constitution (« Tout mandat impératif est nul. Le droit de vote des membres du Parlement est personnel ».) dont la pratique du « fait majoritaire » est de fait inconstitutionnelle. En effet, celle-ci consiste à ce que les parlementaires membres d'un Groupe soient menacés voire sanctionnés parce qu'ils s'écarteraient d'une position collective déterminée par le Groupe politique auquel ils appartiennent ou un parti politique extérieur au Parlement – position qui ne découle au demeurant pas de la consultation du corps électoral de leur circonscription -, et ainsi ne peuvent voter en leur âme et conscience et en prenant en considération d'une part les attentes et demandes exprimées par leurs électeurs et d'autre part les arguments des autres parlementaires les ayant convaincus.
En effet, la raison d'être de la nullité de tout mandat impératif découle de la pierre angulaire de la conception moderne du régime républicain. Quand les Anciens ne définissaient la République que par la mise en commun de ce qui est public, les Modernes ont, eux, caractérisé le régime républicain par l'usage collectif de la raison. C'est de la confrontation d'arguments fondés en raison qu'émerge la définition légitime de l'intérêt général et des moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. Or, enserrer les parlementaires dans le carcan de la logique de groupe empêche toute confrontation d'idées et ne peut qu'aboutir à ce que la volonté présidentielle l'emporte sur celle du peuple français, incarnée par ses représentants.
Ainsi cette pratique méconnaît l'esprit républicain et la lettre de la Constitution en imposant une discipline de Groupe, en muselant l'indépendance de pensée, et donc le caractère personnel du vote des parlementaires et pluraliste de leurs débats.
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