Publié le 14 mai 2018 par : Mme Obono, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.
Au 3° du I de l'article L. 752‑1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « non mariés » sont supprimés.
Par cet amendement, nous proposons de protéger les mineur·e·s ayant subi des mariages forcés en supprimant la condition de « non-mariés » pour les mineurs frères et sœurs de l'enfant bénéficiaire du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, ainsi que de préciser que la minorité légale doit bien s'entendre au sens du code civil français (18 ans) et non d'éventuelles minorités au sens d'un autre droit (par exemple, selon nos recherches la majorité légale est de 15 ans en Iran, 15 ans au Yémen, 15 ans en Arabie Saoudite, 16 ans au Népal).
La notion de « mineur non-marié » pose une réelle difficulté. En effet cette condition résulte d'un équilibre qui peut être problématique. La consacrer impliquerait que le droit français reconnaisse le mariage de mineurs mariés ce alors même qu'ils sont à la charge de leurs parents, et donc potentiellement dans certains pays les mineurs mariés de force, puisque ce phénomène problématique existe encore dans beaucoup de pays, parmi lesquels le Bangladesh par exemple, dont 3071 ressortissants ont demandé l'asile en France en 2015, ou encore la Guinée dont 3780 ressortissants ont demandé l'asile en France l'an dernier. Dans ces deux pays, plus de 60% des femmes ont été mariées avant leur dix-huitième anniversaire selon l'UNICEF (https://www.unicef.org/french/protection/index_earlymarriage.html).
Or si l'intention du Gouvernement est bien de ne pas ouvrir le droit à la réunification familiale pour les bénéficiaires du statut de réfugié ou la protection subsidiaire pour les mineurs mariés et leur époux ou épouse pour restreindre le nombre de bénéficiaires potentiels, cela équivaudrait donc dangereusement à nier la situation problématique des « mineurs mariés » qui sont encore à la charge de leurs parents. Pour ce faire, nous estimons que le curseur doit plutôt être placé sur la protection des enfants et leur intérêt supérieur (en conformité avec l'intérêt supérieur de l'enfant – puisqu'il s'agit bien ici de mineurs ! – consacré par l'article 3 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant de 1989).
La prise en compte de la majorité légale en droit français permet en outre d'éviter que le droit français ne reconnaisse de facto les mariages forcés de mineurs. En effet, afin de protéger les mineurs, en l'état du droit français, le mariage ne peut être contracté avant dix-huit ans révolus (article 144 du code civil), sauf exceptions par autorisation du procureur de la République ou des représentants légaux – parents (Article 145 du code civil, « (…) il est loisible au procureur de la République du lieu de célébration du mariage d'accorder des dispenses d'âge pour des motifs graves. » ; Article 148 du code civil : « Les mineurs ne peuvent contracter mariage sans le consentement de leurs père et mère ; en cas de dissentiment entre le père et la mère, ce partage emporte consentement. ».). Nous estimons qu'une protection similaire doit primer sur le risque de reconnaissance de mariages forcés de mineurs.
Ainsi, par exemple, un tel amendement permet qu'une enfant de 15 ans mariée mais toujours à la charge effective de ses parents puisse bénéficier du regroupement familial (parent ou frère et sœur mineur ayant obtenu le statut de réfugié ou la protection subsidiaire), et non se voir refuser celui-ci au motif qu'elle serait déjà mariée bien qu'étant mineure.
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