Gestion des risques climatiques en agriculture — Texte n° 4874

Amendement N° 238 (Adopté)

Publié le 8 janvier 2022 par : M. Descrozaille.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia 

La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre V du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifiée :

1° Le b du I de l’article L. 521‑3 est complété par les mots : « et de leur fournir les services correspondants aux activités pour lesquelles ils se sont engagés ; » ;

2° Après le 4° de l’article L. 521‑3‑2, sont insérés des 5° et 6° ainsi rédigés :

« 5° Le cas échéant, les modalités de constitution et de reprise de la provision constituée par la coopérative pour engagement de soutien des coopérateurs face aux aléas agricoles ;
« 6° Le cas échéant, les modalités de constitution et de fonctionnement des caisses de compensation. »

Exposé sommaire :

Cet amendement permet aux coopératives agricoles relevant des articles L 521‑1 et suivants du CRPM une provision comptable qu’elles pourront débloquer lors de la survenance d’un aléa agricole identifié dans le règlement intérieur de la coopérative.

La création d’une provision pour engagement de soutien des coopératives agricoles envers les associés coopérateurs pour aléa agricole a été discutée dans le cadre de la refonte du plan comptable des coopératives agricoles, adopté le 17 mai 2021. Elle poursuit le même objectif de gestion des aléas climatique que le projet de loi n° 4758. Les coopératives agricoles proposent donc de contribuer à la maîtrise des conséquences de ces aléas.

Le projet de provision proposé par La Coopération Agricole n’a pu aboutir, l’Autorité des normes comptables (ANC) estimant que les principes coopératifs n’étaient pas assez clairement affirmés dans le CRPM pour servir de base légale à la reconnaissance d’une provision légale.

Ce précédent fournit un exemple flagrant du manque de reconnaissance de la force contraignante des principes coopératifs au préjudice des coopérateurs que les coopératives souhaitaient soutenir pour amortir les conséquences financières de l’épisode de gel d’avril 2021.

Depuis quelques années, les exploitations agricoles sont confrontées à des événements climatiques extrêmes, à la fois de plus en plus violents et de plus en plus fréquents : grêle, gel, sécheresse, inondations, brûlure … Le GIEC a mis en évidence que ces événements climatiques extrêmes avaient vocation à se multiplier au point d’en devenir prévisibles sous l’influence du dérèglement climatique.

Ces événements impactent les exploitations d’autant plus qu’ils sont fréquents et de forte ampleur notamment à trois niveaux :

- Sur la production agricole et donc le revenu de l’année,

- Sur les pertes comptables et financières de plus en plus fréquentes,

- Et sur les pertes de marché quand les volumes ne sont pas disponibles et laissent de la place aux concurrents.

Les coopératives agricoles sont également directement impactées. Par leur fonctionnement et leur résilience, elles peuvent permettent la mutualisation du risque mais, dans la durée, elles sont également fragilisées si ces impacts perdurent et se multiplient. Elles ont procédé à des investissements qui ne peuvent être amortis s’ils sont sous employés. Elles perdent les marchés qu’elles avaient organisés. Elles perdent de manière durable des agriculteurs du fait des faillites de ces derniers, remettant en cause la pérennité de leurs apports.

La production des associés coopérateurs doit également faire face à des aléas biologiques, sanitaires et de volatilité des prix, pouvant fortement impacter le revenu des exploitations et dont les variations sont beaucoup plus caractérisées.

Aucun mécanisme comptable actuel ne permet aux coopératives agricoles de pallier la baisse de revenu des agriculteurs les années où les aléas se manifestent. En effet, les réserves des coopératives étant par nature impartageables, les excédents placés en réserve une bonne année ne peuvent plus être affectés aux associés coopérateurs l’année où ils seraient nécessaires pour amortir l’impact d’un aléa agricole pour sauvegarder la pérennité des exploitations et, partant, celle de la coopérative.

La Constitution d’une provision pour engagements envers les coopérateurs repose sur l’objet intrinsèque des coopératives qui se doivent, dans la mesure du possible, de maintenir ou d’améliorer la rentabilité de l’activité de l’associé coopérateur et de les aider à surmonter des aléas devenus inévitables. Une telle provision permet alors une couverture des risques climatiques subis par les associés coopérateurs. Elle repose aussi sur le principe coopératif de solidarité, les coopératives étant des outils dont se dotent les agriculteurs pour organiser leur solidarité par la globalisation de leurs volumes, la mutualisation de leurs investissements pour commercialiser les productions, éventuellement après transformation, mais aussi pour atténuer des risques.

La coopérative se doit d’appliquer les principes d’équité de traitement, c’est à dire que tous les associés placés dans une situation identique (un risque climatique par exemple) doivent être traités de manière équitable. En conséquence, face à un aléa quel qu’il soit, chaque associé sera traité de façon équitable et égalitaire : « A situation égale, traitement égal ».

La décision de mettre en place une provision pour engagements envers les coopérateurs relève du conseil d’administration (ou du directoire le cas échéant), qui est le seul organe compétent pour la détermination de la rémunération des associés coopérateurs (article L 521‑3-1 du CRPM). Ses décisions s’appliquent à tous les associés coopérateurs, dans le respect des principes coopératifs précités. Les modalités de mise en œuvre de cette provision (alimentation de la provision, utilisation…) seront nécessairement indiquées dans le règlement intérieur de la coopérative, qui s’applique à tous les associés coopérateurs (Pacte coopératif) de manière équitable et transparente.

L’intérêt d’une telle provision repose sur un mécanisme de mutualisation des risques en cas d’apparition d’un aléa climatique, biologique, sanitaire ou de volatilité des prix de marché, et relève de la raison d’être des coopératives agricoles d’améliorer et d’accroitre l’activité de ses membres en amortissant les difficultés financières des exploitations agricoles qui résultent des nombreux aléas auxquels elles sont confrontées.

Cette demande de création de provision spécifique a été présentée à l’ANC qui a adopté, le 7 mai 2021, le nouveau plan comptable des coopératives agricoles (homologué par décret du 22 novembre 2021 publié le 4 décembre 2021). L’ANC a estimé que pour intégrer cette provision dans le plan comptable, il convenait d’en préciser la base juridique, dans la mesure où les seuls principes de solidarité et de mutualisation ne sauraient constituer une base juridique suffisante. Elle a donc renvoyé la création de cette provision au législateur.

C’est la raison pour laquelle, cet amendement propose que soient ajoutées les bases légales nécessaires au CRPM.

Concernant la provision, cela obligerait les coopératives qui souhaitent mettre en place ce dispositif de provision, à prévoir dans leur règlement intérieur les conditions de Constitution et la reprise de la provision lors de la réalisation du risque ainsi que les conditions d’assistance portée aux coopérateurs.

Dans la mesure où la provision pour engagement est distincte du mécanisme de compensation, déjà existant dans les coopératives, et qu’il doit nécessairement être prévu dans le règlement intérieur des coopératives agricoles (ce qui est déjà le cas des caisses de compensation), il est également proposé d’ajouter la mention de la provision nouvelle proposée et des caisses existantes à l’énumération des clauses obligatoires du règlement intérieur des coopératives agricoles, ajouté dans le cadre de la loi EGA et qui a omis de mentionner les caisses de compensation. Il en résulte également une proposition de modification de l’article L 523‑1.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.