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...nte, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, cette proposition de loi revient en nouvelle lecture devant notre Assemblée après son adoption par le Sénat. Sa philosophie n'en a pas changé, mais, comme l'ont très bien rappelé nos collègues, certaines dispositions ont été durcies par la majorité sénatoriale. Le texte en discussion tend à faire de la mise en rétention des demandeurs d'asile dits « dublinés », donc d'une privation de liberté, un régime de droit commun, ou du moins qui pourra être couramment appliqué. Après un bref rappel sur le règlement de Dublin, je centrerai mon propos sur l'objectif de cette proposition dans un contexte annoncé de refonte du régime de l'immigration comme du statut des réfugiés, et d'incertitudes sur le caractère opérationnel du disposit...
...it bientôt venir en discussion. Cette urgence peut s'expliquer par la décision récente de la Cour de cassation, qui est susceptible de fragiliser le régime de mise en rétention. Le Sénat, dans une sorte de course à la restriction des droits, a, de son côté, durci certaines dispositions de la proposition de loi. Je pense, entre autres, au délai, réduit de quatorze à sept jours, pendant lequel les demandeurs d'asile peuvent déposer un recours, ou à l'allongement à six jours de la durée de validité des ordonnances autorisant les visites domiciliaires. Lors des débats en commission, à l'occasion de cette deuxième lecture, il a été beaucoup question de pragmatisme et de réalisme. Il a été demandé aux députés de ne pas avoir d'états d'âme, de mettre leur conscience de côté…
… pour choisir l'efficacité. C'est bien en cela que cette proposition, qui se veut simplement efficace, fait fi de la réalité. À l'instar d'autres textes, elle apparaît surtout destinée à faire savoir à l'opinion, qui a souvent du mal à distinguer la figure du demandeur d'asile de celles du migrant économique et de l'étranger, que l'on restera ferme sur les principes, quitte à oublier que la réalité est souvent différente. Nous restons songeurs en constatant à quel point le caractère opérationnel de ces mesures n'est pas pris en compte. Pourtant, selon un rapport d'un de nos collègues du Sénat, seules 10 % des procédures de transfert au titre du règlement de Du...
...dements et les moyens. Je veux dire également que nous ne pouvons dissocier, dans cet examen, les dispositions de ce texte et celles du futur projet de loi sur l'asile et l'immigration dont nous avons connaissance. Partons de la situation concrète de l'état des personnes qui relèvent de la procédure de « dublinage », par laquelle la France peut, en théorie, engager des démarches pour renvoyer un demandeur d'asile vers le pays responsable de l'examen de sa demande. En 2015, la proportion des personnes concernées par cette procédure représentait seulement 10 % du total des demandeurs d'asile. À présent, plus d'une personne sur deux est susceptible d'en relever : l'ampleur est tout autre. Les personnes qui relèvent potentiellement de la procédure de dublinage sont-elles dans cette situation parce qu...
Efforcez-vous de supporter l'expression d'avis contraires ! En fait, les chiffres révèlent que les conditions posées par le règlement de Dublin ne répondent pas au défi qui nous est lancé, mais agissent comme une arme de dissuasion massive à l'encontre des demandeurs d'asile et, plus généralement, des migrants. Certaines questions restent donc entières : comment la France respecte-t-elle le droit d'asile et les principes de la convention de Genève, du préambule de la Constitution de 1946 et des droits qui leur sont afférents ? Notre pays compte-t-il faire face dignement aux conséquences de ces mouvements de population, dans lesquels il a, comme la plupart d...
...ne mesure de privation de liberté pour le confort de l'administration. Jusqu'à présent, la rétention ne pouvait concerner que des personnes en situation irrégulière. Elle n'intervenait que pour exécuter une décision d'éloignement et ne devait durer que le temps strictement nécessaire à organiser le départ de la personne concernée. Avec cette proposition de loi, l'enfermement serait préventif, le demandeur d'asile placé en procédure Dublin pouvant faire l'objet d'une rétention administrative dès l'introduction de sa requête aux fins de prise en charge, le temps pour l'administration de déterminer l'État responsable de sa demande. La rétention pourrait donc s'appliquer à un très grand nombre de personnes en procédure Dublin, ce qui conduirait à un enfermement massif et disproportionné. L'objectif es...
...aison pour laquelle notre groupe a déposé une proposition de loi visant à interdire le placement en rétention administrative des enfants mineurs. L'intérêt de l'enfant doit systématiquement primer sur les conséquences de son origine étrangère. La jouissance des droits énoncés dans la Convention internationale des droits de l'enfant doit être accessible à tous les enfants, y compris les enfants de demandeurs d'asile, réfugiés ou migrants. Pour conclure, nous voterons une nouvelle fois résolument contre ce texte qui banalise les restrictions à la liberté individuelle des demandeurs d'asile, y compris des enfants, et tend à dégrader leur situation à toutes les étapes de leurs parcours. Ce texte préfigure malheureusement le futur projet de loi, très répressif, sur l' asile et l'immigration, qui a été ...
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pour aborder le débat sur cette proposition de loi avec pragmatisme et pour éviter les caricatures entendues de part et d'autre, je crois utile de répondre à quelques questions. Cette proposition de loi a-t-elle vocation à traiter de l'accueil des demandeurs d'asile, de l'intégration des réfugiés et de la situation de tous les étrangers sur notre territoire ? À l'évidence, non ! Nous apportons ici une réponse légale à un arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2017, qui constatait, dans le droit français, l'absence de définition du risque non négligeable de fuite. Et à quoi nous sert cette définition ? À faciliter le transfert, avec une possib...
...faire son marché, en quelque sorte, à la recherche de la législation la plus généreuse – ou la plus laxiste. Si la démarche adoptée par les versions successives du règlement Dublin est certes opportune, force est de constater que son application aboutit à un échec cuisant. Quelques chiffres le démontrent à l'échelle de notre pays – mais d'autres aussi bien à l'échelle européenne. En 2016, 25 963 demandeurs d'asile ont fait l'objet d'une procédure Dublin ; 14 308 d'entre eux ont reçu l'accord d'un autre État membre de l'Union européenne leur permettant d'y être pris en charge ; et 1 293 demandeurs d'asile y ont effectivement été transférés. À l'évidence, mes chers collègues, il y a là une pyramide inversée : sur près de 26 000 demandeurs d'asile concernés, un peu plus de 14 300 sont acceptés et à ...
Il n'existe plus de politique d'éloignement dans notre pays – le reste relève de la communication. Elle est devenue complètement inefficace et quasiment impuissante. Selon un rapport de la Cour des comptes paru en 2015 – M. Valls était alors Premier ministre – , plus de 96 % des personnes déboutées du droit d'asile restent en France. Autrement dit, plus de 95 % des demandeurs d'asile déboutés demeurent illégalement sur notre territoire sans titre de séjour. Selon les chiffres de l'année 2017, plus de 60 000 personnes ont été déboutées de leur demande d'asile et plus de 55 000 d'entre elles – il importe de le rappeler – resteront, définitivement ou presque, sur le territoire national. Nous ne pouvons plus continuer ainsi. Cette immigration illégale de masse remet en ...
...rs à la rétention administrative dans des cas très précis. Il est naïf de penser qu'une assignation à résidence permettra de mettre à exécution une obligation de quitter le territoire national, comme l'ont cru les membres de la majorité socialiste qui a précédé l'actuelle, ce qui a mené à l'explosion de l'immigration dans notre pays. Ce principe, nous voulons le systématiser, notamment pour les demandeurs originaires des pays sûrs. Nous débattrons prochainement, madame la ministre, d'un projet de loi relatif à l'asile et à l'immigration, et nous déposerons des amendements en ce sens. Bien que cela ne concerne pas directement le texte soumis à notre examen, je souhaite insister sur la nécessité d'accorder davantage de moyens aux centres de rétention administrative. La tragédie de Marseille a mont...
...nion européenne, l'État membre qui sera responsable de son examen. Plus précisément encore, notre rapporteur l'a rappelé, l'obligation d'adopter un texte résulte d'un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne, rendu contre la République tchèque, qui prescrit que les États membres sont tenus de fixer dans leur législation les critères objectifs d'un « risque non négligeable de fuite » des demandeurs d'asile, permettant de placer ceux-ci en rétention lors d'une procédure de transfert vers un autre État membre. Cette obligation a été rappelée à de nombreuses reprises, et encore très récemment, par la Cour de cassation. Aujourd'hui, ces critères n'existent tout simplement pas dans notre législation. Le seul objet de cette proposition de loi est – ou du moins était à l'origine, car elle compor...
...léchir sur le temps long. Or le cadre juridique européen, pensé pour répondre en urgence à une situation critique, est pour le moins inadapté à une gestion à long terme des migrations. Le système actuel fait peser de manière importante et totalement injuste le poids de l'accueil et de la prise en charge des réfugiés sur les pays de première entrée. Il prévoit notamment que le pays dans lequel le demandeur d'asile est arrivé en premier est compétent pour statuer sur la demande. Cette situation pousse de nombreux demandeurs d'asile à se soustraire aux procédures, et à attendre dans la clandestinité l'expiration du délai de dix-huit mois leur permettant de déposer une demande d'asile dans le pays de résidence. De plus, les expulsions de « dublinés » sont souvent suivies d'un retour quasi immédiat de ...
...'est au peuple français de décider, surtout en matière d'accueil de populations étrangères, et à nous, parlementaires, de veiller à ce qu'il en soit ainsi. S'il s'agit d'harmoniser nos législations pour en accroître l'efficacité, tant mieux ! Mais en matière de droit d'asile, certains de nos voisins européens font parfois preuve d'une rare inconséquence. Depuis 1990 et les accords de Dublin, les demandeurs d'asile doivent déposer leur dossier de demande dans le premier pays d'Europe où ils sont entrés. Leurs empreintes sont alors enregistrées dans le fichier Eurodac. Ainsi, pour toute demande d'asile déposée en France, la préfecture saisie consulte ce fichier et, si les empreintes du demandeur d'asile y figurent, demande au premier pays d'accueil, le pays responsable, de le récupérer, si j'ose dir...
...n administrative à une évaluation individualisée des personnes concernées, et au principe de proportionnalité qu'impose la privation de liberté. Notre groupe a également souhaité que ne soient pas confondues la volonté de dissimuler son identité et l'impossibilité – de bonne foi – de présenter un document d'identité en cours de validité, là encore pour tenir compte de la situation spécifique des demandeurs d'asile. Cet équilibre a été modifié par le Sénat, qui a élargi la rétention administrative au refus, par les personnes concernées, de laisser relever leurs empreintes digitales. Je dois dire que l'intention n'est pas illégitime. Je me bornerai ici à un seul exemple : entre janvier et septembre 2017, sur 5 576 présentations à la borne Eurodac dans le Calaisis, 62 % de refus de recueil des empre...
...minons aujourd'hui en deuxième lecture nous revient inutilement durcie par la majorité de droite du Sénat. Inutilement, car certains ajouts n'apportent rien à l'objet de la loi. Je doute, par exemple, que la réduction de quinze à sept jours du délai de recours contre une décision de transfert permette une meilleure application du régime d'asile européen. En revanche, elle sacrifie les droits des demandeurs et le travail de ceux, avocats et associations, qui les accompagnent. Inutilement, car la condition ajoutée, pour caractériser le risque non négligeable de fuite, de la dissimulation d'éléments du parcours migratoire ou de la situation familiale du demandeur est vague. Parle-t-on d'éléments cachés sciemment ou par omission ? Et même si ces éléments étaient cachés sciemment, il faut peut-être en...
...onditions d'accès au titre de séjour pour étranger malade a été entendue, ce qui est une première très bonne décision. Aurons-nous ouvert une réflexion nationale et européenne sur la question des migrations climatiques ? Ce serait cohérent avec notre volonté d'être exemplaires face au défi climatique. Aurons-nous pris des mesures fortes, dans la loi ou à côté de celle-ci, pour l'intégration des demandeurs d'asile, notamment pour faciliter la formation et le travail pendant la durée de la procédure ? Aurons-nous trouvé un compromis sur le délai maximal de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ? Aurons-nous eu un débat éclairé sur la durée maximale de rétention et fait évoluer les conditions de rétention ? Aurons-nous réussi à avoir une approche globale en intégrant la question de l'...
...dans l'espace Schengen. Nous avons tous en mémoire les images insoutenables de migrants traversant les frontières, les mers et les montagnes au péril de leur vie, et nous avons tous conscience que ces événements tragiques n'appartiennent pas qu'au passé ou au présent, car tout laisse à penser qu'ils ne feront que s'accroître dans l'avenir. La France possède une tradition historique d'accueil des demandeurs d'asile. C'est d'ailleurs l'honneur de la République que d'accorder sur ses terres l'asile à toute personne persécutée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social, de ses opinions politiques ou de son combat pour la liberté. Mais cet engagement moral ne doit pas nous empêcher de rester lucides et de regarder la réalité. Cette réalité, c'est qu'...
...ys compétent pour traiter la demande d'asile afin d'éviter qu'un requérant n'en sollicite plusieurs successivement. Le dernier règlement, adopté en 2013 et appelé « Dublin III », fixe plusieurs critères de cette nature. Toutefois, la procédure de détermination du pays responsable de l'examen de la demande d'asile puis le transfert de la personne peuvent prendre plusieurs mois. Durant ce délai, le demandeur peut bénéficier du droit de se maintenir sur le territoire jusqu'à la fin de la procédure. Le règlement Dublin institue donc un principe simple en théorie, mais qui pose de nombreux problèmes en pratique, car il fait reposer toute la prise en charge des demandeurs sur les pays par lesquels ils sont entrés. Or, souvent, ceux-ci ne souhaitent que transiter par ces pays, par exemple l'Italie ou la ...
C'est en permettant à chaque pays d'instruire rapidement les demandes d'asile dont il est responsable, avec des demandeurs physiquement présents, que nous assurerons la pérennité de nos dispositifs d'asile et la dignité des personnes qui ont été jetées sur les routes de la migration.