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Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues, j'ai le sentiment d'être témoin d'une triste hypocrisie. Je me souviens, en effet, de l'émotion qui avait saisi l'ensemble des groupes parlementaires après la diffusion du reportage de la chaîne américaine CNN montrant au monde la mise en esclavage, en Libye, de réfugiés originaires d'Afrique. J'ai aussi le souvenir d'images qui avaient bouleversé notre pays et qui, j'en suis convaincue, nous avaient toutes et tous bouleversés également : celles de personnes qui, cherchant tout simplement à échapper à la guerre et à la misère, avaient trouvé la mort en Méditerranée. Les réfugiés – j'espère que nous serons d'accord sur ce point – ne sont pas des marchandises. Ce...
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui tend à durcir les conditions d'accueil des réfugiés issus de la procédure Dublin, en rendant quasi systématique leur enfermement en centre de rétention.
On privera les personnes de liberté uniquement pour déterminer l'État européen responsable de leur demande d'asile : on fait payer aux réfugiés les indigences européennes, voilà la vérité.
... hors de l'Union. Seront considérées comme irrecevables les demandes d'asile de personnes ayant transité par des pays tiers considérés comme sûrs. Ces personnes y seront ainsi renvoyées sans que leur demande soit traitée par le pays concerné. Cela reviendrait à généraliser l'accord passé en mars 2016 avec la Turquie, par lequel, rappelons-le, l'Union européenne a confié à celle-ci la gestion des réfugiés syriens. Un an après, l'Europe considère qu'un tel accord est un succès puisqu'il a permis de fermer la route aux migrants, comme en témoigne la chute du nombre de traversées. À croire que nous sommes sourds, indifférents, impuissants devant les conséquences de cette disposition pour les demandeurs d'asile, abandonnés à leur sort alors qu'ils sont victimes de situations proprement dramatiques. ...
...grants en Libye, est en réalité comptable de milliers de morts, dans des embarcations sommaires ou sur la route des Balkans, qui tarauderont à jamais nos consciences. L'Union européenne s'est lancée dans une politique d'endiguement, à rebours des valeurs humanistes qui devraient l'animer, et le Gouvernement, qui présentera en 2018 un projet de loi permettant à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides – l'OFPRA – de refuser l'asile à un demandeur pour les mêmes raisons, marche dans ses pas. C'est ce que vous faites : vous vous conformez à cette logique qui tend non à accueillir, mais à contenir, de sorte que vous pouvez conjuguer un discours d'ouverture à des pratiques qui ferment aux réfugiés les portes de notre territoire.
Pour emprunter cet autre chemin, qui, je le répète, est possible, il faut placer au coeur de notre politique la dignité humaine des réfugiés, leur droit fondamental à une vie de famille. Il faut accompagner les mineurs isolés et en finir avec le placement en centre de rétention d'enfants, même accompagnés de leurs parents. Il faut construire des camps d'accueil aux normes internationales sur le modèle de celui de Grande-Synthe, pour proposer aux réfugiés des conditions dignes, et des centres d'accueil des demandeurs d'asile pour les ...
...e ces êtres humains qui fuient la guerre, la misère – que la France a parfois contribué à causer – et la mort, je ne vous demande pas de partager notre sentiment de révolte, mais au moins de vous indigner pour mieux penser, et peut-être de vous rappeler quelques moments de notre histoire. Tout le monde ici se souvient-il qu'entre 1936 et 1938 nous avons su accueillir des centaines de milliers de réfugiés espagnols, je dis bien des centaines de milliers ? Ce que nous avons su faire alors, pourquoi ne saurions-nous pas le faire aujourd'hui pour des personnes qui fuient la guerre et la misère et qui, au péril de leur vie, tentent de traverser la Méditerranée dans des conditions tout simplement insupportables, inacceptables ? Ayons à coeur de mener des politiques justes et humaines. Pour notre part...