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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure, en guise d'introduction, je citerai deux de nos ministres, même s'ils ne sont pas là. Bruno Le Maire : « L'évasion fiscale est une attaque contre la démocratie », mots prononcés lors de la crise provoquée par les révélations des Paradise papers ; Gérald Darmanin : « La fraude fiscale est un coup de poignard au pacte républicain ». Ces deux phrases expliquent pourquoi nous voterons contre le texte et pourquoi nous présentons une motion de rejet préalable. Au demeurant, elles donnent la dimension du fléau : un coup de poignard, c'est mortel ; et on ne soigne pas un cancer avec une aspirine. Là réside tout le problème posé par le projet de loi qui nous est soumis aujour...
Et c'est même un pas en avant, deux pas en arrière, avec les articles 9, relatif à l'instauration d'un plaider coupable, et 9 bis, relatif au renforcement des conventions judiciaires d'intérêt public et à l'élargissement de leur champ d'application à la fraude fiscale. L'article 9 permet d'éviter un procès en acceptant la peine proposée par le procureur de la République, dont je rappelle qu'il est sous les ordres directs du ministre de la justice. Que l'on puisse échapper au procès pose problème : d'une part, celui-ci procure au contrevenant une publicité qui le pénalise davantage encore ; d'autre part, c'est souvent au cours de l'enquête que le dossi...
...t le Président de la République disait pourtant, au mois d'avril dernier, qu'il s'agissait d'« États dont les règles permettent aujourd'hui des contournements massifs ». Là encore, ce projet de loi porte un coup d'épée dans l'eau. Ce texte comprend quelques mesures positives, mais – convenons-en – si faibles qu'elles ne dissuaderont pas grand'monde. Ainsi, les éditeurs de logiciels facilitant la fraude encourront une amende maximale de 10 000 euros. Vous instaurez le name and shame, mais sans publication automatique : tout dépendra donc du bon vouloir d'une commission. Je regrette aussi que la commission mixte paritaire ait fait disparaître l'amendement que nous avions fait adopter, qui intégrait les particuliers à ce dispositifs. Madame la rapporteure, vous avez évoqué la suppression par la C...
... l'examen du projet de loi de finances pour 2018. Mais l'amende ne sera, au plus, que de la moitié des gains retirés de la malversation : non seulement on ne récupère pas tout l'argent qui a enrichi le cabinet, mais on ne le pénalise même pas ! C'est un peu la même histoire que celle d'HSBC dont je parlais tout à l'heure. Bref, je crains fort que rien n'empêche, après l'adoption de cette loi, de frauder davantage ou d'aller plus loin dans l'évasion fiscale. La plus fréquente et la plus efficace des façons de contourner l'impôt n'est d'ailleurs pas remise en question – il faudrait pour cela remettre en cause les traités européens : c'est le dumping fiscal que nous impose l'appartenance à cette zone de libre-échange total qu'est l'Union européenne. Aujourd'hui, les plus riches de nos concitoyens...
Je veux le réaffirmer : nous étions très enthousiastes à l'idée de travailler tous ensemble, toutes tendances confondues, pour lutter contre la fraude fiscale. Nous y avons d'ailleurs réussi en levant partiellement le verrou de Bercy. Mais que s'est-il passé depuis le « serment de Lamartine » ? Où sont passées les bonnes intentions qui s'étaient exprimées alors ?
Peut-être le Sénat les a-t-il fait disparaître. J'y reviendrai. Étendre le plaider-coupable et la convention judiciaire d'intérêt public à la fraude fiscale, c'est balayer l'avancée, certes partielle, sur le verrou de Bercy ; c'est fragiliser le consentement à l'impôt ; c'est encourager les fraudeurs à négocier, plutôt que de les dissuader de frauder. Enfin, l'évasion fiscale est la grande absente de ce texte : lutter contre la fraude sans lutter contre l'évasion, cela revient – pardonnez-moi l'image – à pêcher sans hameçon ! Nous vous avion...