Intervention de Nathalie Loiseau

Séance en hémicycle du lundi 27 novembre 2017 à 21h30
Promotion des symboles de l'union européenne — Discussion générale

Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes :

… nous avons deux drapeaux, deux hymnes, deux devises et, fort heureusement, une seule monnaie. Cela pose-t-il une difficulté ? Aucune, précisément parce que l'Union européenne n'est pas un État mais une construction originale dont la devise est « In varietate concordia », l'unité dans la diversité.

À ceux qui estiment que ces symboles européens mettent à mal notre identité nationale, nous répondons qu'ils la complètent, l'enrichissent, et, au fond, la prolongent. On peut vouloir une forme d'Europe ou une autre – de la plus intergouvernementale à la plus fédérale– , on peut même feindre d'ignorer les institutions européennes, mais on ne peut pas contester le fait que l'idée européenne s'incarne au quotidien.

L'Europe est, bien sûr, le plus vaste espace ouvert de prospérité au monde. Là se trouve son origine, mais réduire l'Europe au marché unique serait pourtant une profonde erreur. Cette erreur, nous ne voulons pas la commettre. Aussi sommes-nous déterminés à faire de l'Europe sociale une réalité. C'est tout le sens du combat que nous avons mené sur le détachement des travailleurs ainsi que de la proclamation du socle européen des droits sociaux lors du sommet de Göteborg, qu'il faut maintenant traduire en initiatives concrètes.

Au-delà, c'est notamment en renforçant l'action de l'Union européenne en faveur de la culture que nous travaillerons à consolider les valeurs que porte le projet européen.

Permettez-moi de vous faire part d'une expérience personnelle, celle d'une diplomate qui a vécu et travaillé sur les cinq continents : là où, en Europe, on perçoit surtout nos différences, parfois nos divisions, ce qui frappe depuis les rues de Dakar, de Rabat, de Djakarta ou de Washington, c'est au contraire la force de la culture et des valeurs européennes, ce mélange si unique de liberté individuelle et de solidarité, d'affirmation de soi et de défense du multilatéralisme.

C'est le résultat d'une longue histoire, faite de bruit, de fureur, de sang versé mais aussi des mouvements d'idées qui ont marqué le continent depuis l'Antiquité en passant par la Renaissance, les Lumières et la Révolution française : là se situe notre héritage commun.

C'est dans cette complémentarité entre ce qui relève de la nation et ce qui revient à l'Europe que le concept de souveraineté européenne prend tout son sens. Nos défis ne sont plus ceux des seules nations : qu'il s'agisse de la lutte contre le terrorisme, de la défense de nos économies face à une concurrence pas toujours loyale, des migrations ou encore du changement climatique, c'est l'Europe qui est la mieux à même de nous protéger.

Opposer souveraineté nationale et souveraineté européenne revient à prendre le risque de nous affaiblir, car l'une et l'autre doivent se compléter pour assurer la sécurité et le bien-être des citoyens tout en garantissant la liberté individuelle.

Soyons clairs et réalistes : sans la souveraineté nationale, la souveraineté européenne n'a pas de sens. À l'inverse, sans souveraineté européenne, la souveraineté nationale n'est pas en mesure de relever les défis de notre temps. Nous avons besoin tout à la fois d'une France forte et d'une Europe puissance, c'est-à-dire autonome et capable de défendre ses valeurs comme ses intérêts dans le monde d'aujourd'hui et de demain.

Revenons aux symboles européens. Après avoir évoqué la devise, je voudrais dire un mot du drapeau étoilé sur fond bleu. Il a d'abord été l'emblème du Conseil de l'Europe, et donc de la Convention européenne des droits de l'homme ; il est devenu le drapeau de toutes les institutions européennes en 1986 ; il a été hissé pour la première fois sur le Quai d'Orsay le 13 juillet 2007, à quelques mois de la présidence française de l'Union européenne ; il est présent dans votre hémicycle depuis 2008. Ce drapeau est avant tout le symbole des valeurs qui unissent l'Europe, des libertés fondamentales inscrites dans la Convention européenne des droits de l'homme, dans les traités européens, et désormais dans la Charte européenne des droits fondamentaux.

Par ce drapeau, nous reconnaissons que nous, Européens, sommes rassemblés par un modèle juridique unique au coeur duquel figurent des principes qui ne sont pas notre propriété exclusive, mais qui sont universels et dont la construction politique européenne est la garante. Ce drapeau est donc à la fois le symbole d'une entité politique, que l'on est certainement en droit de contester ou de critiquer, mais aussi le symbole de valeurs qui doivent nous rassembler.

Ne nous y trompons pas, je partage avec certains orateurs dans ce débat une affection particulière pour le drapeau des Nations Unies.

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