Avis défavorable. Que s'est-il passé depuis l'adoption de la loi de modernisation de la santé qui prévoyait la généralisation du tiers payant intégral ? Acte I : le Conseil constitutionnel a censuré la généralisation de la part complémentaire. Il ne s'agit donc pas d'un choix politique mais d'une décision du Conseil constitutionnel qu'il a justifiée par l'absence de garanties apportées aux professionnels quant à l'applicabilité réelle du tiers payant généralisé intégral. Acte II : le rapport commandé par la ministre de la santé à l'IGAS fait état de difficultés concrètes concernant l'application du tiers payant généralisé, rejoignant ainsi le rapport préfigurant la réflexion politique sur la généralisation du tiers payant, qui évoquait un « chantier monumental » voué à durer plusieurs années.
Telles sont les conditions qui justifient pleinement de ne pas prendre de risques vis-à-vis du système de santé, des patients et des professionnels, notamment des médecins libéraux, et de proposer une solution pragmatique consistant à tendre vers un tiers payant généralisé pour l'ensemble des médecins et des patients. Il convient de ne pas l'imposer aujourd'hui, non seulement parce que nous ne disposons pas encore de la solution technique nécessaire, mais aussi parce que les premiers concernés n'ont pas donné leur assentiment.
À l'origine, la carte Vitale devait être mise en place de manière très brutale mais il a finalement été décidé de faire confiance aux médecins, en prenant le pari qu'ils adopteraient naturellement la carte si elle fonctionnait ; le taux de couverture des médecins par la carte Vitale est désormais supérieur à 95 %. Autrement dit, si nous mettons à la disposition des médecins libéraux une solution technique opérationnelle englobant l'assurance maladie et l'assurance complémentaire qui permettra aux patients de se contenter de passer leur carte Vitale ou toute autre carte dans un lecteur afin d'obtenir une garantie de paiement sans délai et sans difficulté technique, les médecins l'adopteront naturellement parce que ce mode de paiement est plus pratique qu'un chèque – qui traîne parfois dans un tiroir ou dont le patient demande de retarder l'encaissement en attendant son remboursement –, des espèces ou encore des impayés. La généralisation sera plus pratique lorsqu'elle fonctionnera. Nous ne voulons pas imposer un dispositif en espérant qu'il fonctionne ; le Conseil constitutionnel s'y refuse, tout comme la mission de l'IGAS et l'ensemble des syndicats de professionnels. La solution pragmatique est donc celle du tiers payant généralisable consistant à tendre vers un dispositif qui bénéficiera à tous. Nous ferons ainsi reculer le renoncement aux soins – encore une fois, toutes les études montrent que dans 90 % des cas, le renoncement aux soins onéreux pour raisons financières concerne les soins dentaires, optiques et auditifs. Dans ce domaine aussi, nous sommes très ambitieux puisque nous entendons supprimer le reste à charge pour ces soins d'ici à la fin du mandat.
Le Gouvernement prend très au sérieux la question du renoncement aux soins, sur laquelle la ministre de la santé s'est engagée résolument. Il convient juste de faire les choses dans l'ordre pour que notre action réussisse, car nous prendrions un risque considérable à créer une large brèche qui déstabiliserait le système.