Intervention de Aurélien Taché

Séance en hémicycle du mardi 28 novembre 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Taché :

Monsieur le président, madame la ministre du travail, chers collègues, la feuille de route était claire : notre majorité, une fois élue, engagerait toutes ses forces dans la bataille pour l'emploi, en commençant par moderniser le code du travail. Alors que nous nous apprêtons à voter ce projet de loi de ratification, je suis fier de pouvoir dire que notre engagement a été tenu.

Le chômage reste la première préoccupation des Français, et nous leur démontrons que, comme eux, nous croyons au travail qui libère, au travail qui rend fier, auquel doit pouvoir accéder chacun de nos concitoyens. Pourtant, 5,6 millions de personnes ne peuvent encore travailler aujourd'hui dans notre pays, ou pas autant qu'elles le voudraient, et, pour elles, le principe de faveur, souvent invoqué à la gauche de cet hémicycle, ne trouve pas à s'appliquer. Alors oui, pour ces 5,6 millions de Français, nous avons voulu aller vite et nous avons choisi, comme promis pendant la campagne, la voie des ordonnances.

Nous l'avons vu en juillet en commission puis encore la semaine dernière dans cet hémicycle, avec au total soixante-dix heures de débat, des dizaines d'auditions et l'examen de milliers d'amendements : la démocratie politique a tout de même pu s'exprimer. C'est maintenant sur le terrain social qu'elle doit se prolonger.

Le choix que nous faisons avec ce texte est de nous adresser aux entreprises, en particulier aux plus petites d'entre elles, grandes oubliées de toutes les dernières réformes, auxquelles nous voulons donner les moyens de se développer, car c'est bien là que se crée l'emploi, mes chers collègues.

Avec ce texte, nous faisons aussi le choix de renforcer le dialogue social, en faisant confiance à tous les acteurs du monde professionnel : salariés, dirigeants, syndicats et organisations patronales. Nous leur donnons les moyens de s'organiser et de répondre aux défis posés par une économie ouverte, qui connaît des mutations rapides et dans laquelle chacun aspire à plus de liberté, d'autonomie et de capacité à décider. Si nous misons ainsi sur le dialogue social, c'est parce que nous savons que, partout où il est présent, les résultats sont au rendez-vous. Chacun a donc sa responsabilité : celle du législateur est de sécuriser les relations de travail et de prévoir le cadre dans lequel la démocratie sociale peut s'exprimer ; à ses acteurs, ensuite, de s'en emparer !

Avec ce texte, nous donnons de la lisibilité à chacun et faisons confiance aux entreprises en tant que collectif humain. Nous leur disons : maintenant, c'est à vous de jouer ; emparez-vous de ces outils pour bâtir l'entreprise de demain. Nous sommes convaincus que c'est la bonne manière de s'attaquer au chômage et de redonner du sens au travail. Une entreprise moderne et performante est une entreprise démocratique et sociale mais dans laquelle chacun connaît, dès le départ, les règles du jeu.

C'est donc aujourd'hui le nouvel horizon d'un modèle social à la française que nous voulons dessiner. Pour cela, nous renforcerons le rôle des branches. C'est en effet la branche qui connaît les besoins du secteur qu'elle recouvre et qui, historiquement, s'est construite comme le lieu privilégié de la négociation collective. En lui donnant plus de poids, nous confions à chaque secteur d'activité les moyens de s'organiser autour de ses besoins. Aménagement des horaires de travail, recours aux CDI de projet : tout cela sera désormais défini dans le cadre de la branche. Puisqu'elle connaît la réalité du secteur, elle constitue donc le bon niveau de régulation.

De plus, les branches auront désormais l'obligation de prendre en compte les spécificités des TPE et des PME – les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises – , afin de mieux les protéger. Cette décentralisation et ce poids sans précédent donnés aux syndicats sont attendus par les entreprises et les salariés depuis des années, pour en finir avec des normes parfois déconnectées du quotidien et redonner du sens à des élections professionnelles où ils pourront désormais pleinement s'exprimer.

Pour rendre cette négociation au sein des branches encore plus pertinente, nous réduirons leur nombre à 200, contre plus de 700 aujourd'hui. Moins nombreuses, les branches seront tenues de négocier et auront les moyens de le faire. C'est cela, faire confiance aux salariés et à leurs représentants, plutôt que prétendre sans cesse décider à leur place. Enfin, en faisant de l'accord d'entreprise le principe, nous leur donnerons les moyens de poursuivre ce dialogue au plus près du terrain, sur tous les sujets qui font leur quotidien.

Mais, parce qu'invoquer le dialogue ne saurait suffire à le provoquer, ce texte offre aussi des moyens concrets pour l'organiser dans de bonnes conditions. Auparavant diluée entre plusieurs instances, la représentation des salariés a été consolidée et structurée au sein d'une seule. Le nouveau comité social et économique, le CSE, rassemble les compétences des anciens délégués du personnel, du CHSCT – comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail – et du comité d'entreprise. Les salariés auront désormais un lieu unique pour discuter et négocier tous les aspects de la vie de l'entreprise. C'est en lui que nous plaçons notre confiance pour que salariés et employeurs s'emparent des négociations.

Les entreprises pourront même aller plus loin que cette fusion et ouvrir aux délégués syndicaux la possibilité de transformer le CSE en un puissant conseil d'entreprise. Dirigeants, syndicats et salariés pourront alors ouvrir la voie à un nouveau modèle d'entreprise, basé sur la codécision. Demain, sur des sujets comme la formation, l'égalité professionnelle, les salaires ou le bien-être au travail, salariés et chefs d'entreprise devront décider ensemble ; l'entreprise deviendra alors, réellement, un bien commun.

Et, parce que nous ne pouvons priver la moitié des entreprises de ces nouvelles possibilités, nous donnons les moyens aux salariés des TPE et PME la possibilité de conclure des accords, même quand, malheureusement, les syndicats sont absents. Nous sommes convaincus que renforcer la négociation collective est le meilleur moyen d'amener les syndicats dans ces entreprises, même si, comme les partis politiques, ceux-ci devront eux aussi se moderniser et dépasser un certain nombre de clivages pour donner de nouveau envie aux salariés de s'y engager.

Alors, mes chers collègues, votons pour cet hommage de la démocratie politique à la démocratie sociale et, maintenant que nous avons les armes, engageons pour de bon cette bataille pour l'emploi !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.