J'aimerais tout d'abord remercier Paul Molac, notre rapporteur, qui nous permet d'embrasser un sujet cher aux Français. Avant d'en venir aux dispositions précises de ce texte, disons un mot de la légitimité de la cause défendue. Le monde a beaucoup changé. Il a compris qu'il n'est pas condamné à une forme d'anglais triomphant et universel et que les langues régionales d'un pays ne sont pas irréversiblement promises à la disparition, car les êtres humains ont besoin de savoir d'où ils sont, à quels territoires ils se rattachent et quelle est leur identité profonde. À cet égard, le combat pour le maintien des langues et cultures régionales apparaît comme tout à fait légitime, loin de la vision folklorique qu'il a pu avoir durant les décennies passées. Comme je l'ai dit en commission, ma propre perception du sujet a beaucoup évolué au cours des deux dernières décennies.
Est-il possible de traduire cette cause dans les faits ? Les polyglottes possèdent une richesse intellectuelle qui s'acquiert non seulement grâce à des cours traditionnels mais aussi de manière immersive, lorsque divers savoirs sont enseignés dans la langue régionale concernée. Au groupe Agir ensemble, nous sommes une très large majorité à penser que la formation bilingue ou même trilingue – pour tenir compte de la dimension internationale – peut valablement être prise en charge par l'éducation nationale.
Précisons que cette cause n'est en aucun cas un combat contre la nation et la langue nationale, laquelle serait vue comme un adversaire. Au contraire, les langues doivent épouser une cause commune : le bilinguisme doit être considéré comme un progrès et non pas comme le retour à un passé fantasmé.
J'en viens aux dispositions précises de ce texte auquel nous sommes globalement très favorables. Nous pensons que la proposition de loi de Paul Molac fait oeuvre utile en matière de protection et de promotion des langues régionales, notamment grâce à ses propositions sur le déploiement de leur enseignement immersif dans le secteur public.
Nous approuvons les apports successifs du Sénat et de la commission : la reconnaissance des langues régionales comme patrimoine culturel immatériel ; le principe de l'intervention publique pour assurer leur protection ; les dispositions relatives à la signalétique bilingue et à la reconnaissance des signes diacritiques par l'administration civile ; l'application du droit commun à Mayotte.
Il nous reste à évoquer trois points. S'agissant de l'article 2 quinquies, nous sommes favorables à un accord entre la commune de résidence de l'enfant et l'établissement d'accueil. Cependant, une majorité d'entre nous a fait part de ses préoccupations quant au caractère obligatoire de la prise en charge par la commune qui ne peut pas dispenser l'enseignement dans la langue régionale sur son territoire.
Le dispositif prévu à l'article 3 ne nous pose pas de difficultés, mais nous avons proposé un amendement pour que son caractère facultatif apparaisse de manière plus claire.
S'agissant de l'article 2 ter, je rappelle que nous sommes favorables au principe de l'enseignement immersif. Il nous semble cependant qu'en l'absence de limite, l'enseignement pourra être intégralement dispensé dans la langue régionale, au préjudice d'enfants qui ne suivraient plus l'enseignement de la langue française durant le quota d'heures prévu dans le code de l'enseignement. Nous proposerons donc un amendement visant à assurer la bonne maîtrise de la langue française par ceux qui choisiraient l'enseignement immersif.
À ces trois réserves près, …