La question du progrès est intéressante. Ces épidémies, et vous avez raison de rappeler qu'elles sont très anciennes malgré leur accélération stupéfiante, étaient supposées derrière nous. C'est tout l'inconvénient de la notion de progrès. Que l'on puisse, au fond, passer à autre chose. Ce que j'appelle « atterrir », c'est précisément l'inverse. Les épidémies sont devant nous : il va falloir vivre avec celles-ci et avec ces virus. Il n'est pas question de pouvoir s'en défaire.
Il y a un vrai problème de représentation des menaces. Vous avez cité plusieurs fois les risques, ce qui me fait penser à mon ami Ulrich Beck, qui a introduit cette notion de société de risque. La société de risque n'est pas une société en voie de modernisation. C'est une autre société qui vise autre chose et demande un retour assez profond à des questions qui avaient été associées à des visions traditionalistes. Notamment des questions d'appartenance à un lieu, confondues rapidement avec les questions d'identité. Alors que ce n'est pas du tout évident. Les conditions de subsistance sont des conditions qu'il faut prendre en compte. Elles ne sont pas derrière nous, comme des choses anciennes en dehors desquelles la grande flèche du progrès nous dirigerait. À la question que vous posiez, je n'ai malheureusement pas de réponse. Vous avez la chance d'être députée dans cette commission, parce que vous voyez passer tous les sujets passionnants à suivre, en particulier la coordination avec les États européens qui a dû beaucoup vous occuper, sur laquelle j'aurais aimé vous interroger.