Je suis le député des Français qui habitent la Turquie. Les tensions entre Paris et Ankara s'aggravent de plus en plus : nous avons connu le chantage migratoire, les ingérences dans l'islam de France, les provocations d'Erdoğan contre le Président de la République, les agressions contre les Kurdes dans le Nord syrien, les violations des principes de souverainetés grecque et chypriote. Maintenant, c'est la Libye qui cristallise nos différends. Le Président de la République a parlé de « la responsabilité historique et criminelle » de la Turquie, après l'incident en Méditerranée. Jusqu'où va-t-on ?
Je rappelle – et cela introduit mon deuxième sujet – que l'Union européenne tolère depuis quarante-cinq ans l'occupation de Chypre du Nord alors qu'elle est déchaînée face à l'extension de la souveraineté du peuple juif en Judée. Le 20 mai dernier, monsieur le ministre, je vous ai fait part de mes convictions intimes sur la position française concernant le plan d'extension de souveraineté d'Israël en Judée et Samarie. Vous m'avez répondu que mes propos n'étaient pas acceptables. Je ne veux pas polémiquer avec vous : j'éprouve du respect et de l'amitié pour vous, mais je revendique ma liberté de parole, précisément en tant que parlementaire. J'ai bien conscience d'être à contre-courant sur le conflit israélien et ce n'est pas toujours facile. La France et Israël, selon moi, doivent quoi qu'il arrive renforcer leur alliance : c'est leur intérêt mutuel. Vous avez affirmé que la décision israélienne ne pourrait rester sans réponse, vous avez parlé de riposte ; j'en prends acte. Mais cette extension de souveraineté est une décision démocratique en cohérence avec la vérité historique et aussi avec la réalité du terrain.
La doctrine traditionnelle d'une solution à deux États dans les frontières de 1967, avec Jérusalem divisée, ne fonctionne pas et ne fonctionnera pas : c'est mon sentiment. Elle n'a jamais permis de faire avancer la paix que tout le monde souhaite. Les Palestiniens ont rejeté tous les plans de paix. Entre parenthèses, l'Autorité palestinienne détient toujours Hicham Harb, qui est directement responsable de l'attentat de la rue des Rosiers et qui a tué des Français : j'en ai parlé avec le Président de la République en Israël. Je crois, monsieur le ministre, qu'il faut donner une chance au plan Trump. Le Président de la République, qui doit s'entretenir dans les prochains jours avec Benyamin Netanyahou, a lui-même montré en janvier dernier que la France pouvait casser certaines barrières : il s'est rendu à Jérusalem, il s'est rendu au Mur occidental, et il a montré que notre pays était capable de faire bouger les lignes. Je ne voudrais pas qu'il y ait de tension avec Israël, vous l'imaginez bien. Aussi, pensez-vous que la France pourra enfin un jour changer ce logiciel qui me semble périmé et faire évoluer sa position ?