Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du mardi 13 octobre 2020 à 17h30
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre :

Madame Lenne, vous avez raison : il faut vraiment améliorer la consommation des bourses pour les étudiants. Je vais m'y employer, et les services y travaillent eux aussi. Merci d'avoir identifié le problème.

Madame Poletti, je veux bien tout ce qu'on veut, mais si on enlève les critères de l'OCDE pour définir l'aide publique au développement, il faut le faire pour tout le monde, pas seulement pour la France. Si vous changez les normes, il faut créer un autre outil pour identifier ce qu'est l'aide au développement. Pour l'instant, je m'en tiens aux normes de l'OCDE, qui sont reconnues par tous et qui établissent la mobilisation financière pour les différents aspects que vous avez évoqués, lesquels font bel et bien partie du développement.

En ce qui concerne la transparence et le classement que vous évoquez, donnez-moi les références : je ferai en sorte d'y remédier. Je suis pour la transparence totale concernant l'aide au développement. C'est tout à fait essentiel. Sinon, il n'y a plus de développement : on perd totalement sa crédibilité. Cela m'amène à ce que disait Jacques Maire : la transparence et la traçabilité de l'aide sont tout à fait essentielles. Les décaissements ne sont pas assez rapides, j'en suis d'accord, et la conséquence en est qu'on ne peut plus tracer l'aide. Je voudrais qu'à cet égard l'Alliance Sahel soit exemplaire, et je suis prêt à prendre les mesures nécessaires. Cela doit être une référence : une aide publique au développement bien comprise, ne fonctionnant pas en silos, efficace. Pour vous être rendu sur place, monsieur Maire, vous savez l'importance que cela revêt. Le financement potentiel est de 11,6 milliards : il est indispensable qu'on y voie clair. Je vais m'y employer.

J'ai bien pris note de votre remarque concernant les remises de dettes, madame Poletti. Elles devraient être retracées dans le programme 110, mis en œuvre par le ministère de l'économie, des finances et de la relance. Si elles n'y figurent pas, cela pose question.

Monsieur Renson, je confirme vos chiffres. Effectivement, il faut mobiliser les financements. C'est un enjeu considérable, et qui ne concerne pas seulement la France ou les autres pays : un certain nombre d'associations philanthropiques et d'entreprises sont contributrices. C'est un mouvement mondial. Voilà pourquoi le Président de la République a décidé d'organiser, à l'occasion des cérémonies du 11-Novembre, dans le cadre du Forum de Paris, une grande manifestation consacrée à l'ACT-A et destinée à mobiliser des financements, en particulier pour le vaccin. C'est la condition pour que celui-ci soit reconnu comme un bien commun de l'humanité, qu'il soit partagé et que nous anticipions, de manière à sortir de la crise renforcés. Je sais que la Banque mondiale est prête à donner beaucoup, de même que la Fondation Bill et Melinda Gates.

Madame Tanguy, même s'il est un peu tard pour commencer à parler du Brexit, je voudrais faire plusieurs remarques. Ce n'est pas obligatoirement le 15 octobre que les choses vont se nouer. C'est le Premier ministre Boris Johnson qui l'a annoncé, mais ce n'est pas la position du Conseil européen, lequel se réunit effectivement jeudi et vendredi. Pour l'instant, les négociations n'ont presque pas avancé sur les trois points qui continuent à poser problème.

Premièrement, il y a la question de l'égalité de la concurrence au sein du marché intérieur européen, autrement dit le fait que les normes de concurrence, les règles en matière d'aides d'État ou encore les normes environnementales soient prises en compte par le Royaume-Uni. No tariffs, no quotas, no dumping : cela suppose que les règles de concurrence soient mises à plat et soient loyales. Deuxièmement, il y a la pêche – je vais y revenir ; troisièmement, les conditions de gouvernance. Nous en sommes à la neuvième semaine de négociations et les lignes bougent très peu sur ces trois points. En l'état actuel des choses, malheureusement, l'hypothèse d'un « no deal » est très crédible – mais on sait que les Britanniques sont de redoutables tacticiens.

Je voudrais, à la fin de cette audition, faire passer deux messages concernant le Brexit.

D'une part, l'heure n'est plus à la tactique. On a fini de jouer. L'échéance arrive – elle a été fixée à la fin de l'année. Cela veut dire que tout doit se jouer entre le 15 octobre et la mi-novembre. Le « no deal » n'est pas l'hypothèse qui nous paraît être la plus favorable pour les Britanniques, mais nous nous sommes préparés à toutes les éventualités. J'étais hier matin à Luxembourg pour une réunion des ministres des affaires étrangères, lors de laquelle nous avons parlé d'un certain nombre de questions, dont celle-là. Or je constate que les Européens restent unis, y compris par rapport à l'initiative prise par Boris Johnson de faire adopter une loi relative au marché intérieur contraire à l'accord de retrait signé avec l'Union européenne il y a un an : ce texte est inacceptable, et tout le monde le dit.

D'autre part, la pêche ne doit pas être la variable d'ajustement de l'accord. Je suis pour ma part extrêmement vigilant à cette question : l'accès privilégié au marché unique que souhaite le Royaume-Uni est indissociable des garanties obtenues pour nos pêcheurs. Je le dis avec beaucoup de fermeté. Il faut maintenant faire en sorte que les Britanniques comprennent que la pêche n'est pas un dossier à part : il n'y a pas d'accord séparé sur le sujet. Telle est la position du Président de la République, qu'il défendra si la question est abordée après-demain au Conseil européen. S'agissant des conditions d'accès aux eaux et aux ressources, nous devrons également avoir une discussion vigoureuse avec les Britanniques pour obtenir une prévisibilité pluriannuelle et des normes techniques communes, éviter les distorsions de concurrence et tenir compte des droits historiques et des quotas. C'est un sujet lourd, sur lequel nous nous battons. Pour avoir eu, dans une vie antérieure, la responsabilité de la mer, j'y suis particulièrement vigilant : c'est un enjeu auquel je suis attaché.

Monsieur Julien-Laferrière, entre 14 et 15 milliards, je tope. Quant au FSD, je partage votre constat, comme je l'ai déjà dit en réponse à Mme Thomas. On observe effectivement une baisse des recettes de la taxe sur les billets d'avion et une hausse du produit de la taxe sur les transactions financières. La solution pourrait être simple ; j'attends avec intérêt vos observations lorsque le moment sera venu.

Madame Le Peih, j'ai déjà évoqué dans mon propos introductif le plan de 13 millions d'euros que nous allons mettre en œuvre pour renforcer le numérique : modernisation du réseau de communication, développement des visioconférences avec l'extérieur, renforcement de la sécurité opérationnelle des systèmes d'information du ministère, acquisition d'outils de mobilité. J'ai également parlé du RECE, en réponse à M. Herbillon. Le numérique est un enjeu important : nous l'avons constaté avec la crise de la covid-19. Nous allons donc investir massivement.

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