Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du mercredi 28 octobre 2020 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Je salue le sérieux du travail du rapporteur pour avis, même si – il ne s'en étonnera pas – je ne partage pas ses conclusions. Comme la plupart des budgets cette année, celui de la mission « Immigration, asile et intégration » augmente, en suivant les orientations de loi « asile et immigration » à laquelle les députés communistes s'étaient vivement opposés.

Le contexte de la discussion de ce budget est très compliqué. En effet, tout s'entremêle dans une séquence très dangereuse où se multiplient des propositions politiques et médiatiques que je m'autorise à qualifier de démagogiques – certaines frôlent même la bêtise. Il est facile de recourir à la politique du bouc émissaire pour masquer ses propres fautes. Il est désespérant d'entendre les torrents d'horreurs déversés, ces dernières semaines, dans les médias ou par certaines personnalités politiques.

Puisque d'aucuns l'ont peut-être oublié, je le rappelle, le droit d'asile, ce n'est pas de la charité, c'est une obligation constitutionnelle et internationale : il s'agit de protéger des personnes menacées dans leur pays. Or tous les dispositifs mis en œuvre depuis l'accession de Macron à la responsabilité de Président de la République, comme le raccourcissement des délais de recours ou le doublement de la durée de rétention, vont à l'encontre de cette obligation. Ils entravent en effet les droits des demandeurs d'asile sans avoir le moindre effet dissuasif sur les entrées sur le territoire, qui restent stables. Allons-nous persévérer dans cette fuite en avant dans le tout répressif ou allons-nous nous rendre enfin compte qu'il faut changer radicalement de politique ?

Je n'ai rien à ajouter aux exemples donnés par notre collègue Jean-Michel Clément. Je pourrais évoquer Ouistreham. À cet égard, Alain David a raison : des poches se créent dans lesquelles les conditions de vie sont parfaitement inhumaines, même si, et c'est heureux, des solidarités territoriales s'expriment.

Enfin, je souhaite insister sur la notion de pays d'origine sûr, que l'OFPRA utilise pour interdire aux ressortissants de ces pays de bénéficier d'une admission sur le territoire au titre de l'asile. La liste de ces pays est donc extrêmement sensible... Ainsi, certains pays commercialement amis de l'État français pourraient être considérés comme sûrs alors qu'ils sont dirigés par des dictateurs qui savent enfermer leur opposition ainsi que certains journalistes. Ce concept à géométrie variable, incompatible avec le principe de non-discrimination en raison de la nationalité énoncé par la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, est dangereux. Lors des débats sur la loi « asile et immigration », les députés communistes se sont d'ailleurs insurgés contre son existence. Le fait que cette liste soit établie au sein du seul conseil d'administration de l'OFPRA constitue une anomalie majeure. À défaut de la supprimer rapidement, il faudrait à tout le moins imposer que le Quai d'Orsay soit associé au processus, en participant à son actualisation régulière.

Le droit d'asile vu par le Gouvernement est si éloigné du respect du droit international et des droits humains défendus par les députés communistes qu'il nous est bien évidemment impossible d'approuver ces crédits : nous voterons contre.

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