Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 28 octobre 2020 à 9h30

Résumé de la réunion

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  • APD
  • export
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  • migratoire

La réunion

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Examen, ouvert à la presse, des avis budgétaires sur le projet de loi de finances pour 2021 (n° 3360) :

- Examen pour avis des crédits de la mission Aide publique au développement (Mme Valérie Thomas, rapporteure pour avis) et vote sur les crédits de cette mission ;

- Examen pour avis des crédits de la mission Immigration, asile et intégration (M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur pour avis) et vote sur les crédits de cette mission ;

- Examen pour avis des crédits de la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique (Mme Amélia Lakrafi, rapporteure pour avis) et vote sur les crédits de cette mission.

La séance est ouverte à 9 heures 40.

Présidence de M. Michel Herbillon, vice-président, puis de Mme Marion Lenne, secrétaire.

– Examen pour avis des crédits de la mission Aide publique au développement (Mme Valérie Thomas, rapporteure pour avis) et vote sur les crédits de cette mission.

Michel Herbillon, président. Nous terminons ce matin l'examen du projet de loi de finances pour 2021 par l'examen de nos trois derniers avis budgétaires. Nous commençons par l'avis budgétaire sur l'aide publique au développement, qui est attendu. Notre rapporteure a d'ailleurs placé son étude thématique dans la perspective de l'examen, annoncé pour le premier semestre 2021, du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, en proposant une évaluation des forces et des faiblesses du dispositif français de l'aide publique au développement. Dans cette commission, au-delà des sensibilités politiques de chacun, nous formons le vœu que ce projet de loi, si souvent annoncé, si souvent repoussé, vienne à l'ordre du jour de notre assemblée.

Chère Valérie, vous vous interrogez, à juste titre, sur la gouvernance de notre dispositif, sur la dispersion de nos aides aussi bien géographiquement que sectoriellement, et sur les excès des prêts par rapport aux dons. Sur ces questions, je rappelle que notre commission a mis en place un groupe de travail animé par nos collègues Hervé Berville et Bérangère Poletti, dont les travaux ont commencé en début d'année et vont reprendre prochainement.

Au regard des crédits budgétaires, notre rapporteure relève avec satisfaction la poursuite de la montée en puissance du volume des aides versées par la France, pour atteindre 0,55 % de notre revenu national brut – RNB. Depuis 2017, les crédits de la mission « Aide publique au développement » – APD – se sont accrus de 14 % et le projet de loi de finances – PLF – pour 2021 propose de les augmenter de 17 % par rapport à 2020. Nous devons cependant nous interroger sur l'effet mécanique financier provoqué par le tassement de notre produit intérieur brut – PIB – sur l'objectif en part de RNB que la France s'est fixé.

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Avant toute chose, je souhaiterais transmettre à notre Présidente toute mon amitié et lui souhaiter tous mes vœux de rétablissement. Je sais combien le sujet que nous allons aborder lui est cher et je tiens à lui dire que nous pensons très fort à elle.

Je suis heureuse de vous présenter aujourd'hui les crédits de la mission « Aide publique au développement », car ils traduisent un effort historique en faveur de la politique de développement. Jamais notre pays ne s'était autant engagé en faveur de la solidarité internationale : après une progression de 14 % des crédits de la mission aide publique au développement entre 2017 et 2020, le projet de loi de finances pour 2021 amplifie encore cette augmentation, avec une hausse de 17 % des crédits. L'APD est ainsi la politique publique qui enregistre la plus forte hausse sur l'ensemble du quinquennat. Cet effort est d'autant plus important qu'il intervient dans un contexte particulier : après vingt ans d'une baisse tendancielle de l'extrême pauvreté, cette dernière est repartie à la hausse en raison des conséquences de la crise de la Covid-19.

Pour ce qui concerne le budget 2021, je me contenterai de souligner quelques traits saillants : Premièrement, il permet de respecter les engagements, tant quantitatifs que qualitatifs, pris dans le cadre du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement – CICID – ­de 2018, qui a marqué une rupture dans la trajectoire déclinante que connaissait l'APD française.

D'abord, les objectifs en volume sont, en effet, atteints, et même dépassés : l'APD devrait ainsi s'établir à 0,56 % du revenu national brut en 2020 (contre 0,47 % initialement prévu) et 0,69 % en 2021 (contre 0,50 % initialement prévu). L'impact de la crise sur le RNB tend à accroître fortement la part d'APD dans le RNB, de manière mécanique. En outre, la hausse de la prévision d'APD est également liée à d'importantes prévisions d'allégements de dette. Cette trajectoire nous met sur la bonne voie pour l'atteinte des 0,7 % du RNB consacré au développement. Mes chers collègues, la trajectoire annoncée est bien respectée, et la baisse de notre RNB ne s'est pas traduite par une baisse en volume des crédits de l'APD.

Ensuite, en termes de composition de l'aide, les engagements du CICID sont également respectés :

- L'augmentation de l'APD française est principalement portée par l'aide bilatérale, en augmentation de 16,9 %, en particulier sous forme de dons. On constate une augmentation significative des moyens de l'AFD au titre des dons-projets – + 154 millions d'euros – et des dons-ONG (+ 20 millions d'euros).

- Des secteurs qui étaient jusqu'alors les parents pauvres de la politique de développement, font à nouveau l'objet de financements. Je pense notamment à l'augmentation de l'aide humanitaire, qui s'établit à 329 millions d'euros, une augmentation conforme à l'objectif du CICID de lui consacrer 500 millions d'euros en 2022. Ainsi, les trois canaux d'acheminement de l'aide voient leurs crédits progresser : les contributions volontaires aux Nations unies, le Fonds d'urgence humanitaire et l'aide alimentaire programmée.

De même, on constate un net réinvestissement du champ de la santé, qui s'est accéléré en raison de la crise sanitaire. A titre d'exemple, l'initiative Access to COVID‐19 Tools Accelerator – ACT-A –, à laquelle la France consacre au total 660 millions d'euros, traduit le combat de la France contre le nationalisme vaccinal et pour faire du vaccin un bien public universel, dans une approche renouvelée du multilatéralisme : l'initiative unit en effet dans un même partenariat tous les acteurs, qu'ils soient publics, privés, ou issus de la société civile.

Deuxièmement, le projet de loi de finances se singularise par la création d'un nouveau programme, le programme 365, destiné au renforcement des fonds propres de l'AFD, à hauteur de 953 millions d'euros. Ce besoin en fonds propres a trois explications : la mise en conformité de l'agence avec de nouvelles règles prudentielles, les conséquences de la crise économique sur ses résultats, et la croissance des activités de l'AFD, dans la dynamique globale d'augmentation de l'aide française décidée au début du mandat.

Troisièmement, je tiens à exprimer mon inquiétude quant à la fragilisation du financement du Fonds de solidarité pour le développement – FSD. Ce fonds finance les grands fonds « verticaux » dans les domaines de la santé (le Fonds mondial), de l'éducation (le Partenariat mondial pour l'éducation) et du climat (Fonds vert). Il est financé par un pourcentage plafonné de la taxe sur les billets d'avion – TBA – et de la taxe sur les transactions financières – TTF. Or la crise a fait chuter les recettes de TBA, amputant le financement du FSD de 140 millions d'euros. De son côté, le produit de la TTF a considérablement augmenté, passant de 1,13 milliard d'euros prévu en 2020 à une réévaluation de 1,745 milliard d'euro. La prévision pour 2021 se situe à un peu plus d'1,5 milliard d'euros.

On pourrait s'interroger sur la légitimité même d'instaurer un plafond pour des taxes conçues pour lutter contre les excès de la mondialisation. A minima, il conviendrait, dans un contexte d'augmentation des recettes de la TTF, d'en affecter 50 % à l'aide au développement. Je défendrai un amendement en ce sens lors de la nouvelle lecture du PLF, et je vous enjoins à adopter une démarche commune.

J'en viens à la deuxième partie de mon rapport. En effet, il ne suffit pas d'augmenter considérablement les moyens ; encore faut-il que les acteurs français du développement, « l'équipe France », soient suffisamment structurés pour pouvoir les mettre en œuvre de manière efficiente. C'est la raison pour laquelle j'ai choisi d'approfondir le thème de « l'équipe France » du développement, et de faire un bilan de ses forces et faiblesses, deux ans après la présentation au gouvernement par notre collègue Hervé Berville de son rapport sur la modernisation de la politique partenariale de développement et de solidarité internationale.

L'équipe France, qu'est-ce que c'est ? Ce sont d'abord des femmes et des hommes, dont nous devons souligner et saluer le travail au quotidien en France, mais également sur le terrain. Ce sont aussi des structures diverses : agences, chercheurs, organisations non gouvernementales – ONG–, collectivités territoriales. Ce sont également des programmes : je ne citerai, à titre d'exemple, que le fonds Muskoka. Ce qui les réunit toutes et tous, c'est une volonté farouche de rendre notre APD la plus efficace possible.

Il ressort d'abord des auditions que j'ai conduites que l'équipe France retrouve une influence sur la scène internationale, en raison de la hausse des moyens accordés, mais aussi en raison d'un certain nombre d'évolutions en cours dans l'écosystème français du développement : réforme de l'expertise, avec la place reconnue d'Expertise France et son rapprochement avec l'Agence française de développement – AFD –, renforcement de la logique partenariale, par exemple entre l'AFD et les organisations de la société civile, des institutions spécialisées comme l'ADEME, ou la Caisse des dépôts et consignations.

Outre un écosystème d'excellence composé d'acteurs très complémentaires – recherche, réseau universitaire, ONG, collectivités territoriales, ambassades… –, qui ont notamment montré leur capacité à travailler en équipe lors de la réponse à la crise sanitaire, elle dispose d'une approche liant diplomatie, défense et développement, l'approche dite « 3D ».

Enfin, elle cible davantage ses priorités sectorielles et géographique. Son leadership est devenu incontestable dans le domaine du climat, qui fait l'objet d'un engagement fort et constant, et désormais de la santé.

Cependant, si la France dispose d'un écosystème d'excellence en matière de développement, elle souffre encore d'un manque de vision stratégique claire et de pilotage politique de l'APD, comme l'avait déjà souligné Hervé Berville dans son rapport : dispositif institutionnel complexe, tutelle de l'État insuffisamment stratégique, gouvernance « intermittente », décalage entre les priorités affichées et les financements octroyés.

Je tiens à cet égard à appeler votre attention sur l'AFD. La France a choisi un modèle original, parmi les pays de l'OCDE, en faisant de l'AFD, une institution financière soumise au régime des établissements de crédits, l'opérateur pivot de son dispositif bilatéral d'APD, et l'agence a un rôle central dans l'accroissement des crédits intervenus pendant le mandat. Ce choix a de nombreux avantages : la large gamme d'instruments que l'AFD propose, encore élargie par le rapprochement avec Expertise France, en fait un acteur de premier plan sur la scène internationale. L'activité de l'AFD est désormais sensiblement supérieure à celles de nombreux bailleurs bilatéraux.

Cette dynamique nous impose une meilleure évaluation de son activité, notamment dans la perspective du prochain contrat d'objectifs et de moyens de l'AFD. D'une part, il s'agira de rééquilibrer la part entre les dons et les prêts, la part prépondérante de ces derniers engendrant un certain décalage entre les activités de l'agence et nos priorités. D'autre part, la tutelle de l'État sur son opérateur doit être davantage stratégique. À cet égard, je reprends un certain nombre de préconisations du rapport de la Cour des comptes de février 2020.

Surtout, la restructuration de l'équipe France ne pourra faire l'économie du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, qui a vocation à refonder la politique d'aide au développement. Son examen, prévu initialement au printemps, a été reporté en raison de la crise sanitaire. Or les conséquences dramatiques de la crise sur les pays partenaires rendent encore plus urgent l'adoption de ce projet de loi, qui donnera aux acteurs du développement une vision stratégique claire. Il devra permettre de renforcer le pilotage politique de l'aide, de mieux associer tous les acteurs du développement, et d'améliorer l'évaluation de l'aide, en instaurant notamment une commission d'évaluation indépendante, dont je souhaite qu'elle comprenne des parlementaires.

Les efforts budgétaires que nous consentons nous imposent de renforcer la redevabilité de cette politique, ce qui contribuera à la meilleure appropriation de ses enjeux par nos concitoyens. Sur tous ces sujets, je formule plusieurs recommandations, qui seront, je l'espère, prises en compte dans le projet de loi. L'efficacité des moyens apportés à l'APD dépendra en effet de notre capacité à fixer des priorités, donc à faire des choix, et à approfondir la logique partenariale en incluant tous les acteurs, des collectivités territoriales au monde de la recherche en passant par la société civile, avec un rôle particulier des jeunes et des diasporas, afin de valoriser l'expertise de tous les acteurs de l'équipe France.

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La commission a toujours été unanime et a toujours soutenu la proposition du président de la République d'augmenter significativement l'aide publique au développement. Pourtant, elle n'étudie que le tiers de ce que fait la France en matière de solidarité internationale. Plusieurs questions se posent donc à nous députés au moment de voter les crédits.

Tout d'abord, celle de la transparence. En effet, les députés devraient disposer de l'ensemble des éléments qui constituent l'APD. Ils sont colossaux et vont bien au-delà de la stricte analyse des programmes 110, 209 et désormais 365, qui porte sur les fonds propres de l'AFD. L'objectif a été rappelé lors de l'audition du ministre de l'Europe et des affaires étrangères : il faut atteindre les 15 milliards d'euros en crédit de paiement et en valeur absolue pour l'année prochaine. Ce sont des montants importants, qui nous placent pourtant encore loin de l'objectif fixé par l'OCDE d'atteindre 0,7 % du RNB.

Ces 15 milliards d'euros doivent servir, dans les pays les plus pauvres, à l'accès à la nourriture, aux soins, à l'éducation, à la protection contre les effets du changement climatique, à l'accès au développement économique et à la création d'emplois, avec la garantie de ne pas nourrir des réseaux de corruption qui empêcheraient ces moyens d'arriver aux populations. Or, selon l'index de transparence de 2020 établi pas une ONG, le verdict est sans appel : la France ne respecte pas ses engagements en matière de transparence de l'aide. Si l'AFD progresse de cinq places pour se situer vers la trentième place du classement, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, lui, recule à la trente-septième place sur quarante-sept.

C'est la raison pour laquelle le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales est si important. Au-delà de la programmation des crédits, il doit permettre à la France d'améliorer la transparence et de garantir en permanence la disponibilité des informations pour les parlementaires et pour nos concitoyens.

Deuxièmement, 98,6 % de l'augmentation des crédits ont servi à financer notamment l'accueil des réfugiés dans notre territoire, les bourses, les instruments du secteur privé et les remises de dettes. Cette augmentation n'a donc été consacrée que de manière trop faible à ce qui fait le cœur de l'APD. Le Président de la République avait, à juste titre, annoncé que deux tiers de l'augmentation de l'aide devaient être consacrés à l'aide bilatérale, et le dernier tiers à l'aide multilatérale. Il semblerait que cet engagement n'ait pas été suivi.

En ce qui concerne les remises de dettes, elles ne doivent se faire que sur la base d'un accord des pays et des bailleurs qui aident. Cet accord a été obtenu pour le moratoire, mais rien n'est encore décidé pour la suite. 224 millions d'euros ont été consacrés à la Somalie l'année dernière, et l'on parle d'une remise de dette de 4,426 milliards d'euros pour le Soudan l'année prochaine, ce qui porterait l'effort français à 0,69 % du PNB en 2021 ! Ce sera la conséquence de la remise de dette, non de notre action dans les territoires.

En revanche, j'adhère à l'initiative de mon groupe politique, qui a déposé, pour la troisième année consécutive, une demande de rapport sur les aides budgétaires directes liées aux laissez-passer des pays consulaires aidés.

Enfin, si nous saluons l'augmentation significative cette année des crédits de l'APD, cette évolution n'est pas historique : ils s'établissaient à 0,5 % du RNB à 2010 ; c'est entre 2012 et 2017 que les crédits se sont effondrés. Notre groupe s'abstiendra de voter les crédits de la mission « Aide publique au développement » cette année, pour les motifs suivants :

– La transformation de l'APD aurait dû être enclenchée beaucoup plus tôt durant ce mandat ;

– Une évolution est nécessaire sur la problématique de la transparence des politiques ;

– L'absence du texte de loi de programmation attendu depuis des années commence à peser sur nos décisions ;

– L'augmentation des budgets qui ne profitent pas suffisamment aux populations dans les pays prioritaires ;

– Le Gouvernement a renoncé à l'équilibre entre le bilatéral et le multilatéral. Il est toujours beaucoup plus facile d'augmenter des crédits en multilatéral qu'en bilatéral, mais on y perd de l'influence dans notre pays ;

– Il est difficile pour la France de suivre des petits projets, car nous sommes toujours concentrés sur de grands projets ;

– Enfin, pour ce qui est de votre proposition sur la commission d'évaluation, je ne suis pas sûre qu'il faille faire siéger des parlementaires dans cette commission, qui doit être complètement indépendante. Les parlementaires doivent constituer une commission à l'intérieur du parlement. C'est notamment le cas en Grande-Bretagne, où existent deux commissions d'évaluation qui se rencontrent chaque année. La commission d'évaluation doit être totalement indépendante du pouvoir exécutif.

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La crise actuelle a montré la nécessité d'une solidarité accrue sur les questions de santé, de climat, mais aussi sur les questions de croissance économique. La coopération est nécessaire pour coordonner les plans de relance et éviter qu'un pays avance plus vite que d'autres. Il faut éviter que les pays en développement ne se retrouvent dans une situation économique très compliquée.

Depuis trois ans, la France a fait preuve de leadership dans ce domaine, et les crédits ont augmenté significativement. Nous pouvons aussi nous féliciter que les recommandations émises par le Parlement aient été suivies d'effets et traduites au niveau budgétaire ; je pense par exemple à la volonté de donner plus de place aux diasporas.

Cette augmentation des crédits budgétaires, qui n'est pas une fin en soi, a permis à la France d'être plus crédible et audible sur la scène internationale. Nous avons vu, l'année dernière, au G7, la capacité de la France et des diplomates français à prendre l'initiative sur la scène internationale ; je pense notamment au fonds Muskoka et au financement de l'entrepreneuriat féminin.

La mission APD va, à elle seule, augmenter de 684 millions d'euros, ce qui est inédit. En effet, l'APD ne se résume pas simplement à la mission APD, mais on s'intéresse à celle-ci car elle est pilotable et peut faire l'objet d'arbitrages politiques importants. Il faut souligner qu'il s'agit d'une des missions qui augmente le plus fortement – +17 % – parmi toutes les autres missions budgétaires. Cette augmentation de crédit nous permettra de cibler les priorités géographiques et sectorielles, ainsi que d'atteindre l'objectif de 0,7 % du RNB. Je ne suis pas un fanatique de cet objectif en lui-même, mais il nous donne une crédibilité internationale et nous permet de faire partie du concert des nations qui atteignent ces objectifs.

Le projet de loi attendu nous permettra non seulement de disposer d'une programmation, mais aussi de traduire législativement les engagements de la France pour l'agenda 2030 et l'Accord de Paris. Il refondera nos relations avec nos partenaires, notamment l'Afrique. Je veux avoir une pensée notamment pour les jeunesses du Mali, du Cameroun, de la Guinée et du Nigéria, car cette politique de partenariat doit contribuer à les aider à prendre leur avenir en main.

En outre, je souhaite évoquer deux sujets importants, qui illustrent la volonté de mener ces politiques de développement sur le long terme. Tout d'abord, l'évasion fiscale : la France a investi à hauteur de 90 millions d'euros pour améliorer la transparence et lutter contre l'évasion fiscale. Il s'agit de politiques de développement de long terme, qui permettront de sortir de cette relation d'aide un peu coloniale que l'on pouvait avoir.

Ensuite, la question de l'investissement en zone fragile et dans les crises humanitaires est prioritaire, bien que trop faible encore en France par rapport à d'autres pays. Il est en augmentation cette année, grâce à une contribution plus importante de la France au Partenariat mondial pour l'éducation, mais la France doit davantage investir pour l'éducation dans les zones fragiles.

Nous avons donc un budget qui nous permettra d'être crédible à l'international et de défendre nos priorités. C'est avec détermination que le groupe LaREM votera ce budget, qui est en hausse pour la troisième année, et nous attendrons avec impatience le projet de loi de programmation et d'orientation.

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Je félicite Mme la rapporteure pour la qualité de son rapport, qui situe bien les enjeux de cette politique d'aide au développement, laquelle constitue un axe stratégique majeur de notre activité.

Les crédits de la mission « Aide publique au développement » connaissent une nouvelle fois une hausse très sensible. L'an dernier marquait la première étape de cette relance de notre politique d'aide au développement. L'augmentation considérable des crédits de paiement cette année atteste de la mise en conformité de nos engagements budgétaires avec ceux du président de la République.

Nous avons eu de nombreuses occasions de débattre ici des orientations stratégiques et des priorités à donner à l'usage de cette aide, qui devient de plus en plus une branche à part entière de notre diplomatie. Le rapport le rappelle parfaitement : il s'agit à l'avenir de mieux cibler les espaces et les zones géographiques que nous souhaitons soutenir, en investissant également de manière plus sectorielle. Cela nous permettra non seulement de mener des actions plus précises et ciblées, mais également de mieux suivre leurs évolutions. Le contexte international nous contraint à faire des choix dans l'orientation de cette aide vers quelques zones bien ciblées, dans lesquelles se jouent à la fois des enjeux sécuritaire, diplomatique et de développement. Les objectifs doivent de ce point de vue être clairs, entre soutien de long terme et renforcement de l'aide bilatérale. Le projet de loi de finances s'inscrit dans cette logique.

À l'heure où le multilatéralisme est mis à mal, nous devons renforcer nos points forts et renforcer nos partenariats anciens et privilégiés. Ces objectifs seront atteints par des moyens et des outils renouvelés et renforcés. Les acteurs français de l'aide au développement ne cessent de s'améliorer, notamment grâce au dialogue et à l'exigence que nous avons pu exprimer en particulier au sein de cette commission. Vous le soulignez, l'AFD entame une mutation importante, et Expertise France est désormais un acteur reconnu et recherché, ce dont nous devons nous réjouir.

Pour autant, cette transformation doit se poursuivre pour servir une stratégie claire, qui passera notamment par une loi d'orientation de notre aide au développement. C'est d'autant plus important que nous évoluons dans un monde particulièrement troublé, dans lequel la France a un rôle important à jouer. Nous ne devons pas abandonner les institutions multilatérales, mais travailler à leur réforme.

Enfin, je soutiens les propositions de la rapporteure s'agissant de l'évaluation des politiques que nous menons. Cette capacité d'évaluation a toujours été un point faible de notre politique de coopération, que nous avons souligné à de multiples reprises. Le groupe du Mouvement démocrates et apparentés votera les crédits de la mission « APD ».

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Madame la rapporteure, je vous remercie pour votre rapport, qui illustre bien la singularité de l'année que nous venons de vivre, y compris dans le domaine de du développement, avec cette imbrication des crises sanitaires, environnementales, sociales et sécuritaire, qui complique encore la donne. Le groupe des Socialistes et apparentés prend bonne note de la poursuite de la trajectoire devant conduire notre pays vers l'objectif des 0,55 % de notre RNB consacrés à l'APD en 2022.

Nous commençons néanmoins à émettre des doutes en constatant le mouvement contradictoire des programmes 110 et 209, avec une importante contraction des autorisations d'engagement, en baisse de plus de 2 milliards d'euros, soit 30 %, et une expansion significative des crédits de paiement, en hausse de 1,6 milliard d'euros, soit 50 %. Nous constatons aussi l'augmentation des fonds propres de l'AFD au programme 365, pour plus de 953 millions d'euros, ce qui constitue une opération neutre pour le budget de l'État. Ce double mouvement conduit à une baisse drastique de l'aide économique financière et multilatérale, qui ne nous semble pas très judicieuse dans le contexte de crise mondiale que nous traversons. Il est important que la France maintienne sa capacité d'orientation des fonds gérés par les banques multilatérales de développement, et nous déposerons un amendement visant au rétablissement au moins partiel des crédits supprimés.

Je pointerai également le décalage entre la volonté de notre pays de s'ériger en champion du multilatéralisme, alors que des contributions volontaires à certaines organisations, comme l'UNICEF ou le PNUD, très sollicités actuellement, ne sont pas à la hauteur des contributions de certains de nos partenaires, ce que je regrette profondément.

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Merci pour ce rapport fort instructif. Hors dépenses de personnel, les crédits budgétaires du ministère consacrés à l'aide publique au développement progressent de 34 millions d'euros, soit une hausse de 17 %. Cette trajectoire nous permettra de nous rapprocher des 0,55 % du revenu national brut consacré à cette dépense d'ici 2022, pour autant que cet objectif soit maintenu, alors que la perspective d'un nouveau confinement exercera une pression énorme à la baisse sur les finances de l'État.

Tandis qu'en 2015 nous étions à 0,37 % du RNB, nous sommes montés à 0,44 % en 2019, ce qui place la France au neuvième rang des pays donateurs. Selon les estimations, ce ratio devrait logiquement augmenter cette année. Elle s'explique par l'augmentation en volume des crédits, mais aussi par des abandons de créances sur des pays africains, et mécaniquement par la contraction de notre propre richesse nationale en raison de la crise économique liée à la pandémie de la Covid-19. Lors de sa dernière audition devant notre commission, le ministre de l'Europe et de affaires étrangères a indiqué qu'il ne se satisferait pas d'une simple hausse mécanique de ce pourcentage, si elle résultait d'une baisse de notre propre richesse. Son objectif est d'atteindre 0,55 % en 2022 sur la base du PIB français tel qu'il était prévisible en 2019 et tel qu'il était envisagé pour 2022 dans le cadre de la reprise.

Nous saluons bien évidemment cette démarche, mais au-delà de l'objectif de 0,55 % du RNB pour 2022, nous devons absolument continuer à tendre vers les 0,70 %. Pour cela, nous attendons avec impatience l'examen, sans-cesse repoussé, du projet de loi de programmation relative à la politique de développement et à la lutte contre les inégalités mondiales, dans lequel nous défendrons, à l'instar de ce qui est fait au Royaume-Uni, l'inscription de cet engagement des 0,70 % dans la loi, pour que cela devienne une obligation légale à laquelle on ne pourrait déroger.

Pour expliquer cette méthode de comptage en proportion du RNB, Jean-Yves Le Drian disait d'ailleurs que ce n'était pas lui qui fixait les règles, mais l'OCDE. Ce rôle prépondérant de l'OCDE est remis en question notamment par le porte-parole d'Oxfam, qui appelle à « décoloniser l'aide ». Ainsi, il rappelle que les règles autour de l'aide publique au développement sont discutées, négociées et mises en œuvre au niveau de ces pays riches. En outre, elles le seraient trop souvent en fonction de leurs intérêts nationaux. Il estime que ce processus aurait plus de légitimité s'il avait lieu au niveau d'un système comme les Nations unies, où les pays récipiendaires de l'aide pourraient s'exprimer aux côtés des sociétés civiles du Sud. C'est une position qui mérite réflexion, notamment quand l'on sait qu'en 2016, les donateurs de l'OCDE auraient consacré en moyenne 51 % des fonds à des entreprises originaires de leurs pays.

Si les crédits de la mission « APD » augmentent, nous estimons que l'accompagnement des initiatives de la coopération décentralisée ne reçoit pas le soutien financier suffisant. Ils sont stabilisés à hauteur de 11,5 millions d'euros, alors que le pilotage de terrain, qui se fait entre acteurs locaux pour des projets plus microéconomiques, permet d'obtenir des résultats parfois plus pérennes, grâce aux contacts humains rapprochés entre donataires et récipiendaires. L'aide publique au développement et devenue encore plus cruciale dans un contexte où les pays les plus pauvres sont étranglés par la dette et sombrent dans la crise. L'Afrique subsaharienne, mise à l'épreuve par la pandémie de la Covid-19, devrait avoir besoin, d'ici à 2033, de 750 milliards d'euros de financements extérieurs, soit 55 % du PIB de la région, selon le FMI.

Tout en saluant le moratoire mis en place en avril par le G20 et la décision récente de le prolonger jusqu'en juin 2021, pour laquelle la France a joué un rôle déterminant dans le cadre du Club de Paris, le même FMI estime que « des actions plus audacieuses sont nécessaires », que ce soit en réduisant les intérêts de la dette ou en rééchelonnant les échéances. De l'audace, c'est sans doute ce qui manque encore un peu à ce budget. Néanmoins, nous voterons pour, car comme le disait Pline le Jeune : « L'audace croit à l'expérience ».

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Mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier notre collègue Valérie Thomas pour son rapport qui détaille bien la situation, même si, évidemment, je ne partage pas toutes les analyses. Je tiens également à dire que je fais mien quasiment l'ensemble des propos de Bérangère Poletti, que ce soit sur le contrôle, sur les actions, sur l'enveloppe. C'est chose rare pour un député communiste de partager la quasi-totalité d'un propos d'une députée Les Républicains !

Alors que la planète subit une pandémie d'une rare violence, de très nombreux pays ont vu s'enchaîner, après la crise sanitaire, les crises économiques et les crises sociales.

Alors que l'État français a absorbé une partie du choc et que, malgré tout, on voit la pauvreté exploser, il faut s'imaginer dans quel drame vivent des populations dans des États où aucun plan de relance n'a pu être proposé.

Pourtant, le premier grief que l'on peut faire à ce budget, c'est que rien dans le plan de relance n'a été dédié à l'APD, et que la trajectoire de l'APD de 2018 suit son cours, comme si l'analyse qui prévalait en 2018 était encore d'actualité. À l'échelle internationale, alors que tous les pays riches ont fait sauter les verrous budgétaires, rien n'a été débloqué pour aider les pays les plus en difficulté. J'en veux pour preuve le fait que seuls 3 milliards sur les 38 nécessaires ont été trouvés par l'initiative ACT-A, qui vise, entre autres, à faire du vaccin un bien public mondial, et à renforcer les systèmes de santé mondiaux. La somme de tous les plans de relance des pays riches doit avoisiner plus de 10 000 milliards d'euros. Il est très décevant que rien n'ait été proposé aux pays les plus pauvres, hormis un malheureux décalage du remboursement des services de la dette de quelques mois.

Le second grief porte sur l'absence d'ambition internationale, qui aurait pu être portée par la France pour créer un plan de relance international à destination des pays les plus fragiles.

Enfin, le troisième grief porte évidemment sur la fiscalité nationale et internationale. Vous avez refusé d'augmenter la taxe sur les transactions financières, alors que c'est le meilleur levier pour améliorer notre APD. Cependant, rien ne se passe au niveau international pour lutter contre l'évitement fiscal. Une ONG a publié un rapport démontrant que trois géants du numérique ont réussi à soustraire aux pays en développement près de 3 milliards de dollars d'impôts. Trois milliards de dollars de manques à gagner pour les pays en développement, ce n'est pourtant que la face émergée de l'iceberg du coût de l'inaction internationale en matière de lutte contre la fraude fiscale, et la France a ses responsabilités dans toutes ces inactions.

En outre, on parle toujours de l'objectif des 0,55 % d'un PIB qui baisse. Le ministre a pourtant dit qu'il porterait les choses en valeur absolue. Je le répéterai tant que cela n'est pas gravé dans le marbre.

Compte tenu de toutes ces observations, les députés communistes voteront contre la mission « APD ».

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Je vais commencer par répondre à Bérengère Poletti, dont je partage quelques analyses.

S'agissant de la commission d'évaluation de l'aide, il est nécessaire d'avoir une présence des parlementaires à tout le moins en tant qu'observateurs. Ensuite, s'agissant du renforcement du bilatéral, les crédits augmentent de 16,9 % cette année dans ce budget et ils atteindront près 60 % de nos dépenses d'APD en 2021.

S'agissant des petits projets, je partage complétement votre point de vue. Grâce à la restructuration de « l'équipe France » et de l'amélioration des liens entre les différents acteurs, nous serons capable d'être beaucoup plus efficaces sur les petits projets, notamment grâce aux collectivités territoriales, qui sont plus souples, réactives et rapides.

Je suis également d'accord avec les observations d'Hervé Berville. Je partage l'avis qu'il faut investir plus dans l'éducation, parce que nous savons que c'est l'une des clés pour répondre à un ensemble de problématiques au cœur de la question du développement.

Monsieur Joncour, je suis aussi entièrement d'accord avec toutes vos remarques.

Monsieur David, nos contributions volontaires aux agences onusiennes sont en nette augmentation cette année, de plus de 32 millions d'euros. J'ajoute également que nous accorderons 50 millions d'euros à l'OMS cette année, pour ne prendre que cet exemple.

Monsieur Clément, l'objectif de 0,7 % du RNB est bien l'objectif proposé par le Président dans un second temps. Dans un premier temps, la proposition était de 0,55 % en 2022. Nous veillerons à ce que l'atteinte de cet objectif ne résulte pas d'une baisse du RNB. Pour l'instant, les engagements sont respectés.

La coopération décentralisée est fondamentale sur le « dernier kilomètre » : elle répond aux problématiques locales de façon souple et rapide. Il y a eu une baisse de cette coopération décentralisée cette année, en raison de la crise de la Covid-19, puisqu'il était très compliqué pour les collectivités territoriales d'organiser des actions de coopération. Néanmoins, le ministre a pris l'engagement de continuer d'augmenter ces crédits lorsque la situation sanitaire le permettra.

Enfin, monsieur Lecoq, je suis très déçu que vous votiez contre les crédits. J'aurais aimé une abstention, parce qu'il faut reconnaitre que des efforts ont été réalisés, notamment sur ACT-A, à laquelle la France consacre 510 millions d'euros, plus 50 millions à l'OMS, et nous nous sommes engagés à verser 100 millions lorsque le vaccin sera trouvé. Vous verrez, lors Forum de Paris sur la paix de la mi-novembre, que la France est à la manœuvre.

Il ne faut pas non plus oublier que nous avons consacré 50 millions à la solidarité internationale dans le plan de relance.

Sur l'évasion fiscale et la fraude fiscale, nous sommes d'accord.

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Non, nous ne sommes pas d'accord. Il n'y a pas assez de crédits.

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Mais n'oublions pas que sous sommes un des seuls pays qui travaille sur le sujet.

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Merci, madame la rapporteure, pour votre clairvoyance sur l'aide publique au développement, reflet de votre investissement sur le sujet. L'augmentation historique du budget de la France à l'aide publique au développement est une bonne chose, et votre proposition de créer une commission d'évaluation indépendante l'est aussi, car l'efficacité de l'aide est primordiale pour que la qualité l'emporte la quantité. Autrement dit, en termes agro-économiques, ce n'est pas en augmentant indéfiniment les surfaces de production agricole que l'autosuffisance alimentaire s'étend à tous les pays, mais bien en veillant à l'optimisation des rendements qu'il y a gains de production.

Il faut donc s'appuyer sur les projets existants des États bénéficiaires de l'APD et collaborer en tant que partenaires allant dans la même direction. L'aide géographique et sectorielle doit être continue dans le temps et l'espace. Comme vous le signalez, il faut sortir de cette compétition où les intérêts particuliers des pays donateurs prévalent sur la concordance et la cohérence des projets des territoires. Fédérer tous les acteurs du multilatéralisme tout en s'adaptant aux contraintes politiques, économique et régionales, est indispensable. L'aide aujourd'hui doit être multilatérale, et non plus franco française.

Aussi, qu'en est-il du positionnement de l'Union Européenne et de l'Union Africaine sur ce sujet ? Comment envisager notre aide, quand il s'agit de pays qui bafouent ouvertement la démocratie et les droits de l'humain ? Comment se positionner en tant qu'acteurs et facilitateurs de projets, sans rentrer dans la course effrénée au leadership, à la concurrence ouverte entre teams d'experts au service de leur carrière et non des projets ? Enfin, comment faire pour aider les populations totalement exclues des politiques publiques à se rattacher aux projets d'aides internationales, tout en construisant un réseau de développement durable qui permette à terme d'implanter et de consolider la démocratie dans les pays les plus fragiles de la planète ? L'urgence sanitaire, climatique, économique et sociale nous imposent des résultats imminents et tangibles.

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Je voudrais avant tout remercier l'investissement et la dynamique de Valérie Thomas sur la question de l'aide publique au développement. C'est un engament très ancien et très constant.

J'appelle également l'examen au plus vite du projet de loi de programmation et d'orientation relative à la solidarité internationale. Je préconise même que notre commission adresse un courrier commun au ministre et au Premier ministre, à la suite du vote des crédits de cette mission, pour rappeler l'importance que nous accordons à la question de l'APD.

Je souhaiterais revenir sur l'initiative ACT-A, engagée à l'initiative du Président de la République, aux côtés de l'OMS, de la Commission européenne et de la fondation Bill et Melinda Gates.

Je ne surprendrai personne au sein de de cette commission en répétant, une fois encore, que des problématiques importantes et complexes appellent des réponses globales et coordonnées, qui font du multilatéralisme un outil indispensable dans le cadre de la crise sanitaire que nous traversons.

Je me réjouis dès lors du rôle prépondérant de la France dans la manifestation d'un « multilatéralisme renouvelé », qui est indispensable dans le cadre de la crise sanitaire que nous traversons. Cette initiative de lutte contre l'épidémie de Covid-19 comporte quatre piliers : le développement et la distribution d'un vaccin, la recherche d'un traitement, la fourniture de dispositifs diagnostics, le renforcement des systèmes de santé. Au total, ce sont 660 millions d'euros qui seront mobilisés par notre pays afin de financer ACT-A, dont 510 millions pour ces seuls quatre grands axes.

Que pouvez-vous nous dire de la répartition entre ces quatre piliers des sommes engagées par la France afin de financer ACT-A ? Le cas échéant, ne gagnerait-on pas à anticiper sur l'évolution de la situation, en abondant davantage des axes comme celui relatif à la recherche et aux déploiements de traitements ?

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Merci beaucoup pour votre rapport, qui s'inscrit dans la liste de ces avis et de ces propositions qui ont été faites par la commission des affaires étrangères, et il est vrai que nous sommes attachés à augmenter la contribution de la France. Cette année, cette contribution atteint un objectif important, certes, mais qui ne peut pas être une fin : celui des 0,7 % du revenu national brut consacré à l'APD. C'est donc la preuve qu'il y a une politique volontariste de la part de l'État, que nous soutenons tous.

Cet effort important de notre pays ne peut pas être simplement une politique coupée du reste des politiques publiques : il est nécessaire de mettre des liens entre cette aide publique au développement et d'autres politiques publiques, en particulier la politique migratoire. Je regrette que le Gouvernement refuse de mettre un lien entre cet effort en faveur de pays qui en ont besoin, et le refus de certains d'entre eux de reprendre leurs ressortissants, lorsque la France émet des laisser-passer consulaires.

Le Gouvernement compte-t-il lier les politiques publiques d'aide au développement et de gestion des flux migratoires ? L'absence de lien entre ces deux politiques m'oblige à ne pas pouvoir voter en faveur de ces crédits.

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Je tiens à remercier madame la rapporteure pour la qualité du rapport qui nous a été présenté.

Je veux ici évoquer le lien entre le développement et la situation en France. Je pense notamment au dramatique attentat contre Samuel Paty. Vous savez très bien que les enjeux de radicalisation dépassent complètement et très largement le seul territoire français. Vous savez également que la question de l'éducation, notamment dans les pays d'origine des flux de migration est fondamentale. Or nous constatons, en Afrique de l'ouest, un effondrement du système d'éducation publique. Cet effondrement est suivi d'une montée en puissance des écoles coraniques, qui n'offrent aucune espèce de débouchés, si ce n'est celui de devenir prêcheur ou marabout. Ces écoles coraniques prennent progressivement la place du service public. En outre, elles sont porteuses d'un islam qui n'est pas celui de l'Afrique de l'ouest, mais qui est plutôt un islam salafiste importé et financé par des puissances qui ne sont pas des puissances amies de ces pays.

Je me pose donc la question de notre effort en faveur de l'éducation, après l'annonce du Président de la République sur le Partenariat mondial pour l'éducation, à Dakar. Je pense que cette priorité est aussi importante que la santé. Si nous voulons avoir le bon niveau de combat contre la montée de la radicalisation, il convient d'offrir un avenir aux jeunes dans les pays concernés, mais aussi à ceux des diasporas. En effet, les populations des pays d'origine et des diasporas sont extrêmement liées par des liens familiaux, de communauté, de mode de vie. C'est pourquoi nous devons appréhender ce sujet d'une manière globale, y compris dans notre politique d'éducation à l'international. Dans ce domaine la France à un atout en tant que pays francophone très représenté dans la région.

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Je souhaiterais, quant à moi, revenir sur le volontarisme de la politique que mène la France en matière d'aide internationale. Je salue l'effort qui est affiché dans le cadre de ce budget. L'objectif reste bel et bien d'atteindre les 0,7 % du revenu national brut alloué à l'aide publique au développement, mais nous en sommes encore loin. C'est pourquoi je veux avoir votre avis sur la possibilité d'allouer une part plus importante des recettes de la taxe sur les transactions financières. Jusqu'en 2018, 50 % des recettes de cette taxe étaient affectés à l'aide internationale, et 30 % depuis cette date. Un amendement visant à allouer les 200 millions d'euros de recettes supplémentaires perçus en 2020 à l'aide publique au développement a été rejeté, au motif qu'il nuirait à la compétitivité et dégraderait le rendement de la taxe. Je tiens ici à avoir votre avis sur les raisons de ce rejet.

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Merci, madame la rapporteure, pour votre travail important. L'aide publique au développement connait une hausse significative de 344 millions d'euros, et cet effort est appréciable. Néanmoins, il reste loin derrière les objectifs des Nations unies, et nous place en dessous des budgets anglais ou allemands en la matière. Je ne souhaite pas ici revenir sur le manque de transparence de l'utilisation des fonds publics par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, la plupart de mes collègues l'ont déjà souligné.

Pouvez-vous nous rappeler d'abord l'ampleur de notre retard en matière d'aide publique au développement ? Par ailleurs, nous ne pouvons que constater un égarement de la politique diplomatique de la France en Afrique de l'ouest, qui ne semble pas mesurer le délitement des systèmes éducatifs et plus largement des services publics dans de nombreux pays, passant à côté du sujet à chaque échéance électorale, en Guinée, en Côte d'Ivoire, au Cameroun, en République démocratique du Congo, au Mali, et j'en passe. Vous avez évoqué des pistes de nouvelles collaborations avec les sociétés civiles notamment. Comment l'aide publique au développement pourrait-elle permettre de réorienter notre diplomatie vers l'accompagnement des transitions politiques et sociales des pays de l'Afrique de l'ouest, avec lesquels la France a des relations privilégiées ? Par ailleurs, comment peut-on décoloniser l'aide publique au développement pour la rendre efficace ?

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Merci, madame la rapporteure, pour votre travail de grande qualité. Comme nous partageons les mêmes valeurs, je me permets d'appeler votre attention sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, et ce quelques jours après qu'une coalition de trente-deux pays emmenée par les États-Unis a fait une déclaration commune contre l'avortement. Il est bien connu que la France veut être pionnière en matière de diplomatie féministe et souhaite inscrire les objectifs d'égalité entre les femmes et les hommes au sein de la politique d'aide au développement.

Dans votre rapport, il est écrit que via le Fonds des Nations unies pour la population, le FNUAP, une contribution de 18 millions d'euros sera consacrée à la question de l'égalité entre les femmes et les hommes. En revanche, je reste un petit peu sur ma faim quant aux aspects qualitatifs et l'utilisation des marqueurs genre. Le CICID s'était engagé à ce que 100 % des projets et programmes de l'AFD prennent en compte le marqueur genre de l'OCDE et 50 % des volumes annuels d'engagement disposent du marqueur 1 « significatif » ou du marqueur 2 « principal ». Ces engagements sont-ils tenus ?

Dans le même ordre d'idée, « l'expertise genre » permet d'adopter un angle transversal au sujet des questions d'égalité femme-homme dans tous les projets, et d'éviter une logique de silo. Est-ce que ces expertises sont à ce jour suffisamment renforcées ?

Pour conclure, la coopération décentralisée, qui joue un rôle de plus en plus important, est-elle suffisamment encadrée pour favoriser la réalisation d'une réelle égalité femme-homme ?

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Je tiens à rebondir sur les propos de M. Clément et de M. Nadeau, à la suite de l'emploi de cette formule, qui a l'air de passer sans opposition, sur la décolonisation de l'aide publique au développement. L'entretien d'un sentiment de culpabilisation, dans des pays comme la France, qui font des efforts depuis fort longtemps pour l'aide publique au développement, pose problème. J'invite par ailleurs OXFAM, puisque c'est une formule utilisée par cette association, à un peu plus de modestie, compte tenu la grave mise en cause de son action dans plusieurs pays. Certaines ONG devraient balayer devant leurs portes.

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Sur le fond, l'idée proposée par OXFAM que l'aide publique au développement soit gérée par l'ONU me parait contestable, parce que cette dernière prend de fait différentes formes, qui s'incarnent dans la pluralité des acteurs concernés : les organisations internationales telles que l'OMS, les organismes financiers comme le FMI, la Banque mondiale, et la France y contribue. Une aide publique au développement directe, et c'est ce dont nous parlons ce matin, est souhaitable, et il ne faut pas mélanger les leviers multilatéraux et internationaux.

Enfin, il serait bon de ne pas oublier le contexte international dans lequel nous évoluons. En Afrique, par exemple, la Chine a une politique extrêmement offensive. Il n'y a pas d'OXFAM ou d'équivalents en Chine pour contester cette politique, qui est ouvertement une politique de puissance. Je porte aucun jugement moral sur les actions de la Chine, mais ayons conscience qu'il y a des puissances qui ont une politique de contrôle direct ou indirect des matières premières, de l'approvisionnement en matière premières, des routes maritimes et des ports pour les exportations de produits manufacturés, etc. J'aimerais que nous gardions cela à l'esprit lorsque nous évoquons l'aide publique au développement français. Je ne dis pas que la France doit faire exactement la même chose, ni même l'Union européenne, qui en est absolument incapable d'ailleurs, mais soyons conscient que tout cela se passe dans le monde dans lequel nous vivons.

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. S'agissant de la taxe sur les transactions financières, vous avez dit, Mme la rapporteure, que vous alliez présenter un amendement pour l'affectation des recettes. Je tiens à dire que je présente chaque année le même type d'amendement dans le cadre du projet de loi de finances.

Nous avons créé une taxe sur les transactions financières afin de financer l'aide publique au développement, et force est de constater que, depuis 2016, l'augmentation des recettes de la taxe profite au budget général. En effet, le plafond de 528 millions d'euros est dépassé chaque année, et le surplus reversé au budget général.

Chaque année, je présente un amendement et fait face à la même réponse du rapporteur général de la commission des finances, qui émet un avis défavorable et se trompe de débat en soutenant que la taxe sur les transactions financières n'est pas optimale car elle fait fuir les investisseurs. Or, je parle non du taux de taxation, mais de la répartition des recettes entre le Fonds de solidarité pour le développement et le budget général. Le problème que je soulève n'a rien à voir avec l'attractivité de la place financière de Paris.

Ainsi, nous sommes aujourd'hui dans une situation paradoxale : nous avons créé une taxe qui rapporte sans cesse plus chaque année depuis 2016, et ce surplus ne va pas à l'aide au développement. Nous savons, en outre, qu'en 2020, les recettes de la taxe sur les transactions financières vont fortement augmenter car la crise Covid-19 ne l'affecte pas, bien au contraire. Or, 528 millions d'euros seulement contribueront au financement de l'aide publique au développement.

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Merci, madame la rapporteure, et bravo pour la qualité du rapport.

Vous saluez les rapprochements institutionnels au sein de « l'équipe France » de l'aide publique au développement. Le rapprochement de l'Agence Française de développement et d'Expertise France, le rapprochement avec la Caisse de dépôts et de consignations, ainsi que le rapprochement de Proparco et de Bpifrance vont en effet dans le sens d'une plus grande cohérence, d'une puissance d'action de nos outils de coopération internationale.

À propos de ce dernier rapprochement, vous plaidez dans votre rapport pour qu'une impulsion politique lui soit donnée. Je vous pose donc la question suivante : ne faudrait-il pas que cette impulsion contienne un encouragement à développer les entreprises qui permettraient aux pays africains de transformer en produits commerciaux les matières premières, notamment agricoles ? À l'heure où le changement climatique est un enjeu clairement identifié dans les objectifs de développement de l'ONU, c'est une anomalie que les pays africains ne disposent pas d'un tissu industriel leur permettant d'apporter leur propre valeur ajoutée. Les matières premières sont exportées hors d'Afrique et les produits finis, comme vous le savez, sont fréquemment importés en Afrique. Nous pourrions avoir un bilan carbone plus vertueux. Autre illustration, les pays de l'Union économique et monétaire ouest-africaine se sont engagés, accompagnés par la France, dans le processus de création de la monnaie unique Eco.

Or, une monnaie unique devrait venir soutenir des échanges commerciaux initialement importants dans sa zone économique de diffusion, comme cela s'est déroulé en Europe. Force est de constater que les premiers échanges entre les pays africains restent très faibles, faute de transformation des matières premières localement, et du fait d'une concurrence entre ces pays dans la production de ces mêmes matières premières.

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Monsieur Lecoq, la France s'est engagée dans la lutte contre l'évasion fiscale et la fraude fiscale. Elle a mis 90 millions d'euros sur la table et dispose d'une vraie stratégie, la stratégie de mobilisation des ressources domestiques, qui est un document réalisé par la direction générale du Trésor et la direction générale de la mondialisation. Je vous invite à le regarder et à le lire, car nous sommes le seul pays à le faire et à plaider pour une stratégie de long terme sur ces questions auprès du FMI, de la Banque mondiale et de l'Union européenne.

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Madame Lenne, je trouverais également merveilleuse l'idée de la création d'une équipe européenne, afin de mieux coordonner l'aide publique au développement. S'il existe à ce jour des exemples de coopérations, elles restent cependant très fonctionnelles et moins politiques. Le Conseil européen du 16 octobre 2020 a décidé de renforcer et de renouveler le partenariat stratégique avec l'Afrique ; j'espère que nous pourrons y entrevoir les prémices d'une équipe européenne pour le développement.

Au sujet des droits de l'Homme, il s'agit bien de l'une des priorités de l'aide publique au développement, mais qui se heurte parfois aux réalités de terrain. S'agissant de l'égalité entre les femmes et les hommes, qui a été abordée par Mme Clapot, je tiens à mentionner des avancées majeures, comme le fonds Mukwege, qui vient en aide aux femmes victimes de violences lors des conflits. Il existe également un « Forum génération égalité » actuellement en préparation, qui viendra renforcer les droits des femmes, et plus généralement les droits de l'homme. Nous devons effectivement continuer à porter le message des droits de l'homme à notre échelle, mais également à l'échelle européenne.

Monsieur Mbaye, je dois avouer ne pas disposer d'information sur la répartition des fonds entre les quatre piliers de l'initiative ACT-A. La ventilation des différents fonds n'est probablement pas encore actée, dans la mesure où l'ensemble des contributions n'a pas encore été versé. Le forum de Paris sur la paix sera peut-être l'occasion de trouver des réponses à ces questions.

Monsieur Dumont, je ne partage pas du tout votre point de vue, comme vous pouviez vous en douter. Parmi les grands acteurs de l'aide publique au développement, il y en a peu – pour ne pas dire aucun – qui souhaite lier ses actions aux questions migratoires.

S'agissant de l'augmentation de la contribution à l'éducation, Monsieur Maire, je pense également qu'il s'agit d'une absolue nécessité. Concernant le Partenariat mondial pour l'éducation, j'appelle néanmoins votre attention sur le fait que la France a multiplié par dix sa contribution pour atteindre les 200 millions d'euros sur la période 2018-2020. Auparavant, la contribution française n'était que de 17 millions d'euros. Il s'agit là d'un premier pas, même s'il n'est pas suffisant. L'éducation doit demeurer l'une des priorités absolues de l'aide publique au développement.

Madame Tanguy et monsieur Julien-Laferrière, je partage l'idée que 50 % des recettes de la TTF devraient être affectés à l'aide publique au développement, et j'ai également cosigné des amendements en ce sens. Nous devrions développer une stratégie différente en nouvelle lecture et adopter une démarche collective pour déposer un seul et unique amendement visant à affecter 50 % de la TTF à l'aide publique au développement. Cela nous permettrait d'opposer un argument construit au rapporteur général, et d'éviter les confusions entre hausse de l'affectation et hausse du taux de la TTF, qui sont deux débats distincts. En effet, la crainte d'une hausse des taux a souvent occulté le débat sur l'affectation de la TTF, et cela nous a desservi. En somme, je pense que nous devrions discuter tous ensemble, au sein de notre commission, de l'élaboration d'une stratégie commune à ce sujet.

J'ajoute, pour répondre à la question de Mme Clapot, que l'AFD inclut effectivement le critère de l'égalité entre les hommes et les femmes dans ses projets. Pour ce qui est de la coopération décentralisée, je ne suis pas certaine que l'ensemble des collectivités territoriales participant à l'aide publique au développement prenne en compte cette dimension, et c'est peut-être notre rôle en tant que parlementaire d'aller discuter avec ces collectivités territoriales, et de les inciter à prendre en considération cet objectif.

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. En tant que membre du conseil d'administration de l'AFD, je me permets d'indiquer que lorsque l'AFD accompagne les collectivités territoriales, l'agence impose d'appliquer les engagements liés à l'accord de Paris et à la réalisation des objectifs en matière d'égalité entre les hommes et les femmes. En revanche, si les collectivités agissent de leur propre chef, il n'existe pas de moyens à ce jour prévoyant un accompagnement des projets et le respect de ces thématiques.

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L'AFD met en place les processus nécessaires au respect des engagements internationaux et nationaux, mais pour ce qui est des collectivités territoriales, charge à nous, parlementaires, de porter un message permettant de développer un système similaire.

Monsieur de Rugy, merci pour les mises au point nécessaires. Je partage complètement votre position.

Monsieur Nadot, il nous faudra défendre l'exigence de transparence dans le futur projet de loi de programmation et d'orientation. À ce sujet, je soutiens la proposition de M. Mbaye de rédiger un courrier collectif afin d'accélérer la création d'un nouveau cadre législatif pour les politiques de développement.

Mme Sylla, je soutiens l'idée d'une impulsion politique pour que les matières premières africaines deviennent un élément concret de la mise en œuvre d'une politique industrielle locale.

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Madame la rapporteure, merci d'avoir pris le soin de répondre à chacun des intervenants. Mes chers collègues, la discussion générale sur les crédits de la mission « Aide publique au développement » est désormais close.

Article 33, état B : Aide publique au développement

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Je suis saisi de trois amendements sur l'état B annexé à l'article 33 concernant les crédits de la mission aide publique au développement. Le premier amendement, numéro AE16, est présenté par M. David.

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J'émets un avis défavorable sur cet amendement.

Conformément aux orientations du CICID de février 2018, l'augmentation de l'APD française est principalement portée par l'aide bilatérale, qui poursuit sa hausse en 2021 (+ 16,9 %), et représentera en 2021 près de 60 % des dépenses d'APD. Ce renforcement du volet bilatéral s'effectue par la mobilisation d'un volume croissant de dons, qui sont orientés vers les 19 pays prioritaires de notre APD.

En cohérence avec cet objectif, le projet de loi de finances pour 2021 marque une augmentation significative des moyens de l'AFD au titre des dons-projets et des dons-ONG, ainsi qu'une augmentation de l'enveloppe des projets relevant du Fonds de solidarité pour les projets innovants, outil complémentaire de l'aide projet mise en œuvre par l'AFD, car il répond à des problématiques locales pour lesquelles la connaissance de terrain dont dispose l'ambassadeur et le service de coopération et d'action culturelle sont nécessaires.

S'agissant des crédits d'aide multilatérale du programme 110, les crédits de paiement augmentent de 36 % par rapport en 2020. Les autorisations d'engagement enregistrent quant à eux une « baisse mécanique » : c'est la conséquence de la hausse importante des autorisations d'engagement en 2020 à la suite des reconstitutions triennales de trois grands fonds multilatéraux : l'Association internationale de développement (AID), le Fonds africain de développement (FAD) et le Fonds vert pour le climat. Ces trois fonds importants, qui représentent la moitié de la totalité des crédits de paiement du programme 110 en 2021, servent les principales priorités de la politique de développement française.

L'amendement AE16, mis aux voix, est rejeté.

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Le deuxième amendement est l'amendement n° 15, présenté également par M. David.

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J'émets également un avis défavorable sur cet amendement. Le budget qui vous est présenté vise à poursuivre la hausse de l'APD transitant par les organisations de la société civile (OSC), dans le cadre du doublement prévu entre 2017 et 2022 par le CICID. Le montant d'aide publique au développement transitant par les organisations de la société civile est en augmentation constante depuis 2017 pour atteindre 460 millions d'euros en 2019 (contre 310,4 millions d'euros en 2017 et 374,2 millions d'euros en 2018). En 2019, l'AFD a financé les organisations de la société civile à hauteur de 208 millions d'euros, soit une augmentation de 72 millions d'euros par rapport à 2018. Cette enveloppe comprend le dispositif Initiatives OSC, qui atteindra 130 millions d'euros en autorisation d'engagements en 2021, après 110 millions en 2020.

Au-delà de ce dispositif, le soutien global du MEAE par d'autres canaux augmente également, puisqu'il est passé de 126 millions d'euros en 2018 à 139 millions d'euros en 2019. Le Cendre de crise et de soutien reste le pourvoyeur le plus important, puisqu'il contribue à hauteur de 71 millions d'euros pour l'action humanitaire.

Les collectivités territoriales, enfin, sont également très mobilisées dans le soutien aux organisations de la société civile, qu'elles financent à hauteur de 85 millions d'euros en 2019, dernier chiffre connu.

L'amendement AE15, mis aux voix, est rejeté.

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Le dernier amendement est l'amendement n° 17 de M. Julien-Laferrière.

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Il s'agit d'un amendement d'appel. Comme cela a pu être dit par certains de mes collègues tout à l'heure, le projet de loi de programmation relatif à l'aide publique au développement va arriver sous peu, je l'espère. Pour l'heure, les conclusions du CICID de 2018 ne sont toujours pas inscrites dans notre arsenal législatif. Depuis 2017, nous constatons une hausse des crédits alloués à l'aide publique au développement. Cependant, les crédits du programme 209, auquel nous sommes très attachés dans cette commission, pourraient profiter d'une hausse plus importante. Cet amendement d'appel propose de transférer un euro du programme 110 au programme 209, parce que les services sociaux de base doivent être la priorité de notre aide publique au développement. Les objectifs de l'Agenda 2030 sont aujourd'hui loin d'être réalisés, et les perspectives ne sont pas bonnes, en particulier après la crise de la Covid-19. Cet amendement d'appel a donc pour objectif de proposer davantage d'efforts en faveur des services sociaux.

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Même si je partage une grande partie des constats qui sont faits dans l'exposé sommaire de cet amendement, j'émets un avis défavorable.

C'est précisément pour renforcer son action dans les secteurs prioritaires de l'aide, et notamment certains secteurs sociaux qui souffraient jusqu'à présent d'un sous-financement que, depuis le CICID de 2018, la France renforce la composante bilatérale de son aide, en particuliers sous forme de dons. Ainsi, en vue d'engager la hausse des dons projets vers les pays prioritaires, l'AFD a bénéficié de moyens accrus, notamment d'un milliard d'euros d'autorisations d'engagements additionnels dès 2019, dans le cadre d'un effort global sur l'ensemble du quinquennat.

Je rappelle qu'au total, l'aide publique au développement de la France est majoritairement constituée de dons (81 % de nos financements bilatéraux et multilatéraux en 2019), ce qui fait de notre pays le quatrième bailleur mondial en dons. Je rappelle également que la France se refuse à intervenir sous forme de prêts dans les pays les plus vulnérables. En outre, depuis le CICID de 2018, notre politique de développement s'articule autour de priorités claires : santé, crises et fragilités, égalité femmes-hommes, éducation, climat et environnement.

Évidemment, nous pouvons faire plus et mieux. J'entends cet amendement d'appel et je le prends comme un message à passer, mais mon avis reste néanmoins défavorable.

L'amendement AE17, mis aux voix, est rejeté.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement » tels qu'ils figurent à l'état B annexé à l'article 33 du projet de loi de finances pour 2021, sans modification.

– Examen pour avis des crédits de la mission Immigration, asile et intégration (M. Pierre-Henri Dumont, rapporteur pour avis) et vote sur les crédits de cette mission.

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Mes chers collègues, nous allons à présent examiner les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », sur le rapport de notre collègue Pierre-Henri Dumont. Celui-ci succède dans cette fonction à Valérie Boyer, qui a été élue récemment sénatrice des Bouches-du-Rhône et à qui nous adressons tous nos vœux de succès dans l'exercice de son nouveau mandat.

Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sont destinés à la maîtrise des flux migratoires, à l'intégration des immigrés en situation régulière ainsi qu'à la mise en œuvre du droit d'asile.

Alors que la pression migratoire ne faiblit pas, notamment en raison des flux secondaires internes à l'Europe qui privilégient la France, et que les difficultés soulevées sur notre sol par les migrants sont croissantes, les crédits inscrits en autorisations d'engagement pour 2021 au titre de cette mission diminuent de près de 9 %.

Notre rapporteur pour avis nous éclairera dans un instant sur ce paradoxe budgétaire ainsi que sur les prévisions du Gouvernement en matière de demande d'asile et de flux migratoires. Instruit par son expérience d'élu du Calaisis, il a, dans son rapport, dressé un bilan de la pression migratoire qui s'exerce à la frontière maritime entre la France et l'Angleterre et fait le point sur la nécessité de réformer la politique migratoire européenne, symbolisée par le règlement de Dublin III. Un pacte sur la migration et l'asile a été présenté le 23 septembre dernier par la Commission européenne ; il est utile que nous puissions en débattre.

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Chers collègues, il me revient en effet de vous présenter mes travaux sur les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » du projet de loi de finances pour 2021.

Cette mission comporte deux programmes : le programme 303 « Immigration et asile » et le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française ». Pour la première année depuis cinq ans, ses crédits diminuent de 8,8 %, soit une baisse de 170 millions d'euros, en autorisations d'engagement (AE) par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2020, pour atteindre 1,75 milliard d'euros. Les crédits de paiement (CP) s'élèvent, quant à eux, à 1,84 milliard d'euros, soit une augmentation de 2 % seulement. Cette mission ne profite donc pas de l'effort consenti par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance, ce qui est étonnant au regard du défi migratoire auquel la France est confrontée.

Malgré une tendance à la baisse des flux migratoires depuis le pic de 2015, tendance renforcée par la crise sanitaire, l'Union européenne reste en effet confrontée à une pression migratoire forte. En 2019, 139 000 entrées irrégulières ont été recensées et 743 0000 demandes d'asile enregistrées, soit presque 80 000 demandes de plus qu'en 2018. Or, la France est le deuxième pays européen en matière d'accueil des demandeurs d'asile, derrière l'Allemagne : en 2019, 151 000 demandes ont ainsi été enregistrées en France, au guichet unique pour demandeurs d'asile (GUDA). Par ailleurs, la même année, les forces de l'ordre ont procédé à 125 000 interpellations d'étrangers en situation irrégulière, soit le chiffre le plus élevé des cinq dernières années.

La France demeure donc une destination attractive. Elle est choisie notamment par les ressortissants des pays du Maghreb et d'Afrique de l'Ouest francophone, sans oublier ceux de l'Albanie, de la Géorgie et de la Roumanie. Mais elle est aussi un pays de second choix puisque, dans plus d'un tiers des cas, la demande d'asile qui y est déposée l'a été auparavant dans un autre État membre de l'Union européenne – c'est ce que l'on appelle un flux de rebond ou un flux secondaire. Par ailleurs, notre pays est un point d'étape pour des migrants en situation irrégulière désireux d'atteindre d'autres pays, comme le Royaume-Uni.

J'ai choisi de centrer mon rapport sur deux thématiques, la première étant la situation dans la Manche.

Depuis plusieurs années, le Calaisis est confronté à une situation extrêmement critique dont le dernier développement réside dans le phénomène dit des small boats, petites embarcations peu sécurisées utilisées par les migrants pour se rendre clandestinement au Royaume-Uni. Depuis le début de l'année 2020, 7 000 migrants ont ainsi réussi la traversée, soit environ quatre fois plus qu'en 2019 et vingt-cinq fois plus qu'en 2018. Ces traversées sont dangereuses, puisque quatre personnes ont perdu la vie en 2019, et au moins six en 2020. Parmi celles décédées cette année, j'inclus les quatre migrants, dont deux enfants, dont l'embarcation a chaviré en mer il y a deux jours et qui ont fait l'objet d'une grande opération de sauvetage au large de Loon-Plage, dans le département du Nord. Hier, un nourrisson de quelques mois était toujours porté disparu.

L'utilisation de ces small boats est favorisée par la topographie des plages du nord de la France : leurs dunes parsemées de blockhaus et leur végétation abondante permettent de se mettre à l'abri et de dissimuler bateaux et moteurs lorsque la météo est difficile, puis de revenir les chercher lorsqu'elle s'améliore. L'utilisation de ces embarcations est également encouragée par les passeurs, car les ports et les abords du tunnel sous la Manche ont été fortement sécurisés et les contrôles renforcés. Enfin, la crise sanitaire ayant eu pour conséquence de réduire le fret, les vols et les traversées en ferries, les small boats sont apparus comme une véritable solution de rechange pour se rendre au Royaume-Uni.

J'ai pu rencontrer des membres de la gendarmerie et de la police aux frontières (PAF) et je tiens à saluer leur travail, qui a permis, du 1er janvier au 12 octobre 2020, d'empêcher 45 % des tentatives de traversée avant même que les bateaux soient mis à l'eau. Mais ces forces de sécurité sont confrontées à de nombreuses difficultés, au premier rang desquelles figure le manque de moyens matériels et humains. Des renforts humains sont donc indispensables, qu'ils soient affectés directement dans les unités ou qu'ils consistent dans l'envoi de forces mobiles, voire de soldats, comme dans le cadre de l'opération Harpie, qui associe la gendarmerie et les armées en Guyane. Il faut également renforcer les effectifs des renseignements territoriaux afin de mieux lutter contre les passeurs.

En outre, la coordination entre acteurs doit être améliorée, notamment entre la gendarmerie et la PAF. C'est pourquoi je recommande la création d'un commandement unique pour l'action migratoire française dans la Manche. Ce commandement coordonnerait l'ensemble des actions de lutte contre l'immigration clandestine et le secours en mer et aurait sous son autorité l'ensemble des acteurs de cette lutte, à savoir l'armée, dont la gendarmerie, la police, dont la PAF, la préfecture, la préfecture maritime ainsi que les services municipaux.

L'efficacité des actions entreprises dépend également du nombre de mesures d'éloignement prononcées et de l'exécution de celles-ci. Or, en 2020, le taux d'exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) ne s'élève qu'à 16 % dans le Pas-de-Calais. La situation, déjà critique en 2019, a été aggravée par la crise sanitaire, qui a provoqué la fermeture de nombreux consulats, des espaces aériens et, entre le 8 avril et le 15 juin 2020, du centre de rétention administrative de Coquelles en raison de plusieurs cas de contamination au covid-19.

Mais au-delà des problèmes conjoncturels, l'éloignement n'apparaît pas comme une priorité du Gouvernement. Je constate ainsi avec sidération que les crédits consacrés à l'éloignement des migrants en situation irrégulière ne s'élèvent qu'à 34,6 millions d'euros sur le programme 303, dont les crédits sont, au total, de 1,3 milliard d'euros en AE et de 1,4 milliard en CP ! La faible augmentation des frais liés à l'éloignement des personnes en situation irrégulière ne correspond en réalité qu'à celle des rotations de l'avion Beechcraft de la sécurité civile. Cela signifie que l'on ne compte renvoyer chez elles que les personnes originaires de pays dits sûrs, comme les pays des Carpates ou des Balkans, car la majeure partie des opérations de renvoi de migrants en situation irrégulière, dont les pays d'origine sont beaucoup plus éloignés, impliquerait des frais de billetterie.

Ces différents outils de lutte contre l'immigration clandestine sont indispensables pour aider le Calaisis à faire face à la crise migratoire. Dans mon rapport, j'ai souhaité rappeler la situation extrêmement difficile à laquelle ce territoire est confronté depuis la fin des années 1990 : la population, les entreprises et les collectivités y souffrent, et réclament depuis des années l'aide de l'État mais aussi celle du Royaume-Uni. La contribution britannique s'est pourtant toujours limitée à financer du personnel et des infrastructures dédiées à la sécurité, notamment des murs et des barbelés, sans jamais compenser les préjudices économiques et sociaux.

Qui plus est, la pression migratoire pourrait fortement augmenter dans les prochains mois. En effet, à partir du 1er janvier 2021, le règlement Dublin III, notamment la règle du pays de première entrée pour tout demandeur d'asile, ne s'appliquera plus au Royaume-Uni. Or, cette règle décourageait jusqu'à présent certains migrants de traverser la Manche lorsque leurs empreintes digitales avaient déjà été prises dans un autre pays européen, car ils risquaient d'y être renvoyés. Les flux de migrants à destination du Royaume-Uni devraient par conséquent augmenter.

Dans ce contexte, si la coopération bilatérale franco-britannique est indispensable, elle doit néanmoins être rééquilibrée en faveur de la France. Le Royaume-Uni doit en effet augmenter sa contribution financière pour compenser, enfin, tous les coûts induits pour les collectivités, les entreprises et les particuliers. Cette coopération ne sera cependant pas suffisante. Un nouvel accord entre l'Union européenne et le Royaume-Uni en matière d'asile et de migration est nécessaire.

Ce dernier point me permet de faire le lien avec la dernière partie du rapport, qui porte sur la réforme de la politique migratoire européenne. J'incite la commission des affaires étrangères à se saisir des aspects européens de la politique migratoire française qui, bien qu'ils ne soient pas retracés dans le budget de la mission examinée, ne sont certainement pas neutres sur le plan financier.

Le « système Dublin », qui a pour objectif d'identifier l'État responsable du traitement de la demande d'asile d'un individu en situation irrégulière, est à bout de souffle. Le critère du pays de première entrée fait reposer en grande partie la pression migratoire sur les pays dits d'entrée, c'est-à-dire la Grèce, Chypre, l'Italie, l'Espagne et Malte. Or, depuis 2015, ils ne parviennent plus à gérer l'afflux de migrants, dont les empreintes ne sont pas toujours prises. Quant aux procédures d'asile, elles ne sont pas toujours enclenchées, ou durent extrêmement longtemps.

Face à ces dysfonctionnements, la Commission européenne a proposé, le 23 septembre dernier, un nouveau pacte sur la migration et l'asile, que je présente dans le rapport. Il comprend notamment un nouveau mécanisme de solidarité en cas de pression migratoire, de situation de crise ou de force majeure. La proposition de la Commission est toutefois incomplète puisqu'elle n'a, par exemple, pas souhaité imposer un délai de rétention obligatoire une fois la procédure d'asile enclenchée. Une telle mesure est pourtant essentielle pour limiter les mouvements secondaires. La réforme de l'espace Schengen n'a pas non plus été traitée. Or, les contrôles aux frontières doivent pouvoir être rétablis rapidement et systématiquement en cas de flux migratoires importants. J'appelle le ministère de l'Europe et des affaires étrangères à être particulièrement vigilant sur ces deux points.

En conclusion, compte tenu, d'une part, de la pression migratoire très forte à laquelle l'Europe et la France sont confrontés et, d'autre part, des moyens alloués à la gestion des flux, je vous appelle, mes chers collègues, à rejeter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». Envoyer un tel signal me paraît indispensable : nous devons nous doter d'un budget sincère et cohérent face à la réalité migratoire.

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Nous allons entendre à présent les représentants des groupes.

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En tant que porte-parole du groupe La République en Marche sur le volet affaires étrangères de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, j'ai travaillé avec Marielle de Sarnez qui, grâce à sa connaissance du sujet, a su allier efficacité et humanité – chère Marielle, j'ai beaucoup appris à cette occasion.

Monsieur le rapporteur pour avis, vous indiquez, dans votre rapport, que la France fait face à un afflux constant de demandeurs d'asile venant d'Europe, situation qui nous conduit à penser objectivement que celle-ci doit prendre des mesures conjointes. Vous faites état, en outre, d'une difficulté majeure, liée à la mobilité des flux migratoires, qui passaient par la Grèce en 2017, puis par l'Espagne en 2018, en empruntant surtout la voie maritime.

Nous consacrons, depuis trois ans, à l'immigration, à l'asile et à l'intégration un budget en augmentation. En particulier, les crédits alloués à la lutte contre l'immigration irrégulière augmentent de plus de 50 millions d'euros, affectés notamment à la sécurité des frontières. Ainsi, le nombre de refus d'entrée sur le territoire a augmenté dès 2017 de plus de 70 % par rapport aux deux années antérieures. Je salue à cet égard le travail de la police aux frontières ainsi que celui de la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne de la préfecture de police de Paris (DSPAP) et de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ).

Vous avez, monsieur le rapporteur, évoqué les faiblesses de notre politique d'éloignement. Or, celle-ci reste liée à notre souci de préserver les droits de l'homme s'agissant en particulier des mineurs non accompagnés.

C'est avec raison que vous soulignez le travail de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), qui a permis de réduire de plus de 30 % le temps de traitement des demandes d'asile, ce qui concourt à l'objectif d'une meilleure intégration des demandeurs. Quant à la protection temporaire, dont seuls les étrangers non européens qui fuient les zones de conflit peuvent bénéficier, elle est gérée par l'Europe, qui décide donc de son maintien ou non.

Le renforcement de la coopération avec les pays d'origine ou de transit – nous relevons une fois encore cette difficulté – doit par ailleurs constituer une priorité.

S'agissant de l'intégration, il ne faut pas négliger le caractère problématique de l'exercice du droit d'asile par les ressortissants de pays dans lesquels certains opposants sont pourchassés, non pas parce qu'ils demandent plus de liberté face à un régime autoritaire, mais parce qu'ils réclament un régime islamique encore plus autoritaire. Ces éléments doivent être pris en considération : c'est en cela que la question tchétchène percute nos valeurs européennes.

Vous évoquez, dans le chapitre IV de votre rapport, le cadre européen qui demeure nécessaire pour répondre aux défis migratoires, en soulignant que, dans ce contexte, plusieurs réformes en cours devraient permettre de renouveler et de renforcer la politique migratoire européenne. Plus précisément, l'évolution des compétences de Frontex, l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, qui avait déjà mené des opérations de sauvetage en mer et de lutte contre les passeurs, est en cours de négociation. En outre, les crédits alloués à la politique de contrôle aux frontières ont été multipliés par quatre.

En conclusion, le groupe LaREM votera, bien entendu, les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration.

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Pour la quatrième année consécutive, la mission « Immigration, asile et intégration » voit ses ressources augmenter, mais beaucoup moins fortement qu'en 2019 et en 2020 puisque leur hausse est de 36,8 millions d'euros en CP.

Parmi les crédits affectés à ce budget, 34 millions d'euros sont consacrés aux allocations versées aux demandeurs d'asile et à la création de 4 000 places d'hébergement temporaire. Ces deux mesures sont la conséquence de l'augmentation constante du nombre des demandeurs d'asile et de l'allongement de la durée des procédures : elles ne servent qu'à aligner l'action de l'État sur l'afflux non maîtrisé de demandeurs d'asile ainsi que sur la lenteur de leur prise en charge par l'OFPRA. Celui-ci présente d'ailleurs de graves déséquilibres et souffre d'un manque d'efficacité préjudiciable aux demandeurs pouvant réellement prétendre à l'asile, ce qui a des conséquences sur notre société.

Le Gouvernement choisit ainsi d'accorder la priorité aux demandeurs d'asile plutôt qu'à la lutte contre l'immigration irrégulière.

En 2020, les demandeurs d'asile ont dû attendre en moyenne neuf mois une décision de l'OFPRA, l'allongement constant de la durée de la procédure conduisant, tout autant que des décisions d'expulsion à la fois peu nombreuses et inappliquées, à douter de la bonne gestion de cet office. Ces deux problématiques sont à l'origine d'une pression de plus en plus forte sur les structures d'encadrement de l'immigration et du droit d'asile et d'un coût intenable qui ne cesse pourtant d'augmenter. Qu'est-ce qui empêche de mettre en œuvre les dispositions de la loi du 10 septembre 2018 qui visait à réduire le délai dans lequel l'OFPRA rend ses décisions ?

Aujourd'hui, les objectifs sont inversés et l'échec, au regard des chiffres, qui ont explosé, est sans appel.

Pour rendre cet office plus efficace, ne serait-il pas souhaitable de lier son activité, trop indépendante, à la politique migratoire dans son ensemble et de le rendre plus opérationnel et plus réactif, en instaurant une plus grande coopération entre les services concernés ? Par ailleurs, ses crédits devraient être affectés en priorité à l'amélioration du traitement de la gestion des demandeurs d'asile.

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Le travail du rapporteur, qui est un témoignage de terrain, atteste des responsabilités prises dans le domaine de l'asile et de l'immigration par notre commission – dont je rappelle qu'elle s'était saisie pour avis du projet de loi « asile et immigration » – ainsi que de la transversalité de ce dossier, qui ne peut être traité uniquement sous l'angle policier par la commission des lois.

Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sont en légère hausse. Beaucoup reste cependant à faire, surtout au regard de la demande et des troubles vers lesquels le monde semble se diriger. Si le nombre de migrants tend à diminuer au sein de l'Union européenne, ce n'est pas le cas en France puisque, comme le rapporteur pour avis le rappelle, notre pays est plus attractif que certains de ses voisins.

Ce budget comporte des avancées notables, notamment la création de 4 000 places supplémentaires en centre provisoire d'hébergement (CPH) et l'augmentation des moyens de l'OFPRA.

En ce qui concerne l'intégration, si l'allongement de douze à vingt-quatre heures de la formation des demandeurs d'asile peut paraître insuffisant, je rappelle ses incidences budgétaires, mais aussi le rôle joué par les Alliances françaises sur le territoire national ainsi que la revendication, par la présidente de notre commission, de l'élaboration d'une véritable politique d'immigration légale, notamment avec des visas aller-retour.

Le Brexit va nous poser problème, dans la mesure où la France va devenir frontière extérieure de l'Union. Cette situation contribuera à augmenter la pression, mais elle a le mérite de favoriser une clarification puisque nous pourrons nous appuyer sur des moyens européens ; je pense notamment à Frontex.

En conclusion, le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés votera les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

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Monsieur le rapporteur pour avis, vous posez la bonne question, celle de l'adéquation des crédits aux défis migratoires auxquels la France est confrontée et qu'elle risque de ne pas pouvoir relever, faute de moyens suffisants. Je partage votre sentiment : les prévisions gouvernementales reposant sur une stabilisation du nombre de demandes d'asile en 2021 apparaissent aujourd'hui plus qu'incertaines.

En tout état de cause, les députés du groupe Socialistes et apparentés estiment qu'en matière d'immigration, le projet de loi de finances pour 2021 est marqué par une dimension sécuritaire qui a prouvé son caractère inopérant.

En matière d'intégration, force est de constater que les ambitions fixées par le comité interministériel du 5 juin 2018 sont loin d'avoir trouvé toute leur traduction budgétaire.

En matière d'asile, nous continuons de déplorer le caractère excessif des délais de traitement ainsi que les failles de la procédure du règlement de Dublin, qui place trop souvent les demandeurs d'asile dans des situations insoutenables. Nous déposerons, en séance publique, une série d'amendements visant notamment à créer de nouvelles places en CPH et à renforcer la stratégie ministérielle d'accueil et d'intégration.

J'appelle votre attention sur le fait que ces différents manquements sont à l'origine des rassemblements importants de personnes – jeunes isolés, familles entières – qui souhaitent trouver une solution en France mais qui sont en situation d'errance et se regroupent, notamment à la périphérie des villes, dans de très nombreux squats ingérables. En la matière, l'État ne fait pas face à ses responsabilités. Certes, on nous promet, à nous, élus, qui sommes confrontés à d'énormes difficultés, des enquêtes sociales afin de trouver des solutions, mais elles ne viennent pas. On voit bien que les services administratifs de l'État rencontrent des difficultés pour faire face à leurs obligations.

Ces squats peuvent rassembler jusqu'à 500 personnes. On a beaucoup parlé de la « jungle » de Calais ; désormais, chaque ville a la sienne. Or, les élus locaux ne peuvent pas gérer ces bidonvilles. L'État doit apporter rapidement des réponses.

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La mission « Immigration, asile et intégration », dont les crédits augmentent globalement de 36 millions d'euros, soit une hausse de 2 %, par rapport à 2020, se structure autour de trois axes : la maîtrise des flux migratoires, l'intégration des personnes en situation régulière et la garantie du droit d'asile.

L'évolution des crédits est principalement due à l'actualisation des besoins en matière d'allocation unique aux demandeurs d'asile (ADA), en hausse de 11 %, et à la création de 4 000 places en CPH, qui se traduit par une hausse de 23 %.

Le programme 303 « Immigration et asile », qui est lui en hausse de 2,5 %, poursuit trois objectifs : optimiser la prise en charge des demandeurs d'asile, réduire les délais de traitement des demandes d'asile et améliorer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière.

S'agissant du premier objectif, force est de constater que nous courons toujours après les règles que nous nous sommes fixées, en raison d'un manque de moyens, notamment dans les préfectures.

Si la réduction des délais de traitement des demandes d'asile par l'OFPRA puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) à six mois en moyenne peut apparaître comme un progrès, il n'en demeure pas moins qu'entre le dépôt de leur demande et la décision définitive, les personnes réfugiées ne disposent d'aucuns droits, de sorte qu'elles sont incapables de subvenir à leurs besoins, d'autant que les hébergements manquent. Cette situation nous permet, certes, de mesurer la générosité de nos compatriotes, mais elle traduit les carences de notre système d'accueil.

Quant à la lutte contre l'immigration irrégulière, force est de constater que les flux ont diminué, qu'en raison de la pandémie, les centres de rétention administrative (CRA) ne sont pas pleinement occupés – j'ai pu l'observer en visitant celui de Marseille, la semaine dernière – et que les retours sont limités à certains pays : Maroc, Algérie, par bateau lorsque le départ a lieu à Marseille, et Albanie, par avion. Le délai de rétention se trouve de facto réduit par les difficultés de retour, de nombreux pays refusant par ailleurs d'accueillir leurs ressortissants en raison de la pandémie.

Le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » est stable. Chaque année, environ 100 000 étrangers issus de pays extra-européens arrivent en France régulièrement ; ils souhaitent s'y installer durablement et signent le contrat d'intégration républicaine. Les bénéficiaires de la protection subsidiaire, qui représentent 26 % de ces étrangers, sont majoritairement non-francophones, souvent vulnérables, car venant d'une zone de guerre : Syrie, Libye, Afghanistan, et ont un niveau de qualification généralement inférieur à celui des primo-arrivants.

Une simple lecture du budget ne permet pas d'appréhender cette question dans toutes ces dimensions : il manquera toujours la dimension humaine que nous donnent à mesurer les parcours que doivent emprunter celles et ceux qui s'inscrivent pourtant dans le cadre légal que nous avons fixé.

Je citerai deux exemples qui illustrent l'écart séparant les bonnes intentions de la réalité du terrain. Premièrement, les jeunes ayant obtenu le statut de réfugié ou bénéficiant de la protection subsidiaire ne peuvent plus prétendre à l'ADA et se retrouvent alors sans ressources dans l'attente, qui peut être longue, de la convocation de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) en vue de la signature de leur contrat d'intégration républicaine, lequel leur donnera droit aux cours de français et aux quatre jours de formation citoyenne.

Deuxième exemple : un demandeur d'asile n'a, en principe, pas accès au marché du travail et ne peut donc ni travailler ni s'inscrire sur la liste des demandeurs d'emploi auprès de Pôle emploi ni bénéficier des prestations du service public de l'emploi. Dès lors, même s'il est accompagné par un centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA), aucun des prescripteurs autorisés par la loi ne peut le faire bénéficier d'une mise en situation professionnelle : seuls ont accès au dispositif de droit commun en la matière les personnes ayant la qualité de réfugiés ou bénéficiant de la protection subsidiaire.

Tout cela ne fait qu'encourager la clandestinité. En imposant de tels parcours, non seulement nous provoquons de la souffrance mais nous gaspillons également des deniers publics – or ce budget court toujours après les besoins.

Le groupe Libertés et Territoires votera donc contre les crédits de cette mission.

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Je salue le sérieux du travail du rapporteur pour avis, même si – il ne s'en étonnera pas – je ne partage pas ses conclusions. Comme la plupart des budgets cette année, celui de la mission « Immigration, asile et intégration » augmente, en suivant les orientations de loi « asile et immigration » à laquelle les députés communistes s'étaient vivement opposés.

Le contexte de la discussion de ce budget est très compliqué. En effet, tout s'entremêle dans une séquence très dangereuse où se multiplient des propositions politiques et médiatiques que je m'autorise à qualifier de démagogiques – certaines frôlent même la bêtise. Il est facile de recourir à la politique du bouc émissaire pour masquer ses propres fautes. Il est désespérant d'entendre les torrents d'horreurs déversés, ces dernières semaines, dans les médias ou par certaines personnalités politiques.

Puisque d'aucuns l'ont peut-être oublié, je le rappelle, le droit d'asile, ce n'est pas de la charité, c'est une obligation constitutionnelle et internationale : il s'agit de protéger des personnes menacées dans leur pays. Or tous les dispositifs mis en œuvre depuis l'accession de Macron à la responsabilité de Président de la République, comme le raccourcissement des délais de recours ou le doublement de la durée de rétention, vont à l'encontre de cette obligation. Ils entravent en effet les droits des demandeurs d'asile sans avoir le moindre effet dissuasif sur les entrées sur le territoire, qui restent stables. Allons-nous persévérer dans cette fuite en avant dans le tout répressif ou allons-nous nous rendre enfin compte qu'il faut changer radicalement de politique ?

Je n'ai rien à ajouter aux exemples donnés par notre collègue Jean-Michel Clément. Je pourrais évoquer Ouistreham. À cet égard, Alain David a raison : des poches se créent dans lesquelles les conditions de vie sont parfaitement inhumaines, même si, et c'est heureux, des solidarités territoriales s'expriment.

Enfin, je souhaite insister sur la notion de pays d'origine sûr, que l'OFPRA utilise pour interdire aux ressortissants de ces pays de bénéficier d'une admission sur le territoire au titre de l'asile. La liste de ces pays est donc extrêmement sensible... Ainsi, certains pays commercialement amis de l'État français pourraient être considérés comme sûrs alors qu'ils sont dirigés par des dictateurs qui savent enfermer leur opposition ainsi que certains journalistes. Ce concept à géométrie variable, incompatible avec le principe de non-discrimination en raison de la nationalité énoncé par la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, est dangereux. Lors des débats sur la loi « asile et immigration », les députés communistes se sont d'ailleurs insurgés contre son existence. Le fait que cette liste soit établie au sein du seul conseil d'administration de l'OFPRA constitue une anomalie majeure. À défaut de la supprimer rapidement, il faudrait à tout le moins imposer que le Quai d'Orsay soit associé au processus, en participant à son actualisation régulière.

Le droit d'asile vu par le Gouvernement est si éloigné du respect du droit international et des droits humains défendus par les députés communistes qu'il nous est bien évidemment impossible d'approuver ces crédits : nous voterons contre.

Présidence de Mme Marion Lenne, secrétaire de la commission.

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Je tiens à rappeler que la France n'a jamais accueilli autant d'immigrés légaux qu'en 2019 : 400 000 personnes sont alors arrivées légalement sur notre territoire, si on prend en compte les titres de séjour octroyés et le nombre des premières demandes d'asile enregistrées. S'agissant de l'immigration irrégulière, il existe peu d'indicateurs, mais on constate que le budget de l'aide médicale de l'État (AME) a augmenté de près de 5 % au cours des trois premiers mois de l'année et qu'il va passer, dans le PLF, le cap symbolique du milliard d'euros. J'ajoute que le stock des titres de séjour actifs en France est de 3,5 millions.

Les routes suivies par les flux migratoires évoluent, parce qu'il s'agit d'un « business ». Lorsque des routes sont fermées, du fait d'une sécurisation, des efforts déployés par les pays concernés ou par Frontex, les passeurs en trouvent d'autres. Cela s'accompagne d'un changement quant à la typologie des personnes qui migrent en Europe : les passeurs créent aussi la demande. On nous l'a dit lors des auditions : des passeurs ayant pignon sur rue dans certaines villes du Bangladesh et du Pakistan proposent à des gens d'aller en Europe contre telle ou telle somme d'argent.

Les flux et les routes évoluent chaque année. On a observé au premier trimestre 2020 une véritable augmentation des arrivées en Europe, qui a ensuite été stoppée par la pandémie. Cela veut dire que nous ne sommes pas à l'abri d'une résurgence – on n'était pas du tout au même niveau en 2018 et 2019 qu'en 2015 et 2016.

Je ne vois pas l'augmentation de 50 millions d'euros évoquée par M. Cabaré – qui est malheureusement parti – en matière de lutte contre l'immigration irrégulière. Une hausse de 20 millions d'euros est prévue, notamment afin de créer un centre de rétention administrative (CRA) à Lyon. C'est l'année dernière qu'une augmentation de 50 millions d'euros était inscrite dans le PLF, là aussi en lien avec les CRA, en particulier celui de Coquelles, que j'ai visité.

Je crois, pour ma part, qu'il faut bien expulser pour bien accueillir. Si on n'expulse pas les personnes qui n'ont pas à être en France, on se retrouve dans une situation où on ne peut pas intégrer les gens qui ont obtenu l'autorisation d'être là. Plusieurs d'entre vous ont évoqué les bidonvilles qui se forment dans des endroits où se massent des personnes qui devraient être protégées par la France et mises à l'abri – dès lors qu'il s'agit de demandeurs d'asile ou de futurs demandeurs d'asile, venant de pays non sûrs. Mais, au sein du dispositif national d'accueil, 10 % des 100 000 places existantes sont occupées d'une manière indue, soit par des déboutés du droit d'asile, soit par des gens qui ont déjà obtenu le statut de réfugié et qui devraient donc passer dans un autre dispositif. Alors que le nombre de places augmente d'année en année, une partie d'entre elles ne sont pas occupées par les bonnes personnes, en raison du manque d'expulsions, et on ne peut pas s'occuper des « vrais » demandeurs d'asile comme on devrait le faire. On les laisse à la merci des réseaux de passeurs et des réseaux mafieux, et les élus sont en partie désarmés face à la réalité de la situation. Si on veut bien accueillir toutes les personnes qui doivent être protégées par la France, il faut expliquer à celles qui n'ont rien à faire dans notre pays qu'elles devront repartir, et on doit faire des efforts pour que ce soit le cas.

Le budget de l'OFPRA me pose un problème, monsieur Bouchet. Les crédits demandés sont identiques à ce qui était prévu pour cette année. Une hausse des effectifs de 200 équivalents temps plein (ETP) a été votée l'an dernier, mais il n'y a eu que 150 recrutements : il reste donc 50 embauches à faire en 2021. Le budget étant constant, soit on a surbudgétisé pour 2020, soit on sous-budgétise pour 2021 – comme nous nous prononçons avant de savoir ce qui est réellement dépensé cette année, je ne sais pas ce qu'il en est.

S'agissant des délais d'examen des demandes, la pandémie a eu un effet. L'OFPRA ayant fermé pendant plusieurs semaines lors de la première vague, des demandes n'ont pas pu être traitées, ce qui a conduit à une embolie. L'objectif fixé par le Gouvernement dans le cadre de la loi « asile et immigration » était de donner une réponse en deux mois à partir de l'enregistrement d'une demande. Nous en sommes très loin à l'heure actuelle. Le délai était de cinq mois en 2018, de cinq mois et demi en 2019, puis nous sommes passés à neuf mois cette année. Lorsque les demandeurs reçoivent une réponse négative – l'OFPRA accorde l'asile dans à peu près 25 % des cas –, beaucoup font appel devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), dont le délai de réponse est de sept mois en moyenne, ce qui conduit à un total de seize mois.

Ce délai, qui est évidemment beaucoup trop long, pose notamment un problème du point de vue des finances publiques, car cela implique de verser plus longtemps l'allocation pour demandeur d'asile (ADA), alors que les moyens correspondants – 452 millions d'euros dans ce budget – pourraient être utilisés pour mieux accueillir les personnes. Plus on met de temps à rejeter les demandes d'asile, plus on doit augmenter le budget de l'ADA.

Un tel délai pose aussi un problème en matière d'immigration illégale, notamment sur le plan financier – les crédits de l'AME s'élèvent désormais à 1 milliard d'euros, je l'ai dit. Plus on met de temps à donner une réponse à un demandeur d'asile, en particulier lorsqu'il vient d'un pays dit sûr, pour lequel le taux de protection est assez faible – il doit être d'environ 4 % pour l'Albanie –, et moins il est facile ensuite de savoir où se trouve la personne, pour l'expulser ou la renvoyer dans son pays d'origine. Cela contribue également à la paupérisation et aux situations qui peuvent exister dans certains territoires de la République.

Pour toutes ces raisons, la question de la réduction des délais de traitement des demandes d'asile est absolument primordiale – le Gouvernement le sait bien. Nous sommes, malheureusement, très loin des objectifs fixés lors de l'examen de la loi « asile et immigration » – on s'en éloigne année après année.

L'embolie du système s'explique aussi par les demandes d'asile présentées par des personnes venant de pays dits sûrs. Quand 10 % des demandes sont déposées par des ressortissants albanais et géorgiens dont on a libéralisé l'accès à l'Union européenne – ils n'ont plus besoin de visas –, un problème se pose. Leurs demandes d'asile doivent évidemment être traitées, dans le cadre d'une procédure qui est certes accélérée mais qui prend en considération tous les aspects. On a donc moins de temps et d'effectifs disponibles, malgré les 200 ETP supplémentaires qui ont été budgétés, pour traiter les autres demandes. J'ai déjà eu l'occasion de le dire : le fait de ne pas avoir besoin de visas quand on vient de Géorgie ou d'Albanie pose un problème, car cela conduit à une embolie de l'OFPRA.

Merci à M. Petit pour ses remarques – je ne crois pas qu'il y avait de questions dans son intervention.

J'ai déjà un peu parlé des bidonvilles, monsieur David. Vous connaissez mon territoire, qui n'est pas facile. Parfois, voire souvent, les élus se retrouvent seuls face à des problèmes qui ne relèvent pas de leurs compétences, mais de celles de l'État. Il est très compliqué de trouver une réponse adéquate entre, d'une part, le besoin d'humanité – il faut absolument faire en sorte que les gens aient des conditions de vie dignes – et, d'autre part, la nécessité d'éviter une sorte d'appel d'air – nous avons malheureusement vécu cette situation à Calais : c'est ce qui s'est passé à chaque fois. Quand on a créé des camps d'accueil, face à la dégradation de la situation – notamment la présence de squats en centre-ville –, leurs capacités ont été dépassées en quelques semaines, parce qu'ils devenaient des points d'étape pour les passeurs. Il y a eu le camp de la Croix-Rouge de Sangatte et la « jungle » 1 puis 2 à Calais – la « Lande » et le camp Jules-Ferry. Il est très difficile de trouver un équilibre, et je pense sincèrement que ce n'est pas aux élus locaux de le faire : c'est à l'État de prendre à bras-le-corps ces problèmes, qui font partie d'un tout – l'embolie du système d'asile est un aspect essentiel de la question.

J'ai déjà parlé des délais à l'OFPRA, monsieur Clément. Lorsque les demandes d'asile sont en cours d'examen, les personnes concernées ne sont pas reconnues comme des réfugiés – il faut bien faire la distinction. Un peu moins de 40 % des 150 000 demandeurs d'asile obtiennent une protection à la fin de leur parcours, soit en tant que réfugiés, pour deux tiers d'entre eux, soit au titre de la protection subsidiaire, pour le tiers restant.

Par rapport aux autres pays de l'Union européenne, la France accorde une protection importante : les taux de protection, selon la nationalité des demandeurs, sont en général supérieurs dans notre pays. Le taux de protection des demandeurs d'asile afghans, par exemple, doit être d'environ 25 % en Allemagne, alors qu'il est à peu près des deux tiers en France.

C'est d'ailleurs tout le problème des flux secondaires : un tiers des demandes d'asile déposées en France sont, je l'ai dit tout à l'heure, potentiellement « dublinables » : elles concernent des personnes qui ont déjà demandé l'asile ailleurs et qui, la plupart du temps, ont été déboutées. L'existence de différences de protection entre les États européens, alors qu'ils appartiennent à un système de libre circulation, implique des flux secondaires et des flux « rebond ». Quand une personne, avec le même dossier, a 95 % de chances d'être protégée dans un pays et 25 % dans un autre, un réel problème se pose. Nous avons besoin de faire converger les systèmes de protection, dans le respect des spécificités nationales : il faudrait un peu plus de cohérence entre les différents pays européens.

Vous avez eu raison de parler des CRA. Le taux d'occupation de celui de Coquelles, où une extension est en cours d'achèvement – elle sera inaugurée dans les prochaines semaines –, est d'à peu près 60 %. La crise du covid a eu un effet, mais il y a aussi le fait que les pays concernés ne veulent pas récupérer leurs ressortissants. Comme je le montre dans mon rapport, si le taux de délivrance des laissez-passer consulaires, nécessaires pour le renvoi des personnes en dehors des accords de réadmission bilatéraux avec des États tiers, augmente d'année en année – il est désormais supérieur à 60 % –, c'est parce qu'on n'adresse des demandes qu'à des pays dont on est sûr d'obtenir des laissez-passer consulaires. On a totalement lâché l'affaire quand il s'agit de pays dont on sait qu'on n'obtiendra jamais ces documents – j'ai parlé tout à l'heure du Mali.

Une augmentation du budget consacré à la lutte contre l'immigration irrégulière est certes prévue, mais cela concerne uniquement le Beechcraft de la sécurité civile – c'est l'avion utilisé pour les rotations vers l'Albanie et la Géorgie – et non les frais de billetterie liés, par exemple, aux renvois en Afrique subsaharienne. Les renvois ont lieu vers des pays du Maghreb ou – principalement, en fait – des Balkans et des Carpates.

La liste des pays d'origine sûrs, évoquée par Jean-Paul Lecoq, n'a pas été actualisée depuis 2015. Elle figurera en annexe de mon rapport – comme j'ai récupéré cette mission en cours de route, il y a eu un décalage mais nous vous enverrons tous les éléments dès que j'aurai reçu l'ensemble des réponses à mes questions. Une étude sur une éventuelle réactualisation de la liste a été réalisée par le conseil d'administration de l'OFPRA l'année dernière, mais la conclusion était qu'il ne servirait à rien de rouvrir le dossier.

Il faudrait que cette liste soit définie par le Parlement, à l'issue d'un débat en séance publique, et non par le conseil d'administration de l'OFPRA – j'avais déposé en 2018 des amendements en ce sens. Nous avons besoin de transparence sur cette question, compte tenu de ses implications, notamment l'application de la procédure accélérée d'examen des demandes d'asile. Il faudrait un vote, pas nécessairement chaque année mais au moins une fois par législature. Le fait que la liste soit exactement la même qu'en 2015 pose un vrai problème : cela voudrait dire qu'il n'y a pas eu de bouleversement dans le monde depuis cinq ans. On pourrait retirer ou ajouter des pays.

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Je salue le travail de notre rapporteur, en rappelant qu'il faut éviter d'avoir une vision tronquée, voire erronée, quand on parle d'immigration, d'asile et d'intégration, afin de ne pas ouvrir la voie à de vaines polémiques. Dans la période actuelle, il faut être conscient que les questions migratoires sont bien plus complexes et bien moins caricaturales que peuvent le laisser entendre certaines prises de parole dans les médias.

Je voudrais aborder un sujet qui est évoqué moins souvent que la lutte contre l'immigration irrégulière – il s'agit d'une problématique importante, mais ce n'est pas la seule, loin de là –, à savoir l'immigration étudiante, qui fait partie du second axe du programme 303. La France est le quatrième pays au monde pour l'accueil d'étudiants internationaux, et le premier pays non anglophone.

Chacun se souvient des débats que nous avons eus sur ce sujet, notamment à mon initiative, lors du déploiement de la stratégie « Bienvenue en France », dont l'objectif est d'attirer davantage d'étudiants sur notre territoire, voire de les y retenir grâce à des dispositifs tels que le passeport talent pour les salariés qualifiés ou ceux d'entreprises innovantes. Quelles ont été les conséquences de la crise sanitaire sur les flux migratoires d'étudiants vers notre pays ? Par ailleurs, en dépit des circonstances particulières que nous connaissons, quels sont les effets des nouveaux dispositifs sur le volume et l'origine des étudiants ?

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Merci au rapporteur pour ses explications assez précises, dont le ton est un peu différent de ce qu'on entend parfois, sur ces questions, dans l'hémicycle.

Je voudrais revenir sur la question des campements illégaux qui se développent dans beaucoup de territoires français, et pas seulement dans les grandes villes, ni dans les périphéries. À Nantes, il y a eu un campement sauvage, encouragé par la mairie, à un moment, en plein centre-ville, dans un lycée désaffecté qui a été squatté par près de 900 personnes. Le problème n'a pas été réglé. Il y a maintenant en plein cœur de la ville, dans un gymnase désaffecté, un squat de plusieurs dizaines de personnes, où les conditions sont évidemment très mauvaises.

J'ai sans doute une divergence avec Alain David : ces squats sont parfois montés de toutes pièces par des associations, comme c'est le cas à Nantes – il faut être très clair. On doit tarir le problème à la source – de nombreuses actions sont menées en la matière à l'échelle internationale –, mais une question se pose aussi sur le plan national. Certaines associations font œuvre de solidarité – elles assurent un accueil et distribuent des repas –, ce qui est tout à fait compréhensible, car c'est une démarche humaniste, mais d'autres associations sont inspirées par un militantisme politique en faveur d'une ouverture totalement dérégulée des frontières – l'une d'entre elles s'appelle d'ailleurs No border, pas de frontière, ce qui veut tout dire.

Ces associations agissent concrètement pour que des campements s'installent sans limite. Des élus locaux – mais je ne crois pas que ce soit le cas de la maire de Calais – disent aux gens qu'ils peuvent venir, que tout le monde est bienvenu, puis rejettent la faute sur l'État si l'hébergement n'est pas assuré. Ce n'est pas acceptable : on ne peut pas créer des conditions conduisant à des arrivées absolument pas maîtrisées et dire ensuite que c'est la faute de l'État s'il y a un problème en matière d'hébergement.

Le rapporteur a évoqué certains détournements du droit d'asile – il en existe, ce qui est également inacceptable, car cela nuit au droit d'asile. Y a-t-il aussi des détournements en ce qui concerne les mineurs non accompagnés ? Nous assistons, en la matière, à un phénomène de grande ampleur. Progresse-t-on en matière de détermination de la minorité et, indirectement, au sujet de l'immigration familiale qui a lieu au moyen de l'entrée d'un mineur ?

S'agissant des délais en matière de droit d'asile, le problème est-il que les délais d'instruction des demandes ne sont pas suffisamment raccourcis ou bien les procédures sont-elles rallongées par des recours, divers et variés, qui font qu'au bout de deux ans, parfois, il n'est plus envisageable de procéder à une reconduite à la frontière ?

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Il ne faut pas inverser les rôles. Ce ne sont pas les associations qui organisent l'immigration. C'est parce que l'État ne remplit pas ses obligations que les associations, la plupart du temps, se substituent à lui sur le plan humanitaire, afin de trouver des solutions pour des gens complètement désemparés et laissés à l'abandon – des enfants, des familles, de jeunes adolescents, qui se trouvent dans des bidonvilles et sont parfois entre les mains d'une véritable petite mafia locale qui organise notamment la mendicité. C'est à cause des carences de l'État que les associations, en particulier humanitaires, sont obligées d'intervenir. Il ne faut pas dire qu'elles encouragent l'immigration, car ce n'est pas la réalité.

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En ce qui concerne les étudiants, monsieur Mbaye, une forte augmentation s'est produite. Les mesures adoptées pour attirer une immigration étudiante plus importante ont porté leurs fruits, de même que les mesures prises par les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, qui sont de mieux en mieux classés au plan international et qui attirent des étudiants étrangers. L'immigration étudiante correspondait à la délivrance de 46 663 titres de séjour en 2007, de 58 857 titres en 2012 – l'augmentation était déjà importante – et de 80 339 titres en 2017. S'agissant de 2019, l'estimation est de 91 495 titres – je ne connais pas encore les chiffres définitifs. Il y a une corrélation avec l'augmentation globale de la délivrance des titres de séjour, qui a explosé – 276 576 titres ont été délivrés en 2019, contre 171 907 en 2007. L'immigration étudiante est un aspect important de l'augmentation de la délivrance des titres de séjour, mais ce n'est pas le seul.

Pour ce qui est de l'incidence de la crise du covid, je n'ai pas de chiffres exacts à vous communiquer aujourd'hui. Ce que je peux vous dire est qu'on a observé une légère hausse des inscriptions cette année, malgré la crise, s'agissant des étudiants en provenance d'Afrique subsaharienne et du Maghreb, et une très forte diminution, d'environ 40 %, pour ce qui est des étudiants venant d'Asie et des Amériques. Je vous ferai parvenir des chiffres précis dès que nous aurons des réponses plus concrètes.

Je ne vais pas entrer dans le débat ouvert par François de Rugy, mais je peux vous faire part d'une expérience locale, que j'évoque dans le rapport en des termes un peu feutrés. J'ai vu à Calais des ONG – pas toutes –, françaises comme étrangères, demander aux migrants de ne pas aller dans les centres d'accueil et d'examen des situations administratives (CAES) du département et de ne pas déposer de demande d'asile. Quelques associations, notamment britanniques, réalisent un travail de sape qui fait que des migrants préfèrent parfois rester dans le Calaisis plutôt que de s'inscrire dans une démarche de demande d'asile. Je rappelle, à cet égard, que 95 % des migrants présents à Calais peuvent être protégés par notre pays : ce sont, en effet, des Afghans, des Irakiens, des Iraniens, des Érythréens et des Soudanais – les taux de protection pour ces nationalités sont très forts.

Des brigades de l'OFII vont voir ces personnes, en lien avec la préfecture, pour leur demander de déposer leur demande d'asile mais elles préfèrent rester là, alors que des bus ont été préparés pour les conduire vers des CAES et les sortir des griffes des réseaux de passeurs qui veulent les emmener sur des small boats, au péril de leur vie – quatre personnes, dont deux enfants, sont mortes il y a deux jours au large de Dunkerque. Je ne sais pas ce qu'il en est ailleurs sur le territoire, mais voilà mon expérience d'élu local.

Je vais dire du bien du Gouvernement : l'interdiction, pour les associations, de distribuer des repas dans certaines artères de la ville de Calais est une bonne mesure. Certaines associations menaient, en effet, un travail de sape à cette occasion. Cela ne signifie pas que les repas ne sont pas distribués : ils le sont par l'État. Il n'y a pas de migrant n'ayant pas à manger à Calais. On s'assure, simplement, que ce que dit l'État n'est pas contredit par-derrière, et on essaie, autant que possible, de sortir les gens des griffes des passeurs, pour sauver des vies. Voilà l'enjeu. Il ne faut pas tomber dans les caricatures : nous n'en avons vraiment pas besoin dans ce territoire.

S'agissant de la procédure pour les mineurs non accompagnés, tout le monde sait qu'il y a une problématique. La vraie question, au-delà de la prise en charge du coût, très élevé, par les départements, et de la compensation, ou non, par l'État – c'est un débat politique –, est de savoir comment on fait pour s'assurer que les mineurs non accompagnés sont réellement des mineurs et pour avoir un fichier commun permettant d'éviter des déplacements d'un département à un autre lorsque des tests osseux sont préconisés par les services et validés par la justice. Certains exécutifs départementaux refusent de participer à un fichier globalisé, ce qui pose un réel problème, d'autant qu'une fois qu'une personne est reconnue comme étant un mineur non accompagné, elle peut faire venir des membres de sa famille – ce droit a été élargi par la loi « asile et immigration ». Je pense qu'il existe, en effet, un détournement de la procédure.

Je rappelle que le délai de jugement devant la CNDA, lorsque le demandeur d'asile a fait appel d'une décision négative de l'OFPRA, est aux alentours de sept mois. Le délai d'instruction par l'OFPRA étant de neuf mois, en partie à cause de la crise sanitaire – sinon on est plutôt autour de cinq ou six mois –, on aboutit au total à un an et demi de procédure. Une personne à qui on répond qu'elle ne sera pas protégée au titre du droit d'asile à l'issue d'une procédure accélérée et d'un recours très rapide n'aura pas eu le temps de tisser des liens et pourra donc être renvoyée dans son pays. Il est beaucoup plus compliqué, en revanche, de renvoyer une personne qui est restée en France pendant un an et demi, ou deux ans – il s'agit d'une moyenne –, car elle a tissé des liens, et ses enfants peuvent être scolarisés. La question de l'effectivité des décisions prises par l'OFPRA et par la CNDA se pose donc.

Article 33, état B : Immigration, asile et intégration

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Comme nous ne sommes saisis d'aucun amendement, nous allons passer directement au vote sur les crédits de la mission.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » tels qu'ils figurent à l'état B annexé à l'article 33 du projet de loi de finances pour 2021.

– Examen pour avis des crédits de la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique (Mme Amélia Lakrafi, rapporteure pour avis) et vote sur les crédits de cette mission.

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Nous abordons à présent l'examen des crédits de la mission « Économie – commerce extérieur et diplomatie économique » du projet de loi de finances pour 2021.

Nous commencerons par entendre notre rapporteure pour avis, Mme Amélia Lakrafi, puis je donnerai la parole à M. Jean-Paul Lecoq, pour présenter la contribution du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Votre rapport, madame Lakrafi, dresse un tableau général – mais précis – des dispositifs administratifs et financiers de soutien au commerce extérieur et comporte des propositions en la matière. Vous avez également effectué une synthèse des multiples financements qui sont prévus dans le cadre de la mission « Plan de relance » pour les acteurs du commerce extérieur. Je relève, par ailleurs, que vous apportez un éclairage nouveau sur les acteurs du secteur privé, que vous appelez à mieux intégrer dans notre dispositif de soutien.

En ce qui concerne notre commerce extérieur, en tant que tel, l'évolution que vous décrivez s'agissant de 2020 est très préoccupante. Les forces qui étaient les nôtres au cours des dernières années se sont révélées fragiles en cette période de pandémie mondiale qui a vu s'effondrer les échanges internationaux. Vous nous en direz plus, mais l'année 2021 est marquée, à ce stade, par de lourdes incertitudes quant aux performances de notre commerce extérieur et aux résultats de notre balance des paiements, compte tenu de la contraction des échanges de services et du tourisme, qui faisaient notre force.

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Je voudrais dire, à mon tour, que j'ai une pensée pour Marielle de Sarnez. J'ai hâte qu'elle revienne parmi nous.

L'année 2019 s'est traduite par une certaine embellie pour notre commerce extérieur, dont le solde a progressé de 3,9 milliards d'euros grâce à l'augmentation des exportations. Au premier trimestre 2020, le nombre des entreprises exportatrices était, par ailleurs, à son plus haut niveau depuis presque vingt ans – il était alors supérieur à 129 000.

L'épidémie liée au coronavirus est venue heurter de plein fouet cet élan. Le déficit commercial des biens est passé à 34 milliards d'euros au premier semestre 2020, alors qu'il était de 29 milliards au premier semestre de l'année dernière. Sur l'année entière, le déficit de notre balance commerciale pour les biens devrait plonger à 79 milliards, contre 58,9 milliards l'année dernière.

Il faut bien sûr apporter des nuances selon les secteurs. Ceux qui sont les plus ouverts à l'international et dont le poids est particulièrement important dans nos exportations, comme l'aéronautique et l'automobile, sont les plus touchés. Les industries agroalimentaire et pharmaceutique ont relativement mieux résisté à la crise. Dans le domaine des services, le tourisme est particulièrement affecté.

La contraction de notre commerce extérieur s'inscrit dans un contexte général de repli des échanges mondiaux. Que peut-on augurer pour 2021 et les années suivantes ?

Les économistes font preuve d'un timide optimisme. Le Fonds monétaire international (FMI) table sur une croissance du PIB mondial de 5,2 % en 2021, et l'Organisation mondiale du commerce (OMC) anticipe une croissance des échanges mondiaux de 7,2 %. S'agissant de la France, le rapport économique, social et financier prévoit un rebond des exportations de 12,6 %, et le Gouvernement envisage un déficit commercial pour les biens de 68 milliards d'euros.

Ces anticipations sont évidemment très aléatoires. La reprise de la croissance et des échanges extérieurs dépendra, en premier lieu, de l'évolution de la crise sanitaire et des mesures prises par les autorités publiques dans les différentes régions du monde. Bien d'autres facteurs d'incertitude s'ajoutent à cela, comme la conclusion d'un accord ou non avec le Royaume-Uni, l'évolution de la politique commerciale américaine dans les prochains mois ou encore les tensions protectionnistes.

Même si le contexte est très mouvant, il me semble qu'on peut identifier quelques tendances de fond.

Il existe ainsi une tendance à la régionalisation des échanges. L'aspiration des États européens à retrouver une certaine souveraineté, au moins pour les produits les plus stratégiques, et à réduire leur dépendance vis-à-vis de pays tels que la Chine les pousse à chercher des partenariats économiques avec des pays plus proches, en Europe orientale ou, comme je l'encourage, en Afrique. Le raccourcissement des chaînes de valeur répond, par ailleurs, à un souci écologique.

Parmi les tendances de fond figurent aussi des faiblesses structurelles qui handicapent le commerce extérieur de la France depuis des années : l'absence de véritable culture de l'export, la maîtrise encore très insuffisante des langues étrangères, le nombre trop faible des cadres internationaux dans nos entreprises et, ce qui est plus grave encore, la désindustrialisation excessive de notre pays. La France, en effet, ne saurait vendre que des services : nous devons impérativement poursuivre l'effort de réindustrialisation qui est entrepris depuis le début du quinquennat.

Par ailleurs, je tiens, sinon à exprimer des réserves, du moins à émettre un avis nuancé sur l'indicateur du nombre d'exportateurs, qui est souvent mis en avant. Le Premier ministre Édouard Philippe avait fixé un objectif de 200 000 entreprises exportatrices en 2022. Or ce critère est insuffisant – particulièrement dans le contexte actuel – s'il n'est pas assorti d'un objectif en matière de volume d'exportations, de chiffre d'affaires et, surtout, d'inscription dans la durée de la démarche export de nos entrepreneurs. En effet, les entreprises qui feront le commerce extérieur de demain ne sont pas les exportateurs occasionnels qui profitent d'une opportunité, mais celles qui s'implantent durablement sur les marchés étrangers. C'est pourquoi j'appelle de mes vœux une réflexion sur les moyens de renforcer – comme c'est déjà le cas pour les entreprises dites du « French Tech 120 » – le soutien apporté aux TPE-PME qui se révèlent les plus prometteuses à l'export.

J'en viens à présent aux acteurs du soutien à l'export, que je crois avoir presque tous auditionnés. En tout premier lieu, je citerai bien entendu le ministre délégué chargé du commerce extérieur. Le fait que, depuis le dernier remaniement, un ministre soit spécifiquement chargé de ce domaine est une excellente chose – un tel ministère était réclamé depuis longtemps. Je regrette néanmoins que sa désignation ne se soit pas accompagnée pas d'un regroupement des moyens budgétaires consacrés au commerce extérieur et à la diplomatie économique, qui demeurent dispersés entre plusieurs missions et programmes budgétaires relevant de différentes administrations.

Figurent ensuite parmi les acteurs de l'export les membres de ce que l'on appelle la « Team France Export », la TFE, qui regroupe l'agence Business France, Bpifrance et les chambres de commerce et d'industrie, auxquelles sont associées les régions, dont, vous le savez, la compétence en matière de développement économique a été considérablement renforcée par la loi NOTRe. Le rapprochement de ces acteurs a permis la création, dans chaque région, d'un guichet unique de l'export, lequel était très attendu par les entreprises. En pratique, celles-ci n'ont plus à contacter trois ou quatre organismes différents : elles s'adressent désormais à un seul interlocuteur, le « conseiller international ». J'appelle votre attention sur la nécessité pour la TFE de suivre les entreprises dans la durée. L'objectif, encore une fois, est d'encourager, non pas des exportations ponctuelles, mais une internationalisation durable.

Parmi les acteurs publics, je range également les conseillers du commerce extérieur de la France, qui sont utiles mais dont le rôle doit, à mon sens, être recentré sur l'aide aux TPE-PME.

Quant aux acteurs privés, dont le rôle est tout aussi essentiel, ils doivent être, me semble-t-il, mieux associés à la politique de soutien à l'export. Je pense non seulement aux opérateurs spécialistes du commerce international, les OSCI, mais aussi aux chambres de commerce et d'industrie françaises à l'international, les CCIFI, qui sont une vitrine essentielle de notre présence économique à l'étranger. Nous devons impérativement encourager les acteurs publics et privés à maintenir la cohésion dont ils ont fait montre durant la période de confinement et qui leur a permis de conseiller efficacement le Gouvernement dans la préparation de son plan de relance export.

Je pense également aux grandes entreprises elles-mêmes, qui ont un rôle à jouer dans le soutien apporté aux petites et moyennes entreprises françaises. À la différence de leurs homologues françaises, les entreprises allemandes ou italiennes sont réputées pour « chasser en meute », selon l'expression consacrée, et s'appuyer les unes sur les autres. Dans mon rapport, j'avance plusieurs propositions pour renforcer cet esprit collaboratif.

Je pense enfin aux entrepreneurs français à l'étranger, les EFE, qui sont bien souvent les ambassadeurs de nos produits et dont de nombreux emplois en France dépendent. J'avance, là encore, des propositions pour les soutenir dans un contexte qui les éprouve fortement.

Après de premières mesures prises dès le début de la crise sanitaire, le Gouvernement a annoncé, en septembre dernier, un plan de relance global qui comporte un volet relatif à l'export d'un montant de 247 millions d'euros pour la période 2020-2022. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit, en sus des 52 millions d'euros destinés à financer des dépenses d'appel en garantie de l'État, plus de 100 millions d'euros en autorisations d'engagement afin de renforcer les moyens de Business France, de Bpifrance et du FASEP, le Fonds d'étude et d'aide au secteur privé, qui permet de financer des études de faisabilité en amont de projets d'investissement dans les pays en développement.

Ces crédits, inscrits dans la mission budgétaire « Plan de relance », permettront notamment de financer un certain nombre d'outils de soutien. Je citerai, à titre d'exemple, le « chèque export », qui permet de prendre en charge jusqu'à 50 % d'une prestation d'accompagnement à l'export, le chèque VIE, destiné à subventionner des missions de VIE à hauteur de 5 000 euros, ou le renforcement de l'assurance prospection. Ces mesures sont positives, compte tenu notamment de leur impact sur la sécurisation de la trésorerie des entreprises concernées. Leur portée à moyen et long terme devra néanmoins être évaluée, compte tenu des incertitudes qui pèsent, par exemple, sur la possibilité de réaliser des missions à l'étranger ou d'y envoyer des VIE.

Les crédits inscrits dans la mission budgétaire « Plan de relance » complètent ceux inscrits dans la mission « Économie », laquelle comporte, outre la rémunération de Bpifrance, d'un montant de 51,65 millions d'euros, la subvention pour charges de service public de Business France, qui s'élève à 87,62 millions d'euros, contre 90,12 millions d'euros en 2020. Cette évolution est conforme aux engagements inscrits dans le contrat d'objectifs et de moyens (COM) pour la période 2018-2022 de Business France, qui perçoit, je le rappelle, deux autres subventions, plus résiduelles, en provenance de deux autres missions budgétaires.

Avant de conclure, je veux dire un mot du secteur auquel j'ai choisi de prêter cette année une attention spécifique, celui du numérique. Ce secteur dynamique et résolument tourné vers l'international a montré une certaine résilience dans la crise. Il mérite d'être soutenu, pour au moins deux raisons. Tout d'abord, il représente un potentiel de croissance à l'export, nos entreprises pouvant se saisir de nombreux marchés, dans le domaine de la cybersécurité, par exemple. Ensuite, nos entreprises en général et nos exportateurs en particulier devront de plus en plus, compte tenu du contexte actuel, recourir aux outils digitaux : vente en ligne, salons virtuels, e-vitrines... Ces outils ont été cruciaux durant la période de confinement. Du reste, des outils numériques très innovants sont actuellement mis en place par les acteurs publics en charge de l'appui à nos exportateurs. Je salue ces innovations, qui démontrent toute l'utilité de tels outils dans notre société et notre économie. Ne ratons pas le tournant de la digitalisation des entreprises, singulièrement des exportateurs.

En conclusion, je vous invite à adopter les crédits relatifs au commerce extérieur et à la diplomatie économique de la mission « Économie » du PLF pour 2021.

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Nous allons entendre à présent M. Jean-Paul Lecoq, qui va nous présenter la contribution du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Je tiens tout d'abord à remercier Amélia Lakrafi pour son excellent rapport : précis et détaillé, il éclaire très bien les enjeux du commerce actuel.

Le groupe GDR a souhaité se pencher sur la question du commerce extérieur afin de proposer sa vision de la manière dont pourraient être modifiées les aides versées par l'État aux entreprises exportatrices.

Nous dressons en effet un double constat.

Premièrement, il existe de bons outils, tels que les garanties d'emprunt à l'export, qui servent à soutenir les entreprises, des PME aux grands groupes, qui développent des projets internationaux. Cette politique est efficace, mais elle est en partie dévoyée dans la mesure où ces aides contribuent à soutenir des secteurs économiques qui ne respectent pas l'environnement notamment. Alors que les députés communistes expriment systématiquement le souhait que, dans tous les accords bilatéraux et autres conventions internationales auxquels la France est partie, soit inscrit le respect des accords de Paris, le fait de garantir des emprunts liés à des projets d'exploitation de pétrole ou de gaz ne nous semble pas logique. Aussi proposons-nous de moduler les aides et garanties en fonction de l'utilité sociale et environnementale des projets. Il nous semble en effet important d'utiliser ces leviers pour orienter le commerce extérieur de la France et en faire un outil de pilotage de notre diplomatie environnementale.

Deuxièmement, certains des secteurs français qui exportent le plus – armement, exploitation d'hydrocarbures, aéronautique, spatial, automobile… – ont ceci de particulier qu'ils ne comptent que peu d'entreprises, indépendamment des sous-traitants, et que les contrats conclus sont souvent très importants. La France leur donne beaucoup, mais elle met en quelque sorte tous ses œufs dans le même panier. Lorsque le secteur aéronautique chute, plusieurs dizaines de milliers d'emplois, voire davantage, sont menacés. La résilience de ces secteurs est donc très faible. Ainsi l'État est obligé, dans le cadre de sa diplomatie économique, de porter à bout de bras ces entreprises à l'international pour qu'elles maintiennent un niveau élevé de contrats annuels.

Cette utilisation de la diplomatie pour aider nos très grandes entreprises, les députés de la Gauche démocrate et républicaine la regrettent profondément. En effet, lorsque l'on cherche à vendre des Rafale, on ne parle pas trop des droits de l'homme. De même, lorsqu'un énorme contrat est signé, comme c'est souvent le cas dans l'armement, la France a tendance à être moins objective avec ses clients s'ils commettent des violations du droit international. Ce fut le cas au début de la guerre au Yémen : notre pays n'a rien dit pour ne pas fâcher l'Arabie Saoudite et compromettre les quelques milliards d'euros de contrats d'armement qu'elle a conclus avec la France.

Pour dépasser cette situation et améliorer la manière dont l'État soutient les différents secteurs économiques exportateurs, les députés communistes proposent, dans leur contribution, cinq solutions. Je m'attarderai sur nos deuxième et troisième propositions, qui ont trait aux questions portuaires et logistiques.

La France se tire une balle dans le pied en acceptant de faire des ports néerlandais le débouché de l'économie française, au détriment de ses ports nationaux, notamment Marseille et Le Havre. Le canal Seine-Nord Europe va en effet renforcer les ports des Pays-Bas en affaiblissant les nôtres. Cela mettrait en danger des dizaines de milliers d'emplois dans les ports français et rendrait les entreprises dépendantes d'infrastructures sur lesquelles nous n'aurons plus la main. Cette vision européenne des choses coûtera probablement très cher à notre pays, qui s'apprête à abandonner une partie non négligeable de sa souveraineté.

Contre cette politique, je tiens à saluer la charte signée par l'ensemble ou presque des logisticiens français, selon qui toutes les marchandises qui entrent en France et celles qui en sortent devraient passer par des ports français. Le Gouvernement ferait bien de s'inspirer de cette charte. S'il va au bout de cette logique, il devra s'interroger très sérieusement sur l'opportunité de creuser le canal Seine-Nord Europe.

Bien entendu, dans la droite ligne de leurs propositions, les députés communistes, à commencer par Georges Marchais, ont toujours soutenu le « produire en France » et l'importance d'une industrie indépendante face à la mondialisation. Aussi suis-je satisfait de constater que, lors de la crise sanitaire des derniers mois, le groupe majoritaire s'est enfin aperçu que la dépendance totale des pays et la gestion à flux tendu des biens, y compris dans des secteurs de souveraineté comme le médicament, étaient très dangereuses dès lors qu'une crise mondiale survenait. Les ruptures d'approvisionnement en masques et en médicaments ont souligné l'urgence d'une gestion plus locale de notre économie – le rapport de Mme Lakrafi y fait référence ; j'espère que le Gouvernement saura s'en inspirer.

Il reste maintenant à ce dernier à prendre conscience que les accords de libre-échange, loin de favoriser le commerce extérieur, contribuent à spécialiser nos économies et à les rendre toujours plus fragiles. Nous n'avons cessé de le répéter, et la vie démontre que nous n'avions peut-être pas tort… Il faut donc s'opposer à ces accords, dans l'intérêt de l'Europe, mais aussi de notre économie et de nos industries, pour proposer enfin une autre mondialisation.

Si nous avions à nous prononcer sur le rapport de notre collègue, nous le voterions bien volontiers tant il est de bonne qualité. Mais nous sommes appelés à nous prononcer sur le budget alloué au commerce extérieur et à la diplomatie économique, et nous ne le soutiendrons pas.

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Nous allons maintenant entendre les représentants des groupes.

C'est à ce titre, en tant que représentante du groupe La République en Marche, que je vais m'exprimer à présent.

Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie et vous souhaite la bienvenue dans l'examen de la mission « Économie – commerce extérieur et diplomatie économique ». Compte tenu de la qualité de votre rapport et des trente et une propositions qu'il contient, toutes aussi pertinentes les unes que les autres – je pense notamment à celle qui porte sur la féminisation des conseillers extérieurs de la France –, vous semblez déjà incontournable.

Dans la quatrième partie de votre rapport, vous mentionnez le secteur du numérique, de la « tech », de la digitalisation des entreprises et de la cybersécurité comme un nouvel enjeu de l'export. Outre qu'il est un levier important de croissance, dont le développement s'est accéléré avec la crise de la covid-19, il constitue un axe majeur du plan de relance.

Aux tensions commerciales entre grands États et aux tentations protectionnistes s'ajoute la crise sanitaire – dont le rebond actuel fait de l'Europe le nouvel épicentre de l'épidémie –, avec toutes les conséquences que cela emporte pour notre économie.

Cette période historiquement singulière a vu naître des initiatives aussi intéressantes qu'inédites, telles que le groupe de travail SOLEX, Solution pour l'export. Ce groupe, constitué d'acteurs du soutien à l'export, s'est régulièrement réuni depuis le début de la pandémie et a inspiré le volet export du plan de relance. Initiative intéressante, disais-je, car ces échanges ont permis d'élaborer des recommandations, en donnant la parole aux principaux acteurs. Initiative inédite également, car ce groupe, qui s'est constitué au pied levé pour accompagner au mieux et au plus près nos entreprises à l'international, intègre dans sa composition davantage d'acteurs privés ou de cercles de réflexion indépendants du Gouvernement. Le SOLEX a ainsi répondu à un impératif de réactivité et de souplesse, sans pour autant concurrencer le Conseil stratégique de l'export. Vous préconisez la pérennisation de ce groupe de travail. Quelle forme pourrait-il prendre ?

Par ailleurs, vous vous faites l'écho de la crainte exprimée par de nombreux professionnels quant au manque de transparence de la procédure de référencement des acteurs privés et à l'attribution des « chèques export ». En effet, Business France serait juge et partie dans cette procédure qui lui est dévolue. Comment garantir que l'entreprise, lors de la présentation du devis, ne soit pas orientée uniquement vers Business France ? Dans votre proposition n° 19, vous invitez les conseillers de la Team France Export à présenter aussi les prestations des opérateurs spécialistes du commerce international et à intégrer les délégués de leur fédération aux réunions « économie et export » organisées au sein de nos ambassades.

Pour conclure, vous déplorez, à l'instar de votre prédécesseur, l'absence dans la nomenclature budgétaire d'un budget du commerce extérieur clairement identifié. Pour autant, petit à petit, notre politique en la matière devient lisible, efficace et même opérante en période de crise, pour nos entreprises et notre rayonnement.

Pour ces différentes raisons, le groupe La République en Marche votera en faveur des crédits de la mission « Économie – commerce extérieur et diplomatie économique ».

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Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie pour votre excellent rapport.

C'est peu de dire que le commerce extérieur est particulièrement atteint par la crise économique actuelle, qui aura sans doute des effets à long terme et nous impose de faire preuve d'une capacité de rebond et de transformation sans précédent. Il n'y aura pas de retour à la normale ; nous devons anticiper les mutations à venir. Celles-ci étaient cependant en germe depuis plusieurs années, de sorte que les ministères concernés avaient déjà largement fait évoluer les outils de notre politique commerciale.

De fait, avant la crise, notre balance commerciale s'était redressée de manière significative. Le groupe MODEM et démocrates apparentés dénonçait depuis plusieurs années la perte de richesse insensée que son déficit représentait, soulignant déjà les enjeux de souveraineté et d'indépendance liés à cette question.

Il est désormais admis par tous que cette crise doit nous amener à reconsidérer notre manière d'appréhender le monde. À cet égard, je tiens à saluer votre travail, qui identifie parfaitement quelques-uns des enjeux qui sont devant nous.

Vous abordez, par exemple, la question de la régionalisation de nos échanges. C'est en effet un axe majeur de la reprise économique. Nos partenaires les plus proches, ceux avec qui nous avons l'habitude d'une collaboration étroite, doivent être prioritaires dans cette redéfinition des échanges. En d'autres termes, nous devons avoir à cœur de renforcer nos points forts plutôt que d'aller chercher – certes, en remportant parfois quelques succès –d'hypothétiques nouveaux marchés beaucoup plus volatils.

Nous devons également profiter de ce que les cartes sont rebattues pour continuer à orienter notre diplomatie vers une nouvelle approche des accords internationaux, en particulier commerciaux. Notre commission, par l'intermédiaire de sa présidente, Marielle de Sarnez, a été en pointe dans ce domaine, en obtenant, concernant le CETA (Comprehensive economic and trade agreement), une étude d'impact digne de ce nom ainsi qu'un suivi très poussé de l'application du traité. Cela participe de la promotion de nos valeurs et de nos principes. Ces accords doivent désormais être l'occasion de mettre en avant les impératifs écologiques dans nos décisions. Nous saluons, à cet égard, la fermeté de la position de la France sur l'accord avec le Mercosur.

Nous en sommes convaincus, le rebond de notre économie et de notre commerce international passera par notre capacité à affirmer nos principes. L'indépendance européenne et l'écologie seront les pierres d'angle de cette diplomatie économique.

Le plan de relance comporte des moyens supplémentaires pour rendre notre économie plus efficace, qui sont rappelés dans le rapport que vous nous avez présenté. Votre travail de compilation des multiples dispositifs est particulièrement important pour que les acteurs concernés puissent en profiter.

L'effort de rationalisation avait largement débuté et, de ce point de vue, l'action de la Team France Export a été reconnue et soulignée par notre commission. Son utilité perdurera dans la période qui s'ouvre.

C'est ainsi que nous pourrons sortir par le haut de cette situation difficile. Les études prédisent un rebond vigoureux, mais il ne nous permettra probablement pas de retrouver le niveau d'avant la crise. Il importe donc d'être au soutien de nos entreprises et des acteurs qui concourent à leur réussite. C'est pourquoi le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés soutiendra les crédits qui nous sont présentés.

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Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie, au nom du groupe Socialistes, pour votre rapport, qui illustre les défis auxquels fait face le commerce international dans le contexte de contraction spectaculaire de la demande internationale, de rupture des chaînes d'approvisionnement, de difficultés logistiques ou de restriction des déplacements.

Si je salue l'ambition de vos propositions, je centrerai mon propos sur la question des conséquences du Brexit.

Le Royaume-Uni est ou, devrais-je dire, était un partenaire commercial majeur pour de nombreuses entreprises françaises. Un accord commercial avec celui-ci permettrait, dit-on, d'atténuer les conséquences commerciales du Brexit, mais je m'interroge sur le chiffrage de ses conséquences. Je pense notamment à l'éventuelle dépréciation de la livre par rapport à l'euro, qui pourrait poser rapidement des problèmes de compétitivité – et je ne parle pas de ses effets sur le tourisme. Disposez-vous, dans ce domaine, d'éléments chiffrés complémentaires ?

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Madame la rapporteure pour avis, je tiens à saluer à mon tour votre travail tout à fait intéressant et très riche.

S'il est un secteur affecté par la crise sanitaire, c'est bien celui du commerce extérieur. En effet, les économistes du numéro un mondial de l'assurance-crédit, Euler Hermes, anticipent une chute de 100 milliards des exportations françaises en 2020. Si le recul est aussi important, c'est parce que la crise touche directement nos industries françaises de tête, notamment l'aéronautique et les constructeurs et équipementiers automobiles.

Au-delà du contexte, nos difficultés s'expliquent par la structure de notre tissu économique. Là où nos voisins allemands s'appuient sur des entreprises de taille intermédiaire capables de s'illustrer dans un marché globalisé, nos PME et ETI restent tournées vers le marché français et peinent à voir leurs atouts à l'international. Pis, lorsqu'une entreprise se satisfait du marché intérieur, elle n'a pas toujours le réflexe de se tourner vers l'international. C'est quand viennent les difficultés qu'elle s'y intéresse, mais il est parfois trop tard.

Ainsi, ce sont les grands groupes qui portent les chiffres du commerce extérieur de la France, contrairement à ce qui se passe en Allemagne, dont le tissu économique exportateur irrigue l'ensemble du territoire. C'est pourquoi il nous faut repenser le dispositif d'accompagnement des petites et moyennes entreprises à l'export. Le Gouvernement s'est attelé à ce chantier ; les solutions préconisées par son opérateur, Business France, allaient dans le bon sens. Là où une multiplicité d'acteurs se concurrençaient – Business France et les chambres de commerce et d'industrie (CCI), en France et à l'étranger, Bpifrance et le secteur privé –, il a proposé d'opérer une clarification des responsabilités afin d'accroître à la fois le volume des exportations et le nombre des exportateurs. Ainsi, au niveau territorial, un guichet unique réunissant Business France et les CCI est proposé aux régions ; sa mission est d'identifier et de préparer les entreprises à l'export en leur offrant une offre de services différenciée.

Cette volonté d'accompagner les entreprises au plus près du terrain, nous la partageons bien entendu. Nous regrettons cependant qu'une fois de plus, les moyens ne soient pas à la hauteur. Alors que le rôle des CCI est d'accompagner les PME et les ETI dans les régions, le Gouvernement acte une diminution de leurs ressources. Depuis le début du quinquennat, elles ont déjà été réduites de 350 millions d'euros, et la loi Pacte a prévu qu'elles diminuent jusqu'en 2022, dans le cadre de la réforme du réseau des chambres de commerce. Pis, il était prévu, dans la première partie du PLF pour 2021, une nouvelle diminution de leurs ressources, de l'ordre de 100 millions d'euros. Fort heureusement, le Gouvernement est revenu sur cette décision.

De même, nous regrettons que Business France voie une nouvelle fois ses ressources diminuer, avec un budget qui s'élève pour 2021 à 87 millions d'euros, contre 90 millions l'an dernier. Alors que nous avons plus que jamais besoin de relancer nos exportations, il nous faut un opérateur fort pour accompagner nos entreprises et nos VIE, dont la publicité actuellement diffusée sur les ondes résonne comme un appel inédit mais plein de sens.

Enfin, comment parler de diplomatie économique sans évoquer le Brexit et ses conséquences ? La perspective d'une absence d'accord est, hélas, de plus en plus crédible. Si le Royaume-Uni n'est que la cinquième destination des exportations françaises, il est le partenaire avec lequel la France réalise son excédent commercial le plus important. Les exportations nationales de biens vers le Royaume-Uni représentent 31,5 milliards, soit 7 % de nos exportations totales, et le Royaume-Uni est le cinquième fournisseur de notre pays, à hauteur de 19,6 milliards. La France fera ainsi partie des six pays les plus touchés par le Brexit.

Notre faiblesse structurelle à l'export annonce les difficultés que nous rencontrerons dans le cadre du Brexit. Ainsi, les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire sont aussi ceux qui ont le plus à craindre d'un départ sans accord des Britanniques de l'Union européenne : l'automobile, l'aéronautique, les transports et les services liés au tourisme.

En cette période troublée par le covid-19 et le Brexit, nous estimons que les moyens budgétaires ne sont pas en adéquation avec les défis que nos entreprises devront relever à l'export. C'est pourquoi le groupe Libertés et Territoires ne votera pas ces crédits.

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Monsieur Lecoq, le renforcement des moyens du FASEP devrait permettre de financer davantage de projets accompagnant la transition écologique des entreprises. Par ailleurs, dans le secteur du tourisme, un fonds de 50 millions est dédié au soutien à l'émergence des projets durables. Surtout, le plan de relance consacre près de 30 milliards à l'écologie. On ne peut donc pas dire que le Gouvernement n'accorde pas une importance particulière à l'environnement.

Quant à nos diplomates, ils consacrent actuellement, me semble-t-il, un peu moins de 30 % de leur temps à la diplomatie économique. Je suis, pour ma part, favorable à ce qu'ils y consacrent la moitié de leur temps, car il est très important qu'ils soient actifs dans ce domaine et aident davantage encore nos entreprises à exporter.

En ce qui concerne les ventes d'armes, pour le moment, plus aucun armement n'est livré à l'Arabie Saoudite – des discussions sont en cours.

Enfin, j'approuve la charte des logisticiens. Comme vous, je souhaite que toutes les marchandises importées ou exportées transitent par des ports français : cela aiderait grandement nos entreprises.

Madame la présidente, j'imagine que le groupe SOLEX pourrait prendre la forme d'une réunion trimestrielle de l'ensemble des acteurs, privés et publics, du commerce extérieur – je souhaite, du reste, que les acteurs publics y soient davantage associés. Tous ceux qui ont participé aux réunions de ce groupe au début du confinement, qu'il s'agisse de Business France, de Bpifrance, des entreprises, de la DG Trésor ou des diplomates, ont été très positifs : pour la première fois, ils se retrouvaient autour de la table pour travailler ensemble à des solutions ! Puisque le SOLEX doit en principe prendre fin, je souhaiterais que des réunions de ce type continuent de se tenir, et je propose qu'y soient régulièrement invités des think tanks français, tels que l'Institut de prospective économique du monde méditerranéen, l'IPEMED, qui fait un travail exceptionnel.

Comment garantir que la Team France Export oriente bien certaines entreprises vers les OSCI et pas uniquement vers Business France ? Il faudrait, me semble-t-il, que l'indicateur du nombre des entreprises accompagnées, qui est actuellement utilisé pour juger le travail des agents, soit complété par d'autres indicateurs qualitatifs, notamment celui du nombre des entreprises orientées vers le secteur privé. En effet, les entreprises de ce secteur se sont plaintes d'avoir perdu, depuis le début de l'année 2019 et la création du guichet unique pour l'export, 30 % à 40 % de leur chiffre d'affaires.

Monsieur Fanget, le président Macron a souhaité que nous ne signions plus les accords ne respectant pas l'accord de Paris. Mais le commerce international étant une compétence européenne, c'est à l'échelon européen qu'il faut défendre cette position. C'est ce que nous faisons. En tout cas, en l'état actuel des choses, il est exclu de ratifier le traité avec le Mercosur. Le Gouvernement est donc vigilant sur ce point.

Monsieur David, nous ne disposons pas de chiffres plus précis sur le Brexit. Nos entreprises sont inquiètes des formalités douanières qu'elles vont devoir remplir et des perturbations de leur chaîne d'approvisionnement ; les mécontents risquent d'être nombreux. Les fédérations, les entreprises, les syndicats se préparent et la ministre est très active dans ce domaine. Lorsque nous aurons des chiffres plus précis, nous vous les communiquerons, peut-être à l'occasion d'une réunion entièrement consacrée au Brexit.

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Ce sera le cas de notre réunion du 16 décembre.

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Monsieur Clément, il est vrai qu'en France, les grandes entreprises sont celles qui exportent le plus. Je peux citer un chiffre affligeant à ce propos : sur les 129 000 exportateurs, 20 000 seulement font 80 % de leur chiffre d'affaires à l'export. J'insiste donc beaucoup, dans mon rapport, sur la nécessité d'encourager les TPE-PME, surtout celles du secteur du numérique, à se développer à l'international. Il nous faut des entreprises born global qui, dès l'élaboration de leur business plan, envisagent de s'ouvrir à l'exportation ; dans ces cas-là, cela se passe bien. Je le sais d'expérience, il y a peu encore, lorsqu'une entreprise réalisant un petit chiffre d'affaires consultait un conseiller de la CCI pour se développer à l'export, celui-ci l'incitait à se consolider d'abord sur le territoire national. Les choses évoluent mais, jusqu'à récemment, on considérait, de manière idéologique, qu'une entreprise saine devait réaliser 70 % de son chiffre d'affaires en France et 30 % à l'international. Or, actuellement, beaucoup de TPE-PME du numérique réalisent 100 % de leur chiffre d'affaires à l'international. Il est donc très utile que les mentalités changent, en la matière.

Enfin, vous déplorez une baisse des crédits, mais il faut, me semble-t-il, saluer le plan de relance, qui permet d'allouer des crédits additionnels. Business France bénéficiera ainsi de 60,3 millions. S'agissant des crédits export, mon appréciation est donc plutôt positive.

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Je salue à mon tour la qualité de votre travail, madame la rapporteure pour avis.

À l'instar de nombreux pays, la France subit de plein fouet les conséquences économiques de la pandémie de covid-19. Au premier semestre de 2020, notre déficit commercial des biens s'est dégradé, atteignant 34 milliards, contre 29 milliards au cours de la même période l'an passé. Si cette dégradation n'est pas étonnante, elle est néanmoins très préoccupante pour nos entreprises, notamment celles dont l'activité repose en grande partie sur leur présence sur les marchés internationaux. Afin de relancer les exportations, le ministère des affaires étrangères et celui de l'économie ont élaboré un plan de relance ambitieux, qui comporte une dizaine de mesures constituant cinq axes.

Je souhaiterais vous interroger sur les mesures nos 6 et 7 de ce plan, qui concernent la mise en valeur des produits et du savoir-faire de nos entreprises auprès des clients étrangers. Les salons et les divers autres moyens de faire connaître leurs services jouent un rôle important, notamment pour les entreprises dont la taille ne leur permet pas de bénéficier d'un dispositif de communication et de marketing de grande ampleur.

Alors que nous nous acheminons, hélas, vers un durcissement des mesures de sécurité sanitaire, je souhaiterais connaître votre avis sur les moyens financiers et matériels qui ont été déployés ou qui le seront dans le cadre de la numérisation des prestations qui permettent à nos entreprises de se faire connaître à l'international.

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Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie pour la qualité de votre rapport.

Face aux difficultés liées à la crise sanitaire, qui ont pour conséquence une aggravation de notre déficit commercial, vous avez insisté sur l'importance des outils numériques innovants. Comment sont-ils utilisés par les organismes de soutien à l'export ? Quelles actions permettent-ils de mener pour promouvoir nos services et produits et maintenir notre présence à l'étranger ?

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Madame la rapporteure pour avis, mon intervention concerne Business France.

L'an prochain, la subvention qui lui est versée va légèrement diminuer. On lui demande de développer encore ses ressources propres, tout en réduisant sa présence à l'étranger. Mais comment envisage-t-elle de connaître les marchés en y étant moins présente ?

Le fait qu'elle doive développer ses ressources propres me paraît également problématique. Dès lors que cette structure accompagne nos entreprises en leur vendant des services, je m'interroge sur la qualité de la sélection des entreprises en amont. En Irlande, par exemple, la structure de soutien aux entreprises exportatrices est publique, ses services sont entièrement gratuits, mais la sélection est très rigoureuse et la manière dont les entreprises rémunèrent cette structure réside, en définitive, dans un quasi-engagement à créer des emplois en Irlande. Quelle pertinence y a-t-il à financer à hauteur de 87 millions une structure qui a besoin de faire payer ses prestations aux entreprises qu'elle accompagne ? J'en ai vu certaines se rendre en Asie dans le cadre d'un voyage de reconnaissance : elles n'avaient été ni préparées, ni sélectionnées correctement.

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En ce qui concerne les outils du numérique, la plateforme numérique des solutions repose sur un socle conçu au niveau national. Depuis 2019, il est possible d'accéder à quatorze plateformes régionales, qui présentent un parcours pédagogique, un tutoriel sur les fondamentaux de l'export, des parcours solutions, des parcours événements – l'agenda permet à l'entreprise de prendre connaissance du programme France export et des programmes régionaux –, un parcours premiers conseils pour une cinquantaine de secteurs stratégiques – la plateforme offre des recommandations pour choisir ses marchés cibles à l'export, assorties de fiches décrivant les marchés et les conditions d'accès –, des « info live marchés » qui fournissent aux entreprises des informations quotidiennes…

Quant aux mesures nos 6 et 7, elles sont détaillées dans le rapport, pages 40 à 45. En complément des salons physiques, la gamme de services inclut de nombreuses e-vitrines et des salons virtuels. L'objectif est d'atteindre 6 000 participations via le maintien des pavillons France inscrits au programme France Export. On soutient également douze salons internationalisés en France. Les e-vitrines sont testées dans trois secteurs : les vins et spiritueux, la cosmétique et l'agroalimentaire.

Concernant Business France, j'ai eu de bons et de mauvais retours. L'opérateur faisait l'objet de nombreuses critiques jusqu'en 217-2018 ; depuis 2019, on me rapporte une amélioration et un changement de mentalité. Je me demande si, comme en Allemagne et en Irlande, l'accompagnement ne devrait pas être gratuit pour les entreprises. Peut-être la Team France Export doit-elle se cantonner au régalien, c'est-à-dire à la valorisation de la marque France, à l'organisation de salons, en y accompagnant gratuitement les entreprises, et à l'amélioration de l'information – je pense notamment aux nombreuses études de marché, qui sont intéressantes. Pour un accompagnement payant et plus poussé, les entreprises pourraient être orientées vers les OSCI, en bénéficiant notamment des « chèques export ». C'est une réflexion très personnelle, mais elle peut être pertinente. Cela dit, nous pouvons saluer le travail accompli.

Enfin, les entreprises qui se tournent vers l'international pourront être présentes sur des plateformes de e-commerce, par exemple, ce qui permettra de réduire de manière substantielle leurs coûts de marketing. Il faut donc que chacune d'entre elles y ait accès facilement ; encore faut-il qu'elles sachent que ces outils existent. C'est pourquoi je propose que les banquiers, les experts-comptables, les commissaires aux comptes – qui pourraient par ailleurs être conviés aux réunions de SOLEX – échangent régulièrement avec les entrepreneurs pour leur proposer les outils disponibles.

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Merci pour le pragmatisme de vos propositions qui, je l'espère, seront suivies d'effets.

Article 33, état B : Économie – commerce extérieur et diplomatie économique

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N'étant saisie d'aucun amendement, je vous propose de passer au vote sur les crédits de la mission « Économie – commerce extérieur et diplomatie économique », sur lesquels notre rapporteure a émis un avis favorable.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie – commerce extérieur et diplomatie économique » tels qu'ils figurent à l'état B annexé à l'article 33 du projet de loi de finances pour 2021.

La séance est levée à 13 heures 20.